W comme Der Wechselbalg

Fiche technique

Synopsis : Une adaptation cinématographique de l’histoire de Selma Lagerlöf sur un couple marié dont l’enfant a été remplacé par un petit troll.

Réalisation : Maria Steinmetz

Pays : Allemagne

Genre : Animation

Année : 2011

Durée : 8’20

Scénario : Maria Steinmetz

Musique : Felix Raffel

Montage : Maryna Schuklina

Son : Jan Paul Rischer, Peter Seelbach, Martin Steyer

Voix : Margarita Breitkreiz, Tony De Maeyer, Julia Grauberger, Christian Hilger

Animation : Maria Steinmetz

Production : HFF Konrad Wolf

Article associé : la critique du film

Michel Gondry et son jury ont décerné les prix de la Cinéfondation

Le Jury de la Cinéfondation et des courts métrages, présidé par Michel Gondry et composé de Julie Gayet, Jessica Hausner, Corneliu Porumboiu et João Pedro Rodrigues, a décerné vendredi les prix de la Cinéfondation lors d’une cérémonie salle Buñuel avant la projection des films primés.

Le programme comprenait cette année 16 films d’étudiants en cinéma venus d’Asie, d’Amérique et d’Europe, sélectionnés parmi près de 1 600 candidats.

Premier Prix : Der Brief (La lettre) réalisé par Doroteya Droumeva – dffb, Allemagne

Synopsis : Un jour Maja découvre qu’elle est enceinte. Le film explore la situation selon son point de vue, nous faisant assister au moment où elle tente de déchiffrer ce qui lui arrive. Maja écrit alors une lettre mystérieuse…

Deuxième Prix : Drari réalisé par Kamal Lazraq – La Fémis, France

Synopsis : Casablanca, Ghali et Mohammed. Chronique d’une amitié entre deux jeunes hommes issus de milieux sociaux diamétralement opposés.

Troisième Prix : Ya-Gan-Bi-Hang réalisé par Son Tae-gyum – Chung-Ang University, Corée du Sud

Synopsis : Un garçon qui n’a d’autre famille que son frère aîné couche avec un homme pour de l’argent. À court d’espèces, l’homme suggère une nouvelle rencontre pour le lendemain et lui demande son numéro de téléphone. Mais le portable du garçon est confisqué par son frère qui refuse de le rendre.

Les films primés reçoivent une dotation de 15 000 € pour le premier prix, 11 250 € pour le deuxième et 7 500 € pour le troisième.

50ème Semaine de la Critique, le palmarès au niveau court

Grand Prix Canal+ du court métrage : BLUE de Stephan Kang (Nouvelle-Zélande)

Synopsis : Autrefois, BLUE était une mascotte en peluche pour enfants à la télé. Aujourd’hui, il est serveur dans un restaurant asiatique et essaie de garder son travail. Il sourit tout le temps quand il sert ses clients. Parfois des gens le reconnaissent, mais c’est rare. Un jour il reçoit une mauvaise nouvelle.

blue

Prix Découverte Kodak du court métrage : Dimanches de Valéry Rosier (Belgique)

Synopsis : Les dimanches et l’homme face au temps qui passe. Le temps libre qu’on tente de remplir à tout prix. Que l’on observe passer, avec rire ou avec ennui.

Jury : Jerzy Skolimowski (Président), Gitanjali Rao (réalisatrice, Inde), Àlvaro Brechner (réalisateur, Uruguay) Sylvie Pras (Responsable des Cinémas du Centre Pompidou, France) et Huh Moonyung (programmateur au Festival international du Film de Busan, Corée du Sud).

Mention spéciale : Alexis Ivanovitch vous êtes mon héros de Guillaume Gouix (France)

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Synopsis : Alex et Cerise s’aiment d’un amour joyeux. Un après-midi, autour d’un verre en terrasse, Alex est agressé devant Cerise, et la peur l’empêche de réagir. Alors que Cerise fait de cette histoire une simple anecdote, Alex la vit comme une réelle humiliation.
Et si son amour-propre le faisait passer à côté du bonheur ?

Jury : Laurent Heynemann, Gérard Krawczyk, Christine Laurent, Benjamin Legrand et Bertrand Tavernier, cinéastes de la SACD.

Le Petit Rail d’or décerné à « Junior » de Julia Ducournau

Décerné depuis 1995 par l’Association des Cheminots Cinéphiles qui assiste aux projections de la Semaine de la Critique, le Rail d’or a décerné ses prix cannois 2011 à Las Acacias, film argentin et espagnol de Pablo Giorgelli (Grand Rail d’or), et à Junior, court-métrage français de Julia Ducournau (Petit Rail d’or), récompensés parmi les sept films et dix courts métrages de la section parallèle du festival de Cannes.

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Synopsis : Justine, dite Junior, 13 ans, des boutons et un sens de l’humour bien à elle, est un garçon manqué un brin misogyne. Alors qu’on lui a diagnostiqué une gastroentérite fulgurante, le corps de Junior devient le théâtre d’une métamorphose étrange…

W comme The Wind is Blowing on My Street

Fiche technique

Synopsis : Le vent souffle, la porte se ferme et une jeune femme à Téhéran ne peut plus rentrer chez elle.

