Évoquer l’amour à propos de ces trois films ne signifie pas que chacun d’eux tourne autour de cette question. Celle-ci intervient au contraire à chaque fois selon une tonalité particulière, tantôt comme un léger ingrédient, tantôt comme une note dominante, une couleur plus ou moins tendre, plus ou moins passionnelle. On peut tout aussi bien affirmer que chacun déploie, en toute autonomie, son style, ses questionnements, sa sensibilité pour porter un regard nuancé sur un sujet de société, nous perdre et nous faire rire d’un dérèglement sentimental, flirter d’une manière toute personnelle avec le surnaturel. Que ces films s’accordent tout en étant dissemblables n’est-il pas aussi une façon de parler d’amour ? (Jacques Kermabon)
Programmation
OÙ JE METS MA PUDEUR de Sébastien Bailly, 2013, couleur, 20 mn, DCP. Réalisation et scénario : Sébastien Bailly. Image : Sylvain Verdet. Son : Marie-Clotilde Chéry, Alexandre Hecker et Christophe Leroy. Montage : Cécile Frey. Musique : Laurent Levesque. Interprétation : Hafsia Herzi, Marie Rivière, Bastien Bouillon, Donia Mohamed et Abdallah Moundy. Production : La mer à boire Productions Syn. : Hafsia, étudiante en histoire de l’art, va devoir enlever son hijab pour passer un oral. Elle se rend au Musée du Louvre pour observer l’œuvre qu’elle va devoir commenter
KINGSTON AVENUE d’Armel Hostiou. 2012, couleur, 43 mn
Réalisation : Armel Hostiou. Scénario : Armel Hostiou et Vincent Macaigne. Image : Mauro Herce. Son : Romain Lebras. Montage : Nicolas Sburlati. Musique : Other Lives “For12”. Interprétation : Vincent Macaigne, Kate Moran, Sofie Rimestad et Murray Bartlet. Production : Independencia Productions.
Syn. : Vincent a suivi la femme qu’il aime à New York. Mais rien ne va plus avec elle. Entêté, il va tout faire pour essayer de la récupérer.
LE TABLEAU de Laurent Achard. 2013, couleur, 30 mn, DCP. Prix du GNCR au festival Côté court de Pantin 2013.
Réalisation et scénario : Laurent Achard. Image : Georges Diane et Rémy Mestre. Son : Emmanuelle Villard et Agnès Szabo. Montage : Nelly Aullivault et Catherine Quésemand. Interprétation : Fred Personne, Thérèse Roussel, Pascal Cervo et Mireille Roussel. Production : Les Films du Worso
Syn. : Au crépuscule de leur vie, Odile et Marcel s’aiment toujours. Atteinte d’une maladie incurable, Odile doit être hospitalisée. Sentant la fin proche, le couple a décidé de se donner la mort pour ne pas être séparé. Le temps d’un dernier dimanche.
Infos
Séance le mardi 8 octobre à 20h30
MK2 Quai de Seine – 14 Quai de la Seine – 75019 Paris
M° Jaurès ou Stalingrad
Tarif : 7,90 € (cartes illimitées acceptées)
Le Cartoon d’Or est un prix pan-Européen pour les courts-métrages d’animation. Il récompense chaque année le « meilleur des meilleurs » courts-métrages puisque seuls peuvent concourir les films ayant déjà été récompensé dans les plus grands festivals européens. Il a été créé par l’association CARTOON dans le but de promouvoir les talents de l’animation européenne et de créer un lien entre les artistes et l’industrie du dessin animé. De grands noms ont été récompensés par ce prix, tels que Nick Park, Sylvain Chomet, Mark Baker, Michael Dudok de Wit ou encore Jacques-Rémy Girerd.
Cette année, six films étaient en lice pour le Cartoon d’Or 2013. Le 19 septembre dernier, à Toulouse, lors du Cartoon Forum, la plate-forme de coproduction pour les séries d’animation, le Cartoon d’Or a été attribué à un film d’écoles, « Head Over Heels » de Timothy Reckart et Fodhla Cronin O’Reilly (Royaume-Uni, 10′, Prod : NFTS).
Synopsis : Après de longues années de mariage, Walter et Madge ont pris de la distance : il vit sur le sol et elle, au plafond. Lorsque Walter décide de donner une cure de jouvence à leur vieille romance, leur équilibre précaire s’en trouve bouleversé, et ce couple incapable de s’accorder sur la définition du haut et du bas doit trouver le moyen de sauver son mariage.
Le jury du Cartoon d’Or 2013, composé du producteur Didier Brunner (Les Armateurs - France) et des réalisateurs Anca Damian (Roumanie) et Enrique Gato (Espagne), a sélectionné les finalistes parmi près de 30 courts-métrages primés dans les festivals d’animation européens, partenaires de CARTOON. Les lauréats du Cartoon d’Or 2013 ont remporté une aide financière de 10 000 EUR grâce au soutien du Programme MEDIA de l’Union européenne.
Après le succès de la reprise des séances Format Court le jeudi 12 septembre dernier, Format Court vous convie à sa nouvelle projection de courts, le jeudi 10 octobre prochain, à 20h30, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Pour ce deuxième rendez-vous de l’année, nous vous proposons une balade cinématographique inédite en présence des équipes, comme à l’accoutumée : Hu Wei, Julien Féret et Jean Legrand (réalisateur, producteur et chef opérateur de « La Lampe au beurre de Yak ») et Steve Achiepo, Vincent Maury, Bastien Bourhis et Sékou Baradji-Diarra (réalisateur, co-scénariste et comédiens de « En équipe »).
Programmation
En équipe de Steve Achiepo. Fiction, 21’10’’, 2012, France, Shaker Production, ChevalDeuxTrois. Prix UniFrance du court-métrage 2013, 1er prix Talents en court au Festival Cinébanlieue 2012. En présence de l’équipe
Synopsis : Cergy, banlieue parisienne. Bastien, seize ans, vient de remporter un match décisif avec son équipe. Alors qu’il célèbre la victoire, Sékou, son meilleur ami, lui fait part d’une nouvelle fracassante devant l’ensemble de ses coéquipiers : Lauriane, la jolie fille à l’écharpe rouge, souhaite faire sa connaissance.
Der Da Vinci Timecode de Gil Alkabetz. Animation, 3′, 2009, Allemagne, Sweet Home Studio. Prix de la Meilleure Musique au Festival de Stuttgart 2009, sélectionné au Festival d’Annecy 2009.
Synopsis : Une image est isolée afin de créer une animation basée sur ses détails. Divers fragments de cette image, avec pour points communs des formes similaires, nous permettent de découvrir des mouvements secrets.
Utan Snö (Sans la neige) de Magnus Von Horn. Fiction, 35′, 2011, Suède, Pologne, PWSFTviT, VOST Ang. Grand Prix au Festival du court métrage de Leuven 2013. Sélectionné aux Rencontres Henri Langlois 2012 et au Festival Silhouette 2012.
Synopsis : Linus a 16 ans et vient de tomber amoureux de la copine de son meilleur ami. Il ne pouvait pas imaginer que cela aurait de telles conséquences.
Natasha de Roman Klochkov. Animation, 14′, 2012, Belgique, Cinnamon Entertainment. Meilleur Film d’Animation au Festival Aubagne 2013, Prix de la SACD au Festival Anima 2012.
Synopsis : L’ours russe Nicolaï émigre en Europe pour prouver à l’Amour de sa vie (sa merveilleuse ex-femme Natasha) qu’il n’est pas un looser. Un film sur un ours et l’Amour de sa vie…
La lampe au beurre de Yak de Hu Wei. Fiction, 15’, 2013, Chine, France, Ama Productions. Sélectionné à la Semaine de la Critique 2013, Prix « European Film Academy » au Festival du court-métrage de Drama 2013. En présence de l’équipe
Synopsis : Un jeune photographe ambulant et son assistant proposent à des nomades tibétains de les prendre en photo devant différents fonds.
► Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris
► Accès : RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée), BUS 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon). Métro le plus proche: Ligne 7 – Censier Daubenton (mais apprêtez-vous à marcher un peu…).
Alors que notre prochaine prochaine séance de courts arrive à grands pas (jeudi 10 octobre), nous vous proposons de découvrir une sélection de photos de Julien Ti-i-Taming prises lors de la projection Format Court de septembre à laquelle vous avez été très nombreux à assister (107 personnes en salle !). Pour rappel, la programmation était sous le signe du Festival du court métrage en plein air de Grenoble, via une reprise parisienne de son dernier palmarès. Trois équipes de films primés étaient présentes à cette séance, de même que le directeur de la Cinémathèque et du Festival de Grenoble.
Avec Guillaume Poulet, directeur de la Cinémathèque et du Festival de Grenoble
Avec Xavier Legrand et Alexandre Gavras (réalisateur et producteur de « Avant que de tout perdre »)
Avec Gilbert Hus, Augusto Zanovello et Arnaud Béchet (producteur, réalisateur, directeur artistique de « Lettres de femmes »)
Avec Marc Stef, Clément Gonzalez, Baptiste Gondouin et Martin Malzieu (équipe de « As it used to be »)
À l’occasion du focus consacré à l’édition 2013 de l’Etrange Festival, nous avons rencontré Adan Jodorowsky (plus connu sous son pseudonyme musical, Adanowsky), suite à la première mondiale de son film baroque « The Voice Thief », lauréat du Grand Prix Canal + et du Prix du Public au festival. À travers une discussion centrée autour de ce film, Adan nous parle, avec passion, de son envie de se consacrer dorénavant entièrement à l’art cinématographique.
En présentant le film lors de la séance de l’Etrange, tu as dit que « The Voice Thief » est une idée que tu avais depuis 14 ans. Peux-tu nous en parler plus en détail ?
En fait, j’ai commencé avec une petite caméra vidéo Hi-8 qu’on m’a offerte pour mes 12 ans. Je me suis mis à faire des petits courts métrages avec un ami. Plus tard, un jeune producteur qui était assistant chef-op’ m’a dit : « J’ai de l’argent de côté. Tu ne veux pas faire un court ? ». J’ai dit d’accord et on a fait Echek.
J’avais 19 ans, j’étais vraiment très jeune. J’étais impatient, un vrai chien enragé ! Je ne savais pas du tout comment on faisait un film. Après cette expérience, j’ai compris que je voulais être réalisateur. J’ai commencé à chercher une histoire, et le titre d’un des contes écrits par mon père (ndr. Alejandro Jodorowsky), El Ladrón de Voces, m’a vraiment inspiré. J’ai commencé à écrire un scénario à partir de là.
