Padre de Santiago Bou Grasso

Animation, 12′, 2013, France, Argentine, Les films de l’Arlequin

Synopsis : Argentine, 1983. Une femme consacre sa vie entière au soin de la santé de son père, un très haut dignitaire de l’armée. Sa routine quotidienne est réglée par les tintements d’une horloge qui ponctuent continuellement chacune de ses activités, réduisant son existence à cet asservissement.

« Padre » est un court-métrage politique réalisé en stop motion par l’animateur argentin Santiago Bou Grasso qui évoque une partie sombre de son pays, en 1983 juste après la dernière dictature en date. A travers le personnage d’une jeune femme vivant en huis clos dans l’appartement de son père, ancien dictateur argentin, le film dénonce l’absence de positionnement politique de la classe moyenne en Argentine durant cette période sombre de l’histoire du pays. Un film tout en symbolique et en ellipses.

Film multi-primé mis en ligne depuis peu, « Padre » parle de passivité et de déni d’une partie de la population face aux événements atroces (disparitions, tortures, meurtres…) qui se sont déroulés pendant ces événements troubles de l’Histoire. Dans ce court-métrage, le temps s’est arrêté à l’image de cette femme isolée, enfermée dans un quotidien qu’elle répète jour après jour et dans les gestes identiques plan après plan, à l’image des repas préparés pour son dictateur de père. En filigrane, Santiago Bou nous montre ce qui n’est pas, ce qui n’est plus, mais dont les habitudes qui rythment les journées persistent à faire exister. Le réalisateur à pris un soin particulier à travailler la mise en scène, notamment par les bruitages des objets très présent dans ce film sans paroles. Comme le tic-tac régulier des aiguilles de l’horloge, image du temps qui passe, mais qui dans le cas présent nous renvoie à l’immobilisme de la classe moyenne lors de ces événements. L’unique moment où l’on entend le son d’une voix, c’est à travers le poste de radio, lorsqu’on entend une mère demandant justice et dénonçant les atrocités de la dictature.

Déjà, dans « El Empleo » son court précédent,Prix Fipresci 2009 à Annecy,  Santiago Bou proposait un film muet pour dénoncer la passivité du quotidien, le temps suspendu, la déshumanisation et le rapport au pouvoir mais sous couvert d’humour et de mélancolie. Avec « Padre », il semble avoir franchi une étape, celle de mêler histoire intime et collective, avec un couvert plus sombre, plus mature, plus dénonciateur.

Karine Demmou

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