Pays : Iran, Etats-Unis

Année : 2010

Genre : Fiction

Durée : 15’59

Réalisation : Saba Riazi

Scénario : Saba Riazi

Image : Tooraj Aslani

Son : Saba Riazi

Musique pré-existante : Lhasa de Sela , Namjoo Mohsen

Montage : Saba Riazi

Interprète : Anonyme, Rahman Houshyar

Article associé : la critique du film

The Wind is Blowing on My Street de Saba Riazi

Avec son film de deuxième année, Saba Riazi, étudiante à la NYU, dessine un portrait attachant et léger sur l’austérité des mœurs en Iran et ce faisant, pose un regard sensible sur la condition de la femme, la dualité traditions/modernité et la place de la jeune génération « informée » dans le contexte d’une nation marquée par le conservatisme.

« The Wind is blowing on My Street » se base sur une prémisse simple : la rencontre entre une jeune fille qui se retrouve sans voile dans la rue (une faute bien plus grave que fumer une cigarette en public) et son jeune voisin qui lui tient compagnie pendant tout ce temps. Au cours du film, le récit se balade entre deux aspects de la jeunesse iranienne actuelle : d’une part, la fuite des cerveaux et l’envie de partir, d’autre part, le désir de rester, tout en étant conscient de ce que la société impose.

Bien loin de s’attarder sur les éléments politiques qui découleraient forcément de cette thématique, la réalisatrice les frôle seulement et concentre son scénario plutôt sur la communication entre les deux personnages, sur un échange de sensibilités et de points de vue non pas contrastants mais complémentaires. S’ajoute à ceci un jeu d’acteur frais et naturel, et le résultat est un court métrage très digeste, sans prétention sociologique aucune, qui réussit tout de même à provoquer une réflexion complexe sur la manière parfois unidimensionnelle dont le monde islamique est perçu et représenté : une démarche d’autant plus pertinente dans le contexte de « l’Insurrection verte » lors de laquelle ce film a été réalisé.

Adi Chesson

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M comme Music for one Apartment and six Drummers

Fiche technique

Synopsis : Six musiciens profitent du départ d’un couple de personnes âgées pour investir leur appartement et donner à partir de simples objets, un concert.

Réalisation : Ola Simonsson, Johannes Starjne Nilsson

Scénario : Ola Simonsson, Johannes Starjne Nilsson

Genre : Fiction

Durée : 10′

Année : 2002

Pays : Suède

Image : Johannes Starjne Nilsson, Charlotta Tengroth et Robert Blom

Son : Hakon Gapestad

Montage : Johannes Starjne Nilsson, Ola Simonsson

Musique : Ola Simonsson, Magnus Borjeson

Interprétation : Johannes Björk, Magnus Borjeson, Marcus Haraldson, Barbro Gustafson Löfgren.

Production : Kostr-Film

Article associé : la critique du film

Music For One Apartment And Six Drummers de Ola Simonsson et Johannes Starjne Nilsson

Pièces musicales

Depuis 1992, deux enfants terribles suédois, Ola Simonsson et Johannes Starjne Nilsson, commettent des « attentats » filmiques. A quarante ans passés, les deux amis (qui se connaissent depuis l’enfance) n’en ont visiblement pas fini de jouer les sales gosses joyeux. « Music for One Apartment and Six Drummers », signé par ces trublions nordiques en 2002, est désormais devenu un classique du court métrage.

Tout commence comme dans un film de Tarantino… Dans une bagnole rouge, six personnages en quête d’un mauvais coup attendent. Tic tac. Ça ne rigole pas du tout, et pourtant ça nous fait déjà rigoler. Ces six là, il faut bien le dire, ont ce que l’on appelle des « gueules ».

Alors que l’on s’attend tout naturellement à un casse en bonne et due forme dès que les petits bourgeois sortent de chez eux pour promener chien-chien, les « truands », imperturbables commencent à investir chacune des pièces de l’appartement pour… battre la mesure. Nos truands ne sont en réalité rien d’autre, mais c’est déjà beaucoup, que six batteurs déjantés bien décidés à se servir de tout ce qui leur passe sous la main pour faire un joli et mélodique boucan. Aspirateur et mixer, brosse à dents et brosse à chiottes, tiroirs et miroirs, rien n’est laissé au hasard. Au programme, quatre pièces musicales : Rondo culinaire, Fantaisie pour salle de bains, concerto pour ensemble de chambre, boléro de salon.

Entre thriller anarchique et expérimental-feel-good-movie, Music for One Apartment fait évidemment la part belle au son. Le travail sur le montage sonore sublime les compositions délirantes et leur donne une justesse mélodique exceptionnelle. Mais le soin apporté à l’image n’est pas non plus en reste. Et c’est là, la géniale idée de cette folle entreprise que d’être tout à la fois un petit joyau pour les oreilles et pour les yeux : mise en scène dynamique, cadres audacieux et, on l’a dit, présences charismatiques de ces percussionnistes hors du commun prenant leur intervention très très au sérieux.

Cette opération de braquage acoustique de 10 minutes a donné naissance, il y a peu (2010), à une opération de terrorisme acoustique de grande envergure avec Sound of Noise, le premier long métrage de nos Suédois allumés. Une semblable brutalité sonore, il est vrai qu’on en redemandait, voilà qui est fait. A bon entendeur…

Sarah Pialeprat

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La Version du loup d’Ann Sirot et Raphaël Balboni

« Tire la chevillette et la bobinette cherra »

On connaissait déjà le penchant du tandem Sirot-Balboni pour l’étrange et le décalé. Mais si l’univers des deux artistes s’engouffrait dans les méandres d’un psychologisme angoissant dans « Dernière partie » et « Juste la lettre T », avec « La Version du loup », sélectionné en compétition nationale au Festival du court métrage de Bruxelles où il a remporté une Mention spéciale Prix BeTV, le ton change radicalement. Le film revisite joyeusement le célébrissime conte du « Petit chaperon rouge ».

