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Cinéma du réel, la sélection des courts

Cinéma du réel, le festival du documentaire organisé chaque année au Centre Pompidou (Paris) redémarre demain, et se termine le 31 mars 2013. Côté courts, une compétition internationale de 13 titres est prévue au programme. Dans les prochains jours, l’équipe de Format Court vous présentera ses films préférés. En attendant voici le détail de la sélection.

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• AMAL’S GARDEN réalisé par Nadia Shihab (Irak, USA)
• BOIS D’ARCY réalisé par Mehdi Benallal (France)
• CHA FANG (THE QUESTIONING) réalisé par Rikun Zhu (Chine/China)
• CE QUE MON AMOUR DOIT VOIR (WHAT MY LOVE MUST SEE) réalisé par François Bonenfant (Portugal, France)
• LES CHEVEUX COURTS, RONDE, PETITE TAILLE réalisé par Robin Harsch (Suisse/Switzerland)
• DEFENSE D’AIMER réalisé par May El Hossamy (France)
• LETTER réalisé par Sergei Loznitsa (Russie/Russia)
• LIQUIDATION réalisé par Christophe Bisson (France)
• EIN NEUES PRODUKT (A NEW PRODUCT) réalisé par Harun Farocki (Allemagne/Germany)
• MADERA (WOOD) réalisé par Daniel Kvitko (Cuba)
• MAURO EM CAIENA (MAURO IN CAYENNE) réalisé par Leonardo Mouramateus (Brésil/Brazil)
• OSIEMNASTKA (EIGHTEENTH BIRTHDAY) réalisé par Marta Prus (Pologne/Poland)
• QUAND PASSE LE TRAIN réalisé par Jérémie Reichenbach (France)

Short Screens #24 : Spécial « Animation »

De retour dans un nouveau lieu au cœur de la capitale belge, Short Screens débute sa saison 2013 avec une programmation captivante qui fait la part belle du cinéma de l’animation!

Rendez-vous le jeudi 28 mars à 19h30 au cinéma Aventure (Galerie du centre 57, 1000 Bruxelles) ! PAF : 6 euros.

Une collaboration entre Format Court et Artatouille asbl

Au programme, huit petits films à l’univers aussi poétique que décalé :

Mount Head de Koji Yamamura. Japon, 2002, Animation, 10′

Un homme radin a l’habitude de manger les noyaux des cerises. Un cerisier lui pousse sur le crâne et à partir de ce moment, les gens affluent pour y pique-niquer. Ce film est une interprétation moderne d’un conte traditionnel du Japon.

Oh Willy… de Emma de Swaef et Marc James Roels. Belgique, France, Pay-Bas, 2011, Animation, 17′

À la mort de sa mère, Willy retourne dans la communauté de naturistes au sein de laquelle il a grandi. Rendu mélancolique par ses souvenirs, il décide de fuir dans la nature où il trouve la protection d’une grosse bête velue.

Girls’ Night Out de Joanna Quinn. Royaume-Uni, 1998, Animation, 6′

Quand les copines de Beryl l’emmènent dans un club de strip-tease masculin pour son anniversaire, celle-ci ramène un souvenir à la maison.

Si j’étais un homme de Margot Reumont. Belgique, 2012, Animation, 5′

Marie Brune, Mouna, Florence, Emilie et Sabrina décrivent tour à tour la personne qu’elles seraient si elles étaient un homme.

Tram de Michaela Pavlátová. France, République tchèque, 2012, Animation, 7′

Comme chaque matin, les hommes prennent le tramway pour se rendre au travail. Ce jour-là pourtant, au rythme des tickets introduits dans le composteur, le véhicule s’érotise et le désir de la conductrice transforme la réalité en un délire surréaliste et phallique.

Danny Boy de Marek Strobecki (Prix Format Court au festival Court Métrange 2011). Suisse, Pologne, 2010, Animation, 10′

Un jeune poète tombe amoureux dans un monde qui semble perdu. Une ville attend le déroulement d’un drame. Un temps de tristesse et de conformité, un temps de décisions. Derrière les nuages sombres du monde il y a de la lumière, de l’espoir et de la poésie.

I Am Tom Moody d’Ainslie Anderson (Prix Format Court au Festival Anima 2013). Royaume-Uni, 2012, Animation, 7′

Une virée surréaliste dans le subconscient d’un musicien étouffé qui voudrait chanter.

The Werepig de Sam Orti. Espagne, 2008, Animation, 17′

Deux Américains vont en Espagne et découvrent une nouvelle façon de manger ou de se faire manger.

Soirée Format Court « Best of Brest », les photos !

Notre dernier rendez-vous autour du court, organisé jeudi 14 mars et consacré au Festival de Brest, a été un franc succès. Vous avez été 98 à vous être déplacés au Studio des Ursulines pour voir les six films sélectionnés par le festival et l’équipe de Format Court. Quelques jours après la séance, voici l’album photo de cette soirée qui aura duré jusqu’à 23h30 (oups!) au cinéma et bien plus tard, dans un bar des environs.

Comme d’habitude, plusieurs équipes étaient présentes pour présenter les films et répondre aux questions de la salle. Ce soir-là, pour l’occasion, nous accueillions Charlotte Gadonneix (Festival de Brest), Edyta Janczak-Hiriart, Liana Babluani, Nastasia Legrand et Aziza Arslanova (productrice & comédiennes de « Que puis-je te souhaiter avant le combat ? »), Michael Rittmannsberger (réalisateur, « Abgestempelt ») et Hugues Hariche (réalisateur, « Flow »).

Photos : Julien Ti.i.Taming

Prochaine séance : jeudi 11 avril 2013 (carte blanche Lobster Films, en présence de Serge Bromberg) !

Réservations : soireesformatcourt@gmail.com

SHORT SCREENS, c’est parti pour de nouvelles aventures!

C’est parti pour de nouvelles aventures !

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Après deux mois de pause où l’équipe s’est démenée pour dénicher les dernières pépites du film court, SHORT SCREENS est fier de vous annoncer son retour et une nouvelle collaboration avec le cinéma Aventure pour le rendez-vous mensuel du court. Nous sommes très heureux en 2013 encore de pouvoir vous faire découvrir des séances de courts éclectiques et novateurs, dans l’ambiance chaleureuse des salles joliment rétro du cinéma Aventure au cœur de Bruxelles !

Rendez-vous au cinéma Aventure, Galerie du Centre 57, 1000 Bruxelles, tous les derniers jeudis du mois, à 19h30!
PAF : 6 €

Le calendrier des séances 2013 :

  • 28 mars
  • 25 avril
  • 30 mai
  • 27 juin
  • 25 juillet
  • 29 août
  • 26 septembre
  • 31 octobre
  • 28 novembre
  • 26 décembre

Une collaboration entre l’asbl Artatouille et FormatCourt.com

Festival d’Aubagne, la compétition de courts

Une sélection de 73 courts, subdivisés en 11 programmes, sera projetée au prochain Festival d’Aubagne, sensible à la relation entre l’image, la musique et le son, du 18 au 23 mars prochain. Format Court sera dans le coin pour vous faire part de ses préférences parmi les films en compétition. En attendant la tenue imminente du festival, voici l’identité de ces 73 films, qui seront également évalués par le jury des courts (Béatrice Thiriet, Maxime Gavaudan, Andy Gillet, Benjamin Celliez).

Liste des films en compétition

Animation

Agnieszka de Izabela Bartosik
Chase de Adriaan Lokman
Des Ailes de Pierre Hennequin
From Dad to Son de Nils Knoblich
Fuga de Juan Antonio Espigares
Head Over Heels de Timothy Reckart
How Dave and Emma got Pregnant de Joost Lieuwma
Kali le petit Vampire de Regina Pessoa
La boîte de Marie Bouchet
Natasha de Roman Klochkov
The people who Never Stop de Florian Piento
Topo Glassato al Cioccolato de Donato Sansone
Tram de Michaela Pavlátová
Vertige de Christophe Gautry, Mathieu Brisebras

Documentaire

Color Sample de Sune Blicher
Dans l’Oeil de la Forgeronne de Guy Pelletier, Pierre Bundock
Echoes de Javiera Tejerina-Risso Diego Ortiz
En un temps suspendu de Isabelle Solas
Freestyle Life de Adam Palenta
From To de Miranda Herceg
Hermeneutics de Alexei Dmitriev
Kinoki de Leo Favier Schroeter und Berger
La part disponible de Lucas Bernard
Living in Tengrela de Victorien V.

Expérimental

And death will be alright de WeAreTresGentil
Despertar de Maria Cifuentes Caruncho
Glucose de Mihai Grecu, Thibault Gleize

Fiction

Abgestempelt de Michael Rittmannsberger
Adivina quien viene a comer de Pepe Jordana
Blackstory de Stefan Brunner Christoph Brunner
Bonheur à tous de Loïc Guyot
Brot de Ahmet Tas
Camping de Pilar Guitierrez Aguado
Cargols! de Geoffrey Cowper
Chacun sa nuit de Marina Diaby
Chronique de l’ennui de Gari Kikoïne, Jeremy Minui
Coda de Jonathan Tomlin
Damiano – Al di là delle Nuvole Iniziano i Sogni de Giovanni Virgilio
Dans le pas de Léa de Renaud Ducoing
Don Enrique de Guzmán de Arantxa Echevarría
Dood van een schaduw de Tom Van Avermaet
Du poil de la bête de Sylvain Drécourt
Efímera de Diego Modino
Five Ways To Kill A Man de Christopher Bisset
Gabin, Le Mime de Cyril Rigon
Grace de Jo Kelly
Half the Hceart de Andreas Rochholl
Hsu Ji Derrière l’Ecran de Thomas Rio
Hunde wie wir de Anne Zohra Berrached
Korsoteoria de Antti Heikki Pasonen
L’Echarpe Rouge de Romain Nonn
La Bifle de Jean-Baptiste Saurel
La promotion de Manu Joucla
La ville Lumière de Pascal Tessaud
Landscape duet de Pierre Larauza
Le Chevreuil de Rémi St-Michel
Le Grand Combat de Jean-Nicolas Rivat –
Leon & Barbara de Marcin Mikulski
Les cerises du bateau de Sarah Hatem
Les Grossesses de Charlemagne de Matthieu Rumani, Nicolas Slomka
Lisière de Gregoire Colin
Nieuwpoort en juin de Geoffrey Couanon
Prora de Stephane Riethauser
Return to sender de Denise Hauser
Sex, Lies and Flowers de Jan Santroch
Soir de fête de David Robert
Something Will Turn Up de Thanos Psichogios
Tennis Elbow de Vital Philippot
The house on the water de Omer Regev
The Rattle of Benghazi de Paco Torres
Voisin Voisin de Timothée Augendre, Geoffroy Degouy
You Missed Sonja de Félix Koch
Zhalto Kuche de Maria Nikolova

Best of 8, le Best of d’Anima en 2012

Le Best of Anima 2012, le huitième du genre, édité par Folioscope en collaboration avec Les Films du Nord, regroupe huit courts métrages primés au Festival Anima en 2012, accompagnés de trois coups de cœur du festival et de quelques bonus (bande-annonce, autoportraits). Parmi cette sélection, on retrouve des œuvres présentées et récompensées dans de nombreux festivals, telles que « Luminaris » de Juan Pablo Zaramella ou « Pixels » de Patrick Jean. À leurs côtés, on découvre avec plaisir d’autres créations de tout horizon, issues des compétitions professionnelles comme étudiantes.

