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A Strong Woman de Iwona Kaliszewska & Kacper Czubak, Prix Format Court au festival de Créteil

La clôture du 38ème Festival de Films de Femmes de Créteil et du Val-de-Marne s’est déroulée hier soir à la Maison des Arts de Créteil. Pour la première fois, Format Court y remettait un prix au sein de la compétition internationale.

Le Jury Format Court (composé de Katia Bayer, Marie Bergeret, Adi Chesson, Ludovic Delbecq et Zoé Libault) a choisi de récompenser, parmi les 16 films sélectionnés, « A Strong Woman » de Iwona Kaliszewska et Kacper Czubak, un documentaire sur un lieu méconnu (le Daghestan) et une femme en lutte contre les hommes et la solitude, mais aussi une proposition sensible sur le choix et la dignité dans une société machiste et patriarcale.

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A Strong Woman de Iwona Kaliszewska et Kacper Czubak. Documentaire, 16′, 2014, Pologne, Stowarzyszenie Filmowcow Polskich – Studio Munka

Synopsis : Le portrait d’une femme dans un village du Daghestan. À l’encontre du monde patriarcal qui l’entoure, elle adopte une attitude anticonformiste. Dans son combat, quelque chose se révélera utile : son expérience, du temps de l’ère soviétique, lorsqu’elle était championne de lutte…

Pour rappel, le film primé bénéficiera d’un dossier spécial en ligne, sera projeté le jeudi 14 avril prochain à l’occasion de la prochaine séance Format Court au cinéma Le Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Enfin, la réalisateur bénéficiera également d’un DCP (relatif au film primé ou au prochain dans un délai de deux ans) crée et doté par le laboratoire numérique Média Solution.

Rendez-vous au Fife du 5 au 12 avril (Cinéma des Cinéastes) & à l’Happy Biz de Format Court le 11 avril !

Le 33ème Festival international du film d’environnement (Fife) présentera, en entrée libre du 5 au 12 avril au Cinéma des Cinéastes, une centaine de films – dont de nombreux courts – et une sélection de web-documentaires consacrés à la planète au Cinéma des Cinéastes.

Pendant le festival, trois sections compétitives permettront notamment de découvrir une large sélection de films courts venus d’Europe, mais aussi d’Uruguay, d’Afrique du Sud ou du Japon : des courts métrages, des documentaires courts et, pour les petits, une section “Eco Bambins”.

Retrouvez le détail des séances sur la grille des programmes et venez rencontrer les nombreux réalisateurs présents après chaque séance !

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Super info. Le festival clôturera ses rencontres professionnelles avec un « Happy Biz » (un pot heureux) en invitant Format Court le lundi 11 avril de 18h à 20h en partenariat avec Champagne Fleury (des bulles, des bulles !). L’occasion de découvrir les activités de notre site de référence devenu incontournable, mais aussi d’échanger dans un espace convivial avec les invités du festival et les professionnels du court métrage !

Rendez-vous au Cinéma des Cinéastes dès le 5 avril pour l’ouverture du festival et le lundi 11 avril à 18h30 pour l’ »Happy Biz » de Format Court !

En savoir plus sur le festival : http://fife.iledefrance.fr/

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Fiche technique

Synopsis : Sergiusz, dix-sept ans, se sent incompris par sa famille. Le garçon se réfugie dans sa grande passion, le monde de la science-fiction.

Genre : Fiction

Durée : 27’

Pays : Pologne

Année : 2014

Scénario : Kordian Kądziela

Réalisation : Kordian Kądziela

Image : Piotr Chodura

Son : Jan Moszumanski

Montage : Magdalena Chowanska

Musique : Piotr Kotas, Mariusz Goli

Interprétation : Marcel Borowiec, Kacper Borowiec et Barbara Lubos

Production : Krzysztof Kieslowski Faculty of Radio and Television, Université de Silesia

Articles associés : la critique du film, notre reportage : Kordian Kadziela, le vrai du faux & l’interview de Kordian Kadziela

Symphony no. 42 de Reka Bucsi

Animation, Hongrie, 9’33, 2013, Moholy-Nagy University of Arts and Design

Synopsis : Un récit qui présente, de façon originale, un univers subjectif en 47 scènes. Des événements de la vie quotidienne mettent en évidence la cohérence irrationnelle du monde qui nous entoure. Des situations surréalistes qui mettent en scène les humains et leur rapport à la nature.

Souvenez-vous. Ayant commencé sa carrière à Berlin avant de faire un super parcours en festival et d’être shortlisté pour les Oscars 2015, Symphony no. 42 de Réka Bucsi, faisait partie de notre programme spécial conçu pour le Jour le plus court autour du thème de l’insolence.

Bonne info : depuis un mois, le film est disponible en ligne. L’occasion de retrouver ses nombreuses vignettes cocasses et colorées sur l’homme, l’animal, la nature et l’absurdité du monde qui les entourent. Du renard perplexe à l’éléphant emprisonné, des cow-boys à ballons à la liseuse de bonne aventure, des baleines du Sri Lanka à la symphonie n°9 de Beethoven, Réka Bucsi ne lâche rien, le temps d’un film d’école, bouclant sa boucle et laissant une poignée de mystère, de finesse et d’humour derrière elle.

Katia Bayer

3ème Prix Format Court au Festival de Brive

Le mois prochain, Format Court attribuera pour la troisième année consécutive un prix à l’un des 22 films sélectionnés en compétition européenne au 13ème Festival de Brive (5-10 avril 2016). Le Jury Format Court (composé de Paola Casamarta, Nadia Le Bihen-Demmou, Gary Delépine) élira le meilleur film en compétition.

Le moyen-métrage primé bénéficiera d’un focus spécial en ligne, sera programmé lors d’une séance Format Court organisée au Studio des Ursulines (Paris, 5ème) et bénéficiera d’un DCP doté par le laboratoire numérique Média Solution.

