Aperçu de la sélection française à Brest

Le court métrage français a de beaux jours devant lui. La sélection du Festival de Brest de cette année est là pour nous le prouver : des films aboutis, plutôt engagés, souvent drôles et particulièrement bien mis en scène. Un joli cru qui n’annonce en rien la fin du monde !

Au programme de cette compétition 1 de courts métrages français, nous retrouvons pêle-mêle des parapluies capricieux, des hommes nus, un poisson, un nouvel amour et une mauvaise surprise. En somme, un éclectisme cinématographique bien appréciable.

Dans « Les parapluies migrateurs », Mélanie Laleu exploite un univers aussi énigmatique que celui de « Brazil » (du grand Terry Gilliam. On a connu comparaison esthétique moins flatteuse !), au confins du réel et de l’imaginaire. Sa recherche visuelle (des gris contrastés et une pluie constante) s’oppose à sa recherche auditive (une bande-son plutôt entraînante et joyeuse), offrant un résultat très plaisant et bourré d’humour. Sans compter que les parapluies, en plus d’être migrateurs, n’en sont pas moins capricieux! « Mary Poppins » chez Terry Gilliam ? Un mélange surprenant aux saveurs subtiles.

L’humour est également une des caractéristiques de « Stronger », court métrage de Victor Rodenbach et Hugo Benamozid. Sur ouverture de voix-off masculine, deux « amis » devenus « ennemis » se retrouvent dans une salle de cours de dessin, à poser nus devant une dizaine d’élèves. Si le propos s’attarde sur les questions de confiance au sein d’une relation amicale, la mise en image décomplexée et pourtant pudique de ces chairs masculines confère aux dialogues un angle sarcastique. Et à la fin ? Nos deux compères sont toujours nus, mais peut-être réconciliés.

Dans « La sole, entre l’eau et le sable » d’Angèle Chiodo, nulle question de réconciliation, puisque le conflit est absent. On retrouve cependant une voix-off (féminine cette fois) qui parle de la sole, accompagnée d’une illustration visuelle inattendue. La réalisatrice offre un travail sur les formes, les matières et les couleurs très surprenant et d’une grande originalité.

De voix-off féminine, il est encore question dans le court métrage d’Alphonse Giorgi et Yann Tivrier, «Polaroïd Song ». Dans les années 90, un groupe de rock exclusivement féminin est racontée par sa photographe, une jolie jeune femme métissée en passe de découvrir l’amour. Le parti pris assez risqué de la faire parler en face caméra, comme s’adressant aux spectateurs, aurait pu être un flop total (le procédé est dépassé s’il est mal utilisé), mais les réalisateurs se dépatouillent du pire à merveille. Il est fort appréciable de découvrir un film assez féminin, qui parle des femmes sans s’adresser uniquement à elles, et qui plus est mis en image par deux hommes !

Cette sélection se clôture par un film d’Émilie Cherpitel, « Les filles du samedi ». Une femme (interprétée par Cécile Cassel) se réveille dans un appartement lumineux. Elle cherche les choses (on comprend ainsi rapidement qu’elle n’est pas chez elle), passe d’une pièce à l’autre, et se retrouve nez à nez avec un enfant. Il est le petit frère de l’amant de la nuit, parti au golf comme tous les samedis et qui compte bien sur sa conquête nocturne pour s’occuper du bambin ! Un goujat qui aurait pour seul excuse le fait d’être orphelin et responsable par « obligation » de son petit frère. Le duo imposé trouvera finalement de joyeuses occupations… Un court qui en dit long sur l’humour de la réalisatrice, qui joue avec des dialogues pinçants et des rebondissements bien amenés. En dire plus serait gâcher la surprise, car dans Les filles du samedi, rien n’est tout à fait ce que l’on croit.

Même éclectisme dans la compétition 2, avec plus de noirceur cependant et une forme évidente de renoncement au bonheur ultime. Dans « Chacun sa nuit », Marina Diaby brosse les portraits croisés de ces femmes qui, derrière un écran, procurent des moments de plaisirs à des hommes solitaires. Des échanges pour de l’argent, que certaines considèrent comme un travail. Juste un travail. Mais comment renoncer au bonheur d’aimer pour de vrai, pour de bon, même si la rencontre se fait par le biais d’un écran ? L’une d’elles y croit… Mais les fées, cela n’existe que dans les contes.

« Cendres », de Jérome Farrugia, a également quelque chose du conte. Une jeune femme en détresse, un preux chevalier, un château et des « méchants ». Si l’histoire est assez banale, la mise en image, elle, relève vraiment de l’onirisme. Esthétiquement, un noir et blanc très contrasté, ne laissant sortir que le rouge comme autre couleur (la robe de la femme, le sang, certaines armures, etc.). Au fil du court, le rouge, qui n’était que tâche ponctuelle, devient de plus en présent, envahissant, angoissant, et les plans disloquent et morcellent les corps. « Cendres » est un voyage en terre inconnue, persistant comme un rêve, perturbant comme un cauchemar.

Le noir et blanc est aussi la clef esthétique du film de Hu Wei : « Le propriétaire ». Une histoire complexe (autant que sa chute ?) dont vous pouvez découvrir la critique ici. « Le sourire du plombier » n’est pas celui que vous croyez ! Le court métrage assez bref (3 minutes et 30 secondes) de Guillaume Chevalier se déroule dans une cuisine, avec une vieille dame, son fils (qui ne fait que passer) et un plombier. Drôle, vif et sans concession, ce court est comme un sketch, agrémenté de la cruauté réjouissante que seules certaines situations peuvent offrir !

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Dernier court métrage de cette sélection mais pas des moindres, « Que puis-je te souhaiter avant le combat ? », de Sofia Babluani, nous entraîne dans l’univers d’une jeune femme muette, vivant à la campagne avec son père et sa soeur. Un quotidien bien réglé jusqu’à l’arrivée d’une « étrangère » qui chamboulera leur existence pour toujours. Comme ses personnages, « Que puis-je te souhaiter avant le combat ? » est une oeuvre généreuse, plaidant l’amour et la tolérance envers et contre tout(s).

Géraldine Pioud

2 thoughts on “Aperçu de la sélection française à Brest”

  1. J’espère pouvoir bientôt voir ces courts métrages sur Canal Plus ou Arte! Critique qui donne envie d’aller les voir!

  2. Bonjour Sandrine.

    Merci pour ce commentaire et heureuse que cela vous ait donné envie des les voir. J’espère que vous pourrez découvrir ces courts métrages!
    @ bientôt

    Géraldine

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