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Prix du meilleur court métrage international dans la catégorie professionnelle, « Romance » est un film du réalisateur suisse Georges Schwizgebel qui n’a besoin d’aucune présentation. Ce dernier a commencé sa carrière dans les années 1970 et a réalisé depuis une vingtaine de films. « Romance » commence par un plan large sur une jeune femme endormie qui se lève et prend sa valise pour partir en voyage. Parallèlement, un jeune homme quitte son domicile et monte dans un taxi pour se rendre à l’aéroport. Les deux voyageurs se retrouvent côte à côte dans l’avion, et leur esprit bascule alors dans une romance qui évolue au rythme d’une sonate de Rachmaninov. Le point de départ de « Romance » est en effet la musique qui démarre avec le réveil des personnages. Véritable dialogue entre le violoncelle et le piano, le film se passe entièrement de discours pour laisser ses personnages tourbillonner au rythme envoûtant de la partition.

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Cliquer sur l’image pour visionner un extrait du film

On passe alors du crayon à la peinture, de la couleur au noir et blanc, et on suit les personnages dans un mouvement perpétuel entre plusieurs niveaux, celui du rêve, du film qu’ils visionnent dans l’avion, et de la réalité. Quant aux images, elles ne disparaissent pas mais se transforment : une fenêtre devient un visage, tandis que la robe de la jeune femme se transforme soudain en un banc sur lequel elle s’assoie. Les corps se cherchent, se trouvent au détour d’une valse et s’enfuient, tandis que le spectateur se perd à la rêverie. Georges Schwizgebel nous fait voyager librement dans le temps et l’espace bien particulier de la romance, où les repères disparaissent peu à peu, et nous donnent le vertige.

Après la romance de Schwizgebel, on découvre celle de Roman Klochkov, intitulée « Natasha », lauréate du Prix de la SACD. Après « Administrators », film de fin d’études du KASK (Belgique), ce premier film professionnel décrit la situation du bien morose Nicolaï, immigré russe qui tente de s’intégrer en Europe afin de prouver à sa bien-aimée Natasha qu’il n’est pas un loser. Il aboutit dans un zoo, seule possibilité laissée aux immigrants illégaux.

Le film, croqué avec ironie, repose sur les clichés de chaque pays : pour être un bon Français, il ne faut aller qu’à la buvette et boire que du café ou de la bière, et pour être un bon russe, il faut vivre dans un frigo et boire de la vodka. « Natasha » développe des personnages attachants pleins de ressources, et non dépourvus d’humour, dont le talent est bien souvent bafoué par les nécessités du quotidien. Pianiste hors pair, Nicolaï noie son chagrin dans la vodka et la musique, et nous berce de mélodies tristement belles. Avec ce film, Roman Klochkov traite du statut des immigrants illégaux avec humour noir, dans un style graphique qui rappelle l’univers de la bande dessinée, avec des personnages aux contours noirs marqués et une explosion de couleurs et de détails.

Après quelques romances, faisons un détour par « The Wonder Hospital » du réalisateur sud-coréen Beomsik Shimbe Shim, Grand Prix du festival Anima, qui nous emporte dans un univers surréaliste au sein de « L’hôpital des merveilles », un lieu étrangement inquiétant. Lunettes 3D, miroirs déformants : l’héroïne erre dans un monde non défini où tout est fait pour altérer la vision. Dans cet hôpital de chirurgie esthétique, notre personnage avance dans une enfilade de pièce, les unes plus angoissantes que les autres, vers cet « après » tant désiré. Vues subjectives sur un décor étrange et absurde, plans filmés par une caméra de surveillance, dominance de blancs : tout est là pour accentuer l’ambiance pesante et hostile d’un lieu déjà peu accueillant. Comme si tout cela ne suffisait pas, une musique jazzy ajoute une ambiance de supermarché où l’on imagine bien un nouveau visage être vendu juste à côté du rayon « charcuterie ». Pourtant, intriguée et attirée, notre héroïne continue d’avancer et se laisse guider d’une pièce à l’autre comme dans un train fantôme, pour finalement aboutir sur la table d’opération. Mais cet « après », cette beauté tant recherchée dépend de critères tout aussi étranges que le lieu, et de la façon dont chacun tient le miroir entre ses mains.

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Dans un autre registre, « Shattered Past » de Boris Sverlow, Prix TV Paint du meilleur court métrage belge, montre un homme qui fait une attaque alors qu’il écrit ses mémoires. Il est alors propulsé en Russie environ soixante ans plus tôt, lorsque sa famille dut fuir le pays pendant la révolution. Le passé de cet homme est brisé et le réalisateur illustre brillamment la difficile reconstruction et la déformation inévitable du souvenir par une animation faite d’assemblage de papiers découpés, mélangeant dessins, photographies et prises de vues réelles. Des bribes de souvenirs et des images se reconstituent à mesure que le passé refait surface, à travers les yeux d’un enfant. « Shattered Past » nous plonge dans une fresque historique personnelle, basée sur des témoignages et des images morcelées, qui constituent malgré tout un ensemble percutant, où le fond et la forme se rejoignent pour nourrir le récit.

Agathe Demanneville

Best of Anima 8 (2012).  Edition : Folioscope et Les Films du Nord. Distribution : Twin Pics

Gunhild Enger : « C’est extrêmement étonnant, tout ce qu’une image peut révéler »

Gunhild Enger, que nous avons rencontrée le mois dernier à Clermont-Ferrand, est la réalisatrice de « Prematur », une confrontation drôle et tendue entre deux générations (enfants-parents) et deux cultures (Espagne-Norvège). Au Festival de Brest, le film nous avait beaucoup plu pour ses non-dits familiaux et sa forme épurée, le temps d’un trajet de voiture sans retour. Il avait remporté le Prix Format Court, le Prix européen du Conseil régional de Bretagne et le Prix des Passeurs de courts. À l’occasion de la projection du film dans le cadre de notre séance consacrée au Festival de Brest et au focus que nous consacrons à sa réalisatrice, nous vous invitons à faire la connaissance de Gunhild Enger, une jeune femme inspirée par les tableaux, les fictions teintées de réel, la radicalité, l’humour et l’inconfort.

Michel Vasset

© Michel Vasset

Tu as étudié le cinéma à Gothembourg et à Édimbourg. Pourquoi avoir cumulé les cursus ?

Avant d’étudier en Écosse, j’ai fait des études très théoriques en cinéma. Je voulais aussi connaître la pratique. À 22 ans, j’ai voyagé en train, je suis allé en France, au Canada, en Suède, en Angleterre. Je m’installais devant les écoles de cinéma qui m’intéressaient et j’observais ce qui s’y passait. Quand je suis arrivée à Édimbourg, j’ai aimé l’atmosphère, l’environnement était agréable. Ils aiment les scandinaves là-bas et les étrangers sont des êtres curieux. C’était donc une bonne chose d’être norvégienne !

J’y ai tourné « Bargain ». Après mon cursus, on m’a proposé de faire un master là-bas, j’aurais pu rester un an de plus, mais j’ai préféré rentrer en Norvège, acquérir plus d’expérience à Gothembourg où j’ai finalement étudié. L’école était petite, personnelle, avec des professeurs très intéressants. C’était chouette d’avoir une autre approche. Cela s’est ressenti dans mes films qui ont beaucoup changé depuis l’Écosse. J’y étais restée pendant 3 ans, j’avais besoin de retrouver une autre culture, la mienne pour le coup.

Qu’as-tu appris de tes différentes expériences ?

En Écosse, je faisais plutôt des comédies, des sketches. Quand je suis revenue en Norvège, avec l‘expérience et l’âge, j’étais devenue plus mature, plus sérieuse, je voulais continuer à faire de l’humour mais avec un touche plus sérieuse, plus complexe. « Passion » est le premier film qui y a recours, les films qui ont suivi s’inscrivent dans cette mouvance. À part ça, j’ai appris à me débrouiller, à fonctionner comme maintenant. Je réalise, je monte mes films. Comme les courts métrages ne sont pas très bien financés, j’ai du faire beaucoup de choses toute seule, même si depuis, j’ai reçu des fonds pour faire mes films.

À l’école, on apprend bon nombre de choses, mais on ne sait pas toujours comment diriger les acteurs. Dans tes films, tu fais parfois intervenir des acteurs professionnels comme amateurs. Comment as-tu appris à travailler avec eux ?

Je n’ai jamais reçu de conseils pour le jeu, je pense que je ne suis pas très bonne dans ce domaine. Je trouve que c’est difficile de diriger les pros comme les amateurs, c’est quelque chose qui manque d’ailleurs dans mes films. Très souvent, je connais très bien la situation décrite dans mes films, mais je ne suis pas capable d’en parler aux comédiens comme à une personne extérieure. Les comédiens, eux, veulent plus que ce que je le leur donne, ils veulent maîtriser la psychologie des personnages qu’ils interprètent, mais pour moi, les choses doivent rester simples.

Tu as tourné un documentaire qui nous a intrigués, « Back-To-Work », dans lequel un individu parle tout seul devant une assemblée silencieuse. Comment s’est conçu le film ?

À une époque, avant mon master, j’étais au chômage en Norvège. Quand ça t’arrive, après 3 mois, tu dois suivre un cours pour savoir comment postuler. À l’agence de l’emploi, l’instructeur était censé nous motiver, mais la situation était un peu étrange car il s’agissait d’un comédien qui jouait dans le tout premier soap-opéra norvégien au début des années 90 et c’était pour le moins étonnant de le retrouver dans ce lieu-là en train de faire son show. On était 40 personnes à l’écouter et la plupart n’avait pas reçu d’éducation, le message de cet homme n’a donc pas peu atteindre la majorité des personnes présentes. C’est pour ces raisons que j’ai demandé l’autorisation de filmer cette situation le deuxième jour, et le film est tiré de la fin de cette journée-là. Dans le film, l’homme est le seul à parler, ce qui compte, c’est ce qu’il dit et la manière dont il le dit. Après, « Back-To-Work » n’a été projeté que dans les musées ou les expositions. J’ai eu quelques refus de festivals et je n’ai pas insisté.

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Tu ne bouges pas ta caméra, tu fais un plan-séquence, tu restes focalisée sur une personne ou un groupe de personnes. C’est quelque chose que tu conserves de film en film. Pourquoi ?