On a tous plus ou moins grandi avec l’histoire du « Petit Chaperon rouge » comme livre de chevet. Ann Sirot et Raphaël Balboni le savent très bien et s’en amusent. Il existe d’innombrables adaptations du conte, certaines plus coquines que d’autres mais aucune ne semble vouloir donner la parole au loup. C’est que cet être velu à la langue pendante, aux dents aiguisées et capable de se travestir pour arriver à ses fins, a traumatisé des générations d’enfants. C’est sans compter la tendresse particulière que les artistes portent à l’animal auquel ils rendent justice dans une version un brin déjantée.

Avec ce troisième opus, le couple affirme sa volonté de faire un cinéma hybride et atypique, mêlant des affinités respectives, celles du cinéma pour lui et du théâtre pour elle. Ainsi, le récit se retrouve démystifié dès les premières images présentant un Petit Chaperon rouge bien plus espiègle que celui de Perrault. Ici, la fillette se rend en barque chez sa mère-grand et un dynamique Django Reinhardt vient donner le ton et la distance adéquate pour savourer cette fable réadaptée. C’est que 68 est passé par là et le loup se retrouve confronté à l’émancipation d’un Chaperon à l’accent ibérique qui, en quelques répliques bien senties, défie les envies du quadrupède poilu.

Délicieusement interprété par Jean-Jacques Rausin et Ana Cembrero Coca, dans un genre complètement assumé, proche de celui d’Abel et Gordon, les réalisateurs montrent l’envers du décor, les coulisses du cinéma où dans cette traduction burlesque la jeune fille enfile les habits de son « abuela » pendant que son comparse aux grandes dents se retrouve tout de rouge vêtu. Mais loin d’entretenir des rapports conflictuels, les deux protagonistes semblent au contraire nourrir de tendres sentiments l’un pour l’autre. Echanges de bons procédés et si le loup aspirait à une romance tout simplement ?

Marie Bergeret

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V comme La Version du loup

Fiche technique

Synopsis : Comme dans le conte traditionnel, le loup convoite le petit chaperon rouge et se déguise pour arriver à ses fins. Mais dans cette version, le loup, lassé de sa cruelle réputation, rétablit la vérité et dévoile un petit chaperon plus espiègle que la candide fillette de la légende.

Réalisation : Ann Sirot et Raphaël Balboni

Scénario : Ann Sirot

Genre : Fiction

Durée : 10′

Année : 2010

Pays : Belgique

Image : Jorge Piquer Rodriguez

Montage : Nicolas Rumpl & Raphaël Balboni

Montage son : Julien Mizac

Interprétation : Ana Cembrero Coca, Jean-Jacques Rausin

Production : Frakas

Article associé : la critique du film

Killing the Chickens to Scare the Monkeys de Jens Assur

Un titre génial, un visuel de folie, une chronologie inversée, un destin individuel broyé par un régime intolérant en place. « Killing the Chickens to Scare the Monkeys » de Jens Assur, cadeau filmique repéré et offert ces jours-ci par la Quinzaine des Réalisateurs, illustre sans concessions une Chine impitoyable et mécanique et ses conséquences sur la vie d’une jeune enseignante anonyme. Le tout en neuf fragments non linéaires.

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“Dépêchez-vous, nous n’avons pas beaucoup de temps.” Ainsi s’ouvre le scénario fictionnel de Jens Assur, photographe-cinéaste suédois. Si des individus se pressent effectivement devant la caméra, c’est pour assister à un spectacle inédit : une mise à mort programmée d’ennemis d’Etat, accusés de complot contre le pouvoir. Pour ce faire, les amateurs de sensations glauques, dont c’est la première fois pour certains, ont revêtu leurs plus beaux costumes et embarqué leurs appareils photo pour la séquence souvenir.

Cette première scène, extrêmement troublante, dure plus de dix minutes. Le film pourrait s’arrêter là et ferait déjà un très bon court métrage. Seulement, Jens Assur va plus loin : il propose huit autres tableaux dans lesquels un personnage féminin, dont on découvre le passé d’enseignante, se précise au fur et à mesure. Le film est construit à l’envers, permettant ainsi de retracer la vie de cette femme, victime d’un système qui a décidé d’avance de son sort.

“Tuer les poules pour effrayer les singes“ se réfère à la politique du gouvernement chinois de semer la terreur en exécutant les dissidents pour intimider le reste de la population. La création de Jens Assur est à cet égard fascinante tant elle renseigne sur le voyeurisme appuyé et incite le spectateur à sortir de sa torpeur conditionnée et à combler les trous volontairement laissés par l’auteur.

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Précédemment, en 2007, Assur avait signé « The Last Dog in Rwanda » qui avait remporté le Grand Prix de la compétition internationale à Clermont-Ferrand. Il y racontait l’histoire d’un photographe de guerre confronté à la mort, à la politique, aux flashbacks et à l’éthique. « Killing the Chickens to Scare the Monkeys » est encore plus intéressant. La Quinzaine a bien fait de le mettre au-dessus de la pile : le film offre par ses images et sa narration éclatée une contribution politique et émotionnelle importante à un combat cher aux défenseurs des droits de l’homme.