J’ai rencontré des producteurs, mais j’avais beaucoup de difficultés à trouver un financement. Personne ne voulait de mon projet. Plutôt que de m’entêter à vouloir faire un film dont personne ne voulait, j’ai préféré changer de fusil d’épaule et je me suis mis à faire de la musique. Je me disais qu’en faisant ses preuves, tôt ou tard, on viendrait à moi et que je pourrais faire ce film qui me tenait tellement à cœur. Et c’est un peu ce qui s’est passé : une agence de pub a vu les clips que j’avais réalisé pour mes chansons et m’a contacté pour d’autres projets.
Tu as toujours essayé de faire des petites fictions dans tes clips. Cela t’a-t-il aidé ?
Oui, mais malheureusement je n’ai jamais vraiment eu la liberté de réaliser quelque chose de réellement abouti. Il y a aujourd’hui très peu d’argent pour les clips et souvent on reste à la surface sans pouvoir approfondir, ce qui est assez frustrant.
Pour « The Voice Thief », j’ai mis de ma poche l’argent que j’avais gagné sur ma tournée, des droits d’auteur (environ 20.000€). On a aussi fait un appel à dons (crowdfunding) sur Kickstarter avec lequel on a récolté $16.000. En cherchant un peu d’argent en complément ici et là, on a pu réunir la somme de 80.000€, ce qui est pas mal pour un court. Malgré cela, le film s’est fait très vite, en à peine 12 jours de tournage et 15 jours de préparation, durant lesquels on a dû trouver tous les costumes et les accessoires. C’était un boulot colossal.
Évidemment, il y a des choses que j’aurais aimé améliorer, ce n’est pas exactement le film que j’avais imaginé, mais on a tous fait du mieux que l’on a pu avec l’argent qu’on avait à disposition.
À 19 ans, tu t’es dit qu’il fallait attendre le bon moment pour réaliser ce film. C’est-à-dire ?
Je me disais : « Si ce n’est pas maintenant, ça veut dire que ce n’est pas le moment ». Je ne voulais pas forcer le destin, je voulais laisser les choses se faire naturellement. Les gens ne te font pas confiance quand tu n’as rien fait, et être le fils d’un artiste, cela n’est pas suffisant. On pourrait se dire : « C’est le fils de Jodo, il a fait son court, c’est facile pour lui ». Non, on n’imagine pas toutes les années que j’ai attendues pour réaliser ce film. Pendant tout ce temps, je n’ai pas fait que patienter, je faisais de la musique, mais aussi des mises en scènes de mes spectacles, sous forme de happenings. Grâce à toutes ces recherches artistiques, j’étais en quelque sorte préparé pour la réalisation de ce court.
Pendant toutes ces années, j’ai eu le temps de mûrir le film dans ma tête. C’est comme l’histoire de cet homme qui tire une flèche pendant des années vers la lune. Il tire cette flèche pour chasser la lune, sans jamais y parvenir. Mais en agissant ainsi, même si le but n’a pas été atteint, il est devenu le meilleur archer du monde.
Je pense sérieusement qu’un réalisateur n’est prêt qu’à partir de 30 ans, il faut qu’il vive et voit des choses. Il faut qu’il acquière une expérience sinon il ne peut pas vraiment parler d’amour, de rapports humains. Évidemment, il y a des surdoués, mais je pense qu’il faut être mûr pour faire un film.
Le fait d’être musicien influe-t-il sur ta manière de réaliser ?
Cela m’apporte un sens du montage, notamment au niveau du rythme. La musique est très importante dans mes films. J’ai demandé à Rob (du groupe Phoenix – BOs des films « Grand Central » de Rebecca Zlotowski, « Maniac » de Franck Khalfoun) de faire la musique de « The Voice Thief », et j’ai calé le montage sur cette musique. J’ai choisi des morceaux instrumentaux qu’il avait déjà composés et que nous avons ensuite retravaillés ensemble.
Peut-être que dans mon prochain film, je ferai la musique moi-même. J’aurais pu le faire pour celui-ci, mais je voulais être plus disponible pour la réalisation, donc j’ai laissé de côté ma folie des grandeurs, et j’ai choisi quelqu’un qui travaille plus confortablement avec des synthétiseurs.
L’histoire de « The Voice Thief » est centrée sur une chanteuse qui perd sa voix. En voyant cela, on ne peut s’empêcher de penser au fait que tu es musicien, et que tout cela a un rapport. Quel a été ton cheminement par rapport à cette histoire ?
Le rapport à la musique est évident, mais je cherche avant tout à aller dans l’exubérance, dans le baroque, à filmer des personnages hors normes. Les films réalistes ne m’intéressent pas, ce sont plutôt des œuvres dans l’esprit de celles de Tod Browning, Fellini, Buñuel ou Dali que je veux faire.
Je voulais surtout faire un film sans concession. Quand on vous donne la possibilité de faire un court ou un moyen-métrage, il y a une question de liberté qui rentre en jeu. J’ai fait ce que je voulais, je n’ai pas eu de contraintes. Au début, on voulait me couper dix minutes du film, j’ai répondu : « Non ! On n’est pas à Hollywood ! ». Je me suis battu pour que le film fasse sa durée actuelle (24 minutes). J’ai fait ce film dans ces conditions pour être totalement libre.
Le film est habité par une mystique, il y a beaucoup de symbolisme. Y-a-t-il des clés de lecture ou c’est quelque chose qui est plutôt laissé au hasard ?
J’ai plein de clés de lecture et tous les symboles ont un sens pour moi dans le film. Après chacun est libre de les interpréter. Quand je tournais, j’étais en état de transe, je ne savais pas toujours ce que je faisais.
Par exemple, quand le sang blanc s’échappe des corps, c’est pour témoigner de leur pureté. Dans la scène où les mains du mari brûlent, c’est qu’il se sent consumé par la culpabilité. Enfin, lorsque Asia se transforme en diable, son mari découvre, grâce à cette vision de cauchemar, le monstre qu’elle possède en elle…
Comment s’est passée justement la rencontre avec Asia Argento et le travail qui en a découlé ?
À chaque fois que je sors un disque, je crée un personnage différent que je tue ensuite sur scène. Quelqu’un avait filmé l’une de ces mises à mort pendant un de mes concerts, et j’avais envoyé la vidéo à Asia. Elle avait adoré. Je lui ai demandé ensuite si elle voulait qu’on fasse un projet ensemble, et elle était d’accord.
J’ai tout de suite pensé à elle dans le rôle de la chanteuse. On s’est vus à Paris, on a pris une bonne cuite ensemble, on est allés danser et il y a eu une connexion immédiate. Et puis, on adore tous les deux les films d’horreur, je jouais à l’époque dans « Santa Sangre » qui avait été réalisé par mon père et produit par son oncle, Claudio Argento. Bref, tout cela s’est fait très naturellement.
Comment envisages-tu la suite ?
Ce que je souhaite, c’est de continuer à réaliser des films. J’en arrive même à penser à délaisser la musique pour m’y consacrer à plein temps. Je sais que je ne le ferai jamais complètement, je composerai sûrement des musiques de films, mais ce que j’aime par dessus tout maintenant, c’est le cinéma, et donc j’ai envie d’y mettre toute mon énergie.
J’ai d’ailleurs des projets de longs métrages. J’ai deux scénarios sous le coude, et je suis en train de chercher des producteurs pour m’accompagner sur ces projets. « The Voice Thief » était en quelque sorte une carte de visite, je voulais montrer que je pouvais réaliser, maintenant c’est à moi de concrétiser cette idée !
L’Etrange Festival qui s’est terminé il y a 10 jours a proposé cinq programmes de courts métrages. Pour les deux premiers, pas moins de 18 films ont été diffusés, tous très distincts dans leur réalisation et leur écriture. Ils témoignent cependant d’une certaine cohérence de programmation, à savoir donner à des films différents et originaux la chance de trouver leur place auprès du public.
Le programme n°1 fait la part belle à l’expérimental venu d’Allemagne, avec notamment « Hex Suffice Cache Ten » de Thorsten Fleisch, spécialiste du genre et adepte de figures visuelles et sonores agressives et radicales (il est notamment l’auteur du court métrage « Energie ! », source d’inspiration de Gaspar Noé pour « Enter The Void »). Avec ce nouveau film, Thorsten nous invite à un voyage cérébral mêlant corps humain et machine dans un univers cyberpunk et industriel, quelque part entre Shinya Tsukamoto et Marc Caro.
Autre film venu d’Allemagne, « Hollywood Movie » de Volker Schreiner est, quant à lui, un mashup d’extraits de films hollywoodiens dont il se sert, en ne gardant que quelques mots et gestes, pour pervertir le sens original des films en question et transmettre ses propres réflexions ironiques sur le cinéma américain. Un poil trop répétitif à la longue, le film est plutôt habile et efficace.
Flirtant aussi avec l’expérimental, « Set in Motion » de Michael Palm prend la forme d’un dispositif chorégraphique avec plusieurs danseurs contemporains qui interprètent un ballet au milieu de meubles, dans un hangar de stockage. Très ludique, le film se laisse aller à trop de systématisme, vite rébarbatif, mais il est suffisamment original dans son propos, c’est-à-dire la création d’un rapport particulier entre l’être humain et le meuble, pour susciter un intérêt particulier.
« Placeholder » de Doug Bayne, lui, se sert des techniques du Motion Design pour mettre en scène des images cauchemardesques, comme l’apparition d’un chat dément au fond d’une gorge humaine, le tout dans un objet filmique déjanté d’à peine 30 secondes. Œuvre complètement folle et revigorante, Placeholder parvient à remplir son office de transition, sous forme de décharge d’adrénaline.
De son côté, « Flytopia » de Karni Arieli, d’après une histoire de Will Self, est un trip hallucinatoire qui s’inscrit dans une veine fantastique classique. Un homme, peu habitué à la nature environnante de la campagne, notamment à la proximité et au bruit des insectes, sombre peu à peu dans une folie obsessionnelle, après avoir été laissé seul pendant quelques jours par sa compagne. Les insectes commencent à lui parler en formant des mots avec leurs corps, puis remplacent petit à petit sa compagne à tous les niveaux. Il est alors amené à passer un pacte avec eux. Dérangeant et intriguant, le film manque d’un poil de crédibilité, mais bénéficie d’une belle musique composée par Adrian Utley (guitariste de Portishead).