Je ne sais pas si je vais faire que ça, mais je pense que c’est intéressant, ce concept de tableau. C’est extrêmement étonnant, tout ce qu’une image peut révéler. Dans « Back-To-Work », on est intrigué, on scrute les détails, par exemple quand l’homme quitte le cadre et y revient. Pareil pour la femme assise au premier plan : on a envie qu’elle se retourne. L’image, c’est vrai, est un peu hasardeuse parce que le film s’est fait très rapidement mais à la fin, ça marche quand même. Mon dernier film se compose aussi de tableaux, mais pas uniquement.

Pourquoi n’as-tu pas fait d’autres documentaires après ?

Je ne suis pas assez patiente.

Mais tu l’étais, ce jour-là…

J’aurais adoré faire un long documentaire sur le Pôle Emploi, une version longue de « Back-To-Work », y rester plusieurs mois et suivre les gens, voir ce qui allait leur arriver. Mais comme je te le disais, je n’ai pas été assez patiente. Là, ça n’a duré qu’un jour ! C’est tellement ludique d’inventer des histoires et pourtant, elles s’inspirent très souvent de la réalité. Mes fictions sont très souvent liées au réel, d’une certaine manière. Je devrais peut-être faire plus de documentaires mais le deal est très différent que dans la fiction. D’un côté, tu loues les services de quelqu’un, de l’autre, se pose véritablement la question de la confiance, de l’implication. Je ne pense pas avoir assez d’expérience dans le documentaire et c’est assez difficile de trouver la patience et le temps et de construire une relation de confiance avec les personnes que l’on filme.

Tu parles de patience, mais si on prend le cas de « Prematur », l’idée t’est venue en 2006, l’écriture a commencé en 2009, le tournage en 2010, et le film s’est terminé en 2012. Ça a pris du temps aussi.

Bonne question. Oui, c’est vrai, ça a pris du temps, mais à un niveau différent : je travaillais en même temps. Très souvent, je trouve très tôt le titre de mes films, j’avais celui de « Prematur » en tête en 2006. Mon frère était sur le point d’avoir son premier enfant. Je me souviens également qu’à l’époque, ma mère était extrêmement enthousiaste devant cet événement mais qu’elle était aussi focalisée sur les éventuels risques. Ainsi, j’avais une très vague situation qui allait me servir pour la suite, j’ai écrit un peu dessus en 2006 et je l’ai réellement développée quand l’opportunité est arrivée plus tard en trouvant un producteur et des fonds.

« Passion », que tu as mentionné à plusieurs reprises, est un film très énigmatique. Est-ce que c’est un projet qui a été difficile à mettre en place ?

« Passion » s’est fait sans aides extérieures. Avec mon co-réalisateur, Marius Ektvedt, on a voulu faire ce film pour nous prouver qu’on pouvait le faire. Grâce à des films commerciaux qu’on avait tourné avant, on a pu financer « Passion ». Par la suite, on a reçu une aide pour gonfler le film en 35 mm, c’est le seul film que j’ai pu faire ainsi, tous les autres sont en numérique.

Le film est né d’une conversation que j’ai eue avec un ami. Je lui ai demandé ce qu’il aurait fait si en rentrant, il était tombé sur son amie au lit, recouverte de crème fraîche ! L’image est restée, j’en ai parlé avec Marius, on a voulu expérimenter quelque chose d’un peu radical car on avait l’opportunité de le faire, on a cherché également à tester l’humour triste. Notre but était d’utiliser tout ce qu’une seule image pouvait offrir, ce qui a demandé de nombreuses prises. En tournant ce film, j’ai beaucoup appris, j’ai compris par la pratique ce qui était possible et ce qui ne l’était pas. J’ai surtout identifié ce que je pouvais faire en termes d’humour et de strates pour être plus significative à la fin.

Dans ce film-ci et dans les autres, on ressent une forme de voyeurisme. Est-ce quelque chose de conscient ou non ?

L’inconfort est très important dans tous mes films, en fait. Beaucoup d’individus, y compris moi, se sentent mal à l’aise dans leur vie et dans leurs expériences. C’est un sentiment très intéressant à traiter parce que les couches et les émotions sont extrêmement différentes.

Quels personnes ont pu t’inspirer dans ton travail ?

J’ai été très inspirée par les images et les thématiques des films d’Ulrich Seidl (« Paradis : Amour », « Import/Export »), de Roy Andersson (« Nous, les vivants », « Chansons du deuxième étage ») et de Ruben Östlund (« Play », « Involuntary », « Incident by a Bank »). J’ai été également très inspirée par ma famille. Mes parents, leur génération m’ont apporté beaucoup d’idées. L’idée de « Prematur » est venue de ma mère, mon nouveau film, « A Simpler Life », lui doit beaucoup aussi.

Comment as-tu choisi le cadre clos de « Prematur » ? Qu’est-ce qui te plaisait dans le principe d’être coincé dans une voiture et de ne pas pouvoir s’en échapper ?

C’était le concept du début, il était très important. En étant coincé avec ces quatre personnes pendant 17 minutes, quelque chose devait forcément se passer. Parfois, les gens s’abaissent, sortent du cadre, comme pour « Back-To-Work » et c’est satisfaisant de ne pas pouvoir tout voir. À partir du moment où les objets sont hors-champ, on pense différemment à eux que si ils avaient été immédiatement repérables. Je crois que pour ça, j’ai été influencé par Ruben Östlund. J’aime beaucoup sa conception du cadre et de la photographie.

« Prematur » est très minimaliste dans ses décors, son maquillages, sa musique. Seules les voix et les réactions des personnages sont expressives. Pourquoi un choix aussi radical ?

C’était voulu dès le début. J’ai expérimenté ça pour la première fois avec « Passion », l’histoire tenait d’elle même, il ne fallait pas ajouter d’effets. Je me méfie en général de la musique, j’ai l’impression qu’on veut m’emmener quelque part, vers une autre émotion, que ça souligne la situation. Pour le coup, « A Simpler Life » ne comporte pas de musique non plus !

Comment as-tu casté les comédiens de « Prematur » ? Les as-tu fait jouer dans la voiture pour les voir en action ?

Oui, je voulais me familiariser aussi à la situation et en même temps travailler très concrètement, autant avec le cadre qu’avec les comédiens. Le film se passe entièrement dans une voiture, on entend seulement ce qui se passe à l’intérieur et pas à l’extérieur. Je voulais être au plus proche du scénario. Pour ça, j’ai dû emprunter la voiture de ma mère pendant quelques mois (rires) !

Qui sont les comédiens que tu as retenus ? Sont-ils des professionnels ou des amateurs ?

Les deux. Le personnage du père est un acteur non professionnel, je l’ai trouvé un jour dans la rue, en train de promener son chien. Le projet lui a plu, il a été formidable. Pour le rôle de la mère, celui d’une femme forte, ça a été bien plus difficile. J’ai  longtemps cherché du côté des comédiennes norvégiennes de cinéma et de théâtre de cet âge-là et ça n’a absolument rien donné. J’étais assez désespérée de ne pas trouver la pièce de puzzle qui fonctionnerait avec les autres. On m’a conseillé une comédienne qui joue dans un théâtre de marionnettes. Comme elle était en tournée avec sa compagnie, je l’ai rejointe et on a fait le casting sur un parking pendant sa pause déjeuner. Quant à l’actrice espagnole, je l’ai repérée dans un catalogue d’agence de comédiennes, j’aimais son visage et son expression, et ça a collé.

Les représentations de soi et des autres t’intéresse. Pour quelle raison ?

À mes yeux, il y a énormément d’incompréhension et de problèmes de communication dans le monde, les gens ne veulent pas se comprendre et se rencontrer. Je trouve intéressant d’essayer de dresser le portrait de ces situations, d’avouer qu’on peut se tromper, que la culture d’où on vient peut créer des malentendus quand on s’entretient avec une autre culture. Chacun a son interprétation de la réalité, souhaite exprimer des choses mais fait potentiellement du mal à l’autre au passage. C’est ce qui traverse « Prematur » : chacun veut que la situation soit la meilleure possible mais les mauvaises choses sont dites. C’est quelque chose qui arrive souvent dans la vie, je pense. Mais il y a des clés à ces problèmes : faire des films par exemple !

Propos recueillis par Katia Bayer

Articles associés : la critique de « Prematur », Gunhild Enger : l’expérience de la temporalité

Gunhild Enger : l’expérience de la temporalité

Diplômée de l’Edinburgh College of Art, Gunhild Enger est une réalisatrice norvégienne dont l’univers artistique, en marge du paysage cinématographique actuel, interpelle grandement. L’absence de musique et l’usage de longs plans fixes révèlent une véritable curiosité pour la nature humaine et ses petits travers.

En cinq films, Gunhild Enger a imposé un style personnel où elle porte un regard à la fois distancié et absurde sur la réalité qui l’entoure. De « Bargain » (2006), son film de fin d’études, à « A Simpler Life » (2013), son dernier opus, en passant par « Passion » (2008), « Back-To-Work » (2011) et « Prematur » (2012), la réalisatrice aime créer des situations atypiques au travers desquelles les personnages évoluent dans un monde à part. Qu’ils soient noyés dans de longs plans larges ou opprimés dans des plans serrés, ils démontrent tous leur incapacité à communiquer avec les autres. Chez Gunhild, l’approche formelle rend compte de l’importance du plan et du cadre, dévoilant un sens brillant du détail. Tel un tableau renaissant, l’avant et l’arrière-plan sont au même niveau montrant à quel point la réalité est une extraordinaire mosaïque de faits et gestes ordinaires. Plan et narration sont ainsi mis côte à côte attestant d’une jolie maîtrise de la dramaturgie cinématographique.

Bargain

Pour son film de fin d’études, nominé aux prestigieux BAFTA, l’artiste fait preuve d’un sens de l’humour désopilant en mettant en scène un quadragénaire et un couple de septuagénaire habités par l’acquisition d’offres pas chères, de bonnes affaires (bargain). Quand l’un décide de célébrer Noël en février car c’est moins cher, les autres font une obsession sur le papier toilette. Avec ce premier film, Gunhild développe un univers absurde parsemé de cet humour dont seuls les Anglais ont le secret. La caméra très mouvante et la musique entrainante participent du côté comique du film. Loin des contraintes formelles auxquelles elle semble s’être astreint par la suite, la réalisatrice offre un petit film à mi-chemin entre le documentaire et la fiction.

Passion

Une femme d’un certain âge rentre chez elle, se déshabille, se douche, se couche nue sur le lit puis, se badigeonne de crème fraiche et attend patiemment son mari. Quand celui-ci arrive et la découvre dans cette posture, il ne sait comment réagir. Réalisé avec une immense économie de moyens, le film dispose d’une caméra fixe qui immortalise le temps qui passe, l’angoisse de l’attente ainsi que l’angoisse du vide comme celle que l’on retrouve dans les peintures de Hopper. Co-réalisé avec Marius Ektvedt, « Passion » est de ces films qui marquent tant la mise en scène soignée est subtile et intelligente. Très peu monté, le film est une expérience de la temporalité cinématographique sur un spectateur à la fois amusé et mal à l’aise.

