Et voilà, après la nationale et le labo, la compétition internationale de Clermont est en ligne. 79 films issus de 52 pays seront projetés courant février dans la métropole du court, de Fernand Raynaud, de Blaise Pascal et du canard.
Films sélectionnés
Babor Casanova de Karim Sayad, Algérie, Suisse
In the Distance de Florian Grolig, Allemagne
Ihr Sohn de Katharina Woll, Allemagne
Sexy Laundry deIzabela Plucinska, Allemagne, Canada, Pologne
La Indiferencia del viento de Ruben Guzman, Argentine
Entre la tierra de Sofia Quirós, Argentine, Chili, Costa Rica
Homebodies de Yianni Warnock, Australie
Ernie Biscuit de Adam Elliot, Australie
Ri Guang Zhi Xia de Yang Qiu Australie, Chine
Die Badewanne de Tim Ellrich, Autriche, Allemagne
The Light side de Khayyam Abdoullayev, Elmaddin Aliyev, Azerbaïdjan
Dernière Porte Au Sud de Sacha Feiner, Belgique, France
Amazonas de Carlos Piñeiro, Bolivie
Auto Copa Park de João Atala, Brésil
Ainda sangro por dentro de Carlos Segundo, Brésil
Son In the Barbershop de Nathan Douglas, Canada
Le Nom que tu portes de Hervé Demers, Canada, Québec
Las Cosas simples de Alvaro Anguita, Chili
Huaso Chileno de Diego Acosta, Chili
Forastero de Iván D. Gaona, Colombie
Keep Going de Geon Kim, Corée du Sud
Boiler de Young-A Lee, Corée du Sud
Bow Wow Bow de Ayako Fujitani, Corée du Sud, Etats-Unis
Piknik de Jure Pavlovic, Croatie
Polsky de Rubén Rojas Cuauhtemoc, Cuba
Riders de Jesper Vidkjær Rasmussen, Danemark
Har .. Gaf .. Sayfan de Sherif El Bendary Egypte, Allemagne
2037 de Enric Pardo, Espagne
El Adiós de Clara Roquet Espagne, Etats-Unis
Lost Village de George Todria, Espagne, Géorgie
Isand de Riho Unt, Estonie
Touch de A. Stephen Lee, États-Unis
Midland de Bernsen Oliver, États-Unis
Blast Beat de Esteban Arango, États-Unis
Fata Morgana de Amelie Wen, États-Unis, Chine
Talvisydän de Jussi Hiltunen, Finlande
Den Tha Gerasoume Pote de Spiros Charalambous, Grèce
Garasz Inventory de Alyx Ayn Arumpac, Hongrie, Philippines
The Manliest Man de Anuj Gulati, Inde
Şeva Dirêj de Kamiran Betasi, Irak, Émirats Arabes Unis
Kasco de Mojtaba Ghasemi, Iran
Change in the Weather de Muiris Crowley, Irlande
Cham de Yotam Guendelman, Israël
Venerdi de Tonino Zangardi, Italie
The Lasting Persimmon de Kei Chikaura, Japon
Seide de Elnura Osmonalieva, Kirghizstan
No One Gets Out Of Here de Alive Ramzi Bashour, Liban
Anay ny lalana de Nantenaina Fifaliana, Madagascar
Amal de Aïda Senna, Maroc
Mil capas de Tess Anastasia Fernández Massieu, Mexique
Raisa de Pavel Cuzuioc Moldavie, Autriche
Takk for turen de Henrik Martin K. Dahlsbakken, Norvège
Madam Black de Ivan Barge, Nouvelle-Zélande
Accidents, Blunders and Calamities de James Cunningham, Nouvelle-Zélande
Red-end and the Factory Plant de Bethany De Forest, Robin Noorda, Pays-Bas, Belgique
9 Days – From My Window in Aleppo de Issa Touma, Floor van der Meulen, Thomas Vroege, Pays-Bas, Syrie
El Hueco de Daniel Martin Rodriguez, Germán Tejada, Pérou
Dokument de Marcin Podolec, Pologne
Cokolwiek się zdarzy, kocham cię de Justyna Mytnik, Pologne
O Guardador de Rodrigo Areias, Portugal
A Gloria de Fazer Cinema em Portugal de Manuel Mozos, Portugal
Alb de Paul Cioran, Roumanie
Edmond de Nina Gantz, Royaume-Uni
dark_net de Tom Marshall, Royaume-Uni
Fuel to Fire de Sam McMullen, Royaume-Uni
Manoman de Simon Cartwright, Royaume-Uni
Odnajdi v SSSR de Mikhail Zheleznikov, Russie
Zakat de Andrei Annenski, Russie, Allemagne, Roumanie
Vozvrashenie Erkina de Maria Guskova, Russie, Kazakhstan
Freeze de Nelicia Low, Singapour, Taiwan
Stoerre Vaerie (Norra Storfjället) de Amanda Kernell, Suède
Subotika – Land of Wonders de Peter Volkart, Suisse
Courber l’Echine de Kadija Ben-Fradj, Suisse
Just Another Day In Egypt de Corina Schwingruber Ilic, Nikola Ilic, Suisse, Serbie
Nia’s Door de Kek Huat Lau, Taiwan
Ferris wheel de Phuttiphong Aroonpheng, Thailande
Uzak mı… de Leyla Toprak, Turquie
Syn de Philip Sotnychenko, Ukraine
Panorama de Virginia Urreiztieta, Vénézuela
Présent au 30ème festival du film court de Brest pour une séance spéciale où il était invité à présenter certains de ses courts-métrages et à revenir sur sa carrière, le britannique Simon Ellis se prête volontiers au jeu des questions-réponses, en agrémentant le tout d’anecdotes de tournage, et répond aux questions de Format Court. Nous l’avions découvert en 2008 avec le multiprimé « Soft », un film qui concentre et met en scène avec brio tension et violence dans une banlieue de classe moyenne. Le film était présenté à Brest dans une carte blanche aux côtés d’œuvres plus anciennes comme « What About the Bodies » (2002) et d’autres plus expérimentales comme « A Storm and Some Snow » (2006), mais aussi son dernier court « Stew & Punch » (2013). Avec une carrière qui s’étend sur presque vingt ans et de nombreux films à son actif, Simon Ellis est l’une des figures importantes du court-métrage britannique.
Tu as commencé à réaliser des courts-métrages il y a presque vingt ans. As-tu vu les choses changer de façon importante depuis tes débuts, notamment au sein de l’industrie cinématographique britannique, dans la façon de réaliser et produire des courts ?
Je crois que j’ai vu pas mal de changements à vrai dire. Mon premier film a dix-neuf ans et désormais, le processus n’est plus le même, en grande partie à cause des technologies numériques qui ont tout changé. Maintenant, tout le monde peut faire un film et les courts- métrages sont clairement en train de se rallonger. Ce qui avant était un film de dix minutes est désormais un film de vingt minutes. À vrai dire, je pense que ce n’est pas une bonne chose.
Avant, on attendait d’avoir des financements, et si on ne les obtenait pas, on ne faisait pas de films. Aujourd’hui, même sans financements, on peut au moins faire un film facile à tourner avec des caméras pas chères. Il y a donc beaucoup plus de films et il faut maintenant creuser plus profondément pour essayer de trouver les bons. Ça rend les choses plus difficiles pour les festivals, car ils doivent faire leur travail de sélection parmi beaucoup plus de films qu’avant.
En ce qui concerne l’industrie du film britannique, ce qui a réellement changé, c’est l’introduction des frais d’inscription, basée sur le modèle américain. Il y a des festivals qui font ça uniquement pour réduire le nombre d’inscriptions. Si tu dois payer, tu y réfléchis à deux fois avant de proposer ton film amateur, ce qui est, pour être honnête, une situation très bizarre parce que les réalisateurs n’ont généralement pas d’argent.
Comment tes courts-métrages sont-ils produits ? Est-ce que cela a changé depuis tes débuts ?
Les cinq premières années de ma carrière, j’étais seul, je n’avais pas de producteur, je suppose que cela signifie que j’étais mon propre producteur. J’ai commencé à travailler avec un producteur pendant les cinq ou six années suivantes, puis j’ai de nouveau travaillé seul. Lorsqu’il s’agit de gérer un budget, des assurances, toutes ces choses dont vous n’avez pas à vous préoccuper lorsque vous travaillez seul, j’ai besoin d’un producteur. Du coup, il y a trois producteurs avec lesquels je travaille en fonction du projet et de leurs disponibilités.
Par exemple, je suis actuellement en développement d’un long métrage avec un producteur, Samm Haillay (Third Films), que je connais depuis quinze ans, qui a produit des courts et des long métrages supers et on avait très envie de travailler ensemble, c’est la bonne personne pour ce projet. Je ne vis pas à Londres mais les publicités que j’y ai réalisées m’ont permis de faire beaucoup de rencontres. L’équipe que j’ai trouvé dans la publicité, le directeur de la photographie, le chef électricien, le producteur, a ensuite travaillé sur mes courts-métrages, et je travaille avec eux dès que c’est possible. Pour le dire simplement, s’il y a du budget, s’il s’agit d’une commande, il y aura un producteur. Si c’est un projet sur lequel je travaille seul, alors je l’auto-produis.
