C’est un dimanche habituel pour Lis, Babu, Gito et Nino, enfants des rues de Maputo. Alors que la fête foraine bat son plein, ils font la manche, espérant récolter quelques piécettes pour pouvoir profiter à leur tour des attractions du parc. Sélectionné en compétition internationale à Clermont-Ferrand, « A Tropical Sunday » de Fabian Ribezzo dresse un portrait sans fard des conditions de vie de nombreux enfants au Mozambique.
Pour survivre, les quatre gamins vident les restes de nourriture laissés nonchalamment sur les assiettes des badauds venus en famille prendre du bon temps tout en regardant avec envie les chanceux dans les auto-stoppeuses. Mais quand c’est l’heure du concours de danse, Lis pousse ses comparses à une course contre la montre pour trouver en un temps record un costume qui permettra à l’un d’entre eux de monter sur scène. Du borsalino aux chaussures en passant par la ceinture et les chaussettes peintes à même les chevilles, toute la panoplie du grand Michael Jackson est ainsi subtilisée habilement à quelques visiteurs. Le petit danseur peut dès lors se déhancher sur un Beat it remixé à la sauce du coin, enflammant la petite assemblée et raflant le prix qui permet le tour de manège tant attendu.
L’intérêt du film de Fabian Ribezzo réside dans la façon dont il pose des contrastes, celui des riches et des pauvres, celui du monde des adultes qui se confronte sensiblement à celui des enfants. La réalité non sublimée est cependant mise en scène dans une sorte de fable des temps modernes. Les acteurs, non professionnels, plus vrais que nature, semblent cependant sortir d’une comédie sociale et la caméra de Ribezzo aime à les suivre en y relevant les tonalités pâles et chaleureuses de leur quotidien. Une comédie douce-amère au rythme bien senti.
Synopsis : Maputo, Mozambique. Lisa, Babu, Gito et Nuno vivent dans la rue. Le dimanche, ils passent leur journée à la fête foraine, espérant resquiller un petit tour de manège.
Grand Prix Labo en 2010 avec son film « Petite Anatomie de l’Image », Olivier Smolders était de retour cette année au Festival de Clermont, en Labo, avec un film enquête fascinant, « La Part de l’Ombre ». Découvrez à travers cette nouvelle œuvre un auteur passionnant et radical, soucieux d’explorer notamment les problématiques liées à la représentation de l’image au cinéma et dans la photographie.
« La Part de l’Ombre », votre nouvelle œuvre, utilise la forme du documentaire d’archives et de l’enquête avec reconstitution pour raconter l’histoire mystérieuse et tragique d’un photographe hongrois, Oskar Benedek, tout en distillant un doute, pendant toute la durée du film, quant à la véracité de ce récit. Comment vous est venue l’idée d’un tel portrait « imaginaire » ?
Le film est né de deux désirs : celui de porter à l’écran des images que j’aime beaucoup, celles de Jean-François Spricigo, et par ailleurs celui de travailler à partir d’une ébauche de nouvelle que m’avait proposée Thierry Horguelin : l’histoire d’un photographe qui efface le monde en le photographiant. Oskar Benedek naît du croisement de ces deux éléments, l’un visuel, l’autre narratif.
Comment s’est passé le travail d’écriture avec Thierry Horguelin, notamment sur la structure formelle du récit ? Était-ce un défi de réaliser un tel film, avec tout le travail de contextualisation du réel à créer ?
Le pari de départ – non tenu – était de faire un film entièrement de photographies, à la manière de « La Jetée ». Puis est venue l’idée d’un récit en forme de sous-dossiers contenant des archives qui se complèteraient et se contrediraient les unes les autres, de façon à former un récit à la fois clair et complexe. La reconstitution historique faisait partie du jeu, même si la volonté de créer un leurre ne nous est jamais apparue comme une fin en soi. C’est seulement un dispositif pour mettre le spectateur dans une certaine disposition d’esprit. Finalement, la question de savoir si Benedek a vraiment existé importe assez peu. Au cinéma, tout est fiction. Si je fais un film sur Rimbaud, je crée un personnage qui s’appelle Rimbaud, un personnage qui n’a sans doute qu’un lien très éloigné avec le Rimbaud historique.
La frontière entre réalité et fantasme est très fine dans ce film et vous faites preuve d’une grande virtuosité pour brouiller les pistes. Comment avez-vous procédé pour ancrer cette histoire dans un réalisme historique aussi précis et détaillé ?
À partir du moment où le contexte fait croire qu’une image ou un récit correspond à la réalité, le spectateur s’arrange le plus souvent pour occulter les éléments incohérents ou extravagants. Les faussaires ont de tous temps compris que l’accumulation de détails joue comme autant de preuves d’authenticité. Sans compter que le réel lui-même est souvent incroyable. Dans « La part de l’ombre », les éléments les moins crédibles sont les plus vrais, notamment le rôle joué par ce médecin autrichien dans une clinique à Vienne pendant la guerre. Mais, une fois encore, cette question du référent, de l’authenticité, est assez secondaire. Si le film met en péril l’image en tant que pièce à conviction pour saisir le réel, c’est surtout pour interroger la question de l’art lui-même, de l’usage qu’on peut en faire, de sa violence légitime ou coupable, de l’effrayante liberté qui est la condition même de son existence.
Pouvez-vous nous parler de votre collaboration artistique avec Jean-François Spricigo ? Comment avez-vous fonctionné ensemble pour donner vie aux photos du fameux photographe hongrois ?
Nous nous connaissons depuis longtemps et avions envie de travailler sur un projet de film de photographies. Une partie des images préexistaient au film. La plupart d’entre elles ont été faites en suivant le scénario, exactement comme si c’étaient des plans d’un film, en redoublant parfois la prise de vue avec du super 8. Il fallait donc à la fois réaliser un travail de réécriture de différents moments de l’histoire de la photographie et, par ailleurs, que Jean-François poursuive son travail de création originale, en y intégrant parfois des motifs qui ne lui étaient pas nécessairement familiers. Nous avons des univers très différents l’un de l’autre mais en même temps des goûts, des partis pris artistiques et des frayeurs communs. Pendant ce tournage, j’ai été impressionné par la façon dont il travaillait, allant toujours à l’essentiel, ne multipliant pas les prises de vue, maîtrisant parfaitement le support argentique dont il ne se départit pas.
En regardant « La Part de l’Ombre », on pense à plusieurs de vos œuvres précédentes, notamment « Pensées et visions d’une tête coupée », qui était le portrait imaginaire d’un peintre, mais aussi « Seuls », à cause des terribles images d’enfants opérés. Plusieurs obsessions personnelles (représentation de la mort, réflexion sur la beauté, …) se retrouvent également dans le film. Pouvez-vous nous en dire plus sur les obsessions et réflexions qui baignent vos œuvres et spécialement celle-là ?
C’est une idée reçue qui a sa part de vérité : au-delà des différences factuelles entre chaque œuvre, un écrivain écrit toujours le même livre, un peintre reprend toujours le même tableau, un réalisateur fait toujours le même film. Ce n’est en soi pas très étonnant car le travail de création consiste souvent à approcher par cercles concentriques un objet obscur, propre à chaque auteur, le plus souvent impossible à définir avec des mots. Cet objet inatteignable semble tourner sur lui-même et renvoyer de film en film ou de livre en livre, des éclats différents de lumière. Tenter de l’approcher, c’est une manière de se poser des questions sur ce que nous sommes et ce qu’est le monde qui nous entoure. Si chacun mobilise dans son travail un vocabulaire personnel, un ensemble de motifs repérables, c’est moins par obsession que par tentative de restreindre le champ d’investigation. Que les uns travaillent plutôt le motif des fleurs et les autres les cadavres ne change au bout du compte pas grand chose. Il y a des fleurs mortifères et des cadavres charmants.