Back-To-Work

À l’époque de « Back-To-Work » Gunhild Enger était sans travail et assistait à des séminaires organisés par l’organisme norvégien de demandeurs d’emploi. Après avoir assisté à plusieurs cours donné par un animateur, il lui est venu l’idée de réaliser un court métrage qui utiliserait le même dispositif que dans son film précédent. L’intérêt était de voir de quelle manière la forme allait rencontrer la réalité documentaire puisqu’ici rien n’était vraiment écrit à l’avance. Le film échappe tout naturellement à une narration classique. La réalisatrice pose sa caméra à un certain angle de la classe et ne la bougera plus tout au long des 16 minutes que dure le film. Et le dispositif induit la narration car une autre manière de filmer n’aurait certes pas rendu la même tension dramaturgique. Enger, qui n’avait pas l’autorisation de filmer les autres participants, est littéralement invisible, effacée ou plutôt elle est parmi les autres et par la force des choses, elle est le spectateur aussi. Le cours, lui, prend subitement des allures de spectacle et se transforme en un splendide One-Man-Show. Quant au propos du film, c’est celui d’un cours de remise en forme, de coaching. Le décalage entre l’animateur et l’assistance s’agrandit à mesure qu’il s’enfonce dans des théories philosophiques si loin de la réalité des demandeurs d’emploi venus trouver un petit coup de pouce psychologique. Interpellant avant tout, « Back-To-Work » est une expérience en soi.

A Simpler Life

Dans son dernier film tourné juste après « Prematur » et commençant à peine son parcours en festival, Enger s’attaque à la solitude d’un couple de retraités entourés de multiples gadgets nécessaires à faciliter leur vie. Encore une fois, l’intérêt du film réside plus dans la forme que dans son contenu. Parce qu’Enger a l’art et la manière, elle ne craint pas d’assembler des plans fixes les uns aux autres faisant drôlement ressentir l’ennui et le vide existentiel du couple. Au-delà des plans larges où la femme s’exténue à la pratique d’ exercices physiques et l’homme recherche la façon la plus adéquate d’éviter le moindre effort, Enger se fait critique du monde contemporain. Ici, le couple ne se voit plus, ne s’entend plus, ne se parle plus, ne s’écoute plus, il n’y a plus aucune interaction et communication entre les individus. Seuls les bruits des machines qui les entourent semblent répondre mécaniquement à cette quête de l’inutile car l’essentiel a définitivement disparu. Sombre, pessimiste et tellement absurde, « A Simpler Life » est un exercice de style réussi !

Marie Bergeret

Articles associés : la critique de « Prematur », l’interview de Gunhild Enger

Gunhild Enger, Prix Format Court au Festival de Brest 2012

Gunhild Enger, réalisatrice norvégienne de 33 ans, comptabilise cinq courts métrages ainsi que de nombreux vidéos clips, spots d’art vidéos et autres captations institutionnelles. Elle est diplômée de la prestigieuse Edinburgh College of Art (équivalent des Arts décoratifs) ainsi que de l’École de Réalisation de Gothenburg. Ses films s’inscrivent d’ailleurs à cheval entre un cinéma assez traditionnel et le champ de la performance artistique.

Lors du dernier Festival de Brest, nous avions récompensé Gunhild Enger du Prix Format Court du Meilleur Film pour son court métrage, « Prematur », que nous programmons ce jeudi 14 mars 2013 au Studio des Ursulines (Paris, 5ème) dans la cadre de notre séance « Best of Brest ». Deux jours avant la projection, nous vous proposons de plonger dans l’univers très personnel de sa réalisatrice, teinté de sobriété et de minimalisme.

Retrouvez dans ce dossier spécial :

La critique de « Prematur »

Gunhild Enger : l’expérience de la temporalité

L’interview de Gunhild Enger

Rappel. Soirée « Best of Brest »/Format Court ce jeudi 14 mars au Studio des Ursulines‏‏ !

Ce jeudi 14 mars 2013, dès 20h30, le site internet Format Court vous invite au Studio des Ursulines (Paris, 5ème) à découvrir 6 films sélectionnés au dernier Festival européen du film court de Brest, en présence de nombreux invités : Massimilano Nardulli (programmateur artistique du festival), Hugues Hariche (réalisateur), Michael Rittmannsberger (réalisateur), Edyta Janczak-Hiriart (productrice), Liana Babluani (comédienne), Nastasia Legrand (comédienne) et Aziza Arslanova (comédienne).

Programmation

– Tiger Boy de Gabriele Mainetti (fiction, 20’, Italie, 2012, Goon Films).
– Abgestempelt de Michael Rittmannsberger (fiction, 11’, Autriche, 2012, DCS Filmproduktion)
– Flow de Hugues Hariche (fiction, 22’49ʺ, France, 2012, Kazak Productions)
– Noise de Przemyslaw Adamski (animation, 7’, Pologne, 2011, Studio Munka).
– Que puis-je te souhaiter avant le combat ? de Sofia Babluani (fiction, 15’37ʺ, France, 2012, Kometa Films)
– Prematur de Gunhild Enger (fiction, 17’, Norvège, 2012, Motlys A/S).

Infos pratiques

– Projection des films : jeudi 14 mars, à 20h30. Durée du programme : 93′
– Adresse : Studio des Ursulines – 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris – Accès : BUS 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon).
 RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée).
– Entrée : 6 € !
– Réservations vivement recommandées : soireesformatcourt@gmail.com
– Prochaine séance : le jeudi 11 avril 2013 (carte blanche à Lobster Films) !

Concours Audi talents awards, candidatures ouvertes

L’ouverture des dépôts de candidatures du concours Audi talents awards dans les catégories « court métrage », « musique à l’image », « design » et « art contemporain » est officiellement lancée depuis le 1er février. Créé en 2007, le programme de mécénat culturel Audi talents awards a pour vocation de détecter et soutenir des esprits avant-gardistes. Les candidats auront jusqu’au 15 avril 2013 – date de clôture du concours – pour déposer leurs projets. Le jury, composé de personnalités parmi lesquelles des ambassadeurs Audi, désignera les lauréats en mai lors d’une délibération en direct.

Le concours pour tous les artistes « avant-gardistes » est gratuit et ouvert à toute personne majeure francophone résidant en France métropolitaine. Les candidats sont invités à retirer les dossiers de candidatures sur Audi.fr/ATA, puis à les déposer ou à les envoyer à l’agence événementielle de Audi France, Double2 (60 rue de la Joncquière 75017 Paris).

Pour en savoir plus, téléchargez l’appel à candidatures pour le court métrage ou pour les autres catégories sur le site d’Audi.

Retrouvez également le sujet consacré à Rony Hotin, lauréat des Audi talents awards en 2012, pour son film « Le vagabond de St-Marcel ».

Prochaine soirée Bref, mardi 12 mars à 20h30 : carte blanche au Festival de films de femmes de Créteil

À l’occasion des trente-cinq ans du Festival international de films de femmes de Créteil, Bref a souhaité offrir une carte blanche à ses organisatrices. Formule anniversaire à volonté… Trente-cinq ans déjà ! Et les courts courent toujours à Créteil. Au menu : du délire urbain taïwanais à la fête de la tomate, on retient notre souffle avant de plonger dans des lubies zoophiles ou trichologiques… Telle est la salade composée de nos coups de coeur, de ceux du public et des jurys. Après ces amuse-gueules, venez souffler les bougies avec nous, du 22 au 31 mars. L’équipe du Festival.

bref

Programmation

Rêve éveillé de DJ Chen Yin-Jung Taïwan, 2009, couleur, 11 mn.

Shorty n’est pas si petit, ni si grand. Il ne se trompe pas tellement. Être citoyen au vingtet- unième siècle, c’est ressembler au trafic de Taipei. Ambigu et déroutant.Shorty, lui, à vingt heures, rencontre une théière.

Profanations de Lucia Sanchez. France, 2008, couleur, 26 mn.

À seize ans, je faisais partie d’une confrérie religieuse. Je me souviens qu’un jour, j’ai passé toute la journée sur le trottoir : il fallait qu’en échange d’une carte postale, je récolte de l’argent pour les fleurs de la Vierge… Je me souviens qu’un garçon de trois ans a demandé à son père : “Qu’est-ce qu’il fait là, le Monsieur ?”, en parlant de moi ! Et le père lui a répondu qu’on m’avait raconté une histoire qui m’avait lavé le cerveau…

Partouze de crevettes de Momoko Seto. Cuisine parisienne, 2008, noir et blanc, 30 sec.

Quelques instants d’amour fou pour neuf crevettes.

Minuit moins dix/Minuit moins cinq de Sabine Massenet. France, 2008, noir et blanc, 8 mn.

Une fable autour des lieux désertés de personnages empruntés aux films d’Alfred Hitchcock. Le spectateur déambule seul dans des espaces vides à la recherche de l’autre, disparu.

La sole, entre l’eau et le sable de Angèle Chiodo. France, 2012, couleur, 15 mn.

Au cours de l’Évolution, la sole est devenue asymétrique et aujourd’hui, personne ne sait exactement comment cela s’est passé. En 2010, une équipe de chercheurs a tenté de percer ce secret. Ce documentaire est le récit de leurs aventures.

Miramare de Michaela Müller. Croatie/Suisse, 2009, couleur, 8 mn.

Un regard sur la vie aux frontières de l’Europe où les touristes tentent de se relaxer pendant que des immigrés “clandestins” se battent pour avoir accès à une vie meilleure. Mais lorsqu’une tempête s’abat sur les rives, la différence entre les riches et les pauvres s’efface.

Chacun son goût de Hyun Hee Kang. France, 2010, couleur, 3 mn.

Poilu ou pas ? Une question de goût.

Jennifer et Tiffany de Momoko Seto. Cuisine parisienne, 2011, couleur, 2 mn.

Un intense moment d’amour entre Jennifer et Tiffany.

Infos pratiques

Mardi 12 mars : Séance à 20h30
MK2 Quai de Seine – 14 Quai de la Seine – 75019 Paris – M° Jaurès ou Stalingrad
Tarif : 7,90 € (cartes illimitées acceptées)
La projection sera suivie d’une rencontre

Festival Court Métrange, appel à films

Connaissez-vous Court Métrange ? Ce festival qui se déroule chaque année en octobre à Rennes, en Bretagne, a pour but de promouvoir et faire découvrir la création de courts-métrages de fiction à caractère fantastique, insolite ou étrange. Pour la dixième édition, Court Métrange ouvre les inscriptions jusqu’au 30 mai 2013.