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Films en compétition

– BODY de Léonor Serraille, France
– DES JOURS ET DES NUITS SUR L’AIRE de Isabelle Ingold, France
– DIE KATZE de Mascha Schilinski, Allemagne
– FULL THROTTLE III – END TIMES de Renger van den Heuvel, Pays-Bas – Autriche
– GANG de Camille Polet, France
– JE MARCHE BEAUCOUP de Marie-Stéphane Imbert, France
– L’ILE JAUNE de Léa Mysius et Paul Guilhaume, France
– LA BANDE À JULIETTE de Aurélien Peyre, France
– LE DIEU BIGORNE de Benjamin Papin, France
– LE GOUFFRE de Vincent Le Port, France
– LE JARDIN D’ESSAI de Dania Reymond, France
– LE MALI (EN AFRIQUE) de Claude Schmitz, France – Belgique
– LES NOUVELLES GEISHAS DES BUVEURS SOLITAIRES de Momoko Seto, France
– LES RONDS POINTS DE L’HIVER de Louis Séguin et Laura Tuillier, France
– LES ROSIERS GRIMPANTS de Lucie Prost et Julien Marsa, France
– MARIA DO MAR de João Rosas, Portugal
– POINT DU JOUR de Nicolas Mesdom, France
– TÉLÉCOMMANDE Anonyme, France
– THE MASKED MONKEYS de Anja Dornieden & Juan David González Monroy, Allemagne – Indonésie
– VERS LA TENDRESSE de Alice Diop, France
– VILA DO CONDE ESPRAIADA de Miguel Clara Vasconcelos, Portugal
– 6×6 de Pauline Lecomte et Marine Feuillade, France

Des millions de larmes de Natalie Beder

Le premier film de Natalie Beder, en tant que réalisatrice et scénariste, ayant fait ses débuts à Locarno, a été sélectionné au 38ème festival du court-métrage de Clermont-Ferrand en compétition nationale, il l’est également au festival d’Aubagne ayant lieu actuellement. « Des millions de larmes » nous emplit d’une mélancolie agréable devant un homme d’un certain âge (joué par André Wilms) et une jeune fille (Natalie Beder) que la pluie réunit sous un même toit : un café-restaurant.

Dans chaque poème se cache quelque chose de dur. Chez Natalie Beder la poésie prend tout son sens. Cette dureté se révèle au fur et à mesure dans le film, c’est un sentiment qui se répand telle une goutte d’eau traversant votre vêtement et vous assénant des frissons d’humidité.

En quelques instants, dès les prémices du film, on sent que ce film ne nous laissera pas indifférent face aux métaphores, expression d’une mélancolie vécue, une mélancolie passée.

Un couteau, quelques pièces dans une chaussette et du vernis rouge clairsemé sur ses ongles, la jeune fille est clairement fatiguée et trempée.

La conversation s’engage avec cet homme d’une soixantaine d’années. Il semble perdu, comme ce café-restaurant, au milieu de nulle part. Elle, interrompant ce regard qui contemple passablement les gouttes d’eau tombant et s’écrasant contre la vitre, semble acharnée. Elle va quelque part, semble déterminée. L’échange est froid, rude et hermétique. Une tension s’installe. Le vieil homme reste silencieux, et renfermé. Quelque part sous l’apparence de sa vieillesse, se cache une blessure, le visage fatigué par la vie, il semble perdu dans ses silences. Il ressemble à ces inconnus, passant le visage hagard dans des rues sombres.

S’engagent alors des échanges abrupts, parfois doux qui mettent en exergue une différence de style chez les deux personnages. Lorsque le regard d’André Wilms se pose sur la jeune fille, toute la contradiction de leurs caractères éclot. Ils ne se comprennent pas, mais vont prendre la route ensemble. Et c’est le long de celle-ci qu’ils vont se connaître.

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Une jeune fille qui se rattache à l’enfance lorsque vient le noir dans un hôtel avec ses ombres et son inconnu, un vieil homme excédé par des questions incessantes de la jeune fille. Les échanges dans cette voiture qui semblaient si calmes au demeurant deviennent inquiétants. Après la tendresse, viennent la colère et le chagrin. Un chaud-froid qui nous rappelle soudain la relation d’un père et de sa fille. Une paternité sûrement déchirée. Celle d’un homme égaré face à la désinvolture de celle-ci.

Et l’homme qui se voudrait peut-être père ou encore généreux sauveur induit de plus en plus ce questionnement sur cette relation. Qui est-il ? Qui est-elle ? Le tutoiement soudain ne nous laissera pas indifférents et accentuera d’ailleurs ce questionnement.

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Dans cette voiture, la crainte monte. L’agacement prend le pas et le film se transpose dans une nouvelle situation. C’est un papa agacé qui dispute sa fille. C’est à ce moment-là que l’on pourrait y voir l’allégorie de cette histoire. Peu importe, au final qui ils sont, quel est leur passé, ils ont cette importance qui montre que les erreurs antérieures prennent toujours le pas sur le présent malgré les regrets et toutes les larmes que l’on pourra verser.

C’est dans la disparition et la rupture que va s’accélérer l’histoire. Ce déséquilibre brutal dans la narration nous met en empathie sur ce regard usé et anxieux qui envahit le spectateur d’une souffrance réelle. Pourtant lorsque les deux personnages se retrouvent dans un restaurant pour la seconde fois, l’amusement, la complicité et la tendresse paternelle renaissent.

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Dans cette renaissance la réalisatrice joue sur la palette des émotions de cet homme. Un engagement et un parti pris qui, jusqu’au bout s’attachent à cet homme âgé. Les deux personnages poursuivent leur chemin au milieu de ces champs neutres d’émotions. Ils traversent des marais salants, des étendues d’eau, des paysages qui par la rigueur du format (4/3) amplifient le mouvement donné aux acteurs.

Ils s’approprient l’image, aux dépens des paysages volontairement évidés de toute « couleur », de tout relief. C’est une toile de fond à l’environnement gris neutre qui s’assombrit au fil de l’histoire. Cet équilibre parfait, que Natalie Beder instaure tout au long du voyage vers ce néant, nous emplit d’une mélancolie latente, sans cesse perturbée par les tête-à-tête abondants et riches de ces deux personnages déambulant dans ce vide esthétique. Ils s’affrontent, se disputent, mais s’obstinent à se rapprocher. Et lorsque la peur et la suspicion sur ces deux êtres s’installent, cette étrange tension amène à des questionnements de plus en plus prononcés sur cette relation qui s’opère entre eux.