Une thématique importante transparaît au détour de quelques phrases du journal intime de Benedek comme « Je photographie pour effacer, détruire » ou encore « La photographie tue ». De plus, le photographe se prend lui-même pour modèle vers la fin du film et se sent disparaître petit à petit. L’accroche du titre l’évoque aussi : « Film en voie de disparition ». Pouvez-vous nous en dire plus cette idée de disparition grâce à/à travers l’art ?
On a beaucoup répété cette idée que la photographie sert à embaumer le temps, à garder le souvenir et donc à redonner un peu de vie au passé. Cet usage consolatoire, déniant la mort tout en la confirmant, peut être contesté : la photographie est aussi bien un acte de vie, de relation entre les personnes, de création du monde nouveau, inattendu, qui ne préexisterait nulle part. Dans les deux cas, mélancolique ou optimiste, la photographie est une arme qui nous protègerait de la dureté du réel. Et s’il en était autrement ? Et si l’image était au contraire destructrice du passé comme du présent, mangeuse d’imaginaire, de relation, de vie ? Parce qu’elle ment, parce qu’elle réduit le réel, parce qu’elle fige absurdement les choses. La question mérite d’être posée, en ces temps ou des millions d’écrans dans le monde vomissent en permanence des milliards d’images. L’image fascine et, à ce titre, il conviendrait de se méfier d’elle. Dans « fasciner », il y a presque « fascisme ». Cette étymologie fantaisiste raconte quelque chose.
Sur ce film, vous avez travaillé avec Benoît Peeters et Bouli Lanners ? Pourquoi avoir fait appel à eux ?
« La part de l’ombre » est un film artisanal, fait soigneusement avec des bouts de ficelle, sur un coin de table, avec les amis qui voulaient bien y mettre leur grain de sel. Cela faisait longtemps que j’avais envie de tirer parti du physique singulier, un peu kafkaïen, de mon ami Benoît Peeters. Et puis est venue l’idée de solliciter, pour le rôle du complice de Benedek, la collaboration de Marcel Moreau qui est un écrivain belge de grand talent, ami de Jean-François Spricigo. Du coup, il fallait trouver une version rajeunie de ce personnage au physique impressionnant. Bouli étant le barbu le plus crédible et le plus sympathique que je connaisse, je lui ai proposé de s’y coller, ce qu’il a fait sans ciller !
La Part de l’Ombre nous a beaucoup fait penser à ce que faisait Jean-Teddy Filippe, avec sa série des Documents Interdits. Est-ce que cela a été une source d’inspiration pour vous ou avez-vous eu d’autres références ?
Oui, ses « documents interdits » font référence en la matière. « Opération Lune » de William Karel m’a aussi inspiré. Et après avoir revu dernièrement « Sans soleil » de Marker, j’ai lu la biographie du cameraman soi-disant auteur des lettres lues dans le film, un certain Sandor Krasna, né en 1932 à Kolozswar et ayant étudié le cinéma à … Budapest ! Il est fort possible qu’il y ait croisé la route d’Oskar Benedek. Ces deux-là devaient avoir des choses à se dire…
Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Je termine un film d’une vingtaine de minutes, ayant comme titre « La légende dorée ». Il combine une collection d’histoires extravagantes : assassins célèbres, monstres de foire, pétomanes, cannibales, aventuriers délirants ou anachorètes suicidaires. Bien que tous ces personnages aient vraiment existé, le narrateur du film ne fera pas toujours la part, comme dans l’œuvre de Voragine, entre l’Histoire et l’affabulation. Cette « légende dorée » portera le sous-titre « film sphérique », en hommage à Eisenstein qui rêvait d’un livre ou d’un film qui aurait pu se lire en partant de n’importe quel point pour arriver en n’importe quel autre.
Synopsis : Luna est shampouineuse dans un salon de coiffure. Elle vit chez son copain Jiabao et sa mère, une femme tyrannique qui travaille dans une usine de traitement de viande porcine. Son patron l’aime bien, mais il se méfie de Jiabao.
En compétition internationale du festival de Clermont Ferrand était présenté cette année le film de Xiaoyu Du, « Pork & Luna », mettant en scène la cohabitation houleuse d’une jeune fille et de sa belle-mère.
En Chine, une femme travaille dans une usine de viande porcine. Dans une brève scène d’exposition, défilent les corps entassés des cochons encore vivants, puis les morceaux de viande crue dépecée dans l’atmosphère glacée des locaux. La scène suivante dénote largement : dans un salon de coiffure, Luna, délaisse son client la tête moussue de shampoing pour aller rejoindre son copain Jilbao, venu la chercher en moto. Cela commence comme une fugue amoureuse, une échappée belle. La légèreté de la jeunesse se défie du monde adulte… pour atterrir chez la mère de Jilbao, austère et tyrannique. Le caractère de la mère semble contaminé par son mode de vie, par la violence du travail à l’usine, de la chair malmenée. Les amoureux n’en ont cure, et l’insolence de leur bonheur s’agite face à sa solitude.
Cette entrée en matière se révèle n’être que fausse piste : très vite Jilbao disparaît mystérieusement. Luna et sa belle-mère vont devoir se supporter dans une étrange atmosphère d’attente et de confrontation. Chacune voit en l’autre un mode de vie écœurant, avilissant. Elles sifflent comme des chats et leur comportement animal prend des airs de lutte de territoire. La trivialité de leurs affrontements relève d’un dégoût viscéral : rejet des dessous féminins, intrusion dans l’intimité de la douche ou des toilettes. La promiscuité dans toute son horreur : l’odeur de l’autre devient intolérable, puisqu’elle vous rentre dans le corps sans crier gare.
Pourtant, selon un schéma bien connu, l’hostilité est faite de projection et d’identification, et la ressemblance entre les deux femmes se dessine progressivement, tout comme le double jeu du fils. L’intimité de la caméra épaule et son cadre vivant, le mélange entre champs/contrechamps et plans d’ensemble modèlent une symétrie d’opposition puis se muent subtilement en symétrie associative. Le ton âpre du film se dissout. L’inquiétude et l’entraide font jaillir des liens ténus de complicité et l’empathie des corps. Les deux femmes s’apprivoisent, se soutiennent et se découvrent.
Quand le fils revient, une autre fille au bras, on ne sait laquelle des ruptures est la plus difficile… La mère et Luna prises dans la répétition d’une trahison amoureuse ne s’en ressemblent que plus.
Synospis : Joel aime Jacqui très, très fort. Espérant la conquérir, il exprime son amour en lui énumérant tout ce qu’il est prêt à faire pour elle. Mais comme il est complètement détraqué, tout cela n’est pas très ragoûtant – des histoires de vessie pleine de miel, de combats aériens de rhinocéros…
Présentée cette année dans le programme Labo à Clermont-Ferrand, cette petite histoire d’amour a décrispé les sourires de nombreux spectateurs du festival. S’il n’a ramené aucune récompense officielle de la capitale auvergnate, « I Love You So Hard » aura brillamment contribué au très bon cru 2014 de la sélection Labo.