Katia Bayer

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Article associé : l’interview de Jens Assur

K comme Killing the Chickens to Scare the Monkeys

Fiche technique

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Synopsis : « Killing the Chickens to Scare the Monkeys » narre une histoire unique, jamais vue auparavant, empruntée à la vie quotidienne en Chine. Dans un espace grisâtre entre blanc et noir, neuf scènes fortes, qui montrent les conséquences imprévues de la politique nationale sur la vie d’une jeune femme.

Genre : Fiction

Durée : 23′

Pays : Suède, Thaïlande

Année : 2011

Réalisation : Jens Assur

Scénario : Jens Assur

Image : Marek Wieser

Son : Wille Peterson-berger, Niclas Merits

Décor : Sudamol Chaban

Montage : Fredrik Morheden, Åsa Mossberg

Production : Studio Jens Assur AB, Living Films

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Csicska d’Attila Till

Pista se plaint auprès d’un commissaire de police de vols commis dans son champ. Face à l’officier, il se montre impatient et râleur. Une fois rentré chez lui, il pourchasse un ami de sa fille, donne des ordres à sa femme, et bat Feri, son homme à tout faire.

Projeté à la Quinzaine des Réalisateurs, « Csicska » (Beast) du Hongrois Attila Till est traversé par une photo magnifique, un sujet tragique et un impact indiscutable. Le film dépeint l’autorité exercée et la peur insufflée par un homme sur sa famille et sur son esclave personnel, un jeune homme acheté à bas prix. Violence domestique, verbale, et gestuelle sont au rendez-vous de ce film pourvu d’une rudesse et d’une tension permanentes.

Le « Csicska » d’Attila Till est rural, froid, sombre, intense. On monte à plusieurs sur la motocyclette, on tire sur les hommes comme sur des lapins (scène incroyable et terriblement humiliante du père apprenant à ses enfants à tirer sur des cibles humaines, dans l’indifférence la plus générale), on tombe enceinte en étant mineure, on baise en chaussettes devant une photo de mariage, on fait respecter les traditions et on veut faire la loi avec un bâton pendant que les moutons ont le sommeil difficile.

Le film s’infiltre au sein d’une cellule familiale pas comme les autres dans laquelle toute tentative de rébellion face à la figure du père se révèle caduque. À y regarder de plus près, on se demande même si les personnes entourant Pista osent vraiment changer l’état des choses tant la noirceur, la crainte et la dénonciation sont monnaie courante autour de lui.

L’ultra réalisme du film, fréquent dans le cinéma de l’Est, frappe d’autant plus que le réalisateur s’est inspiré de situations de dépendance et de soumission chroniquées dans les journaux ou rapportées par des témoins directs. Vu la terreur brute et directe infligée par le maître sur l’esclave, on n’ose imaginer la réalité qui sous-tend le film. Et pourtant, cette terrible histoire de bête humaine offre un nouvel éclairage sur le phénomène de l’esclavage moderne et sur les conditions de vie (et même de survie) dans les campagnes hongroises.

Katia Bayer

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Article associé : l’interview d’Attila Till

C comme Csicska

Fiche technique

Synopsis : Istvan Balogh, agriculteur hongrois, a le contrôle total de sa femme, de sa famille et de son esclave. Les personnages croisent leur destin tragique à cause de leurs relations extrêmes. Ce film a été inspiré par les souvenirs de personnes qui ont survécu à de telles situations.

Genre : Fiction

Durée : 20′

Pays : Hongrie

Année : 2011

Réalisation : Attila Till

Scénario : Attila Till

Image : Imre Juhász

Son : Csaba Major

Montage : Béla Barsi

Musique : Iván Lantos

Interprétation : Szabolcs Thuróczy, Balázs Szitás, Moni Balsi

Production : M&M Film, Laokoon film

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Cannes 2011 dans sa globalité

On ne sait pas pourquoi, mais cette année, on a beau penser à autre chose, on est happé par Cannes. Allumez la télé, gardez les yeux ouverts, mettez votre plus beau short. Robert De Niro, Uma Thurman, Sean Penn, Faye Dunaway, Pedro Almodóvar, Woody Allen, Terrence Malick, Gus Van Sant, Bernardo Bertolucci, Emir Kusturica, … Quel tapis, mais quel tapis, mes amis !

Le court, moins visible que son padre le long, n’est pas à plaindre pour autant. Michel Gondry (excusez du peu) succède à Atom Egoyan comme Président du Jury de la Cinéfondation et de la Compétition officielle des courts métrages. Dès le 20 mai, on saura quels films de fin d’études parmi les 16 sélectionnés bénéficieront encore plus de la visibilité et du prestige propres à Cannes, et le 22, peu avant que nos amies les stars repartent se brosser les dents chez elles, on commentera comme des chèvres l’attribution de la Palme d’Or du court métrage à l’un des 9 films en compétition.