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Pour télécharger le règlement et la fiche d’inscription pour l’édition 2013 sur le site du festival (http://www.courtmetrange.eu/) ou depuis filmfestplatform (http://www.filmfestplatform.com/).

Pour suivre Court Métrange toute l’année, rendez-vous sur son nouveau blog (http://courtmetrange.wordpress.com/) et sur facebook (http://www.facebook.com/court.metrange).

Sekhar Mukherjee : « L’Inde est un pays dingue et complexe, qui commence doucement à raconter ses histoires par le biais de l’animation »

Créé en 1985, le département de l’animation du National Institude of Design (NID) à Ahmedabad se profile aujourd’hui comme la première école d’animation en Inde. Son directeur Sekhar Mukherjee était invité en tant que membre du Jury international à Anima cette année. Pour l’occasion, il a concocté une petite rétrospective représentative de la diversité de leur production. À peine arrivé au festival, Sekhar a pris un moment pour parler de l’institut, de l’Inde et réinventer le monde à travers son médium de prédilection.

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Quelle est la philosophie du département d’animation au NID qui le distingue des autres écoles?

Notre philosophie est : apprendre en faisant. Notre programme se base essentiellement sur l’acquisition des expériences qui viennent compléter les connaissances théoriques et techniques. Nous mettons énormément d’importance sur la narration. Il faut avoir une histoire à raconter. Il importe peu de savoir si on est plus doué en telle technique ou moins familier avec telle autre, du moment où l’on a une histoire, une idée originale, qui n’a pas encore été explorée dans le médium de l’animation. Du coup, nous sommes ouverts à tous les profils, aux gens de tous les horizons, ce qui est tout à fait conforme à la nature pluridisciplinaire de l’être humain. Nous invitons nos élèves à se découvrir et à conter leurs histoires de manière originale. C’est justement l’idée qui sous-entend la rétrospective concoctée pour le Festival Anima.

Comment se passe l’enseignement, notamment technique, au NID ?

La première année, les élèves de toutes les sections suivent des cours de base communs (géométrie, dessin, couleurs, matières, etc.) La deuxième année est consacrée aux cours techniques (illustration, son, etc.) et à des cours de raisonnement, comme l’écriture de scénario ou le langage cinématographique. Ensuite, en troisième, ils choisissent un médium et une technique à approfondir. La quatrième et dernière année est consacrée à la réalisation d’un projet, en partie à l’école et en partie dans un milieu professionnel. Dans le programme post-graduat, c’est différent. Les élèves viennent d’un milieu précis et ont déjà une certaine expérience. Ils suivent alors des cours théoriques rigoureux et très variés (anthropologie, philosophie, histoire du cinéma, politique…) Nous apprenons autant de nos élèves qu’eux de nous. Par exemple, en suivant le travail de Partha Pratim Das sur le film « Un fleuve nommé Kopai », j’ai appris énormément de choses de ma propre région d’origine, le Bengale.

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« Un fleuve nommé Kopai » de Partha Pratim Das

Nous avons longtemps essayé d’avoir un rapport de un-à-un entre enseignants et élèves mais nous nous rendons compte aujourd’hui que c’est est luxe et que la pression d’accepter de plus en plus de gens monte. Nous fonctionnons un peu à l’instar des ashrams [des ermitages servant également de lieu d’enseignement]. Tout le monde réside sur le campus. D’ailleurs, la localisation de l’institut s’y prête à merveille, sur le fleuve Sabarmati, pas loin de l’ashram de Gandhi lui-même.

Comment l’animation a-t-elle évolué en tant que genre dans un pays comme l’Inde, dominé par le cinéma de Bollywood? Est-ce un genre professionnellement viable aujourd’hui?

Au début, le genre a eu du mal à connaître le succès. Il ne générait pas beaucoup d’emplois, ce qui est une condition indispensable en Inde. Suite à la révolution informatique et l’arrivée d’Internet dans les années 90, les choses ont évolué. Avant, avec les techniques conventionnelles, le travail d’animation étéé laborieux, si on se trompait, il fallait tout recommencer. Maintenant tout cela change.

Et puis, le phénomène d’outsourcing a bouleversé toute la nation. À cette époque, beaucoup de professionnels en animation ont été recrutés par des sociétés de communication. Ils cherchaient plutôt des techniciens que des narrateurs. Grand nombre d’écoles d’animation privées ont alors poussé comme des champignons et le genre a vraiment eu un essor. Heureusement, le NID n’est pas tombé dans ce piège, sans doute grâce à son statut d’institution nationale, son financement officiel et sa longue histoire. Aujourd’hui avec la crise financière, toutes ces petites écoles et de nombreux studios d’animation commencent à tomber comme des mouches. La jeune génération se rend compte d’avoir été bluffée par cette chasse au dollar. Ceci est aussi dû à l’arrivée des médias sociaux qui font que toute opinion peut dorénavant être exprimée. Dans un pays comme l’Inde, tout ça est très opportun. Il suffit de regarder les exemples récents : la révolution menée à l’échelle nationale pour améliorer la situation des femmes, la communauté LGBT qui réclame ses droits, de même que les eunuques, les mouvements contre la corruption politique, etc.

L’Inde est un pays dingue et complexe, qui commence doucement à raconter ses histoires par le biais de l’animation. Aujourd’hui, nous communiquons de plus en plus à l’aide des images. Le langage textuel évolue mais la représentation picturale, antérieure même à la langue parlée, est universelle et intemporelle. Le paysage change avec l’économie globale et les professionnels polyglottes. On communique avec des smileys. On raconte ses histoires par une narration graphique, que ce soit sur les portables, sur Internet, sur les smartphones et leurs applications ou les jeux vidéos. De plus en plus de gens veulent se lancer dans l’animation. Même les grandes boîtes d’apprentissage en ligne ou des écoles d’ingénierie nous contactent afin de dénicher des narrateurs et des conteurs pour communiquer avec leurs clients. Les animateurs se trouvent dans toutes les couches de la communication. Donc l’animation commence certainement à devenir professionnellement viable.

La nouvelle Inde que je décris est très bien représentée dans le film « Season’s Gweetings ». Ce film très humoristique parle des fêtards dans le contexte spécifique de Bangalore, qui est la Silicon Valley de l’Inde. Là, tout le monde travaille à des fuseaux horaires différents et personne n’a le temps de se reposer. Les deux auteurs ont imaginé toutes les différentes sortes de fêtards possibles et de l’autre côté, le pauvre bourreau de travail qui rate tout l’amusement. C’est un tout petit film mais c’est marrant. Il a une portée universelle, tout le monde pourrait s’identifier aux personnages.

L’industrie filmique en Inde est énorme. L’envol de l’animation nous permet aussi de remettre en question la manière dont nous gérons la production filmique. Le cinéma, même à Bollywood, prend une nouvelle direction, la qualité de la narration s’améliore, même si on s’attend toujours à un peu plus de maturité à ce niveau. Mais on voit beaucoup de potentiel. Grand nombre de diplômés en animation sont recrutés dans le cinéma de live-action. Ils sont très prisés. Et puis, la culture de freelance est fort présente en Inde, donc il est plus facile de ne pas s’engager dans une seule boîte. À l’instar des Européens, les Indiens se donnent aujourd’hui la possibilité de faire plusieurs choses variées et d’éviter de stagner. C’est une bonne évolution selon moi, même si cela entraîne une certaine baisse de sécurité professionnelle.

Quelle place occupe le NID dans le paysage de l’animation indienne?

Nous sommes mieux cotés que jamais. C’est pourquoi nous avons besoin de plus d’enseignants. Mais il est très important de ne pas régurgiter la même chose année après année. Nous mettons notre programme régulièrement à jour. Lors de la décennie précédente, les écoles ont prétendu faire des étudiants des Spielberg. Les jeunes se sont ruinés avec des emprunts à la banque. Encore plus bizarre, on apercevait comme une nostalgie colonialiste lorsque des écoles commençaient à proposer des diplômes britanniques. ?a a séduit beaucoup de gens, mais à quoi sert un diplôme britannique si on ne sait même pas qui on est. Tout cela est en train de changer. Nous sommes en train de vivre une transition sociale majeure. C’est pour cela que le médium de l’animation et des romans graphiques sont tellement importants, parce qu’ils permettent de raconter des histoires personnelles.

Isabel Herguera, qui était présente ici l’an dernier avec son film « Àmàr », s’associe activement au NID. Est-ce que de telles collaborations internationales sont courantes ?

Ce genre de partenariats est très important pour nous. Nous avons toujours eu une culture collaborative. Le NID était longtemps mieux connu à l’étranger qu’en Inde. Nous avons accueilli beaucoup d’animateurs internationaux, comme Adrian Frutiger, qui est responsable du sigle de l’école. On peut se le permettre parce qu’on a un subventionnement de l’état mais en même temps, on n’est pas gouverné par le système des universités.

Isabel nous a contactés en 2004 en proposant un atelier d’animation, que nous avons accepté. En 2005, nous avons organisé avec elle un workshop sur l’animation expérimentale, qui fut un grand succès. Parmi les participants, il y avait également Partha Pratim Das, réalisateur du film « Un fleuve nommé Kopai ». Ces personnes sont aujourd’hui devenues des professionnels du milieu. Et nous avons continué notre partenariat avec Isabel. Son expérience dans l’organisation de festivals nous a aussi aidés à mettre en place notre propre festival biennal, Chitrakatha. La relation professionnelle entre nous était tellement bonne qu’on a décidé de se lancer dans des coproductions. Elle vient avec un projet qu’elle élabore dans le cadre d’un atelier et nous lui fournissons une équipe de diplômés talentueux. C’est ainsi que « Àmàr » et « Bajo La almohada » ont vu le jour. Ces coproductions internationales créent une nouvelle sorte d’animation, en encourageant l’expérimentation artistique et l’échange culturel et technique. Car l’industrie aura toujours ses formules et son système productiviste, mais nous cherchons à faire autrement. Cet échange marche très bien et on continuera dans cette voie.

Vous êtes membre de jury international à Anima. Quels sont vos principaux critères pour évaluer un film d’animation?

C’est la première fois que je viens ici, même si, par mon métier, je suis un habitué de jurys. Je suis toujours très curieux de découvrir les films, de savoir ce que les jeunes d’aujourd’hui veulent raconter. Pour moi, le critère premier reste l’histoire. Il faut que le film touche tout son public, des plus avertis au plus lambda. Si elle est censée être drôle, il faut que le public rie. Si elle est triste, elle doit nous faire pleurer. C’est après que je regarde les autres aspects du film : l’esthétique, la forme, le travail technique. Bref, comment la forme répond au fond et incorpore l’histoire.

Quelle place occupe le format court dans le cinéma de l’animation ?