Aux commandes de cet objet animé, deux hommes qui se connaissent bien : Joël Veitch, scénariste, et Ross Butter, réalisateur. Ces amis et partenaires de travail ont souvent eu l’occasion de travailler ensemble avant la réalisation de « I Love You So Hard », notamment dans le cadre de leurs études à l’Edinburgh College of Art et il semblerait que ce travail bicéphale leur réussisse.
Entre le trait graphique très extrême de Butter et l’écriture sans concession, brutale et imagée de Veitch, les films qui jaillissent de leur travail sont autant de délires hallucinants et vifs. « I Love You So Hard », une animation en 2D, propose un dessin assez simple qui place au premier plan les deux protagonistes : un homme follement éperdu d’une femme plus réservée sur ses propres sentiments. Pour conquérir son cœur, il déploie des prouesses d’imagination toutes plus scabreuses et détonantes les unes que les autres.
Car c’est bien de cela dont il s’agit : une passion folle ! Le film réalisé dans une énergie furieuse dépeint la quête amoureuse d’un homme littéralement prêt à tout pour séduire l’élue de son cœur. En transformant le jeu de séduction en une traque fantasque et effrayante, le décalage proposé dans le film est délicieusement jouissif. Ici, les classiques cadeaux tels des bouquets de fleurs deviennent des dons d’organes, les chocolats de l’urine au miel… Un peu gore, assez trash, l’amour n’a plus rien d’une ode romantique…
Pour compléter les ressorts narratifs comiques du film, Butter et Veitch ont également imaginé une voix particulièrement stridente – interprétée par le scénariste – pour ce personnage masculin qui en devient encore plus stressant et agressif. L’homme hurle sa passion dans une sorte de transe grotesque et inappropriée, rythmée par la récurrente phrase : « Oh, I love love you, I love you so hard ! »
Largement inspiré de la propre histoire du scénariste, celui-ci explique volontiers que le film s’ancre dans ce qu’il a vécu quand il a rencontré sa femme. L’amour pour lui était tellement évident et pour elle tellement peu présent qu’il a vécu à cause de ce décalage de sentiments des situations plutôt cocasses.
Délicieusement irrévérencieux, ce court métrage n’est rien d’autre qu’une comédie, simple, peut-être presque simpliste. Le film n’ouvre pas spécialement sur une grande réflexion intellectuelle. En revanche, le public ne boude en aucun cas ce plaisir facile qu’est de rire du ridicule et du grotesque présenté ici. « I Love You So Hard » fait partie de ces objets qu’on aime partager comme une bonne blague entre amis !
Près d’une mer toujours plus bleue dont les vagues transportent les secrets les plus lointains des paysages enchanteurs et d’une histoire ancienne, le bassin méditerranéen rassemble bon nombre de pays aux cultures et aux langues diverses. Pour sa 35ème édition, Short Screens revêt ses méditerranéennes parures et vous propose un petit tour à travers cinq contrées ensoleillées recelant dans leur écrin quelques bijoux cinématographiques venus de Turquie, du Maroc, d’Espagne, d’Italie et de Grèce ! Venez découvrir cette programmation fascinante, inspirée du Festival de court métrages méditerranéens de Tanger 2013 où Short Screens a eu la chance de faire partie du Jury.
Rendez-vous le 27 février 2014 à 19h30 au Cinéma Aventure, au 57 Galerie du Centre à 1000 Bruxelles. PAF 6€.
Un projet à l’initiative de l’asbl Artatouille et Format Court.
CAMOMILLE de Neritan Zinxhira / Grèce / 2012 / 15′
Syn. : Elle est seule. La terre des vivants est loin, alors que le monde des morts sent la camomille.
BUHAR de Abdurrahman Öner / Turquie / 2012 / 12′
Syn. : Une chambre sous un silence mortel. Une femme prépare le dîner à son mari. L’écho de la télévision. Une résolution finale, avec préjudice extrême, à des décennies d’hostilité dans la vie d’un couple…
I RAFI (LA COUTURE) de Sandra Fassio / Belgique / 2012 / 14′
Syn. : Anna coud les costumes de Nicolas depuis des années. Dans cet atelier, ils parlent grec, en souvenir du pays qu’ils ont dû fuir à l’époque de la dictature des colonels. Mais ils ne l’ont pas quitté pour les mêmes raisons. Ce soir Anna verra sa routine brisée par une nouvelle funeste, ce soir Nicolas saura pourquoi Anna ne l’a pas tué.
TERAPIA de Beatriu Vallès / Espagne / 2013 / 10′
Syn. : Emilia est une femme âgée. Elle vit seule, isolée, en laissant passer le temps. Jusqu´au jour où Miguel, un kinésithérapeute débarque dans sa vie.
MARGELLE de Omar Mouldouira / Maroc / 2012 / 29′
Syn. : A Boujaâd, bourgade marocaine ancestrale où mythes et légendes vont bon train, Karim, sept ans et fils unique de parents modestes, se débat avec ses peurs d’enfant et son désir pressant d’être un homme.
MATILDE de Vito Palmieri / Italie / 2012 / 10′
Syn. : Malgré sa timidité, Matilde est une petite fille à l’intelligence vive qui a de la suite dans les idées. Dans sa classe, quelque chose ne tourne pas rond. En s’appuyant sur les remarques de son professeur, elle utilisera à bon escient les objets de son environnement et trouvera un moyen drastique et original de retrouver la sérénité.
« Gli Immacolati », de Ronny Trocker, présenté en sélection nationale de Clermont-Ferrand, repose sur un fait divers survenu en Italie. Décembre 2011, à Turin. Une manifestation de soutien dégénère. Les habitants d’un quartier populaire mettent le feu à la friche industrielle voisine. Celle où vit tout un campement de Roms. Une jeune fille prétend avoir été violée par deux gitans. Son mensonge aura entraîné le débordement et la folie dévastatrice d’une collectivité.
Ronny Trocker, étudiant au Fresnoy et originaire de Bolzano revient sur cet événement, plus connu en France qu’en Italie, car plus volontiers passé sous silence là-bas. À partir de photographies prises sur les lieux de l’incendie quelques mois après, il recompose tout un décor virtuel en 3D. En un plan séquence, sa caméra se promène dans une friche mentale, oscillant entre éléments réalistes et fantasmagories, entre nature et béton. La précision des détails alterne avec les formes abstraites aériennes, les vues d’ensemble avec les rapprochements dans l’espace, quasi organiques.
Les voix off de deux comédiens se superposent à ce voyage de la mémoire. Elles se croisent, confrontant les points de vue, à partir des témoignages du frère de l’adolescente et d’une jeune mère Rom. La parole de chacun est douce, posée, modulée par les sons de la forêt. Elle commence et se clôt comme un conte, une histoire lointaine. « C’era una volta ». Il était une fois. Le recul et l’abstraction jalonnent ce qui échappe, dérape. Mouvements des images et narration en miroir pour faire fluctuer une réalité insaisissable et diffractable, qui nous glisse entre les mains. Telle cette foule immaîtrisable qui s’en ira comme elle est venue. L’incendie comme un feu de paille. La violence collective fondue en apparition fugitive. À travers son errance, « Gli Immacolati » en garde la trace, une impression en creux, dans la cire.
Synopsis : Décembre 2011 dans une ville du nord de l’Italie. Comme chaque soir un jeune homme rentre chez lui. Il est en train de garer sa voiture, quand il découvre sa sœur de seize ans en larmes devant la porte de leur maison. Elle lui raconte que deux jeunes Roms l’ont violée brutalement..