L’on rajoutera également ces brefs moments musicaux qui instaurent tout en délicatesse une composition douce et fine du compositeur Romain Trouillet, une simplicité qui élabore deux passages obscurs et métaphoriques de ce film. Le premier induit la symbolique de ce court-métrage par cet étang et ces roseaux reflétant la nuit. Cette bougie flottant dans l’eau évoque une métaphore du malheur relative à l’histoire. Le second corrélé au premier, relate la disparition et la peur de l’homme d’avoir perdu la jeune fille. Une maitrise parfaite de cette simplicité musicale : en seulement quelques notes, elle implique le spectateur.

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Et lorsque, doucement, l’on coule sur la fin, l’atmosphère s’assombrit, la route se termine dans un bâtiment sombre, l’accompagnement et cet attachement entre ces deux personnages et leur tendresse prennent subitement une autre tournure. Ici, encore on est marqué par une rupture dans la narration. Une rupture qui semble plus définitive. Le visage terne et le tonnerre se rassemblent, les larmes prennent le pas. Nous sommes dans l’entonnoir des émotions. Quelque part, l’histoire touche à sa fin et peut-être, les questions également.

La notion d’herméticité n’existe plus. L’absence se fait sentir. Le deuil d’un souvenir se presse. Les deux personnages doivent se mettre à l’abri de la pluie. Le vieil homme arrivé au bout de sa route a le souffle coupé.

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L’allégorie est plus que présente dans la scène de fin, puisqu’on touche au paroxysme de ce film. La peur et l’angoisse sont autant d’images et de symboles qui s’entremêlent et ces sentiments qui bataillent dans l’esprit de cet homme se retrouvent durs. Il est effrayé tel un enfant. Ici les larmes sont la pluie et celle-ci coule jusqu’à s’abattre sur l’homme comme pour rincer cette hallucination, ces regrets, cette tristesse qu’il emmène avec lui depuis le début.

Fort en symboles et en allégorie, « Des millions de larmes » est une illustration parfaite du pouvoir du cinéma dans le ressenti du spectateur. Le spectateur regarde le film, tout en non-dits, tel un livre dont il tourne les pages voire les dévore. On se plonge dans ces regards et ces personnages pour connaître leur histoire, leur passé et peut-être leur devenir.

Clément Beraud

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M comme Des millions de larmes

Fiche technique

Synopsis : C’est l’histoire d’une rencontre dans un café-restaurant désert le long d’une route. Un homme d’une soixantaine d’années qui attend là. Une jeune femme fait son entrée, un sac sur le dos, sa vie dedans et la mine passablement fatiguée. Il lui propose de l’avancer. Elle accepte.

Genre : Fiction

Durée : 22’

Pays : France

Année : 2015

Réalisation : Natalie Beder

Scénario : Natalie Beder

Image : David Chambille

Son : Jean-Michel Tresallet

Montage : Louise Decelle

Interprétation : André Wilms, Natalie Beder, Myriam Tekaia

Production : Yukunkun Productions

Article associé : la critique du film

Naomi Kawase, Présidente du Jury de la Cinéfondation et des Courts métrages

En 2015, la section Un Certain Regard ouvrait ses portes avec « Les Délices de Tokyo » (An) de Naomi Kawase. La réalisatrice japonaise retrouvera Cannes en mai prochain à la tête du Jury de la Cinéfondation et des Courts métrages pour sa 69e édition.

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À 27 ans, Naomi Kawase devient la plus jeune lauréate à recevoir en 1997 la Caméra d’or pour son film « Suzaku (Moe no Suzaku) ». Une découverte dont la promesse ne cessera de se confirmer, comme en témoignent les sélections en compétition de ses longs-métrages suivants : « Shara » (Sharasojyu) en 2003, « La Forêt de Mogari » (Mogari no Mori) en 2007, « Hanezu l’esprit des montagnes » (Hanezu no tsuki) en 2011 et « Still the Water » (Futatsume no mado) en 2014. En 2013, c’est en tant que membre du Jury des longs métrages que Naomi Kawase siège sur la Croisette aux côtés de Steven Spielberg.

Nouveau concours de scénario 5×2

La Cinémathèque de Grenoble et le Grec organisent depuis 1998 un concours de scénario de court-métrage dans le cadre du Festival du film court en plein air de Grenoble. Depuis 2014, ce concours propose la réalisation de 5 x 2 minutes par un même auteur dans un même lieu.

Le lauréat du concours réalise son projet grâce à une bourse du Conseil Général de l’Isère et un préachat de France 2. Le Grec en est le producteur. Les trois premiers lauréats bénéficient d’un stage de réécriture à Grenoble.

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Le film du lauréat sera diffusé lors du Festival du Film Court en plein air de Grenoble, et dans Histoires courtes sur France 2. Il sera également mis en ligne sur les sites internet de France 2, de la Cinémathèque de Grenoble et du Grec.

Date limite de candidature : lundi 2 mai 2016.

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Infos

http://www.grec-info.com/concours.php

http://www.cinemathequedegrenoble.fr/actualites/festival/concours-de-scenario-2016-lappel-a-projet-est-lance-3783.html

Maman(s) de Maïmouna Doucouré

Mention spéciale Prix France Télévisions au festival de Clermont-Ferrand, « Maman(s) » interroge sur les effets de la polygamie au sein d’une famille jusqu’alors monogame. C’est à travers le regard d’Aida, une jeune enfant de 8 ans, que nous observons sa mère subir l’arrivée d’une autre femme sous son toit. De manière intelligente et précise, la réalisatrice Maïmouna Doucouré nous pousse à la réflexion sans pour autant influencer notre jugement sur la polygamie.