Pour l’heure, ça s’active du côté de la Semaine de la Critique. Pour fêter ses 50 ans d’existence, la section parallèle propose depuis quelques jours de retrouver sur son site Internet les cinéastes qu’elle a révélés (et il y en a un paquet, jugez-en plutôt). Jerzy Skolimowski, qui aime bien les anniversaires, se balade à l’Espace Miramar en tant que Président du Prix Découverte Kodak tandis que Spike Jonze présente en séance spéciale un court métrage animé (« Mourir auprès de toi »), et que Nathalie Baye, la comédienne aux “5 X” est très attendue le 17 pour représenter et soutenir les films peu révolutionnaires de la Collection Canal +.

La Quinzaine des Réalisateurs, dont la bande-annonce est toujours aussi émouvante, n’aura pas de stars à son actif au niveau du court (Louis Garrel n’ayant pas fait de films cette année!), mais des films complètement hallucinants, qui ne manqueront pas d’être évoqués dans nos colonnes dans les prochains jours. L’ACID (l’Association du Cinéma Indépendant pour sa diffusion), quant à elle, ne proposera que deux vrais coups de cœur, le très percutant « Pandore » de Virgil Vernier, et le très musical « Dancing Odeon » de Kathy Sebbah.

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Il n’est pas rare de voir sur le tapis de l’Officielle des cinéastes dont les films précédents ont déjà été sélectionnés au festival. Il en va de même pour les sections parallèles. Certains cinéastes passés par la forme brève resurgissent même sur la Croisette de Madame Jacques avec un nouveau court ou avec un premier ou deuxième long. Certains changent naturellement d’emplacement en fonction de leur parcours, à l’instar d’un ancien étudiant passé par la Cinéfondation, la section réservée aux films d’écoles, qui se lancerait dans l’aventure de son premier long métrage. La Semaine de la Critique accueille ainsi Hagar Ben-Asher, avec « The Slut » (traduction : ici), succédant à « Pathways », réalisé à Minshar for Art (Tel Aviv) et remarqué à Cannes en 2007. Le film a déjà été projeté, mais à en juger par le synopsis et les premières images circulant sur le Net, la réalisatrice semble nourrir un lien du court au long en s’interrogeant sur la question de la rédemption et de la sexualité plus qu’affirmée.

La Quinzaine des Réalisateurs va même plus loin en réinvitant des cinéastes déjà familiers de sa fameuse bande-annonce. Après « Smáfuglar » à l’Officielle et « Anna » à la Quinzaine, Rúnar Rúnarsson, cinéaste islandais qui nous a beaucoup frappés par son sens aigu de la mise en scène et par sa capacité à filmer avec justesse l’adolescence, vient de présenter son premier long métrage, « Eldfjall » (« Volcano » pour ceux qui ne maitrisent pas les langues étrangères). Autre habitué, le Suédois Johannes Nyholm, auteur du génial « The Tale of Little Puppetboy » (l’histoire d’un personnage très moche recevant la visite d’une poupée rousse) et de « Songe des bois », une animation très sobre en ombre chinoise, revient pour la troisième fois au Théâtre Croisette (bravo en suédois reste bravo) avec « Las Palmas ». Pour la culture générale, le trailer du film a généré plus de 8 millions de vues sur YouTube tant les vacances d’un bébé d’un an trash et fauché ont éveillé la curiosité de chacun.

Pour le reste, tout est permis. Skolimowski garde ses lunettes, certains cinéastes reviennent au long après un court (Jonathan Caouette, à la Semaine, après « All Flowers in time »), d’autres font un court après un long (« Fourplay : Tampa » réalisé parKyle Henry, à la Quinzaine, après « The Room »), Johannes Nyholm ne filme pas sa fille comme d’autres parents, des films d’étudiants se frayent un chemin en dehors de la Cinéfondation (comme « Badpakje 46 » à l’Officielle), Hagar Ben-Asher est aussi belle que Julia Roberts, et une nouvelle idée apparaît, telle une bonne pâquerette : Cannes Court Métrage, censé rassembler le Short Film Corner et la Compétition des courts. Strass et surprise. Le 64ème festival de Cannes est plus qu’ouvert.

Katia Bayer

Cannes 2011

C’est écrit sur l’accréditation et un peu partout : c’est le 64ème festival de Cannes. Évidemment, vous, quand vous pensez Cannes, vous appuyez sur le champignon, comme à Une famille en or : cinéma, tenues de fées, carpette rouge, Palme d’Or, surprises, déceptions, …. Et le court métrage, vous y songez aussi ? Mais oui, madame, non, vous ne rêvez pas, Monsieur : le format bref a aussi sa place sur cette côte-là, à cette période-là, dans ce festival-là. CQFocusD.

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Sahim Omar Kalifa : “L’Irak n’est pas le pays des héros mais celui des victimes”

Auteur du touchant Land of the Heroes, sélectionné au Festival de Bruxelles, en compétition nationale et lauréat du Prix Génération KPlus à Berlin, le très prometteur Sahim Omar Kalifa parle de son film, du Kurdistan irakien et de ses projets futurs. Edifiante rencontre.

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Format Court : Pourquoi avoir choisi la Belgique pour venir étudier le cinéma?

Sahim Omar Kalifa : En fait, en 2001, j’ai rejoint mes parents qui vivaient en Belgique depuis 1996. En Irak, j’aimais beaucoup filmer avec mon frère et mes amis. Je faisais des remakes de scènes de films. Au moment de choisir mes études, un ami qui connaissait mon intérêt pour le cinéma m’a proposé de passer les examens d’entrée à Sint-Lukaas. À ma grande surprise, je les ai réussis. Comme mon néerlandais n’était pas très bon à l’époque, la première année fut assez difficile.