En entretien, Juan Antonio Espigares, le réalisateur de « Fuga », Prix Format Court au dernier festival Court Métrange, revient sur son parcours et son film, subtil mélange de recherches visuelles et sonores. Techniques d’animation variées, rapport étroit avec le compositeur, exploration des limites, … : le cinéaste andalou nous décrypte son film et sa construction.
Peux-tu nous raconter ta trajectoire personnelle ?
J’ai réalisé mon premier court-métrage « La escalera de Escher » en 2001 pour le festival Notodofilmfest avec lequel j’ai remporté le prix Canal+. Ce prix consistait alors en une aide à la production pour un nouveau court-métrage, « Sere Ertit », une fiction fantastique que j’ai écris et réalisé. Après ça, j’ai combiné mes études de design industriel avec la réalisation de films publicitaires et des clips musicaux pour la télévision, et aussi la supervision des effets spéciaux dans différentes productions, jusqu’à ce que je me décide finalement à écrire et réaliser un nouveau court, mon premier en animation, « Fuga ».
Quelle est ta relation avec le court-métrage ?
Réaliser « Fuga » a été pour moi un rêve d’enfant devenu réalité. J’ai toujours voulu réaliser une histoire sous forme d’opéra avec une musique symphonique originale comme fil conducteur. J’en ai parlé un jour à mon ami Arturo Díez Boscovich qui est compositeur, et nous nous sommes lancés ensemble dans cette aventure.
« Fuga » est entièrement réalisé et produit en Andalousie. Peux-tu nous parler des conditions de production du court-métrage en Espagne ?
À vrai dire, je ne sais pas très bien comment ça fonctionne en général, et je ne peux que parler de la production de « Fuga ». Nous sommes parvenu à le monter grâce aux efforts d’un petit groupe de personnes (l’équipe d’animation a été uniquement formée par quatre personnes qui ont travaillé ensemble pendant trois ans), et l’aide de plusieurs collaborateurs privés, parmi lesquels ont bien sûr compté l’Orchestre Philarmonique de Malaga et la boîte de production andalouse Andale Films.
Quel est ton regard sur les créations courtes espagnoles ?
Je crois qu’il y a beaucoup de talents émergents en Espagne depuis de nombreuses années, particulièrement dans le champ de l’animation. Elles ont presque toujours des budgets minuscules mais sont très motivées à réaliser leurs films dans les meilleures conditions. Pendant la période où j’ai accompagné « Fuga » dans de nombreux festivals, j’ai pu voir de nombreux films espagnols que j’ai trouvés d’une qualité exceptionnelle.
Comment as tu imaginé l’histoire de « Fuga »?
Pour moi, il était primordial que l’usage de la musique comme fil conducteur soit pleinement justifié. Je ne voulais pas que ça soit aléatoire ou accessoire. L’histoire d’une étudiante en violon confronté à ses propres limites avec ce “grand final” m’a semblé contenir la force dramatique nécessaire pour que la musique ne subjugue jamais l’histoire, et que les deux fonctionne toujours ensemble en lien avec l’intensité émotionnelle.
« Fuga » mélange différentes techniques d’animation. Comment as tu travaillé avec l’équipe d’animation ?
Ça a été la partie la plus dure et la plus longue du processus qui a quand même duré plus de trois ans. J’ai toujours incité l’équipe à apporter constamment ses idées sur la façon dont nous pouvions aborder les différents styles de dessins et d’animations dans le film. En fait, la base de travail a été la même que celle que j’ai suivi avec la musique : l’emploi des techniques d’animation et la façon dont elles se mélangent et changent au long de l’histoire devaient avoir une justification.
Dans « Fuga », la perception des personnages et des décors change selon le point de vue où l’on est placé. Pourquoi ce parti pris ?
C’était pour moi une des parties les plus importantes. La musique et le style d’animation devaient dépendre directement du point de vue du personnage. C’était le leitmotiv du film : une recherche visuelle et sonore qui puisse représenter ce que chaque individu ressent à tout instant de sa vie en fonction des événements qui l’entoure, et surtout la façon dont il les perçoit.
Le passage à la prise de vue réelle arrive à un moment clé du film, peux-tu nous en parler ?
Dans cette scène, mon intention est de montrer le point de vue objectif de l’histoire. Jusqu’à ce moment, on est sans arrêt balancé entre les différentes perceptions que les personnages ont de leur environnement, et la fin essaye de les montrer d’un point de vue extérieur, celui de l’observateur.
La musique est vraiment importante dans le film, comment s’est passé la collaboration avec Arturo Diez Boscovich ?
Après avoir écrit le scénario, j’ai fait un petit tableau avec les temps forts émotionnels du récit qu’il a utilisé comme guide pour composer. Ensuite, nous avons enregistré avec l’Orchestre Philarmonique de Malaga et, en utilisant la musique comme base, nous avons construit le dessin des personnages et le style d’animation que cela m’inspirait. Habituellement, on enregistre la musique à la fin de la production quand tout est déjà filmé, animé et monté, mais nous ne l’avons pas fait comme ça. Nous avons réussi à élaborer un procédé artistique extrêmement organique, dans lequel le travail des uns inspirait celui des autres. J’espère vraiment pouvoir retravailler avec lui de cette manière dans le futur.
« Fuga » s’achève sur une référence à Sainte-Cécile, pourquoi ?
Le conservatoire de musique où se trouvent les élèves est d’origine religieuse et Sainte-Cécile est la patronne des musiciens. Le plus important de cette image de fin, qui est un tableau de Sainte-Cécile peint sur le plafond du conservatoire, est surtout la citation qui l’entoure et que le spectateur peut relier avec l’histoire qu’il vient de voir.
Le titre du film est « Fuga » (« Fugue » en français), quel sens a t’il par rapport au film?
« Fuga » pointe directement la construction musicale de la “fugue”, comme par exemple celle de Jean-Sebastien Bach et sa “Toccata et fugue”. Une fugue se définit comme la répétition d’une mélodie dans différentes tonalités, ce qui me semblait correspondre tout à fait à l’histoire que nous racontions.
As-tu des nouveaux projets de court-métrages ?
J’adorerais pouvoir faire un autre court, mais pas un auquel je devrais encore dédier trois ans de ma vie. Actuellement, j’écris une nouvelle histoire, mais ça sera pour un long-métrage.
En octobre dernier, Format Court envoyait une petite équipe de rédacteurs au dixième festival Court Métrange de Rennes afin de remettre, pour la troisième année consécutive, son prix spécial (Prix Format Court). Au cœur d’une sélection relevée, notre choix s’était alors porté unanimement sur « Fuga » (« Fuite » en français), premier film d’animation de l’Espagnol Juan Antonio Espigares. Racontant l’arrivée d’une jeune fille au pensionnat d’un conservatoire de musique, le film mélange de façon subtile les effets d’animations 3D et 2D et la prise de vue réelle dans un conte symphonique de toute beauté où fantasmes et réalités se confondent dans un jeu de perception visuelle et musicale particulièrement saisissant.
Dès la scène d’ouverture, le climat se pose. Dans un décor en 3D qui évoque à la fois le fond d’un puits d’où s’élève un arbre étrange et gigantesque et les fantastiques univers parallèles de Lewis Caroll, on découvre la silhouette affalée d’une jeune fille qui semble venir d’achever sa chute. À mesure que la caméra s’approche du corps inerte, on est frappé par la puissance musicale du film. L’orchestre philarmonique de Malaga et la musique composée par Arturo Diez Boscovich illustre alors dans un mouvement d’intensité dramatique éclatant l’instant où les membres de la jeune fille se fendent et explosent dans un cri de douleur retentissant. Pas de doute, le film est fantastique, jouant d’emblée avec les codes musicaux et la réalisation des films d’angoisse.