« The Great Rabbit » d’Atsushi Wada est un film d’animation, produit par Sacrebleu, qui sous des dehors d’objet filmique non identifié, prend l’allure d’un conte japonais. Très abscons et austère, ce film laisse plutôt froid quand l’on ne possède pas de clés pour le comprendre, malgré tout le succès et les récompenses qu’il a pu acquérir en festivals.
« The Giant » de David Raboy est un film sur le passage à l’âge adulte, avec tout ce que cela comporte comme sentiments de mort et d’abandon. Sombrant à plusieurs moments dans le cliché et le pathos, le réalisateur fait malgré tout preuve de bon goût au niveau de la bande sonore avec une succession de titres de Mazzy Star, Deerhunter ou TV On The Radio.
Enfin, « Alice in the Sky » de Jonas Meier et Mike Raths est un clip surréaliste réalisé pour le groupe suisse Rusconi (avec une participation de Fred Frith), dans lequel plusieurs animaux et êtres humains se donnent en spectacle dans une suite de tableaux absurdes et poétiques. Un univers très envoûtant et une belle prouesse technique.
Dans le programme n°2 de l’Etrange Festival, le cinéma d’animation se retrouve à l’honneur avec pas moins de trois films animés dans la sélection.
Déjà chroniqué sur le site, « Comme des Lapins » d’Osman Cerfon, produit par Je Suis Bien Content, suite du court métrage « Les Chroniques de la Poisse », voit l’homme à la tête de poisson (le même personnage que dans le premier film) participer à une fête foraine et redoubler de malchance dans tout ce qu’il entreprend. A mesure qu’il trébuche sur des obstacles, des bulles de malheur s’échappent de sa bouche et vont se loger au hasard sur plusieurs individus qui deviennent eux aussi malchanceux. Avec une idée de départ brillante et un humour caustique tout du long, « Comme des Lapins » était un sérieux choix pour le palmarès de cette année. Ce qui n’est pas le cas de « Lady and the Tooth » de Shaun Clark qui, malgré une histoire singulière qui utilise les dents comme bien le plus précieux dans la société, possède une animation particulièrement repoussante et assez éprouvante. Le style est bien entendu en accord avec l’ambiance générale assez malsaine, mais ne permet pas d’accrocher facilement.
« I’m Alone and My Head is on Fire » est, quant à lui, le nouveau délire hystérique de David O’Reilly, réalisateur très estimé, pratiquant un dessin numérique faussement naïf et hautement satirique. Cette animation d’à peine une minute, commandée pour une application iPad, raconte l’histoire d’un personnage avec la tête en feu qui traîne ce problème partout où il va, jusqu’à ce qu’il rencontre l’âme soeur, à l’apparence similaire. Au final, le fruit de leur passion deviendra un véritable jet de feu dévastateur. Même quand il doit composer avec les règles de la commande, l’univers de David O’Reilly reste toujours aussi drôle et irrévérencieux.
Le genre expérimental trouve également une place de choix dans ce programme n°2, avec notamment « Kreis Wr. Neustadt » de Johann Lurf, où dans un élan ludique et saugrenu, le réalisateur nous emmène à la rencontre de plusieurs dizaines de rond-points, vus depuis sa Vespa. « Last Day of Epsilon Eridani B » de Damon Mohl est, quant à lui, un film de SF plutôt alambiqué, qui voit un astronaute et son chien vivre leurs derniers instants sur une planète reculée et inhospitalière. « Trödelseide » de Simon Griesmayr relate l’histoire d’un propriétaire d’un magasin de curiosités, qui après s’être vu lui-même comme une curiosité, trouve un stratagème pour s’emballer de plastique et se mettre dans un coin, comme oeuvre à part entière. Le film est mal rythmé, cependant quelques images restent longtemps à l’esprit. Enfin, « Ahogo-IceCream » de Alisa Goddess, qui raconte la passion torride entre une crème glacée parlante et une fille, est un film musical expérimentant et jouant sur les textures, le rendu des couleurs et une symbolique sexuelle pas toujours de très bon goût.
Pour finir, deux fictions et un documentaire complètent cette sélection. « Elefante » de Pablo Larcuen est une comédie dramatique espagnole dans laquelle Manuel, looser magnifique, est victime d’une maladie pour le moins particulière : il se transforme petit à petit en éléphant. Alors que tout le monde le délaisse, son fils gardera intact son amour pour lui, au fil des années. Une comédie douce-amère, aux maquillages assez réussis, mais dont le propos aurait mérité d’être un peu plus creusé.
« The Voorman Problem » de Mark Gill est une fiction dramatique classieuse construite comme un épisode de la Quatrième Dimension. Le Dr Williams, interprété par Martin Freeman (« Le Hobbit », « Sherlock », « The Office »), doit examiner un prisonnier, M. Voorman, qui se prend pour Dieu. Alors que le septicisme est de mise pour le docteur, Voorman lui donne plusieurs preuves de sa bonne foi, notamment en rayant la Belgique de toute carte (private joke ou problème spécifique du réalisateur ?), et en échangeant sa place avec lui. Efficace et bien filmé, le récit aurait mérité d’être plus poussé, le film n’exploitant que très peu les possibilités de l’idée de départ.
Enfin, « A Story For The Modlins » de Sergio Oskam, évoqué au moment de Clermont-Ferrand (cf. critique), est un film documentaire fascinant qui, d’après une boîte d’archives retrouvées, retrace la vie d’Elmer Modlin et de sa famille, de leur repli sur eux-mêmes pendant des décennies et de l’obsession qu’ils ont nourrie autour de leur progéniture. L’idée brillante du film est de mettre cette histoire en parallèle avec l’information capitale comme quoi Elmer Modlin fut figurant sur « Rosemary’s Baby ». Quand on connait le mystère sulfureux entourant le film de Roman Polanski, notre imagination a vite fait d’associer tout cela au destin des Modlin et de favoriser une ambiance « d’inquiétante étrangeté ».
Ce vendredi 27 septembre, s’ouvre la 28ème édition du Festival International du Film Francophone de Namur (FIFF). Depuis quelques années, nous suivons cette manifestation, présidée par Olivier Gourmet, qui met en avant la diversité de la Francophonie. Cette année, nous accompagnerons le festival autrement en y remettant pour la première fois un Prix Format Court parmi les douze films de la compétition internationale. Le Jury Format Court (composé de Katia Bayer, Marie Bergeret, Juliette Borel, Adi Chesson et Géraldine Pioud) consacrera un focus spécial au film primé. Celui-ci sera également projeté lors d’une séance Format Court au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Le Prix Format Court sera dévoilé lors de la clôture du festival, le 4 octobre prochain.
Films en compétition internationale
– Mouettes de Zeno Graton (Belgique)
– La Tête en bas de Maxime Giroux (Québec)
– La Cible de Mounir Abbar (Maroc)
– Pride (Fierté) de Pavel G. Vesnakov (Bulgarie/Allemagne)
– Pour faire la guerre de Cosme Castro et Léa Forest (France)
– Claudiu et les poissons (Claudiu si caprii) de Andrei Tanase (Roumanie/Allemagne)
– Là où je suis de Myriam Magassouba (Québec)
– Welkom de Pablo Munoz Gomez (Belgique)
– Les Jours d’avant de Karim Moussaoui (Algérie, France)
– Cargo Cult de Bastien Dubois (France)
– Promenade (Plimbare) de Mihaela Popescu (Roumanie)
Envie de voir des courts décalés à proximité des Champs-Élysées ? Ce vendredi 20 septembre, Affreux, Sales & Méchants, une maison de production parisienne vous propose de découvrir au Cinéma Publicis Drugstore une sélection de six nouveaux courts métrages produits cette année. Deux projections sont prévues, l’une à 14h, l’autre à 18h. L’accès est libre, il suffit juste de réserver !
PROJECTION BELLE, PROPRE ET GENTILLE
Ce vendredi 20 septembre 2013, à 14h & 18h
Cinéma Publicis Drugstore, Paris
2 projections, 6 courts-métrages
LES FILMS
ᐅ I’m a Sharpener de Mahdi Lepart avec Jean-Baptiste Maunier, co-prod Full Dawa
ᐅ Sail me to the moon de Julien Gritte et Charles Jaeger
ᐅ Last Call de Camille Delamarre, co-prod Full Dawa
ᐅ La Ville est calme d’ Alexandre Labarussiat
ᐅ Death will be all Right de Wearetresgentil
ᐅ Mecs Meufs de Liam Engle
INFOS PRATIQUES
Vendredi 20 septembre 2013
Cinéma Publicis Drugstore
129 avenue des Champs Elysées
75008 Paris
14h & 18h
M° Champs Elysées / George V
La projection est suivie d’une soirée à Commune Image, 8 rue Godillot, Saint Ouen à partir de 21h.
Merci de confirmer votre présence par mail à : reservationsbpg@asm-prod.com
Invité de la 19ème édition de l’Etrange Festival à l’occasion de la sortie de son nouveau film, « 9 Mois Ferme », Albert Dupontel s’est fendu d’une carte blanche pendant le festival, à laquelle se rattachait une séance de courts métrages programmée par le réalisateur. Petit retour sur cette projection qui s’est avérée passionnante et qui a permis de comprendre quelques unes des influences du cinéma d’Albert Dupontel.
En guise d’ouverture, Albert Dupontel a présenté un film qui lui tient à cœur, à savoir « Star Suburb, la banlieue des étoiles » de Stéphane Drouot. Oeuvre culte pour toute une génération de cinéastes (Gaspar Noé et Lucille Hadzillovic en tête), ce court métrage de SF artisanal, réalisé avec très peu de moyens (dans la propre cuisine du réalisateur, dit-on), fait le grand écart entre chronique sociale désabusée, nouvelle de SF anticipative à la Philip K. Dick et imagerie américaine inspirée des films de George Lucas ou de Steven Spielberg.