Ton film de fin d’études Nan a eu beaucoup de succès.

S.O. K. : Oui, il a obtenu la VAF Wildcard au Festival de Louvain en 2007. J’ai reçu la somme de 60.000 euros pour la réalisation d’un projet futur. Grâce à cela j’ai pu réaliser Land of The Heroes. Au début, j’avais dans l’idée d’écrire un long métrage mais vu le montant, je me suis dirigé vers l’écriture d’un autre court métrage.

Tu sortais de l’école, comment t’es-tu débrouillé pour trouver tes producteurs?

S.O. K. : Quand j’ai eu le Prix à Louvain, Hendrik Verthé et Kobe Van Steenberghe m’ont contacté pour savoir si je voulais collaborer avec eux. J’ai un peu hésité car ils étaient jeunes et n’avaient pas trop d’expérience mais très vite j’ai été convaincu de leur professionnalisme et aujourd’hui, je ne regrette rien. Ils m’aident vraiment beaucoup.

Quelle a été ton inspiration pour écrire Land of the Heroes ?

S.O. K. : Je viens du Kurdistan irakien. J’ai connu la guerre qui a opposé l’Iran et l’Irak pendant les 8 premières années de ma vie. Nos vies étaient rythmées par la guerre. À l’époque, on avait seulement deux chaînes de télévision. Je me souviens que je devais attendre longtemps pour regarder les dessins animés qui étaient la plupart du temps interrompus par les nouvelles de la guerre. J’ai voulu baser mon récit sur cette histoire très simple.

C’est donc un film autobiographique?

S.O. K. :  Pas entièrement. Disons que je me suis inspiré de mon enfance mais j’y ai ajouté des éléments récoltés par-ci par-là. Notamment l’idée de Spiderman, du conflit entre les deux cousins ainsi que le rôle des mères viennent de différents récits racontés par des amis.

Tu parles de la guerre de façon très ironique. Pourquoi ?

S.O. K. : Oui, tout à fait. Alors que je me lançais dans ce projet, beaucoup de gens m’ont dit que les films irakiens et kurdes racontaient toujours la même chose de façon tragique. Je me suis alors demandé comment je pouvais aborder la thématique de la guerre sans être larmoyant et pathétique. J’ai donc opté pour la tragicomédie. Nos vies étaient baignées dans l’ironie. Par exemple, on était obligés de dire qu’on aimait Saddam Hussein alors que ce n’était pas du tout le cas. Dans mon film, on peut apercevoir un peu cette réalité. Les scènes sont comiques mais elles cachent aussi une certaine tristesse. On n’y dit jamais du mal de Saddam mais on comprend très bien qu’il est loin d’être la figure emblématique appréciée de tous. Par ailleurs, le titre du film participe de cette ironie car ce que je montre est plutôt le revers de la médaille. L’Irak n’est pas le pays des héros mais celui des victimes. Tous les personnages sont des victimes de la guerre.

Dans ton film, la violence entre les enfants est mise en avant. Penses-tu que grandir dans un contexte de guerre renforce l’agressivité ?

S.O. K. :  Certainement. Nous avions l’habitude de voir la violence à la télévision chaque jour. On nous montrait sans censure aucune le corps d’hommes et de femmes victimes d’attaques armées. La guerre a façonné notre manière d’appréhender le monde. Dans le film, les enfants se battent, ils répètent ce qu’ils ont vu. Les mères aussi sont conditionnées. Elles ont fait du conflit leur fond de commerce en récupérant les armes pour les revendre. C’est aussi cela que j’avais envie de montrer dans mon film.

Malgré le contexte particulier ton film transmet un message universel. Non ?

S.O. K. : Tout à fait. D’ailleurs, il tourne dans les festivals à travers le monde, il a même reçu le Prix Génération Kplus à Berlin, ce qui a été une belle surprise. Les gens l’apprécient justement pour son côté universel. J’essaye de faire passer un message simple et compris par tout le monde.

Les enfants portent  le film sur leurs épaules. Comment as-tu fait pour les choisir?

S.O. K. : Nous avons organisé un casting en Irak. Ce n’était pas évident car il y a très peu d’acteurs professionnels là-bas. Puis finalement, on s’est décidés sur le choix des 3 enfants. J’ai eu du mal à choisir Dileer, le personnage principal. J’hésitais entre lui et le plus petit des deux. On m’a conseillé de le prendre lui, afin de casser les clichés. Ainsi, le plus grand des deux n’était pas nécessairement la forte tête comme c’est le cas en général.

Quelle place le cinéma a-t-il dans un pays comme l’Irak ?

S.O. K. :  C’est très simple, aucune. Notre cinéma n’a pas évolué depuis la Palme d’or attribué au Turc/Kurde Yulmaz Guney en 1982. Le Ministère de la Culture n’y connaît rien et préfère investir son argent dans des choses stupides plutôt qu’aider les réalisateurs à mettre sur pied des projets intéressants. Les gens ne se rendent pas non plus dans les salles de cinéma. Ils ont le satellite et Internet alors pourquoi se déplacer? C’est dommage.

As-tu l’intention de réaliser un long-métrage?