Je trouve que ce format est absolument indispensable. Il répond mieux aux besoins de la société impatiente d’aujourd’hui. Les gens n’ont pas le temps de regarder les films longs. C’est différent avec le long métrage, on se prépare psychologiquement et pratiquement pour le faire. Mais regarder un film d’entre 10 et 30 minutes devient de plus en plus difficile avec le rythme de vie actuel. Par conséquent, le format très court prend son élan, comme par exemple le film « Season’s Gweetings ». Avec mon agenda chargé, si je reçois un clip de 30 secondes sur mon téléphone portable, et que ce film réussit à raconter quelque chose de manière pertinente, cela me fait réfléchir, ça m’apprend quelque chose. C’est une petite pause très agréable. Dans le milieu de l’animation, le court a une portée importante. D’ailleurs je conseille à mes élèves de ne pas se lancer directement dans le long. C’est un plus grand défi de réussir un court métrage et c’est d’autant plus gratifiant quand ça marche. Maîtriser le court permet d’avoir une bonne assise, pour pouvoir par la suite s’attaquer aux formats plus longs. D’ailleurs, un autre genre intéressant qui se répand est le film anthologie, c’est-à-dire le long métrage constitué de plusieurs courts métrages. Un bel exemple dans l’animation est le film français « Peur(s) du Noir ». Le court métrage restera l’avenir du cinéma. Voir un long métrage est comme aller à un pique-nique, cela nécessite de la préparation. Le court métrage est bon à tout moment, c’est comme un petit shot de tequila qui nous revigore !

Propos recueillis et traduits par Adi Chesson

Aricles associés : l’interview d’Isabel Herguera, la critique d' »Àmàr » d’Isabel Herguera

Nuit du Court en Haute-Provence, appel à films

Vous êtes cinéaste, vidéaste professionnel ou non ? Vous aimez le genre comique, aventure, policier, action et autres ? Vous avez réalisé des films ? Vous voulez partager vos œuvres sur un écran géant et dans un lieu exceptionnel ? Alors, n’hésitez pas, envoyez vos films à la Nuit du Court en Haute-Provence, une première manifestation autour du film court, qui aura lieu l’été prochain en Haute-Provence.

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Le festival est à la recherche de réalisateurs, de producteurs (professionnels ou non) qui accepteraient de diffuser leurs films à titre gracieux lors de leur première édition cinématographique du court en Haute-Provence. L’objectif de cet évènement qui n’est ni une compétition, ni un festival doit permettre aux artistes de s’exprimer au travers leurs œuvres dans un cadre agréable qu’est le cinéma en plein air.

Les films recherchés sont plutôt des comédies de courte durée (moins d’une quinzaine de minutes). Les films d’animation, d’humour et ceux dont la musique joue un rôle important sont fortement sollicités, mais toute autre proposition est la bienvenue.

Cette manifestation bénéficie d’une projection en cinéma numérique 2D sur écran géant et de très bonnes conditions sonores Dolby Digital Stéréo… Les projections s’effectueront l’été prochain dans la cour du château des Templiers à Gréoux-les- Bains (04); site de spectacles estivales équipé de 600 places assises en gradins.

La programmation privilégie les films selon les critères suivants :

– Durée de 1 de 15 minutes (générique compris).
– Sous-titrages français ou anglais (le cas échéant) obligatoires pour les films non francophones.
– Genres acceptés : fiction, docu-fiction et animation.
– Formats vidéos acceptés : DVD, Blu-Ray (zone 2), clé USB, carte SD, fichiers mov, avi, mpeg4 (H264) de très bonnes qualités, résolution souhaitée 1920 X 1080. (Téléchargement et DCP nous consulter).
– La musique doit être originale, libre de droit, et/ou en accord avec la SACEM.

Les films doivent être envoyés à l’adresse suivante, avant le 20 Mai 2013, à :

Cinéma de Pays «Nuit du Court-Métrage»
Place des Aires – 04800 GREOUX-LES-BAINS – France
Plus d’informations sur : http://nuitducourt.blogspot.fr/ – Courriel : cinepays@orange.fr
Contact court-métrage : Jean-Marie Cayet

Jane Campion présidera le Jury des courts métrages et de la Cinéfondation du prochain Festival de Cannes

L’info a été largement répandue hier : Steven Spielberg présidera le Jury du 66ème Festival de Cannes (15-26 mai). Mais il y a moins d’un mois, on entendait parler d’une autre présidence, moins médiatisée : Jane Campion présidera le Jury des courts métrages et de la Cinéfondation du prochain Festival de Cannes, succédant dans ce rôle à Jean-Pierre Dardenne, Michel Gondry, Hou Hsiao Hsien, Martin Scorsese ou John Boorman.

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© AFP

Réalisatrice néo-zélandaise, Jane Campion est remarquée dès ses débuts : lauréate de la Palme d’or du court métrage en 86 pour « Peel », elle capte l’intérêt de la critique internationale avec « Sweetie », son premier long métrage en compétition au Festival de Cannes. Après « Un ange à ma table », elle revient à Cannes avec « La Leçon de piano » qui remporte en 93 la Palme d’or plus un prix d’interprétation pour Holly Hunter.

Son œuvre, dominée par des personnages de femmes intenses en quête de leur identité, s’enrichit de multiples variations avec « Holy Smoke » (Kate Winslet), « Portrait of a Lady » (Nicole Kidman) ou « In the Cut » (Meg Ryan). Son dernier film, « Bright Star », biographie romancée du poète Keats et de sa muse est présenté en Compétition à Cannes, en 2009.

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"Peel"

Gilles Jacob, président du Festival de Cannes et de la Cinéfondation, a déclaré : « Jane est une enfant de Cannes. Je le sais pour avoir choisi ses trois premiers courts (ndrl : « Peel », 1982, « Passionless Moments », 1983), « A Girl’s Own Story », 1984) dont j’avais apprécié le style et la cohérence. Gamines naïvement perverses, ados refermées sur leur solitude, femmes ressassant leurs élans et leurs regrets : c’est l’univers au lyrisme ardent où Jane trace d’une main ferme ses portraits de groupe avec drame. Je suis heureux que l’histoire d’amour entre Lady Jane et le festival se poursuive aujourd’hui avec cette présidence. »

Le Jury de la Cinéfondation et des courts métrages, composé de cinq personnalités du cinéma et de la littérature, devra choisir parmi les films d’écoles de cinéma de la Sélection Cinéfondation les trois premiers Prix. Le jury désignera également la Palme d’or du court métrage, remise lors de la cérémonie de Clôture du Festival, dimanche 26 mai 2013.

Fishing Without Nets de Cutter Hodierne

Avec un peu d’ironie, nous pourrions dire que « Fishing Without Nets » est à certaines régions appauvries du monde ce que sont « Les Pirates des Caraïbes » à un certain cinéma de divertissement ou au tourisme de masse : un blockbuster en devenir. Sauf que les arêtes du réel entaillent ici toute possibilité de fantastique et d’humour. La beauté de la photographie et la richesse solaire rêvée de l’Afrique sont ici impuissantes à produire une quelconque discipline de l’horreur. Ailleurs, des désespérés et des exclus, consommateurs chevronnés de drogues recensées, se craquent sous les déchirants éclairages de doses les rivant à la mort. Dans «Fishing Without Nets », les mêmes mâchent du khat, prennent les armes et braquent les Titanic qui ont échappé au naufrage. Difficile de savoir s’il est préférable de se faire encorner par un iceberg lorsqu’un des pirates constate, pragmatique face à la famine et aux guerres, qu’il leur faut bien trouver un moyen de subsistance; tandis qu’un autre propose de tuer quiconque s’opposera à leur attaque, comme on écrase un moustique.

Même si nous n’assistons pas à l’affrontement, le réalisateur Cutter Hodierne sait mettre du mouvement dans sa fiction, à en juger le travelling avant de la scène d’ouverture, où Abdi rencontre le gang des pirates pour la première fois. En comparaison, le cinéma d’action d’un Tarantino, qui se caractérise aussi par son fort ressac de dérision, est alors très, très loin et même : nous oublions tout de l’existence d’un quelconque cinéma de divertissement devant un film tel que « Fishing Without Nets ». Avant que le destin d’Abdi ne se dirige vers le marchepied du piratage forcé, son quotidien est le suivant : il déambule dans les rues de son village, pauvre, mais aussi lumineux et resplendissant, il s’amuse avec sa petite fille en manque de médicaments, il doit plusieurs semaines d’impayés pour la location de son matériel de pêche, et il passe son temps, seul, en haute mer à pêcher du néant.

Chine, son ami d’enfance, lui, se la pète. Il roule sur l’or, il a un job qui paie bien : pirate. Chine offre un téléphone portable à Abdi qui ne peut refréner un sourire de joie. Chine donne de l’argent à son ami et lui fait la morale et l’incite à suivre ses pas. Et Abdi résiste, en s’attachant à ses valeurs familiales (au sein desquelles figure, on le devine, sa croyance religieuse) qui le nourrissent insuffisamment. À la prostitution de certaines âmes, « Fishing Without Nets » oppose l’utilisation des armes. Et les « gueules », prêtes à riposter, dessoudent tout espoir pour leurs futures victimes.À la fin de l’histoire, seul le visage d’Abdi exhalera encore une certaine innocence, laquelle finira cachée sous l’équivalent d’un keffieh lorsqu’en compagnie des pirates, sa nouvelle famille, il portera un AK-47.

Arbre généalogique du crime, « Fishing Without Nets », du fait de son réalisme, pousse à fournir un peu de rire, avant de s’enfuir. Et pour cela, on choisit de détourner – et de transformer – le titre du très bon documentaire « Ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés » de Marc-Antoine Roudil et Sophie Bruneau (d’après le livre éponyme de Marie Pezé) sur les effets néfastes du travail : « Ils ne tuaient pas tous mais tous étaient frappés ».

Franck Unimon

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F comme Fishing Without Nets

Fiche technique

Synopsis : Dans la famille d’Abdi, jeune somalien, depuis plusieurs générations, on est pêcheur de père en fils. Mais si Abdi part pêcher là où le veut la tradition, au nord du pays, les eaux sont vides et il ne ramène guère de poisson. La famine et les guerres le privent de ressources financières et l’empêchent de prendre soin de sa petite fille. Chine, un de ses amis d’enfance qui l’aide matériellement, a trouvé la parade : ses employeurs sont des pirates qui détournent les navires étrangers. Chine insiste pour qu’Abdi se reconvertisse en faisant profiter ses employeurs de ses connaissances maritimes….

Genre : Fiction

Durée : 17’06 »

Pays : Kenya

Année : 2012

Réalisation : Cutter Hodierne

Scénario : Cutter Hodierne et John Hibey

Interprétation : Abdi Muktar, Abu Bakr Mire, Ali Osman aka «  Chine Boi », Abdulkadir Hassan, Abdulahi Sagar, Mahane Muktar, Nasra Ahmed, Osmane Awale….