Dans un futur proche, « quelque part dans une galaxie lointaine », la population pauvre est amassée dans des immeubles de banlieue suspendus dans l’espace et regroupés par nationalités. Réveillée par d’étranges bruits, Mireille, une jeune fille habitant le building français avec sa famille, se lève en pleine nuit et découvre, à la fenêtre de sa cuisine, un vaisseau appartenant à une station de radio, qui est à la recherche de gens éveillés pour leur faire gagner de l’argent. Mireille y voit une opportunité pour assouvir ses désirs de princesse comme dans les magazines, et va tout faire pour téléphoner à temps au standard de la radio pour récolter l’argent en question.
Critique féroce de la société consumériste moderne, écrasant les masses laborieuses et les rendant avides d’une « vie de magazine », « Star Suburb » étonne par la qualité de son récit qui s’inscrit parfaitement dans l’un des préceptes de la littérature d’anticipation, à savoir brosser le portrait de la société d’aujourd’hui en imaginant ce qu’elle pourrait devenir si tous ses mauvais côtés étaient amplifiés. Le film date de 1983 et reste toujours autant d’actualité.
Non exempt de défauts, dus en partie à un manque de moyens plutôt visible, « Star Suburb » reste ce film, d’une sincérité alarmante, non dénué d’humour, qui a vu la naissance d’un cinéaste qui ne put pas, par la suite, concrétiser ses idées dans d’autres films. Disparu l’année dernière, Stéphane Drouot oeuvrait sans doute dans un cinéma alternatif trop ambitieux pour trouver sa place dans le système étriqué du cinéma français. Gaspar Noé lui aura rendu un dernier hommage avec le film « Intoxication », dans lequel Stéphane se livre, sans fard, face caméra.
Deuxième film proposé dans cette carte blanche, « The Dentist » de Leslie Pearce, est un classique du burlesque (1932), qui met en scène W.C. Fields, star du music-hall de l’époque, dans le rôle d’un dentiste odieux, plus affairé à ses loisirs, comme le golf ou la chasse, qu’à sa supposée vocation.
À travers plusieurs séquences d’anthologie (un arrachage de dents impossible sur une grande patiente qui se tord de douleur dans tous les sens, un soin prodigué à un barbu dont la bouche est introuvable), ce petit film sans prétention dresse le portrait d’un personnage méchant et cynique, faisant preuve de misogynie et obnubilé par la surprotection de sa fille.
Malheureusement, le récit est plutôt ténu et n’est qu’un prétexte à un déchaînement d’humour caustique par l’un des premiers grands comiques trash du cinéma, dont on masquait à l’époque certaines répliques, jugées trop rudes pour les oreilles du grand public.
Pour terminer la séance, Albert Dupontel a choisi de projeter « The Mystery of the Leaping Fish », un film muet subversif et fascinant, réalisé en 1916 au sein des studios hollywoodiens, avec John Emerson à la réalisation, Tod Browning au scénario et D.W. Griffith à la production.
Pastiche irrévérencieux de Sherlock Holmes, ce film met en scène un détective scientifique, Coke Everyday (Coke Ennyday en VO), interprété par un Douglas Fairbanks survolté, qui, pour résoudre les énigmes auxquelles il se retrouve confronté, doit s’injecter et sniffer de la drogue en continu. Alternant situations cocasses et humour surréaliste (comme par exemple une scène de poursuite à dos de poisson gonflable au cours de laquelle Coke Everyday injecte des seringues de coke à « l’animal » pour qu’il soit plus performant), cette comédie, d’une liberté totale, détonne par sa réalisation hystérique et son ton ultra provoquant.
Que les créateurs de ce grand moment de folie aient été conscients ou non de la subversion dont ils ont fait preuve en faisant ce film (en témoigne la séquence d’épilogue, à la fois naïve et maline), il est très plaisant et surprenant de voir ce type de film aujourd’hui et de réaliser qu’ils n’ont pas du tout été inquiétés d’une quelconque censure à l’époque.
Pour la troisième année consécutive, Format Court couvrait l’Etrange Festival (5-15 septembre, Forum des Images) et sa traditionnelle compétition de courts métrages. Films différents, alternatifs, curieux, trash, cartes blanches… : le point sur cette 19ème édition.
La 19ème édition de l’Etrange Festival qui s’est tenu du 5 au 15 septembre au Forum des Images à Paris a doublement récompensé « The Voice Thief » d’Adan Jodorowsky, l’un des nombreux courts métrages en compétition cette année. Lauréat du Grand Prix Canal + et du Prix du Public, ce premier film teinté de psychédélisme et surréalisme a quelques accointances avec l’univers du père du réalisateur, Alejandro Jodorowsky. Il y a quelques jours, pendant le festival, Format Court a eu l’opportunité de rencontrer le réalisateur de « The Voice Thief » (entretien à venir). En attendant, voici les premiers éléments de ce film dans lequel on retrouve la troublante Asia Argento, le frère du réalisateur, Cristobal Jodorowsky, ainsi que la musique rock de Rob, le claviériste du groupe Phoenix.
The Voice Thief d’Adan Jodorowsky – France / Chili / Etats-Unis – 2013 – 24’ – Fiction – Couleurs
Synopsis : Naya, chanteuse d’opéra, se fait étrangler par son mari Noev après une violente dispute et en perd sa voix. Alors que sa raison de vivre a disparu, elle menace de le quitter s’il ne répare pas le mal qu’il lui a causé avant minuit. Se sentant coupable, Noev déambule de nuit, désespéré, à la recherche de la voix parfaite pour se faire pardonner.
Short Screens a le plaisir de vous annoncer une nouvelle séance de courts métrages sur grand écran ! Après une séance consacrée à l’amour en août, nous vous proposons une nouvelle programmation éclectique, avec des films d’hier et d’aujourd’hui, fruits de la créativité d’auteurs belges et étrangers. Rendez-vous ce 26 septembre à 19h30, au Cinéma Aventure, au 57 Galerie du Centre à 1000 Bruxelles. PAF 6€.
Programmation
AVANT QUE DE TOUT PERDRE Xavier Legrand France/2012/fiction/30’
Julien a dix ans. Il fait mine de se rendre à l’école mais se cache sous un pont, son cartable rempli de vêtements. À quelques kilomètres, Joséphine, 15 ans, fait de même et attend le bus.
OPALE PLAGE Marie-Eve De Grave Belgique/2010/fiction/18’
Une mère et ses deux filles sillonnent les rivages du Nord à la recherche d’une plage où l’aînée a laissé ses meilleurs souvenirs.
THE BOY WHO WANTED TO BE A LION Alois Di Leo Royaume-Uni/2009/animation/8’
Max est un garçon sourd de 7 ans qui a grandi dans les années 60. Un jour, il part visiter un zoo avec son école, où il voit un lion pour la première fois. Un sentiment commence à naître, qui va lui changer sa vie à jamais.
AMAR Andrew Hinton Inde/Royaume-Uni/2011/documentaire/9’45’’
Amar a 14 ans et est le premier de sa clase. Un jour, il aimerait devenir joueur professionnel de cricket mais pour l’heure il travaille 6 jours et demi par semaine, cumule deux boulots tout en allant à l’école les après-midis. Un voyage à travers sa vie quotidienne.
NITRO NICKY Marco Laguna Belgique/1997/fiction/7’17’’
Quand Nitro Nicky, The Queen of Speed se met sur la route de Johnny, dit The King…
Au Mali, dans un restaurant, Abdu, le joueur de N’Goni fait la connaissance de Bakari, un jeune serveur. Abdu veut passer la frontière pour partir faire carrière en Europe avec sa musique. Bakari voudrait le suivre mais se sent « coincé ici… ».
Le Festival Off-Courts de Trouville qui vient de se terminer vendredi a un côté « double-face » assez étonnant qui en fait un rendez-vous unique parmi la longue liste de festivals français. La preuve par deux.
Le Labo de création : les Kino
Si vous ne vous êtes jamais rendus à Trouville, en réalité, vous ne pouvez vous rendre compte de l’ébullition qu’il s’y passe. Les gens qu’on y croise ne sont pas ceux que l’on rencontre habituellement dans les autres festivals. Tout simplement parce que là-bas, on pense, on fabrique, on agit… en d’autres termes, on créé sur place.
Off-Courts existe depuis 14 ans et cela fait 11 ans que le Labo Kino y prend ses aises. Le principe : une équipe de professionnels de l’audiovisuel (ou non) se forme, elle développe une histoire et a 48 heures pour faire un film de 5 minutes maximum qui sera projeté dans la foulée, au Kino Kabaret.
D’après les « Kinoïtes » les plus assidus, Off-Courts n’est pas forcément le festival le plus spécialisé pour pratiquer le kino, le Canada, grand précurseur de ce courant, étant apparemment le haut lieu de ces rassemblements créatifs. Néanmoins, le festival de Trouville propose un fonctionnement assez intéressant qui attire chaque année plus d’adeptes. Certains viennent pour la première fois, d’autres ne loupent le festival sous aucun prétexte depuis le début des Labo Kino. Le rendez-vous est international : on y croise des participants de pas moins de 20 pays différents !
Tout est organisé de manière scrupuleuse et ce qui ressemble de loin à un jeu est réellement pris au sérieux par tous ceux qui y participent, aussi bien par le staff que par les apprentis-cinéastes. Après une réunion d’information où chacun parle de ce qu’il sait faire et propose ce qu’il souhaite faire, les équipes passent au « magasin » où ils empruntent du matériel réparti en trois départements : les caméras, la lumière et le son. Tout est à disposition des Kinoïtes pour réaliser leur film, grâce à des partenariats noués avec de nombreux prestataires. Pendant ce temps, les comédiens passent en loge pour être maquillés, habillés, voire totalement déguisés. Puis, les équipes partent tourner un peu partout dans la ville, en faisant parfois appel à la participation des commerçants ou en profitant simplement de la plage. Lorsque les rushes sont dans la boîte, elles s’empressent de se rendre à la salle de post-production où sont mis à leur disposition des ordinateurs pourvus du logiciel Adobe Première, des stations d’étalonnage et deux studios son afin de monter leur film dans les conditions les plus professionnelles possibles. Enfin, deux groupes de musique en résidence au festival (cette année, Groënland et Uberko) composent les bandes originales des films. Autrement dit, toutes les étapes de fabrication d’un film sont respectées et une fois terminés, les courts-métrages sont projetés lors des soirées Kino-Kabaret dans une ambiance des plus festives. L’animateur québécois de la soirée y est pour beaucoup, faisant sensation, vêtu d’un collant en lycra et d’une perruque blonde !