S.O. K. :  Oui. Je suis en train de l’écrire. Quand Land of the Heroes a obtenu le Prix jeune génération à Berlin, le Festival Sundance qui a vu le film a proposé de m’aider pour l’écriture de mon long-métrage. Ils m’ont choisi pour me rendre aux États-Unis en décembre où j’aurai un feedback de 3 professionnels. Je ne m’y attendais pas du tout. J’ai également demandé l’aide du VAF pour ce même projet. J’attends la réponse.

Que raconte-t-il ?

S.O. K. :  C’est l’histoire d’un homme qui est déchiré entre la personne qu’il aime et le poids de sa culture et de sa famille. Il est amené à commettre un acte irréparable. L’action se déroule en Turquie, en Belgique et en Irak.

Propos recueillis par Marie Bergeret

Article associé : le reportage “Guerre et Paix”

Guerre et Paix

Il y aura toujours un champ de bataille pour accoucher des larmes de ceux qui veulent vivre dans la paix et la liberté. A la lumière des révolutions arabes, la guerre montrée à travers trois films sélectionnés au Festival du court métrage de Bruxelle apparaît dans toute sa contradiction. Land of The Heroes de Sahim Omar Kalifa, El Ambidiestro d’Antonio Palomino et El Pozo de Guillermo Arriaga développent tour à tour l’ironie, l’absurdité et la cruauté pour évoquer les sentiments que génère le conflit humain.

Land of The Heroes

1988, au Kurdistan irakien, la guerre contre l’Iran fait rage. Dileeer et sa soeur Zienee s’occupent comme ils peuvent : ils jouent à la guerre. Dileer se prend pour un héros et pour ce faire, arbore non sans fierté un costume de Spiderman. Quand leur cousin vient leur rendre visite, la tranquillité disparaît bel et bien. Et le jeu enfantin se transforme en un rapport de force humiliant et sadique où les enfants recréent la réalité qu’ils voient apparaître à la télévision, cette même réalité qui vient interrompre quotidiennement les dessins animés et qui petit à petit leur enlève un petit coin d’enfance.

Lauréat du Prix Génération Kplus à la 61ème Berlinale, Land of The Heroes touche juste par une mise en scène sensible, par une interprétation authentique des jeunes acteurs mais aussi grâce à l’humour qu’il distille tout au long du récit. Cet humour penche pour l’ironie, la scène où les mères nettoient les armes à feu en est une belle preuve. L’univers développé par Sahim Omar Kalifa rappelle à bien des égards celui de son compatriote Bahman Ghobadi. Comme dans Turtle Can Fly, il raconte la guerre par le prisme de l’enfance. Et l’on constate que celle-ci conditionne le peuple qui la subit au point que les enfants y voient un modèle à suivre. Les soldats de ces guerres reviennent amputés, déchiquetés et meurtris. Qu’à cela ne tienne, ils sont les “héros” que la nation autocrate brandit fièrement en guise d’emblème. Mais si les tortues peuvent voler, il en est de même des araignées.

El Ambidiestro

Le film de l’Espagnol Antonio Palomino installe son action en Andalousie, en 1937 pendant la guerre civile qui oppose la droite nationaliste à la gauche républicaine. Un homme devenu amnésique se réveille sur un champ de bataille, au milieu des deux camps adverses. Il se réfugie dans une tranchée pour échapper aux tirs qui fusent des deux côtés, ne sachant à quel camp il appartient. Cloîtré dans cette espèce de no man’s land, il est amené à répondre de ses convictions auprès des membres des deux camps qui ne savent s’il faut l’épargner ou le sacrifier. S’ensuit un jeu de questions/réponses pour connaître LA vérité. Oui mais voilà, notre amnésique se montre bien habile et quelle que soit la question, sa réponse est ambiguë et empêche les belligérants de le rallier à leur cause. Absolument savoureux, El Ambidiestro montre à quel point les croyances poussées à l’extrême, à l’origine des conflits relèvent souvent de l’aberration. Gauche, droite, l’homme tente de trouver son équilibre. Doté d’un final qui change radicalement de ton, le court métrage du cinéaste andalou est une arme de destruction massive contre le fanatisme dogmatisé. Un sujet sérieux dédié “à tous ceux qui perdent toujours la guerre même sans y participer”.

El Pozo

 

Comme à l’accoutumée, le cinéma mexicain aborde la guerre de façon plus crue. Mexique, 1914, quelque part dans le désert de Coahuila, une maison isolée presque perdue abrite un vieil homme, sa femme et ses petits-enfants. Quique, l’un d’entre-eux, est tombé dans le puits. Le grand-père accourt pour le sauver et lui tend une corde mais celle-ci s’avère être trop petite. Il intime à deux autres enfants d’aller chercher de l’aide. Guillermo Arragia filme avec pudeur de longues scènes silencieuses montrant des gestes ordinaires en temps de Révolution mexicaine. A la banalité des actes s’oppose la cruauté exceptionnelle que vient rappeler la guerre et ses injustices. Point d’humour dans ce El Pozo mais des plans larges aux paysages à perte de vue qui viennent souligner l’impuissance d’un grand-père face à la douleur de son petit-fils. Minimaliste, à la frontière du documentaire, le film d’Arragia dénonce à sa manière l’arbitraire qui entache la réalité quand celle-ci se mêle à l’hostilité guerrière.