Après que votre « Soft » ait récolté plus de 30 récompenses en festival, est-ce que cela a rendu les choses plus faciles pour toi ? As-tu eu plus de propositions ?
Oui, j’ai eu plus de propositions, surtout pour la télévision. Certaines de ces offres étaient des longs-métrages avec des scénarios écrits par d’autres personnes, et on me demandait juste de les réaliser, mais j’ai tout refusé. Je traversais une période difficile à l’époque et je me suis un peu senti submergé par toute cette attention. « Soft » étant un film sur la jeunesse et l’émasculation, on m’a proposé beaucoup de travail qui allait dans ce sens, comme par exemple des projets autour des gangs. À l’époque, je voulais aller dans une autre direction. Je me suis un peu enfermé et je n’ai fait aucune de ces choses. Lorsque le film a gagné le prix du jury au festival Sundance en 2008, c’était un événement important. J’ai reçu beaucoup d’e-mails de personnes qui étaient là-bas et qui souhaitaient qu’on se rencontre. Mais je n’y étais pas, je n’y suis pas allé. S’il y avait une chose sur laquelle je pouvais revenir en arrière, une chose que je pouvais changer dans ma carrière, je serais allé à Sundance !
Tes courts-métrages abordent avec réalisme des thèmes comme la violence et la masculinité. Ces thèmes se retrouvent dans d’autres courts-métrages britanniques présentés cette année en compétition lors du festival de Brest comme « Coach » de Ben Adler ou « The Patriot » d’Eva Riley. Penses-tu que ce sont des thèmes particulièrement liés à la société britannique, une réaction à des problèmes qui lui sont propres ?
Je ne sais pas. Le thème de l’émasculation abordé dans « Soft » est pour moi incroyablement universel, et je ne le considère pas comme quelque chose de britannique. J’essaye justement de rester en dehors des clichés du court métrage britannique. Mais chaque pays a ses clichés. Par exemple, je vais peut-être voir un film français que je vais beaucoup aimer alors que des Français ne l’aimeraient pas du tout. Il y a une tradition au Royaume-Uni, un genre qu’on appelle « poverty porn », qui se passe dans des logements sociaux, avec beaucoup de violence, de l’alcoolisme, des avortements, des viols, du sinistre encore et encore. Ces films s’exportent plutôt bien en fait. Mais j’ai l’impression que chez nous, on commence à se lasser de ce genre de films. Quand j’ai fait « Soft », j’ai délibérément situé l’histoire dans un quartier résidentiel de classe moyenne et non dans des logements sociaux. J’essaye d’avoir une vision plus large, plus universelle, et pas seulement un sentiment de « britannicité ». Je ne sais même pas ce que ça signifie, à part que ces films se passent dans des logements sociaux ou des HLM.
Dans « Stew & Punch », ton dernier court-métrage de fiction dans lequel une pendaison de crémaillère arrosée dégénère lorsqu’un couple participe à un bras de fer, la performance des acteurs semble très naturelle, est-ce que le scénario était écrit de A à Z ou y a-t-il eu une part d’improvisation ?
C’est un mélange. C’est drôle car cette question revient souvent avec « Stew & Punch ». J’essaye tout le temps de revenir en arrière, de regarder le scénario et d’en tirer le pourcentage d’écriture et le pourcentage d’improvisation. Le film a été écrit de A à Z, mais l’idée était que les comédiens puissent dire les choses à leur façon. Mais ils ne pouvaient pas digresser car cela aurait eu un effet sur la durée alors qu’il s’agit de trois chapitres filmés en plans-séquences et qu’il n’y avait pas de montage. Si un passage est censé prendre une page et durer une minute et qu’au final, il en fait deux, cela peut poser problème à cause du style de film dont il s’agit. L’objectif était toujours d’arriver à un certain point, et le temps que nous avions pour y arriver était calculé, peu importe de quelle façon. Le rythme et tous les événements étaient prévus, mais pour les dialogues, les comédiens étaient libres de dire les choses à leur façon.
Le film est tourné en trois actes et trois plans-séquences, pourquoi as-tu choisi cette forme et comment as-tu procédé au moment du tournage ?
L’idée est d’explorer des choses nouvelles à chaque nouveau film. Avec « Stew & Punch », je voulais travailler sur quelque chose proche du théâtre, et je l’ai écrit essentiellement comme une pièce en trois actes. Le concept était trois actes, trois pièces, trois plans. Cela ressemble à un artifice, mais l’idée était de regarder, en temps réel, cet homme se dégrader dans un processus d’auto-destruction. Lorsque vous travaillez en temps réel, en fonction du sujet, il y a instantanément une sorte de tension étrange qui se crée, liée au fait de ne pas savoir ce qui va se passer ensuite. Pour moi, tout ça était nouveau et j’ai trouvé que, parce que tout le monde a tant de choses à se rappeler, et que tant de choses doivent être chorégraphiées, la concentration de chacun est tout le temps à son maximum. On ne peut pas se permettre de tout rater. Si vous arrivez à la fin d’un plan de quatre minutes et que quelqu’un fait quelque chose qui ne va pas, vous devez tout recommencer, et le temps de chacun est gâché. Du coup, tout le monde est ensemble. C’est toujours le cas, mais encore bien plus sur un film tourné en temps réel. Le principal challenge était d’être sûr de pouvoir tourner ces scènes sans avoir à recommencer encore et encore. Le second challenge était de travailler avec une distribution de huit personnes, dans une maison sans meubles aux murs complètement vides où le son rebondissait de tous les côtés et où il était très difficile d’enregistrer un son de qualité dans ces conditions. C’est quelque chose sur lequel je travaille davantage avec le long-métrage que je suis en train de développer.
Est-ce que ce sera ton premier long-métrage ?
J’ai réalisé un long-métrage mais que je n’ai pas écrit, donc en terme de paternité et d’écriture, je n’en ai pas encore fait. Il s’agissait d’une comédie romantique qui est un genre qui ne m’intéresse pas vraiment. J’essayais du coup d’en faire ma propre version. C’était une expérience difficile et ce n’est que maintenant, neuf ans plus tard, que je travaille sur un nouveau projet de long. À vrai dire, quand tu fais des courts depuis très longtemps, que tu bénéficies d’un certain succès et que tu refuses des propositions de longs, tu espères que quand tu en feras un, tu choisiras le bon et ce sera bien. Cela était très naïf de ma part. Au final, les producteurs ont besoin de faire de l’argent et d’amortir leur investissement. C’est très différent du court métrage car avec les courts, les producteurs ne s’attendent pas à récupérer leur argent. On peut donc prendre plus de risques, être plus créatif je suppose. Il y a plusieurs de mes courts que j’ai d’abord écrit comme des longs mais j’ai finalement trouvé que ça fonctionnait mieux comme des courts-métrages, c’est le cas de « Soft » par exemple. Je co-écris, parce que si je devais écrire seul je pense que je n’arriverais nulle part. Je jetterais constamment les choses à la poubelle, je ne les terminerais jamais. C’est bon de pouvoir trouver un équilibre avec une autre personne. On se critique, et on se complimente aussi. Mais ce qui est important pour moi c’est de garder le rythme, car quand je perds un peu d’aplomb, les co-auteurs m’aident à en retrouver, et vice-versa.
Est-ce qu’il y a un réalisateur ou un film en particulier qui est important pour toi ?
J’ai récemment fait une conférence au European Film College au Danemark, et on m’a demandé de projeter un film de mon choix pour les étudiants. J’ai choisi « Nuts in May » de Mike Leigh (1975), qui a été réalisé, à l’origine, pour la télévision. C’est un film très étrange et excentrique et après la projection, des étudiants m’ont demandé pourquoi j’avais choisi ce film. Il est différent des miens et je pense qu’ils s’attendaient à un film sur la masculinité ou quelque chose dans le genre, mais je pense que c’est un chef-d’œuvre. Le principe est très simple, c’est une étude de personnages et c’est une des similarités qu’on peut, j’espère, trouver avec mes films. Il y a très peu de personnages, mais on passe beaucoup de temps avec eux. Au lieu d’essayer de raconter trop d’histoires à la fois, on apprécie les moments passés en compagnie de ces personnages excentriques, très anglais, uniques. C’est une histoire simple mais très bien racontée. Je l’ai vu plein de fois et je ne m’en lasse jamais, c’est un film important pour moi. Mais j’aime « Star Wars » aussi !
Cinématographies locales et étrangères, films sélectionnés et/ou primés en festival, courts d’étudiants, moyens-métrages, regards plus confidentiels et cinéma de patrimoine composent nos projections mensuelles au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Notre prochaine séance (en entrée libre !), organisée le samedi 19 décembre à 20h30, s’inscrit dans le cadre du Jour le plus court dont nous sommes partenaires pour la première fois. Venez y découvrir 11 films français et étrangers (animations, fictions, fantastiques, documentaires, portraits, burlesques) réalisés entre 1901 et 2011 par des cinéastes incontournables (Georges Méliès, Jacques Rozier, Alain Cavalier, Yvon Marciano) et des talents à suivre (Robert-Jan Lacombe, Jan Czarlewski, Sol Friedman, Luis Briceno, Yorgos Zois, Steve Sullivan).