Mais passé l’ouverture, le plus fantastique dans « Fuga » est encore à venir. Dans la scène suivante, on retrouve la jeune fille, cette fois-ci en un seul morceau, assise dans la voiture qui l’amène au pensionnat du conservatoire. Accompagnée de sa mère, elle est accueillie par deux personnages en costumes religieux. Dès cette séquence, « Fuga » révèle la force de son procédé technique et artistique. Par un habile mélange de techniques d’animation, Juan Antonio Espiagares crée de troublants tableaux où se différencient graphiquement ce que les personnages ressentent comme partie intérieure de leur monde, et ce qu’ils perçoivent comme leur étant extérieur.
Perceptions intimes, alors que la 3D sert le point de vue subjectif du personnage pour définir ce qu’il est, des effets de crayonnages en 2D servent à décrire ce qui est inconnu pour lui. L’entrée dans le bâtiment et la découverte de celui-ci permet alors au réalisateur de pousser ce processus de différenciation subjective à son paroxysme pour une visite du pensionnat où seule la jeune fille apparaît en 3D, alors que tout le reste est animé par des teintes et des courbes crayonnées, à la fois sombres et inquiétantes.
Le scénario déroule alors son fil dans cette approche graphique originale, et on découvre très vite la rapide rivalité qui naît entre la jeune fille et une autre pensionnaire du conservatoire autour de leur virtuosité au violon. Avec ce nouveau personnage, apparaît aussi une nouvelle subjectivité. Reprenant le même procédé d’images mixtes 2D et 3D, ce qui est ressenti par les deux jeunes filles, se manifeste tour-à-tour sous des formes différentes et contradictoires qu’accompagnent toujours la puissance symphonique de l’orchestre de Malaga comme un ballet d’émotion musicale et visuelle. La scène de l’audition des violonistes est à cet égard particulièrement convaincante puisqu’elle nous place par un jeu de champ et de contre-champ au cœur des subjectivités de chacune des jeunes rivales, explorant avec force les univers intérieurs de leurs troubles émotionnels.
Sans dévoiler la chute du film qui finit par justifier le choix du procédé technique en révélant finalement ce que le spectateur ignore depuis le début, il faut signaler à quel point le passage à la prise de vue réelle est particulièrement réussi dans « Fuga ». En utilisant un angle de prise de vue en plongée à pic au dessus de la scène, reproduction d’un plan auquel Juan Antonio Espigares nous a habilement habitué tout au long du film pour introduire ses différentes scènes clés, on passe comme une évidence dans une réalité qui a cessé d’être fantasmée. Les subjectivités s’effacent, laissant la place à une situation objective où tout s’éclaire, implacablement.
Si on peut reprocher à « Fuga » d’être un film difficile tant dans sa forme narrative que par la complexité des rapports intimes qu’il met en scène, on ne peut que se réjouir de voir de telles œuvres sur les écrans. Virtuosité technique au service de l’image, composition et interprétation musicale magistrale, réflexion sur la subjectivité du regard humain, « Fuga » est sans aucun doute un film qui ne laisse pas son spectateur indifférent.
Synopis : Sara vient d’arriver au conservatoire de Ste Cécile et découvre qu’il y a plusieurs façons d’interpréter le prisme à travers lequel elle perçoit sa réalité et son talent.
Pays : Espagne
Année : 2012
Genre : Animation
Durée : 15′
Réalisation : Juan Antonio Espigares
Scnario : Juan Antonio Espigares
Musique : Arturo Díez Boscovich
Animation : Víctor G. Boto, David López, , Alberto Portales, Juan Antonio Espigares, Jaime Sánchez
Son et mixage : Francis Oliva
Image, montage, compositing : Juan Antonio Espigares
La reprise des films primés à Clermont-Ferrand aura lieu ce dimanche 16/02, là Paris, au Forum des images. Trois séances auront lieu dans la journée à 15h30 (compétition Labo), à 18h (compétition internationale) et à 20h30 (compétition internationale). Dans la continuité des opérations menées avec le Forum des images autour du Carrefour de l’animation, du festival d’Annecy et des Premiers Plans d’Angers, Format Court vous offre des places pour assister à l’une de ces séances, l’internationale.
Programmation
UD, SPRING OVER, IND (Pass pass le oinj) de Thomas Daneskov. Danemark / fiction 2013 coul. 26min. Prix des médiathèques
En allant rendre visite à son père pour la première fois après de longs mois d’absence, Rasmus voit son pire cauchemar se réaliser : le paternel a perdu la tête à force de camper seul à la campagne et de picoler tout en planchant sur l’écriture de son roman de science-fiction.
JUKE-BOX de Ilan Klipper. France / fiction 2013 coul. 23min. Prix spécial du jury
Danny est un chanteur qui, après avoir connu son heure de gloire, a plongé dans l’oubli. Il passe ses journées reclus dans son appartement. Pourquoi est-on connu un jour, méconnu le suivant ? Connaîtra-t-il de nouveau le succès ? Son obsession frôle la folie.
MEU AMIGO NIETZSCHE (Mon ami Nietzsche) de Fáuston da Silva. Brésil / fiction 2013 coul. 15min.Prix du public / Prix du rire « Fernand Raynaud »
La rencontre improbable entre Lucas et Nietzsche marque le début d’une révolution dans l’esprit du jeune garçon, au sein de sa famille et dans la société. Au final, ce n’est plus un petit garçon, c’est une bombe !
PRIDE (Fierté) de Pavel Vesnakov. Bulgarie, Allemagne / fiction 2013 coul. 30min. Grand prix
Manol, grand-père à la retraite, est un patriarche qui a toujours su imposer fermement ses valeurs au sein de sa famille. Mais aujourd’hui, il apprend que le garçon qu’il a élevé est homosexuel. Voilà ses certitudes ébranlées par les choix de vie de ses proches, dans une bataille perdue d’avance.
Grand prix
SEQUENCE (Séquence) de Carles Torrens. Etats-Unis, Espagne / fiction 2013 coul. 20min. Prix Canal+
Et si vous vous aperceviez un beau matin que le monde entier a rêvé de vous ?
Infos
Projection à 18h, durée totale de la séance : 1h54
Pour assister à cette séance, rien de plus simple : envoyez-nous un gentil e-mail avant ce vendredi 14/02, midi ! Nous avons 5 x 2 places à vous offrir !
Le magazine en ligne Format Court vous convie à sa nouvelle séance « spéciale Court Métrange », ce jeudi 13/02, à 20h30, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Découvrez lors de cette soirée une sélection de films de fiction et d’animation fantastiques, étranges, insolites, aux formes bizarres et débridées, en présence de Cédric Courtoux (programmateur), Olivier Calmel, Pauline Seigland (« L’Art des Thanatier ») et Renaud Bajeux (« Peau de chien »), Sacha Feiner et Chloé Morier («Un Monde Meilleur », sous réserve).