Bien évidemment, les films ont quelques faiblesses, dues en partie à leur fabrication dans l’ »urgence ». Mais il faut bien reconnaître que la plupart des résultats sont complètement bluffants. Ingéniosité, diversité, créativité et solidarité sont au rendez-vous pour près de 70 films réalisés sur une semaine de festival.
Les rencontres professionnelles
Il y a sept ans, Audrey Billard qui faisait alors plutôt partie de l’équipe d’organisation a décidé de créer un Marché du Film au festival. Off-Courts s’est donc ajouté aux quatre autres festivals (Clermont-Ferrand, Cannes, Brest et Aix-en-Provence) qui possèdent également un marché, ce qui a attiré de ce fait les professionnels à Trouville.
Comme dans la plupart des marchés, un catalogue des films, des postes de visionnage et une toute petite salle de projection sont mis à disposition des distributeurs et diffuseurs. L’originalité réside dans le fait que ce marché se situe, le temps du festival, dans la discothèque du Casino de Trouville !
Programmé à un moment stratégique dans l’année (pile 6 mois après/avant Clermont-Ferrand, le plus important), le Marché de Trouville remporte un succès auprès des professionnels. Côté acheteurs, on a ainsi pu recenser cette année la présence d’une dizaine de diffuseurs venus des quatre coins du monde, d’une dizaine de distributeurs principalement français et canadiens, de quelques responsables de nouveaux médias européens et des représentants des institutions françaises.
Autre rendez-vous professionnel à prendre en compte durant cette édition : une table ronde organisée autour des coproductions européennes et/ou francophones. Les intervenants tels qu’Alexandre Charlet (producteur aux Films du Cygne et président du Pôle courts-métrages chez Unifrance), Christophe Taudière (responsable des achats et pré-achats sur France 2), Valentine Roulet (responsable du Service de la création du CNC), Sandra Dahlie-Goyer (productrice et fondatrice du volet québécois d’Off-Courts) ont par conséquent débattu durant deux heures à propos des initiatives prises ou à prendre entre les acteurs des différents territoires pour faire face à l’augmentation des coûts et la baisse des financements.
Loin d’être dénuée d’intérêt, cette table ronde s’est centrée sur une problématique sur laquelle il est utile de se pencher à l’heure où il est de plus en plus compliqué de produire des courts-métrages. Malheureusement, de part et d’autre, les discours, souvent fort négatifs, n’ont suggéré aucune solution, ni même ouvert de réelles portes. Off-Courts, de son côté, prétend ne pas en rester là avec cette problématique et compte bien rouvrir le débats lors la prochaine édition.
Dernier moment important pour les professionnels du court : la mise en place d’un nouveau prix d’une valeur de 30.000€ à destination des jeunes producteurs, grâce à un nouveau partenariat (et pas des moindres) entre le Festival Off-Courts et France Télévisions. Toute l’équipe de France TV était donc au complet mardi soir dernier à la mairie de Trouville avec Samuel Pratt (coordinateur général du festival) pour annoncer le lancement de ce nouveau prix et en donner les critères d’éligibilité. Ce prix du jeune producteur s’adresse à des producteurs possédant une structure créée depuis moins de 6 ans et ayant un film sélectionné en compétition française à Off-Courts. Il sera décerné lors de la prochaine édition et servira de tremplin aux jeunes acteurs du court-métrage.
Le 14ème festival d’Off-Courts s’est terminé hier soir à Trouville. La plupart des films primés a été chroniquée dans nos différents reportages parus cette semaine :
Wilfried Méance a 29 ans et déjà huit films au compteur en tant que réalisateur (« Deal », « Après toi »,« Pintame », …). Lors de cette 14e édition du Festival Off-Courts à Trouville, il présente son dernier film, « Suzanne » en compétition dans la sélection française. Le court-métrage aborde, avec nostalgie et humour noir, l’égoïsme d’une famille aveugle devant l’état de leur aïeule. Même si ce film est légèrement plus grave que ses films précédents, il s’inscrit dans une lignée de comédies grand public totalement assumée pour Wilfried Méance puisque selon lui, le but premier d’un metteur en scène est de divertir les gens. Nous avons rencontré ce jeune homme au capital sympathie énorme, qui est à Trouville cette année, pour la troisième fois.
Peux-tu nous parler de ton parcours et de ce qui t’a amené à faire du cinéma ?
Depuis que je suis adolescent, j’ai toujours voulu faire du cinéma. Lorsque j’étais plus jeune, j’ai fait du théâtre. C’est là où j’ai pris conscience de ce qu’était le métier de metteur en scène et que je me suis rendu compte que j’étais plus apte à faire de la mise en scène que de jouer. Par conséquent, depuis que j’ai 11-12 ans, je souhaite faire ça. Si bien que juste après le bac, j’ai intégré l’ESEC (Ecole Superieure Libre d’Etudes Cinematographiques) avant de faire une école de communication. À l’ESEC, j’ai rencontré une grande partie de mon équipe avec qui je travaille aujourd’hui. D’ailleurs, c’est là tout l’intérêt de suivre une école de cinéma : les rencontres qu’on y fait sont plus importantes que l’enseignement qu’on y reçoit.
Contrairement à de nombreux courts-métrages, tu es amené à faire tes films finalement assez grand public, avec une tendance comique.
En tant que metteur en scène, je préfère réaliser des comédies. C’est le domaine dans lequel je me sens le plus à l’aise et le plus impliqué. C’est très grisant de faire rire les gens, ça donne envie de continuer dans cette voie. Lorsque je passerai au long, je ferai de la comédie aussi.
Tes films sont assez légers et pour autant, les thèmes que tu traites (les crises familiales, la mort, le suicide, les rencontres amoureuses, …) ne sont pas forcément légers. À ce propos, Jacques Demy disait qu’un film léger parlant de choses graves vaut mieux qu’un film grave parlant de choses légères. Qu’en penses-tu ?
C’est exactement ça. D’ailleurs, je crois fortement au cinéma de divertissement, sachant que selon moi, le talent d’un metteur en scène est de faire tenir 300 spectateurs pendant 1h30. Avec mes courts, j’ai pu tenter des choses un peu moins drôles ou des thèmes un peu plus noirs, histoire de me frotter à toutes les palettes de la comédie : romantique, burlesque ou douce- amère.
Es-tu conscient que dans le milieu du court-métrage, généralement, les comédies ne sont pas très fréquentes et peu aidées par les différentes institutions ? Aucun de tes films n’a bénéficié d’une aide. Comment le vis-tu ?
En effet, aucun de mes films n’a reçu d’aides. Mais finalement, c’est juste un frein à la durée des films que je peux faire, c’est-à-dire que je suis un peu obligé de faire des courts dont le budget oscille entre 5.000 et 6.000€ (jusqu’à 12.000€ pour celui qui a coûté le plus cher). Je ne peux pas faire beaucoup mieux, avec des temps de tournage qui sont très courts. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles je veux passer au long-métrage. L’économie est à deux vitesses : en court-métrage, on subventionne plus volontiers des films dramatiques, sauf qu’en long-métrage, c’est plutôt le contraire. On financera plus facilement une comédie car c’est finalement ce que la grande majorité des gens a envie de voir.
On remarque que tes films sont souvent sélectionnés d’une année à l’autre dans les mêmes festivals qui sont ouverts aux comédies grand public, comme l’Alpe d’Huez, Meudon ou justement Off-Courts à Trouville.
Oui, c’est la troisième fois que je me retrouve à Off-Courts et je suis d’autant plus heureux cette année car je reviens en compétition alors que l’an passé, j’étais en hors-compétition. C’est toujours sympa d’être en compétition ! Après, je trouve que Trouville est un festival vraiment sympa, en particulier pour toute cette partie Labo Kino qui permet à des tas de gens d’essayer des tas de choses. Qui plus est, le festival est bien organisé. Après, pour moi, il n’y a pas de petits ou de grands festivals, car c’est un bonheur à chaque sélection.
Peut-on aussi avancer qu’il n’y a pas de petits et de grands films mais des films tout court ? Dans tes films qui ne sont pas financés (ou presque pas), on retrouve bon nombre de comédiens connus et reconnus qui acceptent d’y jouer. Comment l’expliques-tu ?
En fait, ça se joue au coup de cœur. Qui plus est, comme je te disais, on tourne sur des laps de temps très courts, si bien qu’en gros, ils me donnent trois jours de leur vie. C’est beaucoup pour ces comédiens, mais quelques uns préfèrent tourner plutôt que d’attendre un nouveau projet de long. Certains ont envie d’accompagner des jeunes réalisateurs qui après, feront peut-être du long, et avec qui ils retravailleront peut-être.
« Suzanne »
Considères-tu le court-métrage comme un moyen de s’essayer au cinéma mais aussi de tenter de travailler avec une équipe en vue de faire un long-métrage ?
En fait, il y a plusieurs avantages à réaliser des courts-métrages. D’abord, c’est une école pour tester des choses au niveau de la mise en scène avant de passer au long, pour aborder le travail avec les comédiens et avec les techniciens. Ensuite, c’est surtout une super carte de visite pour aller démarcher les producteurs de longs-métrages, pour leur montrer ce qu’on est capable de faire et pour les rassurer, d’autant plus que les budgets sont assez conséquents, notamment en comédie.
Ton dernier court-métrage « Suzanne » n’est pas vraiment une comédie, tu es dans autre chose que dans tes films précédents…
En effet, ce n’est pas vraiment une comédie. C’est plus volontiers un film noir et triste. Le ton n’est pas le même que dans mes films précédents, bien qu’en salle, j’ai entendu des gens rire. Comme la situation est un peu trash, seul, on a du mal à en rire car on se sent un peu coupable de rire, alors qu’en salle, lorsqu’on entend des gens rire, on se dit qu’on en a le droit.
En plus d’être auteur-réalisateur, tu possèdes aussi la casquette de producteur au sein de Hilldale Productions. Pourquoi vouloir tout faire ?
Tous mes courts-métrages ont été coproduits entre Hilldale, ma boîte, et FastProd, une société qui est gérée par Jean-François Moussié, depuis que j’ai fait « Le grand moment de solitude ». On a mis chacun la moitié du budget de ce film et comme on a réussi à vendre le film aux chaînes, on a réussi à récupérer notre investissements voire plus, ce qui nous a permis faire les films suivants. En fait, on a réussi à faire cinq films avec l’argent d’un seul film puisqu’on n’a jamais remis d’argent depuis. A la base, j’avais créé Hilldale pour la production de mon premier long-métrage qui était plutôt dans une veine indépendante. Après, avec Hilldale, j’ai voulu me diversifier. On fait aussi de la publicité, ce qui permet à la boîte d’avoir des revenus autres que par la fiction et aussi de pouvoir se payer, tout simplement. Il faut bien vivre (rires) !