Programmation
L’Homme à la tête de caoutchouc de Georges Méliès (Fiction, 2’30’’, 1901, France, Lobster Films)
Dans son laboratoire, un apothicaire place sa tête sur une table et la fait grossir au moyen d’un soufflet. A son tour, son assistant actionne le soufflet, mais il le fait avec trop d’ardeur et la tête explose.
Kwa Heri Mandima (Au revoir Mandima) de Robert-Jan Lacombe (Documentaire, 10′, 2010, Suisse, École Cantonale d’Art de Lausanne, Pardino d’oro au Festival de Locarno 2010). En présence du réalisateur
A travers la redécouverte d’images d’archives longtemps conservées à Bordeaux chez mes grands parents, je raconte mon enfance passée à Mandima, un petit village du nord-est Zaïre où je suis né. En partant d’une photo panoramique du grand départ, j’observe et je repense à ces dix premières années de ce petit garçon qui doit, un beau jour, partir ailleurs pour la ville, pour le lycée. Derrière lui, il laisse ses amis et toute une culture. La vie, sa mentalité, ses codes seront à réapprendre.
Casus Belli de Yorgos Zois (Expérimental, 11’11 », 2010, Grèce, Pan Entertainment SA, sélectionné à la Mostra de Venise 2010)
Toutes sortes de gens, de nationalité, de classe, de sexe et d’âge différents, font la queue. Dee files d’attente en files d’attente se forme une chaîne humaine. Mais au bout de la queue …c’est le compte à rebours.
Rentrée des classes de Jacques Rozier (Fiction, 24’, France, 1955, Dovidis)
Un petit village de Provence. C’est le jour de la rentrée des classes et l’écolier René Boglio n’a pas fait ses devoirs de vacances. Il fait l’école buissonnière. Dansc l’après-midi, il revient à l’école et introduit dans la classe, une petite couleuvre. Beau chahut des enfants, dans les rues du village, à la poursuite de René qui rend sa liberté à la couleuvre.
Emilie Muller de Yvon Marciano (Fiction, 21’, 1993, France, Gravida Films, Mention Spéciale du Jury et Prix de la Presse au Festival de Clermont-Ferrand 1994)
Une jeune comédienne fait un bout d’essai. Le réalisateur l’interroge sur le contenu de son sac à mains.
L’Illusionniste de Alain Cavalier (Documentaire, 13’, 1990, France, Isabel Pons)
Antoinette est illusionniste. Elle a 86 ans et exerce ce métier avec passion. Dans un tête à tête avec la caméra, Antoinette nous fait d’abord découvrir quelques tours de magie puis évoque des moments forts de sa vie.
Le Cochon danseur (Fiction, burlesque, 2’, 1907, Pathé)
Ce court métrage relate les prouesses d’un cochon qu’une jolie fille fait danser.
L’Ambassadeur et moi de Jan Czarlewski (Documentaire, 11’, 2011, Suisse, École Cantonale d’Art de Lausanne, Pardino d’oro au Festival de Locarno 2011). En présence du réalisateur
Son excellence, l’ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire de la République de Pologne auprès du Royaume de Belgique a consacré toute sa vie à son pays. En contrepartie, il n’a jamais vraiment eu de temps pour moi, son fils. A Bruxelles, je viens passer quelques jours avec lui afin d’essayer de rattraper le temps perdu.
Day 40 de Sol Friedman (Animation, 5’45 », 2014, Canada, auto-production, sélectionné au festival de Toronto 2014 et au festival d’Annecy 2015)
Dans ce récit animé de l’Arche de Noé, des activités épouvantables ont lieu sur le grand bateau, pendant que les animaux découvrent la face sombre de leur nature.
En pratique
– Samedi 19 décembre 2015, à 20h30, accueil : 20h. Durée de la séance : 107′
– Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris
– Accès : RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée), Bus 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon). Métro le plus proche : Ligne 7, arrêt Censier Daubenton (mais apprêtez-vous à marcher un peu…)
– Entrée : gratuite !
– Réservations vivement recommandées : soireesformatcourt@gmail.com
Après la compétition nationale et avant l’internationale, voici la liste des 30 films retenus en sélection labo au prochain festival de Clermont-Ferrand (5-13 février 2016).
Films en compétition
Synthesis de Christoph Girardet, Allemagne
In Between Identities de Aleksandar Radan, Allemagne
Symbolic Threats de Lutz Henke, Mischa Leinkauf, Matthias Wermke, Allemagne
Freedom & Independence de Bjørn Melhus, Allemagne
A Smile in the Back of My Head de John Stewart, Australie
Eden’s Edge (Three Shorts on the Californian Desert) de Leo Calice, Gerhard Treml, Autriche
The Exquisite Corpus de Peter Tscherkassky, Autriche
Deer Flower de Kangmin Kim, États-Unis
The Pride of Strathmoor de Einar Baldvin, États-Unis
Greener Grass de Paul Briganti, États-Unis
Ghost Cell de Antoine Delacharlery, France
The Reflection of Power de Mihai Grecu, France
Le park de Randa Maroufi, France
Ganjouriho de Mathias Minne, France
Hotaru de William Laboury, France
Kamakshi de Satindar Singh Bedi, Inde
A Coat Made Dark de Jack O’Shea, Irlande
Gelem de Alon Sahar, Israël
Ardeidae de Corrado Chiatti, Chiara Faggionato, Daniele Tucci, Italie
Sugar Lump de Ryo Okawara, Japon
Behemoth – or the Game of God de Lemohang Jeremiah Mosese, Lesotho
The Couple de David White, Nouvelle-Zélande
Voor Film de Douwe Dijkstra, Pays-Bas
Junilyn Has de Carlo Francisco Manatad, Philippines
H Positive de Glenn Paton, Royaume-Uni
Camrex de Mark Chapman, Royaume-Uni
The Atom Station de Nick Jordan, Royaume-Uni
Teeth de Tom Brown, Daniel Gray, Royaume-Uni
La fin d’Homère de Zahra Vargas, Suisse
The Living Need Light The Dead Need Music de The Propeller Group, Vietnam
Les samedi 19 et dimanche 20 décembre prochain, aura lieu à Paris un nouvel événement, « Le Cinéma, c’est jamais trop court » organisé en collaboration avec le Jour le plus court. Pendant deux jours, le Carreau du Temple accueillera cette fête du court métrage à Paris avec des projections, rencontres, débats, ateliers participatifs, tournages en direct, programmes et activités jeune public, le tout gratuit et accessible à tous à partir de 9h du matin.
L’événement, organisé par l’association Faites des Courts Fête des Films, souhaite faire connaître le court-métrage et l’ouvrir au plus grand nombre. Bonne info : Format Court participera à cet événement avec un petit espace dédié à proximité du bar et couvrira la manifestation en vidéo tout au long du weekend. Venez nous rencontrer, manger un Carambar et célébrer le court !
Infos
Carreau du Temple : 4, rue Eugène Spuller, 75003 Paris
Comme le réalisateur, producteur et fondateur du festival Olivier Bourbeillon l’a déclaré lors de la présentation de la séance spéciale « Tout a commencé en Finistère » lors du dernier festival du film court de Brest qui s’est terminé le 15 novembre dernier : « Ce n’est pas parce qu’on vient de Bretagne qu’on est des ploucs !». En effet, alors qu’une grande partie des courts métrages français que nous voyons aujourd’hui sont produits à Paris, la Bretagne, avec une quarantaine de sociétés de production cinématographique, est indéniablement une terre de cinéma.
Pour son 30ème anniversaire, le festival du film court de Brest fait la part belle à un cinéma breton de qualité à travers plusieurs programmes hors compétition : deux programmes « Made in Breizh » constitués de productions récentes qui mettent en avant de jeunes talents et « Tout a commencé en Finistère », une sélection de courts métrages réalisés ou produits dans le département du Finistère lors de ces quinze dernières années.
Parmi ces films finistériens, on découvre ou redécouvre avec plaisir, le film d’Olivier Bourbeillon « Une femme dans la rue », produit par Paris-Brest Productions. Leena, jeune peintre finlandaise dans la Bretagne du XIXème siècle, est lassée de ne peindre que falaises, vagues et rochers. Elle souhaite peindre des corps, des visages, de l’humain. Sur la plage, elle rencontre un jeune homme qui finit par accepter de lui servir de modèle. Dans ce film, la beauté des paysages, sauvages et indomptables, est à l’image de ce bel inconnu, farouche, fougueux, mais qui finit par se laisser dompter par la jeune artiste. La côte bretonne, son village pentu en pierre et ses habitants un peu méfiants finissent par charmer la jeune peintre mais aussi les spectateurs. Le film nous transporte d’un vaste espace naturel à la rue jusqu’à la chambre, nous fait pénétrer dans une intimité entre deux personnages où la passion artistique et la tension sexuelle sont palpables.