Après Ron Dyens (Sacrebleu Productions), Jean-Christophe Reymond (Kazak Productions) et Emmanuel Chaumet (Ecce Films), Mathieu Bompoint (Mezzanine Films) a remporté l’an passé le prix Procirep du Meilleur Producteur au festival de Clermont-Ferrand. Grâce à ce prix, il a bénéficié de 5000€ à redistribuer dans un ou plusieurs court(s) métrage(s) et d’une carte blanche présentée ces jours-ci au festival de Clermont-Ferrand.
À la tête de Mezzanine Films créée en 2004, il a produit en dix ans pas moins de 34 courts métrages, 4 longs métrages et 4 documentaires. A l’occasion du festival de Clermont-Ferrand, il nous a parlé de ses choix de programmation liés à sa carte blanche mais également de son métier de producteur, des joies qu’il lui procure, et de son combat au jour le jour pour continuer à collaborer avec des gens dont il aime le travail. Le tout avec un ton des plus bienveillants envers le cinéma et plus particulièrement pour le court métrage.
Peux-tu nous parler de ton parcours de producteur?
J’ai très tôt voulu être producteur, je me sentais l’âme d’un organisateur plutôt que celle d’un réalisateur ou d’un acteur. Quand j’étais petit, je me rendais dans un festival en province où je voyais de nombreux producteurs. À partir de là, je me suis dit que c’était un métier que j’avais envie d’exercer et j’ai par conséquent orienté tout mon parcours pour devenir producteur. Comme je ne connaissais personne dans le cinéma, j’ai décidé de faire une école de commerce (HEC) pensant que ça m’ouvrirait plus de portes. En en sortant, j’ai travaillé six ou sept ans avec Frédérique Dumas à Noé Productions où je me suis formé au développement, à la post-production, au suivi de production des films. J’ai terminé avec elle en produisant un documentaire, « Enquête sur le monde invisible » de Jean-Michel Roux avant de me dire que j’allais créer ma boîte. Il s’est avéré que le faire n’était pas aussi simple que prévu. J’ai donc repris la fabrication et la production exécutive de longs-métrages pour d’autres. Sylvie Pialat créait aussi sa structure (ndlr : Les Films du Worso) et avait besoin de mettre de l’ordre dans tout ce qu’elle était en train de développer. J’ai donc travaillé avec elle pendant trois-quatre ans en parallèle du développement de ma propre boîte. Et puis, les premiers courts métrages sont arrivés, les premières rencontres en festivals jusqu’à arriver à aujourd’hui avec plus de 30 courts métrages et 4 longs métrages produits.
« Nice »
On remarque en effet que tu es un producteur à la fois de courts et de longs métrages. Comment expliques-tu ces va-et-vient entre le court et le long ?
Il y a des réalisateurs avec qui il faut continuer de travailler en faisant des courts métrages avant de passer au long et il y a des réalisateurs que je croise, avec qui j’ai envie de faire des longs, mais pour lesquels il est intéressant de tester une collaboration grâce aux courts. Le court est un moyen d’expression important et surtout, de crédibilité vis-à-vis de l’expérience aussi bien pour tout un chacun que pour le duo réalisateur/producteur. Je vois mon travail de producteur comme celui d’un accompagnateur, ça me semble donc une évidence d’arriver à travailler sur la durée avec les auteurs. Après, ça ne veut pas dire que nous allons passer toute notre vie ensemble, mais lorsque je commence une collaboration, j’espère toujours que ça va aller loin. En effet, je ne sais jamais à l’avance si ça va fonctionner ; c’est une question de temps, d’expérience et d’atomes crochus. Par exemple, avec Maud Alpi, ça s’est très bien passé depuis le début : on a fait trois courts métrages ensemble (ndlr : « Lucas sur Terre », « Nice » et « Courir »), on vient de tourner un moyen métrage, on a une avance pour un long métrage, donc c’est plutôt positif, mais ça dépend des différents parcours de chacun. Il y a d’autres gens que j’accompagne un temps et qui partent ensuite sous d’autres horizons mais c’est la vie et c’est bien comme ça aussi.
Pourrais-tu décrire ton travail de producteur ?
J’ai conscience d’accompagner plutôt des auteurs que d’être sur des propositions de cinéma de l’ordre du divertissement. Peut-être que j’en ferai un jour, mais aujourd’hui, je fais plus volontiers attention à essayer de rendre faisables les idées des auteurs avec qui je travaille. Par conséquent, c’est un réel accompagnement. C’est-à-dire que je n’interfère jamais dans leurs histoires en pensant à ce qui va plaire ou ne pas plaire. Bien évidemment, il arrive que je conseille en voyant ce qui faisable ou non, mais on essaie toujours de trouver des solutions. Arrive à un moment où on se pose ces questions parce qu’il faut rester réaliste quant aux moyens qu’on a lorsqu’on fait un court. Je suis plutôt bienveillant en essayant d’être toujours le plus ouvert et positif possible pendant cette période qu’est le développement du scénario. Ce n’est certes pas évident, mais selon moi, c’est toute la différence entre la loi de l’offre et la loi de la demande. Le cinéma d’auteur en l’occurrence est sur la loi de l’offre où l’on propose et le public décide ensuite d’y aller ou non, d’adhérer ou non à cette proposition. Pour la loi de la demande, à l ‘inverse, on essaie de comprendre ce que les gens ont envie de voir et on cherche ensuite quelque chose qui y répond. Ce sont deux approches différentes et dans le court métrage, nous bénéficions encore de cette liberté. Par exemple, en court, la comédie est un genre qui est très délaissé mais lorsqu’il y a de bonnes propositions de comédies dans le court, elles sont loin d’être formatées. C’est la preuve qu’on peut réussir à populariser du cinéma d’auteur même compulsif.
Reconnais-tu que chez Mezzanine Films, il n’y a donc pas de ligne éditoriale à proprement parlé ?
De fait, je n’ai pas un genre prédéfini mais plutôt, des goûts très variés. C’est d’ailleurs ce que j’ai indiqué dans ma note pour accompagner cette carte blanche que je pense que depuis dix ans, on doit commencer à voir se dessiner un peu qui je suis à travers tous les films que j’ai produits. Effectivement, ils sont très variés, mais ça reflète forcément mes goûts et ça dit un peu qui je suis, sans aller jusqu’à dire que je fais ma psychanalyse en produisant des films (rires) ! C’est vrai en tout cas que je n’aime pas dire que j’ai une ligne éditoriale précise. J’ai fait des films sociaux, des films d’horreur fantastique, des films expérimentaux, etc. Tant que j’ai quelque chose à partager avec le porteur de projet, j’estime que j’ai encore à apprendre en tant que producteur et dans mes relations de travail. Qui plus est, je pense que c’est réciproque.
Peux-tu nous raconter comment s’est passé l’aventure de production de « Todo lo que no puedes dejar atràs » (Tout ce que tu ne peux pas laisser derrière toi), un film de Nicolàs Lasnibat, entièrement tourné au Chili et en langue espagnole présenté en compétition nationale cette année à Clermont-Ferrand ?
Nicolàs Lasnibat est un Chilien qui vit en France depuis dix ans. Il a fait La fémis et il a besoin de parler de choses qui se sont passées dans son pays. Par chance, le CNC est tout à fait ouvert à l’idée d’aider les courts métrages tournés à l ‘étranger. Nous avons cherché à avoir un peu de financement au Chili, mais il n’y a qu’en France où l’on a cette réelle chance d’avoir autant de financements pour les courts métrages. À un mois du tournage, le seul financement que nous avions trouvé au Chili nous a malheureusement lâché, donc on a dû faire sans. On a pris des décisions à droite, à gauche et on y est arrivé. Ceci étant, je ne suis pas allé au Chili. On avait traduit le scénario pour tout ce qui était de la recherche de financements en France et on a trouvé au Chili, des gens de confiance avec lesquels on a travaillé. Nicolàs avait également déjà un peu travaillé là-bas ce qui facilitait les choses. Disons qu’on a réussi à faire de la production par Skype avec des rendez-vous quotidiens (rires) !