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« Maman(s) » est le deuxième court-métrage réalisé par Maïmouna Doucouré. Son premier film « Cache-cache », tourné dans le cadre du concours HLM sur court, racontait l’histoire d’un groupe d’enfants à la recherche de leur camarade disparu dans une cité. Son nouveau court-métrage sorti en 2015 a déjà un beau parcours. Auréolé de deux prestigieuses récompenses, le prix du jury au festival de Sundance et le prix du meilleur court-métrage au festival de Toronto, il a reçu cette année une mention spéciale Prix France Télévisions au festival de Clermont-Ferrand.

« Maman(s) » raconte l’histoire d’Aida, 8 ans, qui attend avec impatience le retour de son père parti en voyage. Au sein d’une famille d’origine sénégalaise, elle évolue dans un appartement à l’ambiance chaleureuse et tamisée.

Ce court-métrage s’ouvre sur une scène qui n’est pas sans rappeler le générique du film « Du silence et des ombres » de Robert Mulligan (1962). Filmées en très gros plans, les mains d’un enfant s’adonnaient au coloriage d’une maison maladroitement dessinée. De la même manière, Aida dessine sa famille et le lieu dans lequel elle vit. Au loin, derrière les murs de sa chambre, on entend les rires étouffés de sa mère. C’est un moment rassurant, où le bonheur est palpable à l’approche du retour de l’être aimé.

Dans le film de Robert Mulligan, ce dessin, symbole fort d’une famille unie, présageait d’un bouleversement. Baignant jusqu’alors dans une enfance libre et protégée, les jeunes héros du film allaient basculer vers un autre âge, où le monde adulte se révélerait à eux dans tout ce qu’il avait de plus violent et injuste. Le court-métrage de Maïmouna Doucouré traite aussi d’un bouleversement durant cette période si fragile qu’est l’enfance. Aida va faire l’expérience d’un drame au sein de sa famille, un dysfonctionnement qui va la faire chavirer loin de sa zone de confort.

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La porte de l’appartement s’ouvre joyeusement : le père tant attendu est là, dans tout ce qu’il a de plus beau, de plus resplendissant. Et pourtant, derrière lui dans la pénombre, une femme l’accompagne, elle porte dans ses bras un nouveau né. L’enthousiasme se feint progressivement, un non-dit s’installe. Et c’est là toute la force et la sagesse de ce court-métrage : au lieu de critiquer frontalement la polygamie, la réalisatrice interroge sur cette pratique en faisant un constat précis des dommages collatéraux qu’elle peut engendrer.

Progressivement, l’appartement se transforme, il devient exigu. Une pièce doit se libérer pour la nouvelle femme et son bébé, Aida va devoir emménager dans la chambre de son frère. Elle observe secrètement son ancienne chambre transformée, où un lit deux places est maintenant installé. Trop grand, il semble ne pas tenir entre les murs. Maïmouna Doucouré filme ce lit vide avec les draps froissés, comme pour nous montrer dans un sous-entendu faussement pudique, la place que la sexualité a dans ce nouveau ménage.

C’est par toutes ces observations qu’Aida prend conscience du jeu sous-jacent d’une sexualité multipliée, d’un désir dupliqué. Une découverte progressive qui se fait aussi en observant le corps de cette nouvelle femme qui se déshabille et surtout le corps de son père torse nu traversant le couloir pour la retrouver. L’ultime constat de ces observations sera le résultat même de ce second mariage : un nouveau né qui par ses cris ne cesse de manifester sa présence dans cette famille qui n’est pas vraiment la sienne. En voyant le sein de cette femme qui nourrit son fils, le trouble s’empare d’Aida. Plus que pensive, elle se transforme.

Et c’est là toute la beauté de ce court-métrage : Aida se métamorphose sous nos yeux, une force nouvelle se déploie chez elle. Elle va se battre pour retrouver son équilibre familial, mais surtout pour protéger sa mère de ce tourment. Entre mère et fille, un jeu de miroir opère : c’est aussi son avenir de femme qu’Aida souhaite préserver en protégeant sa mère. La féminité de cette femme, son pouvoir de séduction, son estime d’elle-même sont mis à l’épreuve par l’arrivée d’une autre épouse. Pour Aida, cette prise de conscience aiguë de ce qui se trame sous ses yeux s’apaisera au contact d’un amour binaire, loin de toutes convoitise extérieur : l’amour maternel.

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La réussite de ce court-métrage tient aussi par sa mise en scène rigoureuse qui met en avant le jeu des acteurs. Les silences et les regards lourd de la jeune Sokhna Diallo qui interprète Aida, transpercent souvent l’écran pour nous dire toute la gravité de la situation. En nous immergeant entre les murs d’un appartement, la réalisatrice, sans porter de jugement précis, nous pousse à réfléchir sur la polygamie et ces enjeux, tout en étant dans l’empathie de chacun de ces personnages. Il est impossible de sortir de ce court-métrage sans porter une réflexion, ou du moins sans s’interroger un instant sur cette pratique qui reste encore trop peu remise en question.

Sarah Escamilla

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M comme Maman(s)

Fiche technique

Synopsis : Aida, huit ans, habite un appartement de banlieue parisienne.

 Le jour où son père rentre de son voyage au Sénégal, leur pays d’origine, le quotidien d’Aida et de toute la famille est complètement bouleversé : le père n’est pas revenu seul, il est accompagné d’une jeune sénégalaise, Rama, qu’il présente comme sa seconde femme.

 Aida, sensible au désarroi de sa mère, décide alors de se débarrasser de la nouvelle venue.

Genre : Fiction

Durée : 21′

Pays : France

Année : 2015

Réalisation : Maïmouna Doucouré

Scénario : Maïmouna Doucouré

Image : Yann Maritaud

Son : Clément Maléo

Montage : Sonia Franco

Interprétation : Sokhna Diallo, Maïmouna Gueye, Azize Diabate, Eriq Ebouaney, Mareme N’Diaye

Musique : Viviane N’Dour

Production : Bien ou Bien Productions

Article associé : la critique du film

Rappel. Soirée Format Court, ce jeudi 10 mars 2016 !

Pour la quatrième année consécutive, le magazine en ligne Format Court accueille le Festival Européen du Film Court de Brest pour une nouvelle séance Best of Brest !