Produit la même année, en 2000, également par Paris-Brest Productions, on rit puis s’attendrit devant « Les filles du douze » de Pascale Breton. Produit en Finistère mais tourné à Lorient, le film commence comme une comédie un peu légère autour d’un groupe de femmes seules, une bande de copines qui se serrent les coudes, de l’allumeuse invétérée à la jeune fille un peu timide. Le film prend peu à peu le temps de poser ces personnages féminins, a priori un peu vulgaires et bêcheuses, pour nous faire entrer dans leur intimité, dans leur passé, et comprendre leurs blessures. On se prend soudain à ressentir de l’empathie pour ces personnages, et « Les filles du douze », au départ un peu futile, à l’image de ces personnages, parvient à capter toute notre attention, à nous faire rire et à nous émouvoir au travers d’un récit qui se déploie progressivement et subtilement.
Dans « Le Baiser », réalisé en 2005 par Stefan Le Lay et produit par la société de ce dernier, Les Films du Varech, une scène de baiser prend une toute autre tournure lorsque la pellicule se déchire lors de la projection et que le monteur la recolle à l’envers. La réaction des personnages se renverse alors en même temps que la situation. Mélange de fantastique et de comédie burlesque, « Le Baiser » joue avec les codes du cinéma et plus particulièrement avec ceux du montage, processus capable à lui seul de modifier toute la narration du film. Ce court métrage de quelques minutes seulement, écrit en une soirée et tourné en deux jours avec un petit budget, avait remporté le Grand Prix au festival du film court de Brest en 2005.
Dans ce programme 100% finistérien, on retrouve également le décalé « Comptes pour enfants » de Gael Naizet, le troublant « Erémia Erèmia » d’Olivier Broudeur et Anthony Quéré, et les bouleversants « Nous » d’Olivier Hems et « Clôture » de Mickaël Ragot. Ce dernier met à l’honneur la langue bretonne, que l’on entend rarement au cinéma, à travers le personnage touchant de Joséphine, éleveuse de vaches. Dans un enchaînement ritualisé, les bêtes sont tour à tour menées à l’abattoir, jusqu’à ce que Joséphine elle-même, après avoir laissé partir avec amertume sa dernière vache, fasse ses adieux à la terre. Film de terroir, mais aussi film sur l’attachement aux êtres, « Clôture » est avant tout l’histoire d’une rencontre entre son réalisateur et son personnage principal. Au moment de présenter la séance, alors que Joséphine est présente dans la salle, on nous dit que du haut de ses 90 ans, cette dernière s’occupe toujours de ses vaches. On se demande alors quelle est la part de fiction et la part de documentaire dans un film qui brouille un peu les pistes en mettant en scène une femme qui joue son propre rôle avec beaucoup d’amour et de simplicité.
Place maintenant aux jeunes réalisateurs et aux productions d’aujourd’hui. Dans le programme « Made in Breizh », quelques films se démarquent. « Les Guerriers », film d’école de Maxime Caperan et Thomas Finkielkraut, dresse le portrait de Thomas, un adolescent de seize ans à fleur de peau. La caméra resserrée sur ce personnage nerveux le suit lors d’une journée où tout va basculer. Entre petits deals avec les copains, tensions familiales et étreintes avortées, les plans serrés sur cette figure d’adolescent en ébullition nous font ressentir l’enfermement et la frustration de près. Seuls les moments de virées, de déplacements mis en musique, en scooter ou en voiture, semblent apaiser un moment le climat de tension autour de Thomas, jusqu’au dénouement libérateur, le départ, le vrai, une échappée vers de nouvelles aventures, vers une liberté qui lui permettra peut-être de se trouver.
Dans un tout autre registre « Miaou Miaou Fourrure » d’Erwan Le Duc, dont nous avions déjà évoqué sur Format Court le précédent film « Jamais Jamais », est, à l’image de son titre, farfelu, une comédie dramatique délurée produite par 10:15 Productions. On y retrouve Maud Wyler, que l’on avait déjà pu voir devant la caméra d’Erwan Le Duc, ainsi qu’Alexandre Steiger, qui forment un duo fraternel remarquable. Dans l’immense demeure familiale, Alice réunit ses deux enfants, « qui s’entendent comme chien et chat », et décide de disparaître, de façon radicale, en se suicidant, afin de mieux les réunifier. Entre folie et sagesse il n’y a qu’un pas et le personnage d’Alice, mère sacrificielle, en est un bon exemple. Entre un fils couvé qui ne semble pas avoir résolu son complexe d’Œdipe, et une fille qui a préféré déserter pour se réfugier dans une vie plus « normale », selon les mots de sa mère, tout dans ce film est « borderline », et ne tient qu’à un fil. Lorsque intervient la mort de ce pilier familial, le frère et la sœur décident de se barricader dans la maison et de sauver ce qu’il leur reste de vie de famille, nourrissant leurs souvenirs et leur révolte enfantine. Dialogues et situations cocasses s’enchaînent et Erwan Le Duc parvient à détourner le drame pour en faire un récit comique et absurde, ou les personnages, touchants dans leur détresse, construisent leur forteresse pour mieux retrouver leur complicité.
Ensemble, ces films, et d’autres qui n’ont pu être évoqués ici, mettent en avant une production locale foisonnante, où existent également des initiatives de soutien à la création comme le concours de scénario Estran, organisé pour la sixième année par l’association Côte Ouest, ou encore le dispositif d’accompagnement aux projets et à l’écriture de Groupe Ouest. Alors qu’il y a 30 ans, à l’initiative de quelques réalisateurs et producteurs locaux, naissait un festival qui nous permet d’ouvrir un œil curieux sur des productions venues de toute l’Europe, il suffit parfois de regarder juste autour de soi, dans notre ville, dans notre région, pour trouver quelques pépites.
Découvrez la liste des 57 titres, choisis parmi 1714 films, qui seront en compétition nationale au prochain festival de Clermont-Ferrand, ayant lieu du 5 au 13 février 2016. Pour info, cette sélection comprend 37 films de fiction, 14 films d’animation et 6 documentaires, expérimentaux pour la plupart.
Films en compétition
1992 de Anthony Doncque
Les amours vertes de Marine Atlan
Au bruit des clochettes de Chabname Zariab
Au loin les dinosaures de Arthur Cahn
Blanquette de Charlie Belin
Brume, cailloux et métaphysique de Lisa Matuszak
Café froid de François Leroy, Stéphanie Lansaque
Chalon de Jean-Luc Dang
D’ombres & d’ailes… de Eleonora Marinoni, Elice Meng Dans les eaux profondes de Sarah Van Den Boom
La danse des mots de Jean-Marc Rohart
Des millions de larmes de Natalie Beder
Des racines de Jeanne Traon-Loiseleux
Le déserteur de Jeanik Barot
Du plomb dans l’aile de Uriel Jaouen Zrehen
E.T.E.R.N.I.T. de Giovanni Aloi
Ennemis intérieurs de Selim Azzazi
Fais le mort de William Laboury
La fin du dragon de Marina Diaby
Free Bullet de Caroline Detournay, Paulina Pisarek
Fuck l’amour de François Zabaleta
Le gouffre de Vincent Le Port
L’île jaune de Paul Guilhaume, Léa Mysius
Isabella Morra de Isabel Pagliai
Jason Krist de Matthieu Vigneau
Jay parmi les hommes de Zeno Graton
Je ne suis pas un cygne de Armand Lameloise
Journal afghan de Cédric Dupire
Jukai de Gabrielle Lissot
Livreur de Vladilen Vierny
Maître-Chien de Jean-Alain Laban
Maman(s) de Maïmouna Doucouré
L’ours noir de Xavier Seron, Méryl Rossi Fortunat
Peripheria de David Coquard-Dassault
Première séance de Jonathan Borgel
Le printemps de Clelia Schaeffer
Punk à chien de Rémi Mazet
Reisende auf einem Bein de Alexandru-Petru Badelita Le Repas dominical de Céline Devaux
Réplique de Antoine Giorgini
Réveiller les morts de Morgan Simon
Rhapsody de Constance Meyer
Les rosiers grimpants de Lucie Prost, Julien Marsa
Sabine de Sylvain Robineau
Samedi de Hannibal Mahé
Samsung Galaxy de Romain Champalaune
Tombés du nid de Loïc Espuche
Tout, tout a continué de Emmanuel Parraud
Tranche de campagne de Hannah Letaïf
Uncanny Valley de Paul Wenninger
Une sur trois de Cecilia de Arce Burkhalter
Victor ou la piété de Mathias Gokalp
La voie rouge de Frédéric Ramade
Wake Man de Tornike Bziava
Wellington Jr. de Cécile Paysant
Yaadikoone de Marc Picavez
Yùl et le serpent de Gabriel Harel
Cela fait un bon moment qu’à Format Court, nous souhaitons vous faire part d’un projet original nommé CIEL, alias Cinéma indépendant en ligne, lancé il y a quelques mois par Ciclic, la structure qui portait l’ancien festival de Vendôme dont nous étions partenaires. L’initiative cherche à favoriser la diffusion des œuvres soutenues et des formats peu visibles dans les salles de cinéma et/ou à la télévision.