« Luca sur Terre »
Ce n’est bien sûr pas la première fois que tes films sont sélectionnés en festival mais quel effet ça fait d’être sélectionné à Clermont-Ferrand ?
Je suis à chaque fois super content. Ça avait commencé avec Maud Alpi et « Lucas sur Terre » et ça m’avait déjà fait très plaisir. Depuis, ça ne s’est jamais arrêté. Je trouve que Clermont-Ferrand a en plus cette tendance à suivre les auteurs qui font des courts, à s’intéresser à eux. Ils essaient de résister malgré la pression des lignes éditoriales d’autres festivals. Ils proposent toujours des programmes très variés avec aussi bien des films d’école, de l’animation et tous types de genres différents. Et ça permet ainsi à chaque film d’exister en tant que tel dans leurs programmes plutôt que d’être immédiatement comparé. S’ils créaient des thématiques pour la compétition, ce serait dramatique. Ce sont au contraire des gens bienveillants à l’égard du court métrage. Ils permettent l’assurance que toutes les façons de s’exprimer dans le court métrage seront représentées à Clermont.
Dans le cadre du Prix Procirep du meilleur producteur que tu as reçu l’an passé, tu bénéficiais de 5000€ à redistribuer dans un ou plusieurs court(s) métrage(s). As-tu déjà utilisé cette récompense ?
L’annonce du prix avec les 5000€ est tombée début février et nous avons tourné le film de Nicolás Lasbinat à peu près au même moment avec de l’argent en moins, la somme a donc directement été redistribuée. Du coup, cet argent ne pouvait pas mieux tomber !
Peux-tu nous expliquer tes choix de films dans le cadre de la carte blanche qui accompagne ce Prix ?
Je dois t’avouer que je me suis bien pris la tête avec cette carte blanche (rires) ! L’idée des premières cartes blanches, c’étaient de faire connaître des sociétés de production et leurs films maison, puis avec les années, l’idée n’était plus forcément de montrer leurs films mais aussi ceux qui leur plaisaient. Personnellement, j’ai eu envie de programmer des films qui m’avaient plu, des films que j’avais produits et des films de réalisateurs avec lesquels je vais travailler par la suite et dont les films m’ont marqués. Il y a donc des films très variés. Parmi les films qui m’ont particulièrement marqué, il y a « La peur, petit chasseur » de Laurent Achard, « L’amour existe » de Maurice Pialat ou « Prologue » de Bela Tarr. J’ai même pris un film de Chaplin (« A film Johnnie ») que j’avais choisi d’abord pour le sujet car le cinéma est l’objet même du film. Il s’agit d’un film de 1914, réalisé par quelqu’un d’autre dans lequel on voit déjà le personnage Chaplin qui se dessine. De plus, c’est un court-métrage sur le cinéma qui a aujourd’hui 100 ans et je me suis dit que ce serait l’occasion de le montrer. Je trouvais ça intéressant symboliquement. D’ailleurs, le festival de Clermont-Ferrand l’a repris dans sa séance d’ouverture. Après, j’ai aimé les films d’Estelle Larrivaz (« Notre Père ») et de Jean Denizot (« Mouche ») dont j’ai produit les premiers longs (ndlr : respectivement « Le paradis des bêtes » et « La belle vie »). Ce sont des films qui m’avaient marqué à mes débuts et qui m’ont conforté dans l’envie de travailler avec eux. Ensuite, puisqu’il s’agissait d’une carte blanche spécifiquement clermontoise, j’ai mis le premier film de Maud (ndlr : « Lucas sur Terre ») car c’était le début de mon histoire avec le festival donc j’avais envie de le montrer à nouveau. Après, j’ai tâché qu’il y ait un programme intégralement en 35 mm et un autre en vidéo.
Dans ce dernier programme, je voulais également composer entre des films qui m’avaient marqué et des films que j’avais produits, essentiellement ceux de l’année dernière (« Le retour » de Yohann Kouam et « Le verrou » de Laurent Laffargue) parce que ce sont des cinéastes dans lesquels je crois et dont je développe d’ailleurs leur long métrage. J’ai aussi mis un moyen métrage (« Vourdalak » de Frédérique Moreau) car c’est toujours compliqué, dans une carte blanche, de mettre des films longs, mais j’avais vraiment envie de montrer la diversité de ce que j’ai produit jusqu’à présent. Par ailleurs, c’est un moyen métrage que j’aime beaucoup, qui est extrêmement libre sur un ton un peu décalé.
Parallèlement à Mezzanine Films, tu es également vice-président au SPI (Syndicat des Producteurs Indépendants). Par conséquent, on te sent concerné par le métier de producteur et sa situation dans le milieu audiovisuel. Peux-tu nous donner ta vision de la profession ?
Lorsque je suis arrivé au SPI, j’ai remarqué que je n’étais pas le seul à galérer. C’est en effet un moyen de créer des liens, de se donner du courage, d’avancer sur nos projets en se disant qu’on n’est pas seul au monde. Au SPI, on a aussi été clairement identifié comme un syndicat qui essayait de défendre les intérêts du court métrage, de la même manière qu’il y a eu une volonté de professionnaliser ce secteur depuis une dizaine d’années en France. Les résultats commencent à se voir aujourd’hui avec les sociétés qui produisent aussi bien du court que du long et qui arrivent à produire des longs différemment. Elles dérangent sûrement encore le paysage audiovisuel français, mais c’est important de défendre un autre point-de-vue là de la production. Ces personnes défendent communément un film avant de penser qu’elles sont assises sur un tas d’or. C’est un peu comme ça que je le vois. A priori, ce qui motive l’ensemble des producteurs du SPI, c’est la création, l’accompagnement d’auteurs et de projets de manière très sincère.
Que penses-tu de la nouvelle présidente du CNC, Frédérique Bredin, lorsqu’on se souvient que son prédécesseur, Éric Garandeau, avait démontré une réelle passion pour le court métrage ?
Il ne faudrait pas, sous prétexte que son prédécesseur était fan de court, qu’elle veuille à tout prix se démarquer en laissant de côté le court. Je ne pense pas qu’elle éprouve un désamour du court métrage mais qu’il ne faut pas qu’elle l’oublie trop longtemps. C’est la première fois que la présidente du CNC ne se déplace pas depuis 7 ou 8 ans à Clermont-Ferrand. Ça se rajoute au fait que parmi les temps forts de 2013, le court métrage n’a même pas été mentionné. Il ne faut pas que ça dure trop longtemps. Il faut qu’elle reprenne vite conscience que c’est la création de demain qui naît là et que le CNC doit y prêter une attention particulière. Bien évidemment, on remarque ce que fait déjà le CNC, mais ça passe aussi par des marques d’affection de la présidente.
Le mot de la fin ?
Un mot pour remercier Format Court. Il y a beaucoup de bénévolat au sein de ce webzine comme c’est fréquemment le cas dans le court métrage en général, mais ça reste important qu’il y ait des gens qui parlent de ce qui se fait dans le court métrage.