Image : Cutter Hodierne

Son : Patrick Taylor

Production : John Hibey, Cutter Hodierne, Rapahel Swann, Harold Otieno, Abu Bakr Mire

Article associé : la critique du film

Liova Jedlicki : « J’ai voulu que mon film soit une réelle expérience pour le spectateur »

Nous avons rencontré le réalisateur du film « Solitudes » lors du dernier Festival de Clermont-Ferrand où il a remporté le Prix Adami de la meilleure interprétation féminine, une Mention du Jury Télérama ainsi qu’une Mention « Pialat » du jury officiel. Le jeune homme était pour la première fois au festival, et conscient que son film (mettant en relation une prostituée roumaine violée et un traducteur pour les services de police) n’est pas simple, il n’a pas lésiné en explications et argumentations sur ce qu’il a cherché à raconter.

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« Solitudes » est ton premier film dramatique après deux comédies réalisées auparavant. Pourquoi avoir basculé vers un film aussi grave ?

J’ai tout simplement la volonté de servir un propos et d’aborder des sujets qui sont d’actualité dans notre société. Certains sujets ont besoin d’être traités par le cinéma pour être vus par les gens, pour que ça les touche. C’est une manière de donner des sujets de réflexion. Avec ce film, je n’ai pas voulu imposer une vision manichéenne des choses, j’ai plutôt voulu soulever une interrogation à laquelle je n’ai pas de réponse en réalité. Je pense néanmoins que le sujet de la procédure après un viol est très important.

Donc, tu ne considères pas ton film comme une critique, mais bel et bien comme un constat ?

Non, en effet, ça ne peut pas être une critique parce que c’est un débat trop compliqué. La procédure administrative et judiciaire qui vient après un viol est la réponse de la société à cet acte ignoble, et en soi, elle est nécessaire. Il faut relever des preuves à travers des examens gynécologiques en plus d’interrogatoires, pour permettre de mener une enquête. Dans le système tel qu’il est avec une justice qui existe, on ne peut pas dire que ce soit mal. Dans le film, aucun des protagonistes n’est méchant, même s’ils paraissent aux premiers abords antipathiques. Ce serait idiot de les traiter de la sorte puisque leur motivation est de faire leur travail au mieux. Le problème est que, bien évidemment, la victime dans le film attire l’empathie, et toutes ces choses liées à la procédure paraissent cruelles, inappropriées, particulièrement au moment où ça se passe. En fait, la problématique est de savoir comment mener à bien cette procédure qui suit un viol, sans que cela devienne un deuxième viol. Dans mon film, on est en attente d’un geste d’humanité de la part du traducteur, ce qui, finalement est un peu injuste pour lui, puisqu’il se contente simplement de faire son boulot. J’ai donc voulu soulever la question de cet acte manquant.

Justement, en faisant de ce traducteur un être si froid, sans aucun geste affectif, n’as-tu pas craint que le spectateur ne ressente aucune empathie pour ce qui est, finalement, ton personnage principal ?

Je suis d’accord qu’il n’est pas forcément très attachant. Mais je n’ai pas eu peur de ça pour autant. En fait, l’histoire nous a été racontée par un traducteur qui avait vécu cette situation. On a bien sûr un peu dévié de la réalité pour la dramaturgie du scénario et on a surtout rabaissé pas mal de choses pour la crédibilité fictionnelle. Par exemple, dans la réalité, ils n’y avait pas sept violeurs, mais vingt. Tout ça pour dire que je n’ai pas essayé de provoquer ni de choquer, mais bien au contraire, avec la scénariste Alexandra Badea, on a essayé d’amoindrir les éléments trop graves. Ce qui avait perturbé le traducteur dans cette histoire, c’est qu’à la sortie de la préfecture de police après cette nuit si longue de procédure, il s’est retrouvé avec la femme devant Notre-Dame. Là, il semblerait qu’elle se soit un peu rapproché de lui et machinalement, il l’a repoussée d’un geste répulsif. Il a dû avoir honte ou peur d’être vu avec une prostituée. Ça l’a marqué profondément et c’est là où il a compris qu’il fallait peut-être juste la prendre dans ses bras. C’est cette réflexion sur la procédure qui m’a intéressé. Face à ces filles qui se font violer et à qui on interdit de prendre une douche, on s’aperçoit que la première chose à faire serait peut-être d’avoir une discussion simple et compassionnelle avec elles. Peut-être faudrait-il qu’il existe une petite cellule psycho-affective. C’est ce que j’ai voulu soulever en montrant l’incapacité d’attachement du traducteur.

Alors, penses-tu que ton film pourrait avoir un impact « éducatif » au sein des systèmes judiciaires et/ou des associations de prévention et protection des femmes, puisque tu fais un constat et que tu ouvres surtout la réflexion ?

C’est un peu prévu. On devrait normalement projeter le film dans des commissariats de police. Et puis, si Firmine Richard a accepté de faire le film, c’est notamment parce qu’elle fait partie des élus de la mairie du 19e arrondissement et qu’elle mène une action auprès de femmes battues, violées. Dès les premiers rendez-vous qu’on a eu avec elle, elle a tout de suite évoqué le fait de montrer le film. Après je ne sais pas si on peut employer le mot « éducatif » car je pense juste que mon film est un point d’entrée pour la conversation. Je sais aussi que le planning familial est très en attente de voir le film comme un outil, mais j’insiste sur le fait que c’est un outil introductif car je ne me considère pas comme un donneur de leçons capable d’enseigner ou d’analyser quelque chose. Il y a des gens qui sont très compétents pour ça. Moi, j’ai seulement voulu mettre le spectateur face à une situation qui arrive malheureusement tous les jours et qu’on ne veut pas forcément voir. Je fais appel à l’humanité des gens finalement. Je ne cherche pas à faire dans le sensationnalisme, et je veux plutôt faire un cinéma d’émotion.

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Et comment procèdes-tu pour faire du cinéma d’émotion dans ce film ?

J’ai filmé plutôt de manière classique avec des choix d’angles qui proposent au spectateur de vivre une expérience. Effectivement, à travers les champs et contre-champs avec la psychologue, les autres intermédiaires et les deux protagonistes, on se situe des deux côtés, on est placé à l’intérieur même de la procédure. Je pense que les gens pourront peut-être être touchés pendant les 17 minutes du film, mais je pense également et malheureusement, qu’ils l’oublieront très vite. Espérons qu’il y en ait tout de même qui conservent cette réflexion, avec leur propre sensibilité et leurs questionnements.

Penses-tu que l’on puisse comparer ton film à celui de Maïwenn, « Polisse » dans lequel elle décrit un système plus qu’elle ne donne de vraies leçons, un peu comme toi ?

Maïwenn décrit beaucoup plus la vie de ceux qui sont à l’intérieur même des commissariats de police, au sein même des procédures. Mais sinon, pourquoi pas. Je n’y ai pas forcément pensé. En tout cas, effectivement, je ne cherche pas à donner de leçons, mais je sais que si on a envie de changer le monde, de la manière la plus humble possible, il est nécessaire de le comprendre. Et c’est sans doute ce que j’ai souhaité avec ce film.

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Contrairement à tes deux films précédents, pour « Solitudes », ce n’est pas toi qui a écrit le scénario. Comment s’est passée la collaboration avec Alexandra Badea ?

Au départ, Alexandra est une auteure de théâtre et « Solitudes » est son premier scénario de cinéma. Lorsqu’on s’est rencontré, elle m’avait parlé de deux histoires racontées par un traducteur qui l’avaient profondément touchée. Il est vrai que ce que lui a raconté cet homme est une source incroyable car ce sont des éléments souvent cachés ou bien auxquels on a difficilement accès, et qui pourtant, arrivent tous les jours de manière presque banale. Avec Alexandra, nous avons donc choisi de travailler ensemble sur ce thème en commençant par un court-métrage sur l’une de ces histoires. Elle s’est mise à écrire très vite, en quinze jours je crois. Je lui ai donné quelques conseils, mais presque plus sur la mise en page que sur le fond en réalité. Puis, nous avons envoyé le scénario à deux boîtes de production. On a un peu fait les « marieurs » ; c’est-à-dire qu’on a envoyé le texte à la boîte roumaine en disant que la production française le ferait, et inversement avec la boîte de production française. Ça a marché et tout est allé très vite après. Depuis, Alexandra a écrit le long-métrage de l’autre histoire qu’elle m’avait racontée.

Toujours sur le même thème ?

Pas vraiment, si ce n’est que ça se passe à Paris également et qu’il est toujours question d’une histoire franco-roumaine. Sur ce scénario-là, elle a écrit une première version. Je lui ai fait quelques remarques et elle a réécrit. Finalement, cet été, on retravaillé l’écriture ensemble, bien plus que ce que l’on avait fait pour le court-métrage. Le scénario est donc là. Nous avons d’autres projets ensemble, plus volontiers avec une idée de co-écriture puisque j’ai très envie de revenir à l’écriture. J’avais en effet arrêté de manière volontaire car j’avais très envie de réaliser un scénario qui n’était pas le mien. Ce n’est pas la même chose, mais c’est un travail très intéressant.

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Et Alexandra Badea, est-elle entrée dans la réalisation de ce film-là ?

Non, mais elle m’a aidé pour la direction d’acteurs puisqu’elle était la traductrice pour le film, vu qu’elle franco-roumaine. Je ne parle pas roumain. Les deux comédiens parlent français, mais ils pouvaient faire des erreurs sur le texte, et par conséquent, Alexandra était très en contact avec eux.

À propos des comédiens, tu es passé par un casting, des recommandations ou bien tu les connaissais déjà avant ?

Le film était écrit pour la comédienne Madalina Constantin (ndlr : elle a reçu le prix d’interprétation féminine lors du Festival de Clermont-Ferrand 2013). C’est en effet l’actrice de théâtre fétiche d’Alexandra et j’ai également voulu tourner avec elle. Il n’y avait aucun doute la concernant. D’ailleurs, elle a énormément travaillé pour le rôle en faisant des recherches, en se documentant, en rencontrant des prostituées, etc… La production tenait absolument à réaliser un casting, mais je n’y ai pas tenu. En revanche, pour le personnage masculin, on a fait un casting et il s’est avéré qu’on a également choisi un comédien qu’Alexandra connaissait du théâtre, Razvan Oprea. Ça a été un peu plus compliqué avec lui, notamment parce qu’il vit en Roumanie. Pour dire vrai, il était le rôle principal à l’écriture, mais au vu de ses faibles disponibilités, on a recentré le film afin que la procédure devienne le personnage principal. La victime devient le personnage sur lequel l’empathie repose. Lui, il est le personnage sur lequel on projette, on attend quelque chose, c’est l’antihéros. C’est aussi le personnage grâce auquel on entre dans l’histoire. Comme il est dans l’écoute, il permet de faire le lien avec le spectateur.

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Et Firmine Richard ? Tu nous as parlé de son point de vue engagé socialement pour cette histoire, mais peux-tu nous expliquer ton envie de travailler avec elle ?