Bon à savoir : tout au long de l’année, CIEL propose des films en ligne, des dossiers, des entretiens, des cartes blanches, des liens utiles,… Le numéro actuel, intitulé « Bandes de filles, cinémas au féminin » en clin d’oeil au beau film de Céline Sciamma, réunit 14 courts métrages en ligne autour du cinéma au féminin.
Le Net nous offre de bonnes surprises en ces temps moroses : « Oh Willy… », le très beau film de Emma de Swaef et Marc Roels, primé un peu partout, est en ligne depuis quelques jours. Lauréat du Cartoon d’or 2012, nommé aux César 2013, disponible en DVD en Belgique et aux Pays-Bas, il est enfin visible en intégralité sur différents sites web dont la page You Tube du distributeur Autour de Minuit ainsi que la page Viméo des réalisateurs, toujours aussi unis et créatifs.
À Format Court, nous connaissions depuis longtemps le travail de Marc Roels (co-réalisateur de « Mompelaar » avec Wim Reygaert) et de Emma de Swaef, dont le film de fin d’études, « Zachte plantent », annonçait le film à venir. C’est donc très tôt que nous avons repéré leur premier travail professionnel à 4 mains, lors de sa première sélection française au festival de Clermont-Ferrand en 2012, que nous avons programmé à notre toute première séance Format Court à Paris le mois qui a suivi, et que nous avons fortement accompagné le film sur notre site.
Nous vous invitons donc à (re)voir ce film animé, merveilleux, drôle et émouvant, à le partager et à vous (re)plonger dans nos sujets liés à « Oh Willy… » : la critique du film, la critique du DVD etl’interview d’Emma de Swaef. Bonne (re)découvertes et (re)lectures !
Presque dix ans après être sorti de l’IAD (Institut des arts de diffusion, Belgique), Jean-François Ravagnan réalise son premier court métrage de fiction « Renaître ». Par amour pour Malik , Sarah part en Tunisie pour le retrouver et lui demander d’être sa « première fois » alors qu’il est sur le point d’en épouser une autre. Primé par Format Court au dernier festival du film francophone de Namur, le film est un portrait de femme actuelle inspiré de « Rosetta » et de « Adèle H ».
« Renaître » est mon premier film. J’ai fait un film de fin d’études documentaire à l’IAD « En attendant les Olivettes » puis j’ai directement travaillé comme assistant réalisateur sur « Le Silence de Lorna » des frères Dardenne. J’ai ensuite continué en tant qu’assistant réalisateur, pour approfondir l’apprentissage de mon métier sur les plateaux, j’avais besoin de ça. C’était aussi une manière de rencontrer des équipes (des opérateurs, des ingénieurs du son…). J’ai mis presque 10 ans à faire un film après ma sortie de l’école car j’avais envie de trouver un sujet qui me tienne aux tripes.
Ton film de fin d’études « En attendant les Olivettes » s’attache à suivre des personnes âgées dans un café-concert à Liège. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?
J’avais des arrière-grands-parents très jeunes. Ils s’occupaient de moi les mercredis après-midis et pendant les vacances. À leur contact, j’ai cultivé une affinité pour les choses plus anciennes, l’art de raconter des histoires, la musique qu’ils écoutaient… Les personnes du film me faisaient penser à eux. Ce café était un endroit qui était en train de s’effacer, il a ensuite été racheté et j’ai voulu le garder en mémoire. J’avais l’impression là-bas d’être dans les années 60, comme si le temps s’était arrêté. Mon court métrage est un portrait qui passe presque uniquement par la chanson tant les personnages ne s’expriment jamais directement.
« Renaitre » est l’histoire d’un geste fort, motivé par l’amour d’un point de vue féminin. D’où t’es venue l’idée de réaliser cette histoire ?
Une amie maghrébine m’a un jour raconté qu’elle était partie rejoindre l’homme dont elle était amoureuse pour qu’il soit sa « première fois » avant qu’il ne se marie avec une autre. Il restait beaucoup de blancs dans son récit. Je me sentais encore loin de tout ça, je lui ai suggéré d’écrire une nouvelle mais j’avoue que cela m’a presque habité pendant un an. Et ce qui m’obsédait, c’était le geste de cette femme. Je me suis dégagé du fait de ne pas être une femme, de ne pas être musulman. Je me suis interrogé sur l’aspect purement scénaristique : comment raconter l’histoire d’une première fois, d’une manière cachée, organisée, orchestrée par un personnage féminin. J’ai écrit un premier traitement qui ressemblait plus à une nouvelle littéraire qu’à un scénario, avec énormément de références aux sons, aux odeurs… J’ai utilisée cette matière par la suite pour les décors, la lumière, l’ambiance sonore. Puis, j’ai eu l’idée de raconter le film comme un secret. J’avais envie de jouer avec le spectateur. Comme mon amie m’avait raconté l’histoire avec énormément de blancs, j’avais envie de faire la même chose, pour que le spectateur puisse s’identifier encore plus à ce personnage. Dans le film, on attend presque 14 minutes avant de savoir ce qu’elle fait, des indices ont été parsemés par ci par là.
Après toutes les projections déployées sur le personnage de Sarah, on se retrouve confronté à cette histoire d’amour. Le spectateur pense à un avortement, à la prostitution. Et finalement c’est bien plus simple : elle vient simplement dire à l’homme qu’elle aime qu’elle a envie de le revoir une dernière fois avant son mariage. J’avais l’occasion de montrer un personnage actif, libre de son destin, qui choisit de perdre sa virginité. J’ai donc décidé de raconter l’histoire de manière très linéaire, comme une ligne tendue entre deux points : elle a un objectif, elle va aller jusqu’au bout, en se battant, en acceptant aussi de ne plus jamais le revoir.
As-tu éprouvé des difficultés pour te mettre dans la peau d’un personnage féminin ?
Non, c’est assez étrange. Le trajet dramatique, intérieur du personnage coulait de source. Par contre j’ai eu beaucoup plus de tracas pour le garçon, pour cerner le conflit qu’il y avait en lui, entre son mariage et Sarah. Je ne voulais pas en faire une victime, je voulais qu’il soit consentant. Il faut toujours essayer de se mette à la place de ses personnages, se demander ce qu’on aurait fait à leur place. La partition du garçon s’est vraiment développée dans les toutes dernières versions du scénario, sur le tournage en Tunisie avec l’acteur Bassem Hamraoui. Je voulais absolument prendre un comédien tunisien, quelqu’un vivant là-bas. On a beaucoup discuté ensemble du personnage, de sa réaction. Il m’a parlé de son vécu, des tabous de la société tunisienne même si le mœurs sont bien plus développés qu’on ne voudrait le croire en Europe. Beaucoup de lecteurs du scénario m’ont dit qu’une femme musulmane ne pouvait pas agir comme Sarah le fait dans le film, que ça n’était pas crédible qu’une jeune femme musulmane aille rejoindre l’homme qu’elle aime pour perdre sa virginité avec lui. Je me suis rendu compte qu’ils projetaient leurs propres fantasmes ou clichés sur le Maghreb. Le film aborde en sous-texte les différences culturelles entre la Belgique et la Tunisie, il esquisse les questions de l’émancipation, de la féminité, de la sexualité.
Justement, concernant ce sous-texte, comment as-tu pu réussir à être juste et authentique ?
J’ai beaucoup fait lire le scénario en Tunisie, et quelqu’un m’a dit un jour qu’on ne savait pas si le film avait été écrit par un homme ou par une femme. Pour moi, c’était un excellent signe. Je l’ai aussi fait lire en cours d’élaboration à la personne qui m’a raconté l’histoire et à un moment, elle m’a donné sa bénédiction. Elle m’a dit : « Je pense que tu es dans le vrai ». Pour chaque lecteur, homme ou femme, en Tunisie ou en Belgique, ce qui ressortait avant tout, c’était la force du geste, au-delà de l’aspect culturel, religieux ou traditionnel.
Le vécu de l’actrice Nailia Harzoune, qui incarne le personnage de Sarah, a-t-il apporté quelque chose au personnage ?
Pas vraiment. J’ai rencontré Nailia très tard car j’avais écrit le film pour quelqu’un d’autre, pour une comédienne que j’avais rencontrée par hasard et qui est rentrée très tôt dans le développement du projet. Finalement pour des raisons d’emploi du temps, elle n’a pas pu participer au tournage. J’ai donc mis très longtemps pour retrouver quelqu’un : il fallait une comédienne qui puisse exprimer énormément sans parler, simplement par le regard, avec dureté et douceur. J’ai alors rencontré Nailia. Elle m’a dit que c’était très agréable de jouer ce personnage-là, parce qu’il était bien plus courageux qu’elle. Sur le tournage, elle a pris le pouvoir, elle est devenue Sarah.
Le film a-t-il été montré en Tunisie ?
Oui, mais il n’a pas été montré en festival. Un ami réalisateur tunisien, qui m’a beaucoup aidé pour la relecture, les repérages, dans la construction du film, me dit toujours : « Tant qu’il y aura des femmes courageuses dans la société civile tunisienne, notre pays ne sera pas vaincu ». Énormément d’avancées sociales ont été faites grâce aux femmes. Elles sont très vigilantes face aux changements politiques, aux révisions de la Constitution… Et en Tunisie, le film est assez bien reçu car c’est un personnage féminin puissant, qui gagne, c’est un archétype du cinéma tunisien où les femmes sont souvent des personnages très forts, victorieux, qui ne se laissent pas faire. Et la manière dont on en parle est teintée de liberté. Le cinéma tunisien est audacieux et les gens voient les films.