Peux-tu nous parler brièvement de ton long-métrage en préparation ?
C’est une comédie qui s’appelle « Amsterdam », il traite de la crise des trentenaires à qui on a promis un boulot s’ils faisaient des études alors que c’est tout l’inverse. Et ceci de manière humoristique. J’espère bien sûr travailler avec la même équipe que sur mes courts-métrages, mais comme je travaille désormais avec des producteurs de longs-métrages, ce ne sera pas le premier film pour tout le monde. Ceci dit, je souhaite que chacun de mes comédiens fétiches aient un rôle, même secondaire et je tâcherai au mieux d’intégrer tout le monde.
Le mot de la fin ?
Mot de la fin (rires) ! Plus sérieusement, j’ajouterais qu’on peut vraiment faire rire avec des sujets graves. Prendre des sujets qui semblent durs et les détourner avec de l’humour permet aussi de faire passer un message. C’est l’autodérision qui peut encore nous sauver.
Ce jeudi 12 septembre, à 20h30, notre première séance de l’année est consacrée au Festival du film court en plein air de Grenoble. Cinq films, tous primés lors de la dernière édition (juillet), seront projetés ce soir-là, au Studio des Ursulines (Paris, 5e), en présence de nos nombreux invités : Guillaume Poulet (directeur de la Cinémathèque et du Festival de Grenoble), Xavier Legrand, Alexandre Gavras (réalisateur et producteur de « Avant que de tout perdre »), Augusto Zanovello, Jean-Charles Finck, Arnaud Béchet, Olivier Dehors, Gilbert Hus (réalisateur, co-scénariste, directeur artistique, producteurs de « Lettres de femmes ») et Clément Gonzalez, Marc Stef, Martin Malzieu, Baptiste Gondouin, Roberto Fernandez (réalisateur, co-scénaristes de « As it used to be »).
En pratique
► Projection des films : jeudi 12 septembre 2013, à 20h30. Durée du programme : 87’
► Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris
► Accès : RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée), BUS 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon). Métro le plus proche: Ligne 7 – Censier Daubenton (mais apprêtez-vous à marcher un peu…).
C’est la rentrée. Du côté des festivals, les évènements se bousculent et se chevauchent même. Cette semaine, Silhouette referme ses parapluies pour ses projections en plein air, l’Etrange Festival affole et perturbe ses spectateurs au Forum des images, Off-Courts invite une nouvelle fois le Québec au centre de Trouville.
Pour notre part, la reprise se fait doucement mais sûrement. En premier lieu, nos soirées Format Court redémarrent ce jeudi 12 septembre au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). La première séance de l’année est consacrée au 36ème Festival du film court en plein air de Grenoble, organisé cet été. Pour cette projection de rentrée, nous vous invitons à découvrir le palmarès du dernier festival, en présence de pas moins de trois équipes de films (réalisateurs, scénaristes, producteurs, directeurs artistiques…), les membres des différents jurys et de Guillaume Poulet, directeur de la Cinémathèque et du Festival.
Début octobre, nous attribuerons un nouveau Prix Format Court en Belgique, lors du Festival International du Film Francophone de Namur (le FIFF, en abrégé). Le même mois, nous remettrons pour la troisième année consécutive un Prix au Festival Court Métrange de Rennes, après y avoir primé « Danny Boy » en 2011 et « Mamembre » l’an passé.
Les cinq ans du site approchent à grands pas. Pour l’occasion, différentes cartes blanches sont prévues dans les prochaines semaines. À Court Métrange déjà où nous proposerons six films plutôt étranges ramenés de nos balades en festival et sur la Toile, diffusés lors de nos projections, évoqués sur le site ou découverts un peu par hasard. Cette première carte blanche de l’année sera présentée en ouverture du festival, le 17 octobre prochain.
Après Court Métrange en octobre, nous serons au Festivals de Brest en novembre et à celui de Vendôme en décembre pour deux nouvelles cartes blanches. Enfin, en janvier, nous reviendrons à Paris pour une séance spéciale lors des soirées Bref (séances MK2). Toutes les informations relatives à ces projections qui nous honorent et nous enchantent seront bien évidemment publiées sur le site en temps voulu.
De belles nouvelles donc, pour une bonne rentrée.
On en est ravis. Bouchon !
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Troisième et dernière sélection en compétition à être présentée à Trouville : celle des courts-métrages français, comportant le plus grand nombre de films. Pas moins de 23 films tous très différents les uns des autres seront projetés lors de cette 14ème édition. En voici un petit aperçu.
Commençons par le poétique « Les deux morts de Parfait » réalisé par Leila Fenton. Tourné à Tel-Aviv et en hébreu, ce film touche particulièrement non seulement parce qu’il est plastiquement intéressant (décor de carte postale, lumière chaleureuse, etc.) mais aussi et surtout parce que l’enfant qui représente le personnage principal de Parfait, possède en lui cette douceur et cette fragilité qui font qu’on s’attache instantanément à lui. Certes, ce court-métrage s’ajoute à la longue liste de courts-métrages français qui jouent avec les bons sentiments et une morale dont on se passerait parfois, mais il ne demeure pas moins un film très sensible.
Il est vrai que dans cette sélection, on recense nombre de films très « gentils » dont ceux-ci : « Douce Nuit » de Stéphane Bouquet dans lequel un gang qui semble assez violent aux premiers abords agit finalement pour une cause salvatrice, « Entre les lignes » de Jean-Christophe Hadamar sur une correspondance mielleuse entre un lycéen et une personne âgée hospitalisée ou encore « Les perruches » de Julie Voisin où une jeune fille atteinte d’une maladie grave perd ses cheveux et retrouve la joie de vivre en se cachant sous une perruque bleue (ou comment utiliser le prétexte d’une fête pour en faire un film). Loin de cracher sur les bons sentiments, appréciant même l’idée de ne pas voir seulement des films suicidaires, on peut toutefois souhaiter un peu de rebondissements et de réelles intrigues dramatiques dans les films proposés.
Heureusement parmi cette liste de films un peu trop à l’eau de rose, certains réalisateurs ont su détourner les bonnes morales pour s’en amuser. Par exemple, il y a « Diagnostic » de Fabrice Bracq où un couple consulte un grand médecin pour tâcher de déceler une maladie apparemment très répandue et qui touche le mari. L’excellent jeu des comédiens ne peut que vous rendre hilares bien que finalement, l’intrigue de ce film soit vraiment toute simple. Et un prix d’interprétation à Roselyne Bachelot, un ! Il y a aussi « Suzanne » de Wilfried Méance, dans lequel la vie d’une grand-mère change sans que les membres de sa famille ne s’en rendent compte, si bien que ce film à l’ambiance fleur bleue au début prend un tournant d’humour noir. Rien de transcendant dans cette histoire, une chute finalement assez attendue, mais comme à son habitude, Wilfried Méance, le réalisateur du « Grand moment de solitude », maîtrise à merveille les personnages et la montée du caractère comique.
Autre film qui démarre sur une idée de morale pleine de bons sentiments et qui se termine en blague : « Djekabaara » d’Enis Miliaro. Pour le coup, le jeu des comédiens est assez mauvais, mais l’histoire drôle qui sert de contexte à la rencontre est plutôt bien mise en images, surtout dans les décors immenses d’Afrique Noire. Enfin, « Fanily » de Jules Dousset offre son rôle principal à un objet du quotidien plutôt qu’à un personnage en chair et en os, et cette petite comédie douce-amère se laisse apprécier.
À l’inverse, certains films de la compétition sont survolés et laissent derrière eux une sensation d’amateurisme. On aura donc quelques retenues pour un film comme « Le bout du fil » de François Raffenaud où le personnage principal (une femme âgée), attendant un appel – malgré une solitude apparente – ne provoque aucun attachement (au même titre que l’esthétique du film). On le regrette bien car le thème de la vieillesse confrontée à la solitude, peu traité finalement dans le milieu du court-métrage, aurait pu amener à un meilleur résultat. Ou encore « Ma rencontre » de Justin Pechberty dans lequel le personnage, Bertrand, se voit dix ans après et discute avec lui-même sur ce qu’il est devenu pour peut-être changer son destin. Le réalisateur semble apparemment attiré par les thèmes traités dans « Retour vers le futur » (et par les split-screen, soit dit en passant) mais offre malheureusement une version personnelle peu captivante et assez mal interprétée. Dommage encore une fois, tant l’idée de base autour de la propre rencontre d’un personnage n’était pas inintéressante.
En réalité, le meilleur de cette sélection française réside dans les films d’animation. Voici par conséquent un petit aperçu des six films d’animation en compétition ici. D’abord, « Rebelote » de Cyril Coste, un film d’école, en forme de caricature des super-héros et dont l’esprit des comics est bien respecté. Puis, « Reverso » de Kimberly Honma, Clément Lauricella, et Arthur Seguin, qui permet aux trois réalisateurs de critiquer la société active à travers un personnage qui vit sa vie à l’envers (comprenez, depuis le plafond). Enfin, « Motorville » de Patrick Jean qui retourne le puissant Google contre lui-même en reprenant le style visuel de Google Map pour créer un énorme bonhomme, issu des États-Unis, prêt à anéantir le monde car il est en manque de carburant (ou plus exactement de pétrole). Comme dans « Pixels », le réalisateur aime définitivement détourner des techniques visuelles qu’on connaît pour faire passer ses messages critiques face à la mondialisation.
Il y a aussi le trash mais pas moins génial « Les deux vies de Nate Hill » de Jeanne Joseph où cette fois, le split screen est utilisé à bon escient pour suivre l’évolution de deux Nate Hill selon leur naissance par voie traditionnelle ou par césarienne, comme si le destin de chacun était écrit dès leur venue au monde. On n’oubliera pas « Duku Spacemarines » de Nicolas Liautaud, même s’il est loin d’être le meilleur. On y voit à nouveau des supers héros avec en plus tout le registre des films d’action et/ou de science fiction (courses-poursuites en voiture avec des extra-terrestres) pour toucher les petits garçons devenus adultes (ou pas !). Enfin et pas des moindres, le fameux « 5 mètres 80 » de Nicolas Deveaux qui n’a plus grand-chose à prouver au sein des animateurs mais qui nous bluffe toujours autant malgré l’extrême simplicité des histoires qu’il raconte et le manque de retournements scénaristiques. Après l’éléphant qui fait du trampoline dans « 7 tonnes 2 », voici des girafes qui s’exercent au plongeon. Le film est d’une beauté à couper le souffle (ou le cou !).