Cette soirée spéciale, composée de 4 courts-métrages français, polonais, grecs, allemands et croates, aura lieu ce jeudi 10 mars 2016, à 20h30, au Studio des Ursulines (Paris 5e) en présence de nos invités : Fabienne Wipf, directrice du festival, Daphné Hérétakis, réalisatrice de « Archipels, granites dénudés » et l’équipe de « Coach » de Ben Adler, Prix spécial du jury au festival de Brest 2015.

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En pratique

– Jeudi 10 mars 2016, à 20h30, accueil : 20h. Durée de la séance : 81′
– Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris
– Accès : RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée), Bus 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon). Métro le plus proche : Ligne 7, arrêt Censier Daubenton (mais apprêtez-vous à marcher un peu…)
Entrée : 6,50 €
Réservations vivement recommandées : soireesformatcourt@gmail.com
Évènement Facebook : ici !

Chabname Zariab : « Dans un roman on peut écrire les sensations du personnage tandis que dans un film il faut pouvoir les montrer. Mais il s’agit toujours de raconter une histoire »

« Au bruit des clochettes » est le premier court métrage de Chabname Zariab. Cette co-production franco-tunisienne présentée en compétition nationale au festival du court-métrage de Clermont-Ferrand a remporté le prix de la meilleure première oeuvre de fiction décerné par la SACD. Avec ce film, Chabname Zariab aborde un sujet tabou, celui des réseaux de pédophilie en Afghanistan. Rencontre avec une jeune auteure qui nous parle de son pays meurtri et de la difficulté d’y faire du cinéma.

Chabname Zariab

Qu’est-ce qui t’a amené vers la réalisation de films ?

J’étais expert en dommage pour une compagnie d’assurances. J’avais écrit un roman, « Le Pianiste afghan », j’étais déjà dans l’écriture et j’étais très cinéphile. J’ai aussi un rapport très particulier à l’image et aux films en général, que ce soit pour le cinéma ou la télévision, car quand je suis arrivée en France je ne parlais pas le français et pour une grande partie des immigrés, tout cet apprentissage se fait aussi par la télévision et le cinéma. J’avais aussi la chance d’avoir une mère très cultivée et très littéraire qui nous a baignés dans le cinéma et la littérature. C’est une dévoreuse de livres. Même à l’adolescence, dans ce moment ou on est peut-être plus proches de l’amusement que des livres, elle nous lisait des romans. C’est elle qui m’a transmis ça.

Comment as-tu choisi le sujet des Bacha bazi pour ton premier court métrage « Au bruit des clochettes » ?

C’est un sujet que je ne connaissais pas personnellement mais dont j’avais entendu parler et qui était assez vague, sur lequel je ne m’étais pas attardée. Même si c’est dramatique, je pensais que ça se passait dans des zones très reculées d’Afghanistan. Finalement j’ai vu “The Dancing Boys of Afghanistan”, le documentaire du journaliste Najibullah Quraishi, qui a infiltré les réseaux de bacha, et se faisait passer pour un homme à la recherche d’un jeune garçon. Ce documentaire m’a vraiment bouleversée parce qu’on y explique que c’est un phénomène qui s’étend de plus en plus. Dans les pays musulmans il y a une espèce d’hypocrisie, parce qu’à un moment donné, la scission entre la société des hommes et celle des femmes crée des troubles presque psychiatriques. Il y a des pulsions qui existent et qu’il faut évacuer et les premiers à en pâtir sont les enfants.

Au bruit des clochettes-Chabname Zariab

Finalement, dans une société qui rejette l’homosexualité, c’est une pratique surprenante.

C’est même entre l’homosexualité et la pédophilie. Mais en même temps, ça ne s’y apparente pas vraiment car il y a un travestissement qui se fait. Ces enfants sont quand même déguisés en fille. C’est quasiment schizophrénique.

Penses-tu que ce film aurait pu être produit ou réalisé en Afghanistan ?

Il n’aurait pas pu y être produit car nous n’avons pas de structures de financement, pas de sociétés de production à l’image des sociétés européennes. Il y a Afghan Film, une structure gouvernementale qui accueille les tournages en Afghanistan et qui permet d’offrir une certaine forme de sécurité pour que les films puissent y être tournés. On ne pouvait pas le financer là-bas mais une fois qu’on a obtenu les financements en France, je voulais vraiment tourner en Afghanistan, à Kaboul plus précisément, et ma productrice était plutôt d’accord. Le moment où nous avons décidé de tourner coïncidait avec les élections présidentielles et le pays à commencer à devenir un peu instable. Ma productrice, qui y envoyait tout de même toute une équipe, n’a pas voulu prendre la responsabilité de mettre cette dernière en danger. Elle avait déjà travaillé en Tunisie et on finalement recréé l’Afghanistan là-bas. Je suis contente du résultat, c’est assez crédible.

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Existe-t-il des réseaux de diffusion pour un sujet aussi tabou que celui-ci en Afghanistan ?

Il existe des festivals qui commencent à naître, notamment un festival de femmes, un peu comme le Festival de Films de Femmes de Créteil. Il a été créé à Herat dans le nord de l’Afghanistan par trois réalisatrices. Il y a des réalisatrices brillantes en Afghanistan, mais sans sociétés de production c’est très difficile de mettre en place des projets. Elles le font quand même, elles se battent et arrivent à réaliser de très beaux projets, principalement documentaires, parce que ça coûte moins cher que la fiction, mais il y a vraiment une jeunesse brillante.

Est-ce qu’il y a des difficultés à organiser ce genre d’événement ?

Non parce qu’elles les organisent dans des régions qui sont assez ouvertes. Il y a des gouverneurs qui aident les festivals à se faire. Mais c’est une société malade et on ne peut pas non plus lui en vouloir quand on considère les trente années de guerre qu’elle a vécues. Ça ne laisse pas indemne. Ça bouleverse. Toute l’éducation, toute la vision qu’on a pu avoir peut tout à coup s’effondrer et il faut tout reconstruire. Mais cela se fait petit à petit.

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Comment as-tu rencontré le comédien principal de ton film, Shafiq Kohi ?