Comment s’est passée la production avec les frères Dardenne ?
« Renaître » était leur premier court métrage en tant que producteurs et mon premier court en tant que réalisateur. Ça a mis beaucoup de temps car le film n’a pas été accepté à la Commission des films, il a donc failli ne pas exister, faute d’argent mais cela m’a rendu obstiné. Devoir travailler dans une économie de moyens force à se poser des questions et à faire des choix. Les frères Dardenne n’ont jamais essayé de modifier le scénario, de l’infléchir d’une certaine manière, ils ont toujours eu un regard bienveillant sur la matière. Plusieurs membres de l’équipe des Dardenne ont rejoint le film (le chef opérateur, l’assistante…) et l’ont fait par amour du scénario. Au montage, j’ai travaillé avec un ami et là aussi, ils ont apporté un regard extérieur pertinent en posant les bonnes questions, en faisant exprès de me perdre aussi, pour que je réfléchisse, que je reparte de zéro. Ils ont été des sortes de baromètres, sans jamais vouloir imposer une marque de leur cinéma.
Pourtant à y regarder de près, « Renaître » subit l’influence de la marque de fabrique des Films du Fleuve.
Le personnage de Sarah s’inspire à la fois de d’Émilie Dequenne dans « Rosetta » et d’Isabelle Adjani dans « L’Histoire d’Adèle H » car c’est un personnage obstiné par l’amour, jusqu’à en devenir folle d’ailleurs. Dans mon film, on retrouve cette énergie déployée par les femmes, avec cette caméra proche des corps (j’avais d’ailleurs le même opérateur qu’eux, Benoît Dervaux). Il y a donc une forme de filiation au début du film et je pense que c’est le ton juste. Puis la caméra devient différente lorsqu’on se retrouve dans l’appartement, elle se calme. J’avais envie de regarder les personnages, les entendre respirer, se parler. Le spectateur est trimballé pendant treize minutes ; à un moment, il faut s’arrêter pour voir et écouter.
Par ailleurs, ce qui est très beau dans le cinéma des frères, c’est ce que j’appelle la combine : emprunter de l’argent, dissimuler les intentions. J’ai aussi donné beaucoup d’importance aux détails, aux vêtements de Sarah par exemple. C’est une leçon que j’ai retenu des Dardenne : faire attention aux costumes, ce qu’ils racontent. Chez eux, sur le plateau, ce sont les corps qui parlent. On met de côté l’aspect psychologique, il a déjà été répété, évoqué, intégré par les corps des comédiens. Il n’y a plus que les corps et les gestes qui s’expriment. C’est une recherche continue de l’authenticité.
J’ai plusieurs choses en tête. Je suis en train de développer une histoire de long métrage où les frères Dardenne seraient prêts à m’accompagner à nouveau. Et le fait que « Renaître » est bien accueilli en festival me donne du temps, dans ma tête, pour bien penser la suite.
Ce weekend, Format Court était à Toulouse pour présenter une carte blanche 100% animée et participer au Jury de la compétition internationale au 24ème festival Séquence Court-Métrage. Voici le palmarès dans son intégralité, regroupant les des différentes compétitions.
Compétition nationale
Prix du Public : Sous tes doigts de Marie-Christine Courtès
La 17ème édition du Festival des Cinémas Différents et Expérimentaux de Paris s’est achevée le 18 octobre dernier aux Voûtes à Paris, un espace où se sont déroulées la plupart des projections de la compétition et des divers focus proposés cette année dans le programme du festival. Situé en contrebas de la rue des Frigos, qui par ces soirées d’hiver porte bien son nom, le public a trouvé refuge dans la salle de projection de ce lieu alternatif pour y découvrir une sélection de films pour le moins stimulante. Ajoutons que l’usage de chaises pliantes comme sièges de cinéma, s’il suscitait un léger inconfort, avait pour mérite de maintenir l’auditoire éveillé et attentif, condition sine qua non pour traverser des programmes plutôt denses.
Microsillons
L’un des nombreux focus proposés lors du festival donna l’occasion de (re)découvrir un court-métrage de Jean-Luc Godard : « Lettre à Freddy Buache », à propos d’un court-métrage sur la ville de Lausanne réalisé en 1982. On y voit un peu et on entend beaucoup le cinéaste qui, depuis sa salle de montage, adresse une « lettre » à son ami Freddy Buache, alors directeur de la Cinémathèque suisse. Il y est fait mention de la commande d’un film sur la ville de Lausanne à Godard, des obstacles rencontrés par ce dernier lors du tournage et de l’impossibilité d’honorer ladite commande, supposant ainsi un détournement du matériel beaucoup plus fructueux. Godard creuse, cherche à l’intérieur des images filmées pour cette commande un autre film, ne réalisant plus comme il le dit un film « sur », mais un film « de ». Le cinéaste en vient à définir la spécificité de son médium comme manière de restituer une perception du monde faite d’un ensemble de lignes et de taches de couleurs, reliant la pratique du réalisateur à celle du peintre. Le geste de passer indéfiniment à l’intérieur des sillons, tels ceux du disque vinyle que Godard manipule à l’image, pourrait valoir comme motif principal reliant les propositions les plus marquantes découvertes au cours du festival FCDEP. En s’emparant d’images préexistantes ou en en produisant de nouvelles, les cinéastes reconduisent chacun à leur façon ce désir de creuser dans la matière pour créer de nouvelles formes, détachées des conventions du cinéma de fiction et documentaire.
Les projections « hors les murs » permirent aux spectateurs de découvrir un peu en amont des séances aux Voûtes quelques films rares, longs-métrages issus du début des années 1970 et rassemblés avec d’autres films autour du thème « Fiction/Déviation ». La découverte successive des films « L’Empereur Tomato Ketchup » de Shūji Terayama (Japon, 1971) et de « La Fin des Pyrénées » de Jean-Pierre Lajournade (France, 1971) définit un premier courant auquel il était possible de rattacher tout un pan des courts-métrages de la compétition : celui du cinéma militant, tendance anarchiste. Les projections en 35 mm de ces deux films ont plongé les festivaliers dans les luttes politiques d’antan, figurées de manière poétique dans chacun des films. Chez Terayama, on imagine une dictature menée par des enfants asservissant les adultes dans une mise en scène grand-guignol convoquant les artifices du théâtre tandis que chez Lajournade, le prolongement des révoltes initiées en Mai 68 conduit à une désillusion aussi risible que terrifiante, les jeunes anarchistes traversant les espaces désertiques d’une France montrée comme un état policier. Purs produits d’un cinéma underground propre aux années 1970, ces deux films n’ont rien perdu de leur force subversive et de leur beauté, même si la pellicule usée des copies projetées virant au rose signalait l’urgence d’une restauration.
Quels signes des luttes politiques contemporaines nous sont parvenus dans les courts-métrages de la compétition ? Le cinéaste Pierre Merejkowsky propose dans son nouvel opus « L’abbé Pierre » un constat amer, un état des lieux toujours plus catastrophé vis-a-vis de la lutte des classes et de l’engagement pour le prolétariat. Devant l’objectif de la caméra, Merejkowsky s’agite, éructe, soliloque sans fin sur son passé chaotique de militant et sur une figure féminine qui a marqué son parcours : l’énigmatique Yvonne. Le cinéaste-acteur arpente des lieux de transits (gares, cafés) pour y déverser sa bile anarchiste, endossant moins le rôle d’orateur politique que celui d’un troll hirsute vociférant sans discontinuer une parole presque inaudible. Ici, creuser le sillon du politique revient à creuser la parole, celle de Merejkowsky devenant une entité monstrueuse, auto-dévorante et impuissante à construire un discours cohérent. Dans un même mouvement, le réalisateur devient à la fois le procureur et l’avocat, le bourreau et la victime de son propre cas dont il fait état dans une sorte de procès à ciel ouvert que le dispositif du tournage organise afin d’en devenir le réceptacle. Coupable d’avoir cru et de continuer à croire en la lutte des classes, d’avoir en son nom commis des erreurs, tels sont les maux dont le cinéaste s’accuse face à la caméra sans cesser pour autant d’affirmer la nécessité de poursuivre la lutte et de témoigner du sort des laissé-pour-compte. Car le film dessine en creux, et c’est peut-être à cet endroit qu’il émeut le plus, un étonnant portrait de femme à travers l’évocation du personnage de Yvonne, une ouvrière que le cinéaste plaça un jour sous sa protection avant d’en faire, malgré lui, l’instrument d’instances politiques mal intentionnées.