Pour en revenir aux fictions réelles (car il n’y a pas de documentaires programmés à Trouville-sur-Mer cette année), il y en a certaines, en plus de « Des deux morts de Parfait », qui ont particulièrement retenu notre attention, soit par leur originalité, soit parce qu’elles semblent mieux maîtrisées. Il s’agit de « Je t’attends toujours » de Clément Rière, sorte de faux documentaire sur la disparition étrange du frère du réalisateur/narrateur, passionné d’astronomie, lors d’une observation des étoiles. Le titre marque l’enquête que décide de mener le réalisateur pour retrouver son frère suite à la découverte de photos troublantes. On se laisse emporter par ce film fait d’images d’archives et de plans actuels, alors que tout y est fictionnel. Parallèlement, on accroche particulièrement avec « Le retour » de Yohann Kouam bien que le titre ne soit pas son plus fort atout. Il est également question d’une histoire entre frères mais pas du tout sur le même ton. Ici, Willy, un adolescent, attend avec impatience le retour de son grand frère Théo qu’il a toujours mis sur un piédestal jusqu’à ce qu’il découvre que celui-ci est homosexuel et que tout se chamboule dans sa tête et dans son comportement au collège. Le thème a beau être assez récurrent dans le court-métrage (et pas seulement), il est ici traité dans un milieu plus inhabituel (la banlieue chez des jeunes d’origine africaine noire) et de manière assez intime en passant par le lien fraternel.
Trois autres films méritent également qu’on se penche un peu sur eux. Tout d’abord, « Le souffle court », doté d’une super photo, de Johann Dulat (école Louis Lumière) dans lequel Antoine se sert de son pouvoir de retourner dans le passé pour rencontrer des filles, jusqu’à ce qu’une certaine Alice le fasse changer. Puis, « The Blue Dress » de Lewis Martin où une caissière a des rêves de riche en se voyant dans cette fameuse robe bleue à froufrous aperçue dans une boutique de luxe. Enfin, un ovni : « Shunpo » de Steven Briand qui ressemble plus à une publicité (le film est d’ailleurs produit par Partizan Films qui a l’habitude de « traîner » dans la pub !) ou à un clip, mais l’exploit est bel et bien là. Il s’agit d’un film extrêmement visuel à la limite de l’expérimental, montrant une femme qui sort ou qui souhaiterait sortir de son propre corps, de sa routine « métro-boulot-dodo » juste pour un moment. Et ce souhait est rendu possible grâce la performance de la danseuse Juliette Nicolotto.
Au final, on assiste à une compétition française, certes très variée mais surtout très grand public (sauf peut-être pour ce qui est des films d’animation un peu plus violents et qui posent des questions bien plus existentielles) contrairement à la programmation de nombreux festivals de courts-métrages en France. Par ces choix, Off-Courts prétend alors proposer une « ligne éditoriale » résolument différente et assumée. On demeure néanmoins légèrement déçu que certains films soient sur un mode un peu trop artisanal malgré l’énergie ressentie. Peut-être a-t-on envie d’imaginer que pour l’un des cinq festivals de courts-métrages les plus réputés en France, la sélection française de l’an prochain sera plus exigeante.
Le festival Off-Courts reconduit pour sa quatorzième édition la formule singulière de sa compétition de courts-métrages, à savoir proposer à la fois une sélection de films français, internationaux et québécois. Créé il y a une quinzaine d’année autour d’un partenariat entre la France et le Québec, le festival nous donne l’occasion de découvrir chaque année les réalisateurs émergents des deux côtés de l’Atlantique et leurs premières oeuvres attendues avec intérêt.
La vingtaine de courts-métrages québécois sélectionnés pour concourir dans la compétition de cette année propose l’habituel éventail de genres (fiction, animation, documentaire) et de durées (certains films excédent à peine une minute, la majorité en fait une quinzaine et quelques uns dépassent les vingt minutes). Il est néanmoins surprenant de relever que si diversité il y a au niveau des genres et des formats, la majorité des films de la sélection québecoise traite tous du même sujet : l’enfance. Ou pour être plus exact, disons que les enfants (pré ados et adolescents) sont ici les rois, protagonistes au coeur de pratiquement chaque film, scrutés sous tous les angles par les caméras des cinéastes.
Si le récit d’initiation constitue un genre à part entière abondamment représenté dans les festivals de courts-métrages, la sélection des films québécois du festival Off-Courts peut se targuer de nous offrir un éventail complet de ses multiples variations. Mais nous constatons également que si ce sujet (l’abandon de l’enfance sous forme de transition brutale pour le héros) semble stimuler encore les générations de jeunes réalisateurs, les voies généralement empruntées pour explorer ces questions demeurent les plus balisées, les moins excitantes. Ainsi, il est difficile de trouver de l’intérêt aux trop sages « Gaspé Copper » d’Alexis Fortier Gauthier (les liens entre un frère et une soeur mis à mal puis finalement soudés autour de l’abattage du chien de la famille) ou encore aux « Adieux de la Grise » d’Hervé Demers (une petite fermière perd son innocence en même temps que sa meilleure amie, un lama (!), est tué par un loup). Le symbolisme très pauvre développé par ces deux films (mort de l’animal de compagnie = mort de l’enfance) n’est qu’un exemple du manque d’originalité et du mauvais goût symptomatique des films de la compétition. Lorsqu’il s’agit de filmer les premiers émois amoureux et sexuels des adolescents, ce n’est guère mieux. En témoigne les grotesques « Faillir » de Sophie Dupuis (une ado succombe à la tension sexuelle et couche avec son grand frère) et « Le Monstre » d’Elisabeth Desbiens (le récit d’une amourette macabre entre une ado lambda et un psycho-boy). Trop de films faisant bon marché de la souffrance des enfants parcourent ainsi la sélection, le point culminant sans doute représenté par le nauséeux et embarrassant « Imparfaite » d’Emilie Gauthier, ou comment mettre en scène de la façon la plus lourde qui soi et en dix minutes l’abandon d’un nourrisson par sa mère sous prétexte que l’enfant est… bruyant !
Heureusement, deux films parviennent à tirer leur épingle du jeu et à remonter le niveau de la sélection. D’abord, le très beau « Là où je suis » de Myriam Magassouba, autre récit d’initiation qui a en premier lieu l’intelligence de prendre son temps (25 minutes) pour développer son propos. Le film raconte avec pudeur le deuil vécu par une adolescente après la disparition brutale de sa meilleure amie dans un accident de la route, drame filmé au plus près du visage et du corps de la jeune interprète Virginie Léger qui habite avec une grâce déconcertante ce rôle difficile. Le récit, véritable parcours du combattant pour cette héroïne en quête de repères, est habilement tissé autour des rapports et des échanges fugaces que le personnage principal entretient avec les différents membres de la communauté des adultes, autant de figures auxquelles elle devra faire face pour acquérir son indépendance. La réalisatrice s’emploie à filmer le corps de son actrice en perpétuel mouvement, en lutte dans des espaces qu’elle doit investir à l’instar des magnifiques landes enneigées de Rouyn-Noranda où l’action se déroule. L’importance du mouvement culmine dans la scène finale du cours de danse où l’héroïne exécute une chorégraphie sans sa partenaire, seule au milieu des autres couples de danseuses. La vision de ce corps ne pouvant se reposer sur un autre traduit dans un premier temps et de façon poignante le poids de l’absence de l’amie disparue. Puis peu à peu, le corps de la jeune fille transporté par ces pas de danses solitaires se libère complètement, figurant de façon poétique la prise de contrôle du personnage sur son corps et son environnement.
Le très efficace « Mila » de Kristina Wagenbauer s’impose naturellement comme le second film remarquable de cette sélection. Il s’agit là encore de partir de schémas connus et éprouvés (l’évolution d’une enfant au sein d’une cellule familiale en crise) pour arriver ailleurs. Mila, une pré-adolescente discrète et solitaire, a développé un hobby singulier : enregistrer les sons de sa vie de tous les jours à l’aide d’un dictaphone pour les triturer ensuite sur ses logiciels de montages. Au milieu du tumulte d’une vie familiale rythmée par les disputes de plus en plus fréquentes de ses parents, la jeune fille s’invente un univers fait de sons et de musiques. Le film prend des allures de conte spielbergien lorsque la jeune fille décide d’utiliser ses aptitudes pour influer sur son quotidien. En montant des extraits de conversations téléphoniques de sa mère, elle dupe la secrétaire de l’école et échappe aux cours. On devine rapidement que ces larcins en apparence anodins dissimulent un projet plus grand. À l’occasion d’une réunion de famille autour de l’anniversaire du grand-père, la jeune fille, armée de son piano digital, joue une partition musicale à laquelle elle incorpore des samples de cris et de paroles échangés par les différents membres de la famille. Le morceau évolue et se transforme petit à petit en véritable chaos sonore, renvoyant à la figure des parents leurs comportements violents et mesquins qui contaminent le quotidien du foyer. La réalisatrice vise juste en attribuant à son héroïne la capacité à s’imposer par le seul usage de son talent et de son intelligence, pareil à celle du film de Myriam Magassouba qui trouvait dans la danse le moyen de survivre au deuil. Dans les autres courts-métrages de la sélection, le parcours initiatique des personnages leur est imposé par des ficelles scénaristiques grotesques soumises aux jugements arbitraires des réalisateurs. Ces deux films, en partant des mêmes schémas, se distinguent en faisant des héroïnes les artisans de leur transformation. En faisant le pari de la subjectivité, les deux réalisatrices trouvent l’angle juste pour aborder des thèmes lourds (le deuil, la famille dysfonctionnelle) à travers le regard des enfants.