Rendez-vous mondial du court métrage, le Festival international de Clermont-Ferrand offre chaque année la trop rare opportunité de parcourir la planète côté courts. La sélection que vous propose la revue Bref, aussi éclectique que possible, n’a d’autre ambition que de faire partager quelques-unes des découvertes sélectionnées, puisées dans les compétitions internationale et labo.
Programmation
NOAH de Walter Woodman et Patrick Cederberg. Canada / 2013 / couleur / 17 mn / projection numérique. Grand Prix, Prix du Public Labo, festival de Clermont-Ferrand 2014
Matthew Kinch – Son : Aaron Yeung. Montage – Animation : Patrick Cederberg – Interprétation : Sam Kantor, Caitlin McConkey-Pirie – Production : KoalaMotion, Walter Woodman, Patrick Cederberg.
Une histoire d’amour et ses aléas à l’heure des réseaux sociaux et de l’ère numérique.
Réalisation et scénario : Vinz Feller – Image : Martin Ahlgren et Filip Zumbrunn – Son : Andreas Litmanowitsch et Caleb Mose – Musique originale : Simon Ho – Montage : Vinz Feller et Aaron Yanes – Interprétation : Linda Geiser, Emilio Delgado, Hansrudolf Twerenbold, Ernesto Solo et Janice Acevedo – Production : Contrast Film, Ivan Madeo.
Les dernières volontés du mari d’Elisabeth étaient de se rendre à Montauk, où ils s’étaient rencontrés voilà bien des années. Elisabeth entreprend alors cet ultime voyage aux États-Unis avec les cendres de son époux.
WELKOM de Pablo Munoz Gomez. Belgique / 2013 / couleur / 18 mn / projection numérique
Réalisation : Pablo Munoz Gomez – Scénario : Pablo Munoz Gomez et Sarah Schenkel – Image : Kinan Massarani et Erika Meda – Son : Pierre Dozin et Marc Alberisio – Musique originale : Rafael Munoz Gomez – Montage : Cyril Delannoy – Interprétation : Jean Jacques Rausin, Simon André, Wim Willaert, Patricia Goemaere, Bart Cambier, Miel Van Hasselt et Daniel Vidovsky – Production : Mediadiffusion, Emmanuel Van Hoof.
Jorge aime son père. Son père aime une poule. Jorge n’aime pas la poule, il veut la mettre dans un poulailler. Avant de construire ce poulailler, Jorge doit avoir un permis de construire.
SUBCONSCIOUS PASSWORD de Chris Landreth. Canada / 2013 / couleur / 10 mn / projection numérique
Réalisation et scénario : Chris Landreth – Son : Andy Malcolm et Pierre Yves Drapeau – Musique originale : Daniel Janke – Animation : Sean Craig – Voix : John Dilworth et Don McKellar – Production : Office National du Film du Canada, Marcy Page.
Un prénom oublié provoque une troublante incursion dans l’inconscient sous forme de jeu-questionnaire.
METUBE : AUGUST CHANTE LA HABANERA DE CARMEN de Daniel Moshel. Autriche / 2013 / couleur / 4 mn / projection numérique
Réalisation et scénario : Daniel Moshel – Image : Martin Bauer – Son : Bernhard Drax – Musique : Philip Preuss et Georges Bizet – Montage : Christin Veith – Interprétation : August Schram, Albert Maier et Elfie Wunsch – Production : Moshel Filmproduction, Daniel Moshel.
Hommage à ces milliers d’utilisateurs de YouTube et de blogueurs vidéo à l’ambition débordante.
RIVALISER AVEC LES VOISINS de Michael Pearce. Royaume-Uni / 2013 / couleur / 28 mn / projection numérique
Réalisation : Michael Pearce – Scénario : Selina Lim – Image : Benjamin Kracun – Son : Gunnar Oskarsson – Musique originale : Stuart Earl – Montage : Immanuel Von Bennigsen et Maya Maffioli – Interprétation : Maxine Peake, Geoffrey Bell et Adeel Akhtar – Production : Incendiary Pictures, Megan Rubens.
Celia, l’épouse d’un homme politique, se retrouve confrontée à deux malfrats qui en veulent à son mari.
Infos pratiques
Mardi 11 février, séance à 20h30
MK2 Quai de Seine – 14 Quai de la Seine – 75019 Paris
M° Jaurès ou Stalingrad
Tarif : 7,90 € (cartes illimitées acceptées)
Synopsis : Rodrigo est un jeune sourd, installateur de systèmes audio pour voitures dans un petit atelier en banlieue de Recife, au nord-est du Brésil. En dépit de sa surdité, il vit en lien étroit avec les sons, dont il ressent les vibrations qui battent au plus profond de son corps.
Genre : Documentaire
Durée : 28’
Pays : Brésil, Espagne
Année : 2012
Réalisation : Gabriel Mascaro
Son : Joana Claude, Gabriel Mascaro
Montage : Eduardo Serrano
Production : Gerardo Peral (Art Aids) et Rachel Ellis (Desvia)
Présenté en compétition internationale du festival de Clermont-Ferrand cette année, « A Ondaz Traz, O Vento Leva » de Gabriel Mascaro est un documentaire sensible sur Rodrigo, un jeune sourd, installateur de systèmes audio pour voitures.
Dans la chaleur de Recife, au nord-est du Brésil, Rodrigo passe son temps à travailler dans son atelier et à s’occuper de sa petite fille Mariana dont il a la charge. Rodrigo est sourd mais cela ne l’empêche aucunement de ressentir les sons et les vibrations qui l’entourent.
Dans ce court métrage documentaire, Gabriel Mascaro porte un regard attendrissant sur son protagoniste que l’on suit dans ses pérégrinations diurnes et nocturnes. Il nous fait ressentir ses doutes, ses craintes, tout en évitant habilement tout côté mélo grâce à la personnalité rayonnante de Rodrigo qui, même s’il est atteint du sida, continue à aller de l’avant, à se battre pour lui et pour sa fille. Le film a d’ailleurs reçu l’appui du Art Aids Foundation, une association internationale qui vise à promouvoir des projets artistiques qui traitent du combat de la maladie.
Pour « A Onda Traz, O Vento Leva », le réalisateur brésilien recourt à une mise en scène qui invite à un voyage sensoriel pour toucher au plus près de l’humain. Il joue avec l’absence et la saturation sonores, chaque plan pousse à éprouver la réalité du jeune sourd pour mieux la comprendre. L’océan qui borde la ville fait écho à la vitalité qui anime son âme et la dernière image où Rodrigo, plongé dans l’eau, tient Marianna dans ses bras tout en les levant au ciel, est un appel à la vie.
Prix Spécial du Jury : Molii de Carine May, Mourad Boudaoud, Yassine Qnia, Hakim Zouhani, France
Prix du Public : Inupiluk de Sébastien Betbeder, France
Prix de la Meilleure Musique Originale (SACEM), Prix de la Meilleure Photographie (Nikon) : Scars of Cambodia de Alexandre Liebert, France
Prix Meilleure 1ère Œuvre de Fiction : Prix S.A.C.D. (Société des Auteurs Compositeurs Dramatiques) : T’étais où quand Michael Jackson est mort ? de Jean-Baptiste Pouilloux, France
Prix ADAMI d’Interprétation Meilleur Comédien : Adel Bencherif pour La Fugue de Jean-Bernard Marlin, France
Prix ADAMI d’Interprétation Meilleure Comédienne : Nina Mélo pour Vos violences de Antoine Raimbault, France