Je suis très fière de Shafiq. On a envoyé une annonce de casting un peu partout et Shafiq a été le premier candidat. J’ai appelé ma productrice aussitôt pour lui dire d’arrêter le casting. Elle m’a répondu que j’étais folle, qu’on ne pouvait pas s’arrêter là, qu’il fallait à tout prix que je voie d’autres personnes. Quand je l’ai vu et qu’on a fait des essais, ça s’est confirmé. Lorsque j’ai commencé à l’habiller et à le maquiller pour voir ce que ça donnerait à l’image, j’étais absolument convaincue. C’était une très belle rencontre. Shafiq est un comédien professionnel qui est venu assez jeune d’Afghanistan, il fait partie du groupe Aftaab de Ariane Mnouchkine depuis dix ans et a été formé au Théâtre du Soleil. Il n’est pas danseur mais il a fait un travail de danse incroyable. On a fait la chorégraphie ensemble, il fallait qu’il ait une certaine grâce et qu’il puisse adopter des gestes très féminins. Je dansais et il me suivait. Ariane était très contente car c’est également le fruit de son travail. Elle nous a prêté le Théâtre du Soleil pour les répétitions et j’avais du coup ce comédien et cet espace incroyables pour travailler.

Comment, avec le chef opérateur, avez-vous mis en place cette très belle scène finale de danse ?

Avec le chef opérateur, Eric Devin, également ça a été une rencontre extraordinaire. J’avais une image et une durée très précises en tête, je ne voulais pas de cut. Ça a été assez terrible parce que nous avons tourné les deux scènes de danse sur une journée, en Tunisie, sans climatisation, par 40 degrés. Les grelots que Shafiq porte pèsent chacun 4kg et il a dansé sept heures, enfermé avec les techniciens dans cette petite maison. J’avais une pression parce qu’en Tunisie, quand la journée de travail se termine à 19h, tout le matériel est posé et tout le monde s’en va. Pour cette dernière scène où il tourne sans s’arrêter, il était déjà très tard et il a fallu le faire en une seule fois, que tout soit réussi en une séquence. Les figurants s’affaissaient de plus en plus et au bout d’un moment je leur ai demandé de sortir parce qu’ils n’étaient plus dedans et qu’il fallait tout de même qu’on garde cette intensité. J’ai donc demandé à Éric de cadrer très haut, uniquement sur Shafiq. Je suivais de l’extérieur sur l’écran car c’était filmé en caméra portée à l’épaule et Eric s’enfermait avec Shafiq et le faisait danser. Au départ, je voulais un plan beaucoup large, dans le style des derviches tourneurs. Finalement, on ne voit plus la robe et on perd cet effet, mais ça marche très bien, je suis contente du résultat. Il y a une réécriture au montage et finalement le film est très travaillé jusqu’à ce qu’on arrive à une version regardable.

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Comment as-tu abordé l’écriture de ce film après avoir écrit un roman. Était-ce ton premier scénario ?

Ce n’était pas mon premier scénario. Je pense que la construction n’est pas si différente. Le scénario est très dialogué, on écrit pas et ne traduit pas de la même façon les émotions des personnages. Dans un roman on peut écrire les sensations du personnage tandis que dans un film il faut pouvoir les montrer. Mais il s’agit toujours de raconter une histoire. Pour moi les deux exercices sont assez liés.

L’écriture et le montage de ce projet ont-ils été longs ?

Ça n’a pas été long mais c’est un projet que j’avais laissé de côté. Je l’avais écrit au moment où j’avais vu ce documentaire, et c’est ma rencontre avec Judith Lou Lévy, ma productrice (Les Films du Bal), qui a fait que je l’ai ressorti. Elle travaillait dans une autre société de production où elle était conseillère en développement et où j’ai développé un long métrage, et elle m’avait demandé de lui proposer d’autres projets. Je lui en ai montré trois. Elle réfléchissait à quel projet prendre et je l’ai un peu devancé en lui disant que « Au bruit des clochettes » me plaisait d’avantage et je l’ai envoyé au CNC. On a eu un très bon retour et on m’a demandé de réécrire quelques passages pour le représenter. Tout s’est fait très vite car nous avons obtenu la contribution financière du CNC puis, quelques semaines plus tard, Arte a préacheté le projet, on a donc pu préparer le tournage. Par la suite, nous n’avions plus d’argent pour la post-production car le tournage en Tunisie a coûté très cher. On a alors eu la chance que Dom Dom Films nous ait quasiment offert la post-production.

Envisages-tu un passage au long métrage ainsi que d’autres films courts ?

Oui. Je prépare actuellement un autre court métrage, on est vers la fin de l’écriture. En parallèle, je suis en train de développer un long métrage qui s’appelle « Les Intégrés » et qui parle de cette notion d’intégration qui me semble un peu étrange,;j’ai un rapport particulier avec ce mot. Je pense qu’on vit en France une crise sémantique et que ce sera le sujet du film.

Propos recueillis par Agathe Demanneville

Article associé : la critique du film

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The Reflection of Power de Mihai Grecu

Adepte des allégories délicates empreintes de mélancolie, Mihai Grecu continue d’interroger le monde et ses vicissitudes à travers des films entrechoquant images réelles et effets spéciaux numériques. Après les magnifiques « Centipede Sun » (2010) et « We’ll Become Oil » (2013), il s’attaque cette fois au régime nord-coréen à travers une représentation inédite de Pyongyang, la cité la plus hermétique du monde, avec le sublime « The Reflection of Power », qui a obtenu la Mention spéciale du Jury Labo au dernier Festival du court métrage de Clermont-Ferrand.

Une représentation de grande envergure, gala sportif millimétré et chorégraphié avec soin, devient le centre d’attention de tout un peuple qui délaisse sa ville à la merci d’une inondation dévastatrice. Cette ville est celle de Pyongyang et le régime décrit, celui ô combien rigide de la Corée du Nord. Alors que les jeux Arirang attirent les foules, les rues sont désertées et les monuments se retrouvent abandonnés. Toute forme de vie humaine a quitté ces lieux lugubres, les seuls visages restants étant ceux, figés et souriants, des statues, affiches et tableaux à la gloire du régime. Petit à petit, le niveau de l’eau monte et engloutit tout signe de pouvoir ostentatoire, comme autant de géants aux pieds d’argile.