Du côté des films d’animation de la sélection, si « Nicola sans s » de Xavier Abitov et « Not Delivered » de Vincent René-Lortie et Cynthia Carazzato sont remarquables techniquement, leurs scénarios ne visent pas haut et les réduisent à des exercices sans consistance. On saluera dans un autre registre la photographie magnifique de « Kin » de Ben et Sébastien McKinnon, sorte de long clip esthétisant dont on peine à en saisir le sens et à y voir autre chose que de l’esbroufe visuelle, le film semblant vouloir marcher sur les plates bandes du rouleau compresseur « Trotteur » (Arnaud Brisebois) présenté l’année dernière dans la sélection québecoise. De l’esbroufe il y en a encore dans « Midnight Wind » de Nicolas Fidala, ersatz pénible des cinq premières minutes du « Melancholia » de Lars Von Trier : une succession de plans d’apocalypse en super slow-motion qui ne raconte rien. On salue encore une fois la performance technique en soupirant devant la paresse d’écriture des cinéastes livrant des objets plus froids les uns que les autres quand ceux ci ne tombent dans l’abstraction la plus totale (voir « Micta » de Marie-Pier Ottawa, une minute de gros plans non narratifs sur des matières diverses). So what ?
La sélection québecoise déçoit. Les réalisateurs sélectionnés semblent en règle générale attacher plus d’importance à créer des images fortes, quitte à se vautrer dans le nauséeux et le grotesque ou à se perdre dans des exercices formels froids et vains. Il y a un savoir-faire technique certain et des moyens conséquents mis à disposition de ces jeunes cinéastes. Ne manque que l’écriture, la rigueur et une réflexion sur le traitement des sujets abordés. Deux réalisatrices plus que prometteuses sortent du lot : Myriam Magassouba et Kristina Wagenbauer, dont les films forts, poétiques, témoignent d’une intelligence d’écriture et d’une exigence formelle remarquables. L’an prochain, le festival en sera à sa quinzième édition. Nous espérons y découvrir plus de propositions de ce genre.
Ce vendredi 6 septembre 2013, s’est ouvert le 14e Festival Off-Courts de Trouville-sur-Mer qui, en quelques sorte, prend le relais du 39e Festival de Deauville qui se termine le même week-end juste de l’autre côté du Pont des Jumelages. Si le Festival de Deauville brille de toutes les paillettes hollywoodiennes, celui d’Off-Courts se veut plus familial, plus proche de la discipline artisanale. Ceci étant, les deux festivals ont en commun de mettre en lumière et d’être partenaires de deux pays d’Amérique du Nord : les États-Unis pour Deauville et le Québec pour Trouville-sur-Mer.
Passons sur cette comparaison et laissons-nous emporter par l’air marin cinématographique qui souffle sur Trouville (ou plus exactement sur le Village Off) pendant huit jours car durant ce festival qui sonne désormais comme un rendez-vous incontournable de la rentrée, il se passe de nombreux évènements aussi bien pour les professionnels de l’audiovisuel que pour les simples amateurs : rencontres, concerts, labo kino, tables rondes, projections en tout genre, etc.
Les films en compétition à Off-Courts se subdivisent en trois sélections (française, québécoise et internationale) face auxquelles les différentes jurys (le Jury Officiel, le Jury du Syndicat de la Critique, le Jury Jeune, Spirafilm et le public) devront être attentifs, tolérants (ou pas) et équitables (ou pas).
À l’origine, la compétition d’Off-Courts répertoriait exclusivement des courts-métrages provenant de France et du Québec, mais désormais, les différents jurys et le public compteront aussi sur une sélection de films européens et francophones. Un bon point pour le festival car les films internationaux sont souvent de qualité.
Cette année, la compétition démarre ce samedi 7 septembre, en matinée, avec une sélection de films étrangers dont 15 courts-métrages viennent des quatre coins du monde : Suède, Pologne, Espagne, Belgique, Allemagne, Bulgarie, Italie, Pays-Bas, Liban, Luxembourg et Madagascar.
Point commun entre la plupart de ces films : le suspense. En effet, plus du tiers de ces courts-métrages prennent le spectateur à la gorge ou au ventre, mais ne les laisseront pas dormir tranquilles. Parmi ces films assez angoissants, on citera « 22 :22 » de Julien Becker (Luxembourg) où un employé, sur le point de quitter son bureau un peu tardivement, voit la scène se répéter à l’infini dans un bâtiment aux allures froides et futuristes.
Se repère aussi « Balance » de Mark Ram (Pays-Bas) durant lequel on tremble pendant une dizaine de minutes pour le survivant d’une partie d’escalade pendu seul au-dessus du vide. « Doors » de Michele de Angelis (Italie), filmé à la manière d’une caméra de surveillance, provoque également l’inquiétude pour cette femme malencontreusement enfermée entre la porte du vide-ordure et celle du couloir de son immeuble, une situation potentiellement drôle, mais qui tourne vite à la claustrophobie. Autre film qui prend littéralement aux tripes : « Hotel » José Luís Alemán (Espagne) qui prouve que les Ibériques sont définitivement très doués dans le film de genre, même si le réalisateur n’en est pas à ses débuts (il a déjà mis en scène deux longs-métrages d’épouvantes, « Le territoire des ombres 1 et 2 »). Ici, un type perdu et assoiffé dans le désert, découvre avec joie un étrange hôtel fait de carton, mais plein de victuailles attrayantes. « Watcher » de Daniel Jude (Allemagne) emprunte aussi à cette catégorie en touchant plus à la science-fiction et en traitant de l’invasion de drones sur Terre. Un peu longuet, un peu surfait, un peu moyen, le film n’est pas forcément inintéressant.
En poursuivant sur la veine fantastique, un film remarquable venu de Madagascar et réalisé en rotoscopie pose la question sur ce que serait notre monde sans couleurs : « Colors » de Cid. Pour rappel, la rotoscopie est une technique complexe qui permet de redessiner une action filmée en prise de vues réelles. L’effet, souvent bluffant, l’est encore plus lorsque le film est de l’ordre de la science-fiction. Ce petit bijou de Cid, réalisateur un peu geek et adepte de mangas et d’autres histoires à la limite du réel, nous fait étrangement penser à deux autres courts-métrages : « Fard » de David Alapont et Luís Briceño (France, 2010) et « Chromophobia » de Raoul Servais (Belgique, 1966). « Colors » n’est pas pour autant une pâle copie de ces deux films forts remarqués, mais bel et bien un nouveau questionnement sur la différence avec les codes d’une jeunesse moderne.
La compétition internationale d’Off-Courts comprend des films nettement moins fantastiques mais tout aussi angoissants par les thèmes qu’ils traitent et/ou la manière dont ils sont réalisés comme « Mitt Fora Liv » de Sébastian Lindblad (Suède), film court ultra noir et archi glauque sur la pédophilie. On évoquera également « A Big Drama for a Little Man » de Nico Capogna (Italie), l’histoire d’un gardien de nuit découvrant des immigrés dans son lieu de travail alors que lui-même est étranger. L’image du film est tremblante, légèrement floue, sombre et imparfaite. Elle s’accompagne d’une musique envoûtante qui, après 4 minutes, nous embarque dans cette aventure nocturne et rend le film plus moderne, à la limite parfois de l’expérimental, surtout lorsqu’on découvre les visages noirs cachés derrière les frigos, et différents des autres films sur le thème de l’immigration.
Pour clore cette sélection de films, on citera rapidement « 4:13 do Katowic » d’Andrezej Stopa (Pologne), un polar assez violent et pétulant sur un père de famille coincé entre la justice et son désir de vengeance. Le film n’est pas mauvais, mais il tombe vite dans l’oubli.
"Ingrid fait son cinéma"
Pour contraster avec ces films fantastiques ou d’action qui tiennent en haleine, il est toutefois possible de faire à Trouville une petite pause humour avec « Ingrid fait son cinéma » de Véronique Jadin (Belgique), énième film qui dénonce avec dérision les commissions de sélection cinématographique qui ne donnent de l’argent qu’aux réalisateurs confirmés ou qu’aux histoires psycho-dramatiques. Plaisant et finalement assez touchant, le film a malheureusement un côté déjà vu et revu malgré la chouette interprétation de la comédienne Ingrid Heiderscheidt.
"Tooth of Hope"
Relevons trois autres petites pauses issues d’un registre différent. En premier lieu, « Tooth of Hope » de Nizar Sfair (Liban) dans lequel un père de famille n’ose pas avouer à sa femme qu’il a perdu son travail et demeure sans emploi malgré ses efforts pour en retrouver un nouveau. On ne dévoilera pas la chute plutôt poétique de ce gentillet court-métrage, mais on vous en livrera un petit indice en précisant que le titre y est pour beaucoup.
Deuxième film de cette compétition ne faisant pas de mal et pouvant éventuellement faire sourire malgré un côté amateur (on le pardonne au réalisateur puisque son film est issu d’un kino) : « War Room » de Thomas Stuyck (Belgique) qui évoque la déclaration d’une guerre déclarée entre la Belgique et l’Iran suite à la provocation d’un ministre belge (il aurait uriné sur l’ambassade iranienne).
Le dernier film sur lequel on se penchera dans cette compétition européenne et francophone est un peu notre coup de cœur malgré son côté mélodramatique poussé à l’extrême : « Electric Indigo » de Jean-Julien Collette (Belgique) dans lequel une jeune fille retrace sa vie depuis sa naissance jusqu’à l’évènement qui l’a fait changer, celui de couper le cordon de manière assez violente pour vivre sa propre vie. Elle grandit au milieu de deux hommes mariés mais assurément hétérosexuels jusqu’au jour où sa mère débarque pour la récupérer. Le pitch aurait parfaitement pu être celui d’une sitcom tragico-comique, mais Jean-Julien Collette a préféré en faire un film certes un peu trop « bobo », mais plutôt réussi. Le réalisateur n’en est pas à son premier film et on le remarque d’ailleurs par la notable direction d’acteurs (bien que l’utilisation de l’anglais au milieu du français n’apporte pas grand-chose), la maîtrise du choix de chaque plan, l’image fort esthétisante, la justesse entre le touchant et le grave. À la limite parfois de l’invraisemblable, cette histoire unique mérite l’attachement.
Dans l’ensemble, cette sélection d’Off-Courts propose un panel de films assez distincts les uns des autres même si certains genres priment plus que d’autres et pour la plupart, sont assez bien maîtrisés. De nouveaux réalisateurs côtoient des auteurs confirmés, ce qui s’avère positif pour ce début de festival.