Marie Bergeret

Article associé : l’interview de Sahim Omar Kalifa

illegal_cinema, une expérience de cinéma différente

Valorisant les films marginaux et expérimentaux, ces séances sont proposées par et pour les spectateurs. « illegal_cinema » est un rendez-vous hebdomadaire ayant lieu tous les lundis, à 20h aux Laboratoires d’Aubervilliers. Prochaine rencontre demain, autour de la croisée des chemins.

illegal_cinema est un rendez-vous hebdomadaire lors duquel des spectateurs montrent à d’autres spectateurs des films qui les touchent, pour en discuter ensemble. Chacun(e) peut proposer une séance, en inscrivant le film choisi dans une problématique qui sera débattue après la projection. Rendre poreuses les frontières entre « programmateur/trice» et «public»: tel est l’enjeu du projet. Tout type de film peut faire l’objet d’une séance, qu’il s’agisse de courts ou de longs-métrages, de documentaires, de films d’animation, de vidéos d’artistes, ou autres objets filmiques. Une seule limite: un/e réalisateur/trice ne peut pas venir montrer ses propres films, la discussion collective devant l’emporter sur le discours d’autorité auquel nous sommes habitués face à un(e) auteur(e) ou un(e) expert(e). Tous les lundis soirs depuis mai 2010 et jusqu’à juin 2011, des discussions sont organisées à partir de films ayant une circulation restreinte dans les circuits habituels du cinéma ou dans les médias, proposées chaque fois par une personne différente.

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La prochaine séance est proposée et animée par Farid Mouhous, informateur jeunesse au Point Information Jeunesse d’Aubervilliers.

Programme de la soirée

« Paroles de volontaires européens », un film produit par VE France (France, 2010, 11min.)
« Un pont, une histoire », un film produit dans le cadre de l’Office Municipal de la Jeunesse (France, 2007, 10min.)
« On the train », un film de Barnabas Toth (Hongrie, 2003, 10min.)

À la croisée des chemins

Partir. Partir ailleurs. Un ailleurs, précis et ouvert. Une terre à investir. Pourquoi pas ? Köln, en Allemagne. Manchester, au Royaume-Uni. Padova, en Italie. Lisboa, au Portugal. Wrocław, en Pologne. Tant de lieux où, pendant quelques mois, les valises pourraient se poser. Se poseraient aussi de nombreuses questions à propos de la langue, de l’intégration, de l’altérité, de l’interculturalité, etc. Car « partir » signifie « être au milieu », entre soi et l’autre, dans un devenir-autre. Inscrit dans le courant d’air qui relie, dans un courant d’être naturel au-delà des codifications préalables, dans l’entre-deux.
Mais qu’est-ce que détermine un tel mouvement, une telle implication à travers les frontières culturelles ? Si l’on part, c’est avec une idée en tête, de petits cailloux en poches, des sourires en réserve, des objectifs solidaires à appliquer. Pour contrecarrer les manques spécifiques que chaque contexte social possède. L’aventure de l’entre-deux implique donc une appropriation des valeurs humaines, une approche curieuse de l’être.

Pour questionner cette « médiation » que l’aventurier incarne ontologiquement, trois courts-métrages dessineront la ligne de fuite du débat à partager. Un débat sous le signe de l’intermédiaire, des différences, à la croisée des chemins.

Infos pratiques : lundi 16 mai · 20:00 – 22:00 – Les Laboratoires d’Aubervilliers / 41, rue Lécuyer 93200 Aubervilliers / Métro ligne 7 Quatre chemins

Le site des Laboratoires : www.leslaboratoires.org

La page Facebook consacrée à l’événement : ici

Je vais à Disneyland d’Antoine Blandin

Sélectionné avec juste raison dans de nombreux festivals (quoique étonnamment peu primé), dont le dernier Brussels Short Film Festival, « Je vais à Disneyland » d’Antoine Blandin dresse un portrait déchirant de la violence parentale. Un film d’école d’une maturité admirable et qui sort du rang.

Calvin a une vie peu commune mais il s’y fait, voyant toujours le côté positif des choses : il apprécie les moments passés en compagnie de son père alcoolique qui regarde des films porno, le temps qu’il passe en tournant en rond, attaché à une chaine dans le jardin, les tentatives violentes de la part de son père de « réparer » son fils né à la suite d’une erreur… Un jour, un sac sur la tête, il croit embarquer pour le plus beau jour de sa petite vie : il va à Disneyland.

Pour parler d’un sujet aussi brutal, Antoine Blandin, sorti de l’EMCA (Angoulême), opte pour une forme simple et sans affectation. Un dessin léger et enfantin et un dialogue candide permettent de focaliser les trois petites minutes de film sur le psychologisme de l’enfant-protagoniste. Trois minutes bien poignantes qui paraissent après coup tellement bien façonnées que les prolonger serait diluer la force de ce court.

Par son recours au sous-titrage aux dépens de tout dialogue sonore, son utilisation d’une partition instrumentale fugace signée Ez3kiel, et sa représentation familière de la misère sociale, le film se dote d’un coté universel, encore plus que son camarade scandinave « Sinna Mann », vu dans à peu près tous les festivals mondiaux depuis sa sortie. Le mérite de « Je vais à Disneyland » réside dans le fait qu’il ne prend pas de gants pour traiter d’une thématique grave et tragique. Sous le couvert affable de l’animation, ce court en dit long, percutant et traumatisant son spectateur par son ironie incisive. Un voyage cauchemardesque dans le « pays des merveilles » à ne pas rater. Déconseillé aux âmes sensibles !

Adi Chesson

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