En utilisant l’allégorie et la métaphore, Mihai Grecu interroge sur la déshumanisation induite par un pouvoir absolutiste, qui préfère célébrer sa toute puissance à travers des représentations scéniques grandiloquentes, plutôt que de laisser une infime place à une quelconque liberté individuelle.

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Grecu évite l’écueil d’un discours trop frontal qui aurait pu paraître simpliste, en creusant les symboliques inhérentes à l’élément aquatique, véritable miroir déformant de la grande vérité prônée par le régime. L’eau, telle une entité sauvage, destructrice et purificatrice, révèle l’envers du décor et submerge l’envie de contrôle absolu. Elle agit comme un deus ex machina qui épure et rétablit une certaine forme d’apaisement, mais aussi comme un immense “bac révélateur” laissant apparaître sur “la photo d’ensemble” tous les secrets inavouables les plus pronfondément enfouis.

Fort d’un savoir-faire technique virtuose, le film alterne plusieurs moments de bravoure à la fois beaux et chargés de sens, comme la scène très iconique dans laquelle la statue du dirigeant sur son trône, baignée dans un paysage désolé à dominante rouge, réfléchit dans l’eau cette même couleur écarlate et fait écho à des litres de sang se déversant à ses pieds. A un autre moment du métrage, une chorale d’enfants, en tous points semblables et les pieds dans l’eau, essaye tant bien que mal de chanter quelque chose d’intelligible, mais le son qui en sort est “noyé” dans un magma bruitiste et lointain. Enfin, le dernier plan du film montre une flamme de pierre, symbole de vie et de liberté, s’estomper et se dissoudre sous les assauts conjugués de l’eau et du brouillard.

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Jouant sur une ironie mordante distanciée et empreint d’un nihilisme mélancolique, « The Reflection of Power » de Mihai Grecu tire à la fois un signal d’alarme pour éviter d‘en arriver à la catastrophe de l’engloutissement total, mais entend aussi que l’espoir d’assainir toute vision obscurantiste par l’Elément fondamental de l’eau existe quelque part, malgré tout.

Julien Savès

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R comme The Reflection of Power de Mihai Grecu

Fiche technique


Synopsis : Dans la capitale la plus secrète du monde la foule assiste à un spectacle alors qu’une catastrophe menace d’anéantir la ville…

Genre : Expérimental

Durée : 9′

Pays : France

Année : 2015

Réalisation : Mihai Grecu

Scénario : Mihai Grecu

Image : Mu Jin

Monteurs son : Simon Apostolou et Mihai Grecu

Mixeur : Simon Apostolou

Production : Bathysphère Productions

Article associé : la critique du film

Devenez lauréat de la Fondation Jean-Luc Lagardère !

Créées en 1990, les bourses de la Fondation Jean-Luc Lagardère soutiennent les jeunes professionnels de la culture et des médias. Dans le domaine de l’audiovisuel, la Fondation attribue chaque année quatre bourses.

lagardere-fondation

Auteur de documentaire : 25 000€

Vous êtes un jeune auteur de 30 ans au plus, ayant déjà réalisé un documentaire diffusé à la télévision, dans des festivals ou au cinéma, vous avez un projet de documentaire quel que soit le format (série de 26’, unitaire de 52’ ou 90’), à caractère social, économique, politique, scientifique ou culturel (documentaire de mémoire, portrait intimiste, documentaire d’investigation, film ethnographique…)

Auteur de film d’animation : 30 000€

Vous êtes un jeune auteur de 30 ans au plus, ayant déjà réalisé un film d’animation à titre professionnel ou dans le cadre de vos études, vous avez un projet de court-métrage ou souhaitez réaliser le pilote d’un long-métrage ou d’une série (que ce soit en 2D, 3D, en images de synthèse, avec des marionnettes…).

Producteur cinéma : 50 000€

Vous avez 30 ans au plus et vous souhaitez produire un film de fiction de long-métrage.

Scénariste TV : 20 000€

Vous êtes un jeune scénariste de 35 ans au plus, ou vous faites partie d’une équipe d’auteurs (scénariste et dialoguiste, co-scénaristes, co-dialoguistes), vous avez déjà obtenu un contrat d’option ou une convention d’écriture passée avec un producteur (TV ou cinéma, toute durée, que le projet ait abouti ou non), vous avez un projet de scénario pour la télévision (téléfilm, sitcom, série, mini-série, short, utilisant des images traditionnelles ou des images de synthèse).

La Fondation accorde également des bourses dans les domaines suivants : Créateur numérique, Écrivain, Journaliste de presse écrite, Libraire, Musicien et Photographe.

Modalités de candidature sur le site : www.fondation-jeanluclagardere.com

Dépôt des candidatures avant le samedi 11 juin 2016 !

Du côté des Oscars

La 88e cérémonie des Oscars du cinéma ayant eu lieu ce dimanche 28 février 2016 à Los Angeles a récompensé trois courts-métrages dans les catégories habituelles : fiction, animation, documentaire. Les votants de l’Académie ont choisi les titres suivants parmi les films présélectionnés.

Meilleur court métrage de fiction : Stutterer de Serena Armitage et Benjamin Cleary

Meilleur court métrage d’animation : Bear Story (Historia de un oso) de Pato Escala Pierart et Gabriel Osorio Vargas

Meilleur court métrage documentaire : A Girl in the River: The Price of Forgiveness de Sharmeen Obaid-Chinoy

Des supers filles & courts primés aux César

Vendredi soir, le Théâtre du Châtelet a vu récompenser deux réalisatrices de courts métrages repérées par Format Court : Céline Devaux a remporté le César de l’animation avec son formidable « Le Repas dominical » (projeté en septembre 2015 dans le cadre de nos projections en présence de sa réalisatrice) tandis que Cécile Ducrocq a obtenu le sésame du court avec son très juste, « La Contre-allée » projeté en sa présence et celle de sa comédienne, Laure Calamy, à notre dernière Soirée Format Court, il  y a 10 jours.