Autre motif récurrent dans les courts-métrages de la compétition : la présence des insectes, êtres vivants les plus aptes à se faufiler dans les interstices les plus étroits, arpentant pour les cinéastes des espaces impraticables à l’intérieur desquels se forment de nouveaux sillons. Il en va des très beaux films « Rond est le monde » de Olivier Dekegel et de « L’œil du cyclope » de Jen Debauche, deux moyens-métrages belges réunis dans le même programme et qui partagent plusieurs traits communs. En place d’un récit ou d’un sujet clairement établi, c’est une traversée à l’intérieur de différents espaces qui conduit le geste de chacun des réalisateurs et fait de l’exploration de la nature son principal enjeu narratif. D’un côté, Olivier Dekegel adapte les préceptes des moines franciscains à sa pratique de cinéaste en construisant son film sur le passage des saisons et en enregistrant les métamorphoses de la faune et de la flore sur la pellicule Super 8. Le film se livre en entier dans la nudité de son dispositif, ne faisant jamais valoir d’autre ambition que celle de restituer une perception du mouvement continu de la nature et du temps, le réalisateur attentif à la présence de tous les corps qui traversent son cadre. Les apparitions régulières d’un petit âne, compagnon de route choisi par le cinéaste pour son périple, sont particulièrement émouvantes : la progression de l’animal et de l’homme sur les routes de campagnes, le premier filmé de face par le second qui marche à reculons, fait apparaître un nouveau rapport où chacun des protagonistes dirige l’autre sur une même voie en prenant en charge à la fois la continuation du voyage et du tournage du film.
Dans le moyen-métrage « L’œil du cyclope », un paysan quitte le champ à l’intérieur duquel il s’affaire pour se jeter dans la nature et se confronter à différents espaces, comme agité par une force inconnue. Les motifs de la marche et de la traversée sont ici reconduits par Jen Debauche, et si un glissement vers la fiction s’opère de manière plus franche que dans le film de Dekegel, l’attention portée aux mouvements de la nature demeure au centre du film. Le fait de suivre une figure, fusse-t-elle muette et dépourvue d’histoire en la personne de ce paysan lambda, introduit immédiatement la possibilité d’une quête et donc d’un récit. L’itinéraire de l’homme à l’intérieur de ces différents espaces (forêts, champs, montagnes…) s’apparente à un retour à la nature, où la nécessité d’éprouver son corps en le mettant à l’épreuve des éléments devient le moyen d’une transcendance, de l’accession à un état nouveau. Lorsqu’aux confins de la nuit apparaît dans le lointain ce fameux cyclope à l’œil monstrueux, représenté par l’ampoule de ce qui ressemble à un phare, le film semble basculer dans la science-fiction et convoque les souvenirs de la Quatrième Dimension (le choix du noir et blanc n’est pas anodin). Après que l’homme se soit confronté à cette entité, le jour se lève sur un nouvel espace et sur un nouveau genre, le western, que rappelle ce désert rocailleux et la présence des vautours s’agitant dans le ciel et sur le sol. L’homme qui restait jusqu’ici une figure sans histoire et sans statut accède enfin à l’état de personnage dès lors qu’il s’avance fièrement, tel un cow-boy de cinéma, dans la lumière du soleil. C’est à cet instant que le montage s’emballe, que l’image se dissout et que le film s’interrompt, comme si l’apparition des signes de la fiction accompagnait la mort du film et l’achèvement d’un parcours.
Si l’intérêt de chacun des films évoqués relève d’une pratique solitaire du cinéma dans la pluralité de ses formats et de ses modes d’expression, la proposition la plus stimulante et singulière découverte au cour du festival demeure celle de Jacques Perconte qui présentait son opus « (M) Madeira » en compétition cette année. Dans ce film plus que dans les autres, le geste de creuser indéfiniment le même sillon se rejoue et devient cette fois le motif formel à partir duquel le réalisateur travaille sa matière. Rendu sur l’île de Madère pour y filmer ses paysages et ses communautés d’ouvriers agricoles, Jacques Perconte livre un travail de longue haleine fait de retouches de ces images numériques en post-production pour un résultat unique et proprement sidérant. En effet, les plans d’espaces naturels finissent par se fondre les uns dans les autres dans un entrelacs de pixels redéfinissant notre rapport à la perspective et à la couleur. La structure de l’image se met en mouvement pour épouser celui du plan lui-même (le ressac des vagues sur le rivage, le souffle du vent dans les arbres ou sur les champs, les activités des ouvriers…) que d’autres plans viennent à leur tour contaminer, produisant une sorte de germination visuelle aussi miraculeuse qu’inquiétante. Lorsque Perconte démultiplie à l’intérieur d’une seule image la présence d’un ouvrier bêchant la terre en faisant varier à chaque fois son échelle dans le plan, l’on assiste quasiment à la matérialisation de son geste plastique. À l’instar de l’ouvrier agricole retournant inlassablement ses plants dans la terre, Perconte enregistre ses plans et les retravaille, les manipule pour que germe quelque chose de neuf. Un cinéma différent.
Si la musique est nourriture d’amour, jouez toujours
Lauréat du Prix Format Court au FIFF à Namur cette année avec « Renaître », Jean-François Ravagnan avait réalisé en 2007 son film de fin d’études à l’IAD (Institut des arts de diffusion). « En attendant les Olivettes » est un documentaire profondément humain sur l’âge et l’amour.
Avec ce premier film à la fois candide et mature, Jean-François Ravagnan livre le portrait intime de Stéphanie et Jefke, un couple octogénaire liégeois qui se rend régulièrement à leur café chantant local. Les Olivettes du titre est encore aujourd’hui un lieu emblématique de la ville de Liège, vestige de la belle époque et des temps révolus avant l’arrivée des karaoké ubiquitaires impersonnels. C’est là, sur la scène, micro à la main et entourés de musiciens et d’amis-fans, qu’ils vivent de manière la plus intense leur ultime raison d’être. Chant et musique font tomber toutes les barrières qui les excluraient du monde.
Imprégné dans une atmosphère passible et immobile, ce film nous plonge dans la vie intérieure des personnages, sans tomber ni dans le pathos ni dans la froideur par rapport à son sujet. En l’espace d’un quart d’heure, la fragilité du couple surannée face au passage du temps, à la fois lent et rapide, se fait parfaitement ressentir. Des cadres fixes donnent à voir leurs activités quotidiennes monotones : cuisine, repas, ménage… Ces plans larges reflètent l’inébranlable stase de la routine mais se resserrent vite pour ne pas perdre de vue le but final du duo mélomane. Leurs répétitions rigoureuses et leur toilette soignée sont autant de préparatifs pour le moment tant attendu, la soirée aux Olivettes où Stéphanie et Jefke interpréteront avec brio des airs d’antan comme Le plus beau tango du monde ou Que reste-t-il de nos amours ? de Charles Trenet.
Le temps de quelques plans face caméra des habitués du café, « En attendant les Olivettes » devient également le portrait d’un lieu, un double registre qui est agencé surtout par le montage son. Après la performance, les bruitages de la collectivité planent sur l’intérieur vide de la maison du couple tel le spectre d’un souvenir déjà lointain. Tout comme le chant solo de Stéphanie dans le pré-générique rejoint le brouhaha du choeur dans la bande-son.
Ce qui touche le plus dans ce documentaire, c’est le constat que la musique, besoin vital pour ce couple, est avant tout l’expression la plus consommée de la tendresse qu’ils portent l’un pour l’autre. La scène finale – une sérénade Dans la Balançoire chantée par Stéphanie à Jefke, sa voix sincère tremblante d’émotion au point de provoquer des larmes chez son mari – atteste parfaitement de cet amour, que Ravagnan filme avec respect et pudeur.
L’édition 2015 du festival du film court de Villeurbanne s’est achevée ce weekend. Pour la deuxième année consécutive, Format Court y délivrait un prix au sein de la compétition européenne. Notre jury (composé de Julian Medrano Hoyos, Zoé Libault et Clément Béraud) a choisi d’attribuer son prix du meilleur court-métrage à un film d’école allemand, « In uns das universum » de Lisa Krane, illustrant subtilement les choix face à la maladie et aux rêves personnels. Un film choisi à l’unanimité, parmi 37 autres, pour son originalité scénaristique, sa poésie ambiante, son excellent travail de montage ainsi que sa photographie magnifiant le travail des corps lors des scènes de danse.
In uns das universum de Lisa Krane. Fiction, 29′, 2015, Allemagne, Kunsthochschule für Medien Köln
Synopsis : Une malformation biologique étrange est détectée à l’intérieur du corps de Li, une jeune danseuse. Les docteurs sont désemparés et leurs recherches sur les causes possibles restent peu concluantes. Tandis que les spécialistes empiètent sur son corps, essayant d’examiner la plus petite molécule, Li refuse de voir sa condition comme « un défaut ».
Le film bénéficiera d’un dossier spécial en ligne et sera programmé lors d’une prochaine séance Format Court au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). La réalisatrice bénéficiera également d’un DCP pour un prochain court doté par le laboratoire numérique Média Solution.
Chefs-d’œuvre de la littérature, objets de propagande ou de blasphèmes, les livres sont autant de regards sur le monde, présents pour nous enrichir, nous divertir ou encore nous faire réagir. A l’heure du numérique, les questionnements quant à leur avenir foisonnent. Short Screens qui s’est offert un City Trip à Barcelone où il présentait une carte blanche au Festival Bibliocurts, vous convie à une séance bruxelloise autour du thème de la lecture.