En fait, je suis tombé amoureux d’elle à douze ans lorsque j’ai vu « Romuald et Juliette ». C’est une actrice formidable. Comme beaucoup de réalisateurs, j’ai envie de travailler avec des gens que j’aime et que j’admire. Tout simplement, je lui ai envoyé le scénario et elle m’a rappelé. Elle a été touchée par les raisons que j’ai évoquées précédemment. Comme on a l’habitude de la voir jouer dans des comédies, c’était finalement pour moi un moyen de ne pas montrer les intermédiaires de cette procédure de manière trop cruelle et caricaturale. En effet, dans un court-métrage, il est difficile de montrer la vie des personnages, tout simplement pour une question de temps, et là, je sais que ceux qui mènent la procédure apparaissent comme des salauds. Sauf que je n’ai pas envie de dire que ce sont des salauds puisqu’ils font juste leur boulot.

Ton film a été diffusé sur France Télévision dans le cadre de l’émission Histoires Courtes, le dimanche 3 février dans une version plus longue que celle vue à Clermont-Ferrand. Peux-tu nous en parler ?

En fait, j’ai tourné des scènes dont je savais dès le début qu’elles seraient retirées, mais que je voulais absolument qu’au montage, on puisse réécrire le film. Il est vrai aussi qu’à la dernière minute, on m’a retiré deux jours de tournage initialement prévus, si bien que je n’ai pas eu le temps de me retourner, et nous avons donc tout tourné, en respectant le scénario de départ. C’est pour ça qu’on a deux versions différentes : la mienne, et celle du producteur. Comme on avait eu de l’argent pour le scénario, on m’a conseillé de faire un film qui le respecte le plus possible. Par ailleurs, il est plus facile et plus acceptable d’entrer dans le film par le traducteur (ndlr : dans la version longue, le film commence par une scène de famille chez le traducteur, juste avant qu’il ne reçoive un coup de fil pour se rendre au commissariat). Pour le spectateur, cela créé une distance avec tout ce qui se passe puisque c’est le traducteur qui va vivre cette nuit-là. Dans la version courte, j’ai voulu que mon film soit une réelle expérience pour le spectateur et j’ai donc coupé cette petite distance.

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À qui s’adresse le titre « Solitudes » que tu as choisi de mettre au pluriel ?

La première solitude est bien sûr celle de la prostituée. Celle du traducteur est au même niveau mais de manière très différente. C’est celle de tout le monde, celle de tous les protagonistes car ils sont habités par une fonction qui fait qu’ils ne sont plus eux-mêmes. Et j’irai encore plus loin en affirmant qu’il s’agit également de la solitude du spectateur, justement parce qu’il vit ce film comme une expérience, il reçoit en pleine figure cette émotion violente et il se sent impuissant. C’est un problème de la vie que j’ai voulu soulevé : on préfère ne pas voir ses propres problèmes et ceux des autres. Je me demande toujours et encore pourquoi on ne libère pas notre humanité alors que c’est ce qu’on possède de plus précieux. J’ai donc voulu traiter d’une solitude collective, générale, d’où le pluriel du titre. Ce qui est amusant c’est qu’il s’agissait d’un titre provisoire au début du film et qu’il est finalement resté. On le trouvait trop métaphorique et on voulait quelque chose de beaucoup plus concret, mais nous n’en avons pas trouvé d’autre. Du coup, les gens se posent la question sur le titre et par conséquent, ils réfléchissent trois minutes de plus sur le film. C’est toujours ça de gagné.

Pour ce troisième film, tu as travaillé avec les mêmes producteurs de Rézina Productions. Peux-tu nous parler de cette collaboration ?

Oui, Bernard Tanguy (producteur/réalisateur de « Je pourrais être votre grand-mère ») a monté sa société de production, et le premier court-métrage qu’il a produit est le mien. Il avait co-produit un long-métrage avant, et mon court « Chérie… », un petit film qui n’a pas coûté pas cher (3.000€, tourné en trois jours), a été le galop d’essai ? ! J’ai rencontré Bernard alors qu’il voulait déjà faire de la mise en scène. D’ailleurs, s’il a créé sa propre boîte, c’était aussi et surtout pour apprendre, pour rencontrer des personnes de ce milieu puisqu’il venait d’un domaine complètement différent du cinéma. J’ai eu la chance de le rencontrer et de trouver un mécène, car mes deux premiers films, il les a financés en partie. Il m’a mis le pied à l’étrier en me laissant une liberté totale, et aujourd’hui, je peux dire que je lui dois tout. J’ai une reconnaissance éternelle envers lui. D’ailleurs, pour « Solitudes », lorsque nous avons eu des subventions, j’ai eu l’impression de pouvoir un peu rembourser ma dette. Et si on poursuit sur la fidélité à une équipe, j’aimerais souligner que je travaille avec le même directeur photo depuis mon premier film, Julien Poupard. Je travaillerai avec lui sur tous mes prochains films, et si un jour, il faut choisir entre Brad Pitt et lui, je préfère me passer de Brad Pitt (rires) ! Plus sérieusement, au cours de ces trois films, j’ai rencontré des gens talentueux qui sont devenus des amis. C’est merveilleux sur un tournage de ne plus avoir besoin de s’expliquer pour se comprendre. Cette générosité-là, présente sur le tournage, elle est censée se retrouver pour le public.

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« Chérie… »

Pour terminer, c’était ta première fois à Clermont-Ferrand, réputé pour être le plus grand festival de courts-métrages au monde. Ça t’a procuré quelle sensation d’y être ?

Lorsqu’on apprend qu’on est sélectionné à Clermont, c’est déjà une récompense en soi. C’est merveilleux d’être parmi tous ces réalisateurs, d’autant plus que c’est un festival qui est très suivi, que ce soit par la profession ou par le public. En effet, qu’on aille à une séance à n’importe quelle heure, le public est toujours présent et réagit. Ca fait d’autant plus plaisir que le court-métrage est tout de même un format assez marginal. Les professionnels sont là aussi, peut être encore plus que sur les autres festivals. J’ai aussi des amis qui sont en compétition cette année comme Xavier Legrand avec « Avant que de tout perdre » et François Choquet avec « Swing Absolu ». Il n’y a aucune rivalité entre nous et je suis très content de vivre ce festival avec eux. C’est génial de partager ça !

Camille Monin

Articles associés : la critique du film, l’interview de Pierre Murat (Télérama)

 

Consultez la fiche technique du film

« Solitudes » » était projeté au Festival de Clermont-Ferrand dans le cadre de la compétition nationale (F12)

Soirée Format Court spéciale Festival de Brest, le jeudi 14 mars prochain !

Après notre soirée anniversaire de janvier et notre Saint-Valentin de février, voici l’information relative à notre séance  du jeudi 14 mars dès 20h30, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème) . Cette programmation, réalisée en partenariat avec le Festival européen du film court de Brest, rassemble six films dont le tout premier prix Format Court décerné au festival. Comme d’habitude, plusieurs équipes seront présentes  pour évoquer leur travail : Hugues Hariche (réalisateur), Michael Rittmannsberger (réalisateur), Edyta Janczak-Hiriart (productrice), Liana Babluani (comédienne), Nastasia Legrand (comédienne) et Aziza Arslanova (comédienne).

Programmation

Tiger Boy de Gabriele Mainetti (fiction, 20’, Italie, 2012, Goon Films). Grand prix du Film Court du Festival de Brest, Prix du Meilleur réalisateur au Festival Roma Creative Contest, VO-ST ENG

Synopsis : Ce qui parait être un caprice est en réalité un appel au secours que personne ne semble entendre.

Article associé : Brest. Courts européens & petits comédiens

Abgestempelt de Michael Rittmannsberger (fiction, 11’, Autriche, 2012, DCS Filmproduktion). Mention du jury au Festival de Brest, Méliès d’Argent au Festival international du film Espoo Ciné (Finlande). En présence du réalisateur

Synopsis : Après un contrôle de la police, un jeune père d’origine arabe ne sait pas comment expliquer la situation à son fils, qui ignore que des événements plus inexplicables sont encore à venir…

Article associé : Brest. Courts européens & petits comédiens

Flow de Hugues Hariche (fiction, 22’49ʺ, France, 2012, Kazak Productions). Prix révélation au Festival de Brest, sélection au Festival Tous Courts d’Aix-en-Provence. En présence de l’équipe

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Synopsis : John, un jeune bodybuilder, se prépare jour après jour pour une compétition, les NPC Georgia Bodybuilding Championships. Sa vie est un rituel, une mécanique parfaitement réglée. Concentré sur son objectif, il ne lâche rien, espérant atteindre sur scène cet instant de bonheur unique : le flow.

Article associé : la critique du film

Noise de Przemyslaw Adamski (animation, 7’, Pologne, 2011, Studio Munka). Prix Canal + Cocotte Minute au Festival de Brest, sélection au Festival de Clermont-Ferrand

Synopsis : Un travail audiovisuel où le son tient le rôle principal. Les bruits qui s’immiscent dans l’appartement du protagoniste font l’objet de son interprétation, générant des images aléatoires qui entrent en interaction. Privés de leur corrélation visuelle, les sons évoquent des images qui sont souvent à cent lieues de leur source réelle.

Article associé : la critique du film

Que puis-je te souhaiter avant le combat ? de Sofia Babluani (fiction, 15’37ʺ, France, 2012, Kometa Films). Sélection au Festival de Brest, Prix UniFrance du court-métrage 2012. En présence de l’équipe

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Synopsis : Marie une adolescente de quinze ans adoptée dans son enfance, vit avec un père fermier et une petite sœur dans le sud de la France. Son existence est partagée entre le rôle d’une mère de famille et celle d’une adolescente. L’intrusion d’une étrangère en fugue à la ferme changera définitivement le cours de sa vie.

Article associé : aperçu de la sélection française à Brest

Prematur de Gunhild Enger (fiction, 17’, Norvège, 2012, Motlys A/S). Prix Format Court, Prix Européen du Conseil régional de Bretagne et Prix des Passeurs de courts au Festival de Brest

Synopsis : Prematur narre l’histoire d’un Norvégien, Martin, et de sa petite amie espagnole, Lucia, qui est enceinte. On suit le couple pendant leurs quinze premières minutes ensemble sur le sol norvégien, et notamment la rencontre de Lucia avec cette nouvelle culture, et surtout sa belle-famille.

Articles associés : la critique du film, Gunhild Enger : l’expérience de la temporalité, l’interview de Gunhild Enger

Infos pratiques

– Projection des films : jeudi 14 mars 2013, à 20h30. Durée du programme : 93′

– Adresse : Studio des Ursulines – 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris – Accès : BUS 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon).
 RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée).

– Entrée : 6 € !

– Réservations vivement recommandées : soireesformatcourt@gmail.com

Évènement Facebook : par ici !

 Prochaine séance : le jeudi 11 avril 2013 (carte blanche à Lobster Films) !