Retrouvez pour l’occasion nos différents articles :

La Contre-allée (Année Zéro), César du Meilleur Court Métrage

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Suzanne se prostitue depuis 15 ans. Elle a son bout de trottoir, ses habitués, sa liberté. Un jour, de jeunes prostituées africaines s’installent en périphérie. Suzanne est menacée.

A lire : la critique du film, l’interview de Laure Calamy

Le Repas dominical de Céline Devaux (Sacrebleu Productions), César du Meilleur Court Métrage d’animation

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Synopsis : C’est dimanche. Au cours du repas, Jean observe les membres de sa famille. On lui pose des questions sans écouter ses réponses, on lui donne des conseils sans les suivre, on le caresse et on le gifle. C’est normal, c’est le repas dominical.

A lire : la critique du film, l’interview de éline Devaux

Prochaine Soirée Format Court, Best of Brest !

Pour la quatrième année consécutive, Format Court accueille le Festival Européen du Film Court de Brest pour un nouveau Best of Brest ! Cette séance spéciale se tiendra le jeudi 10 mars prochain, dès 20h30, au Studio des Ursulines (Paris 5e) en présence de nos invités : Fabienne Wipf, directrice du festival, Daphné Hérétakis, réalisatrice de « Archipels, granites dénudés » (Mention spéciale Format Court au festival de Brest 2015) et l’équipe de « Coach » de Ben Adler, Prix spécial du jury au festival de Brest 2015.

Programmation

Larp de Kordian Kądziela (Fiction, 27′, Pologne, 2014, Krzysztof Kieslowski Faculty of Radio and Television, Université de Silesia). Prix Format Court au festival de Brest 2015

Sergiusz, dix-sept ans, se sent incompris par sa famille. Le garçon se réfugie dans sa grande passion, le monde de la science-fiction.

Archipels, granites dénudés de Daphné Hérétakis (Documentaire, 25′, France, Grèce, 2014, Le Fresnoy). Mention spéciale Format Court au festival de Brest 2015. En présence de la réalisatrice

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Athènes 2014. Entre désirs endeuillés et espoirs perdus, un journal intime se cogne contre les murs de la ville. Le quotidien d’un pays en crise, l’inertie de la révolution, les questions individuelles qui se confrontent au politique, la survie qui se confronte aux idéaux.

The Chicken de Una Gunjak (Fiction, 15’, Allemagne, Croatie, 2014, Zak Film Productions, Nukleus Film). Sélectionné à la Semaine de la Critique 2014, Prix du cinéma européen du meilleur court-métrage 2014

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Pour ses six ans, Selma reçoit un poulet comme cadeau d’anniversaire. Comprenant que l’animal va être tué pour nourrir la famille, Selma décide de le sauver et le laisse s’échapper. Lorsque la mère de Selma tente de récupérer le poulet, elle devient la cible des tirs d’un sniper. Bienvenue à Sarajevo, en 1993.

Coach de Ben Adler (Fiction, 14’, France, 2014, Fluxus Films). Prix spécial du jury au festival de Brest 2015, Prix spécial du Jury Génération 14+ (Berlinale 2015). En présence de l’équipe

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Un père divorcé emmène son fils de quatorze ans, dont il n’a pas la garde, assister à son premier match de football de l’équipe d’Angleterre, en France. Une panne de voiture et la rencontre avec un car de supporters anglais, et son leader hooligan, donneront à cette aventure une tout autre tournure.

En pratique

– Jeudi 10 mars 2016, à 20h30, accueil : 20h. Durée de la séance : 81′
– Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris
– Accès : RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée), Bus 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon). Métro le plus proche : Ligne 7, arrêt Censier Daubenton (mais apprêtez-vous à marcher un peu…)
Entrée : 6,50 €
Réservations vivement recommandées : soireesformatcourt@gmail.com
Évènement Facebook : ici !

Prix Format Court/Média Solution. Le cas de « Berlin Metanoia » de Erik Schmitt, projeté à la Berlinale 2016

Fin octobre 2015, nous vous annoncions la mise en ligne de « Nashorn im Galopp » de Erik Schmitt, réalisateur allemand primé par notre jury Format Court l’an passé au festival de Brest. Si vous n’avez pas vu le film, nous vous invitons à le découvrir. Il est toujours aussi sympa et accessible dans son intégralité.

Pour info/rappel, dans le cadre de notre prix, nous avons consacré un  dossier spécial à Erik Schmitt, mais aussi projeté son film à Paris, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème), en présence du réalisateur en mars 2015.

Toujours par rapport au prix, le réalisateur a bénéficié d’une copie DCP pour son nouveau court-métrage grâce aux bons soins de notre partenaire, le laboratoire numérique Média Solution, à l’origine du Coup de Pouce DCP (dont l’actuel concours pour gagner un DCP est ouvert jusqu’au 31 mars 2015).

Le bon Scoop. « Berlin Metanoia » (image ci-dessous), le nouveau film d’Erik Schmitt, dont le DCP a donc été créé par Média Solution, a fait sa première à la dernière Berlinale dans la section Generation 14plus, consacrée aux jeunes cinéphiles de moins de 18 ans. On en est ravi pour le film et le réalisateur.

Depuis la création des Prix Format Court, notre équipe a récompensé plus de 30 films de tous genres et horizons (France, Belgique, Allemagne, Pays-Bas, Autriche, Espagne, Royaume-Uni, Pologne, Portugal, Roumanie, Norvège, Suède, Danemark, Canada, Brésil, Algérie, États-Unis) et s’est associé à de nombreux festivals français et étrangers.

Dorénavant, nous ne manquerons pas de vous tenir au courant des nouveaux projets des réalisateurs et réalisatrices que nous avons primés et des DCP créés pour la finalisation et la diffusion de leurs films.

Aider les auteurs, encourager la création, maintenir notre engagement en faveur du court métrage, collaborer avec un prestataire technique réputé pour son professionnalisme (encodage, sous-titrage, étalonnage) et son lien indéfectible aux auteurs et aux producteurs, telle est encore et toujours notre mission.