Le jeudi 26 novembre à 19h30, au cinéma Aventure, Galerie du Centre, Rue des Fripiers 57, 1000 Bruxelles – PAF 6€.
PÊLE MÊLE de Maëlle Grand Bossi, Belgique/ 2011/ Documentaire/ 24′
Pêle-Mêle est une bouquinerie située en plein coeur de Bruxelles. C’est un fouillis organique, un espace débordant de livres autour desquels se côtoient les riches et les pauvres, les jeunes et les vieux … et une clientèle d’habitués « haut en couleurs ». Chacun y touche et y aime les livres à sa manière.
THE LIBRARY de Leo Crane, Royaume-Uni/ 2012/ Animation/ 4′
La journée d’Annie à la bibliothèque commence comme n’importe quel autre jour jusqu’à ce qu’un homme intriguant s’assied à ses côtés et la distrait de ses pensées.
EL LIBRO BLANCO de Isabelle Montoya, France/ 2013/ Fiction/ 6’30
Cynthia est née à Buenos Aires. Comme beaucoup d’Argentins, elle porte un nom italien. Quand elle était petite, son grand père lui lisait un livre italien. Aujourd’hui adulte, Cynthia ne cesse de chercher le titre de ce livre, comme s’il détenait la clé de son identité.
THREE STONES FOR JEAN GENET, de Frieder Schlaich, Allemagne/ 2014/ Documentaire/ 7′
En avril 2013, la chanteuse Patti Smith se rend sur la tombe de l’écrivain français Jean Genet à Larache, au Maroc.
PUÑO POÉTICO, de Diego Granella, Espagne/ 2011/ Fiction / 8′
Sous la chaleur des lumières d’un club de la Barcelone de 1934, nous assistons à la rencontre fortuite de deux géants de la littérature hispanique: Pablo Neruda et Federico García Lorca. Dans une atmosphère versatile, entre verres, tangos et amitiés occasionnelles, la nuit forcera les poètes à développer leurs meilleures armes : les mots.
IL FAUT QU’UNE BIBLIOTHEQUE SOIT OUVERTE OU FERMEE, de Raymond Garceau, Canada, 1959, Fiction, 26’27 »
Tourné dans une petite ville de Montmagny, au Québec, ce court métrage de fiction raconte les déboires d’une brave jeune femme pour sauver une bibliothèque que personne ne fréquente. Le local et les livres ne conviennent pas aux besoins de la population. On lui rappellera qu’il n’est jamais trop tard pour mener à bien une entreprise, si hasardeuse soit-elle. Sa campagne portera-t-elle fruit?
BIBLIOBURRO, de Valentina Canavesio, Colombie, 2009, Documentaire, 5’20 »
Chaque week-end, bénévolement, et avec la complicité de ses ânes, Alpha et Beto, l’instituteur Luis Soriano s’en va sur les chemins escarpés de la brousse porter la culture écrite jusqu’aux communes les plus reculées du nord de la Colombie.
Sorti de l’IAD (Institut des Arts de Diffusion) en 2007, c’est en tant qu’assistant réalisateur sur certains films des frères Dardenne, notamment, que Jean-François Ravagnan apprend le métier avant de réaliser son premier film de fiction « Renaître », produit par Les Films du Fleuve. Primé par Format Court au dernier Festival du film francophone de Namur (FIFF) dans la compétition internationale, le film dresse le portrait d’une jeune femme jusqu’au-boutiste qui pose un geste fort pour se libérer d’un amour impossible.
Demain soir, vendredi 20 novembre, à 19h, Format Court bénéficie d’une carte blanche exclusivement composée de films d’animation au Cinéma ABC de Toulouse à l’occasion du festival Séquence Court Métrage. 9 films français et étrangers (dont plusieurs Prix Format Court) font partie de cette programmation présentée par Katia Bayer (Format Court), David Le Bozec, Sonia Gerbeaud et Mathias De Panafieu (réalisateurs).
Si vous souhaitez assister à cette séance, contactez-nous rapidement.
Pour accompagner cette carte blanche spéciale anim’, la première exposition «hors les murs» de Format Court est également à découvrir jusqu’au 29 novembre dans le hall du Cinéma ABC. Y figurent les dessins et croquis réalisés par les animateurs/dessinateurs français et étrangers d’aujourd’hui et de demain, parmi lesquels Benjamin Renner, Théodore Ushev, Sarah Van Den Boom, Franck Dion, Plympton, Koji Yamamura, Jean-Charles Mbotti Malolo, Adam Eliott, …
Synopsis : Au son d’une comptine angoissante, une jeune fille s’approche d’un étrange tunnel…
Sophie Sherman élabore un cinéma à la jonction des formes expérimentales et de la fiction, où des motifs empruntés aux contes et aux mythes sont agités par les dispositifs narratifs et plastiques qu’elle met en place. Ici, un unique plan-séquence filmé au téléphone portable permet à la réalisatrice de retrouver le plaisir qu’ont les enfants de jouer à se faire peur, en utilisant tous les outils à sa disposition. Une comptine scandée comme une invocation, la présence d’une main touchant fébrilement la mousse et les feuilles sur les branches, autant d’éléments qui installent en un laps de temps resserré un climat d’angoisse. La basse résolution de l’image numérique vient accentuer l’impression de dénuement et donc de danger que le film produit, cette progression vers un étrange tunnel convoquant les souvenirs du Petit Poucet ou d’un Chaperon Rouge courant au devant des ennuis.
Ce vendredi 13 novembre, nous avions prévu de sortir une info concernant le festival de Brest. Le soir même, avait lieu la remise des prix du festival. Pour la 4ème fois, Format Court y remettait son prix. Et puis… La terrible actualité a surgi. Choqués, indignés et tristes, nous avons délaissé le site ce weekend. Ce lundi, parce qu’il paraît qu’il faut reprendre le fil, même si ce n’est pas facile, nous revenons péniblement à nos publications. Bon courage à tous dans cette terrible épreuve.
Pour la trentième édition du festival européen du film court de Brest (10-15 novembre 2015), le jury Format Court, composé de Katia Bayer, Gary Delépine, Paola Casamarta et Agathe Demanneville, a décidé de primer deux films d’écoles. Il a attribué vendredi soir le prix du meilleur court métrage européen au film polonais Larp de Kordian Kądziela (Krzysztof Kieslowski Faculty of Radio and Television). Le film met en avant une figure d’adolescent rêveur et chevaleresque, aliéné et désabusé face à une famille qui ne le comprend pas toujours.
Le jury a également remis une mention spéciale au film Archipels, granites dénudés de Daphné Hérétakis (Le Fresnoy), un documentaire expérimental qui regroupe les témoignages croisés d’une jeunesse grecque dans un contexte de crise économique et sociale. Un film sensible dans lequel les protagonistes se mettent à nu et dont la parole dépasse la situation grecque pour devenir universelle.
Larp fera l’objet d’un dossier spécial en ligne et sera programmé lors d’une prochaine séance Format Court au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Kordian Kądziela, le réalisateur, bénéficiera également d’un DCP pour un prochain court doté par le laboratoire numérique Média Solution.
Larp de Kordian Kądziela (Fiction, 27′, Pologne, 2014, Krzysztof Kieslowski Faculty of Radio and Television, Université de Silesia)
Synopsis : Sergiusz, dix-sept ans, se sent incompris par sa famille. Le garçon se réfugie dans sa grande passion, le monde de la science-fiction.
Archipels, granites dénudés de Daphné Hérétakis (Documentaire, 25′, France, Grèce, 2014, Le Fresnoy)
Synopsis : Athènes 2014. Entre désirs endeuillés et espoirs perdus, un journal intime se cogne contre les murs de la ville. Le quotidien d’un pays en crise, l’inertie de la révolution, les questions individuelles qui se confrontent au politique, la survie qui se confronte aux idéaux.
Pour l’édition 2015 du festival Filmer à tout prix (Bruxelles), le jury Format Court (composé de Marie Bergeret, Adi Chesson, Mathieu Lericq) a décidé d’attribuer son prix du meilleur court métrage au film brésilien « Nova Dubai » de Gustavo Vinagre. Un « documentaire fictionnalisé » qui aborde l’amour et la sexualité dans un contexte de crise existentielle et sociétale au-delà de tout tabou de représentation. Un film coup de poing qui heurte les sensibilités pour affirmer sa place dans le cinéma documentaire d’aujourd’hui.
Nova Dubai de Gustavo Vinagre. Documentaire, 50′, 2014, Brésil, Avoa Filmes
Synopsis : Éclaboussure porno-politique, Nova Dubai relate la lutte stérile d’un groupe de jeunes hommes animés d’une rage sexuelle désespérée contre l’insolente spéculation immobilière qui ravage espoirs, mémoires et aspirations. Seule la politique des corps en lutte semble égaler l’obscénité des projets immobiliers…
Le court-métrage primé fera l’objet d’un dossier spécial en ligne et sera programmé lors d’une prochaine séance Format Court au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Le réalisateur bénéficiera également d’un DCP pour un prochain court doté par le laboratoire numérique Média Solution.