En 2003, lors de l’élargissement de l’Union Européenne, Lars Von Trier a eu l’idée de développer « Visions of Europe », une suite de 25 courts métrages de cinq minutes, réalisés par 25 réalisateurs, chacun d’entre eux offrant sa vision du présent et du futur du continent. « Prologue », du maître hongrois Béla Tarr, nous montre une longue file de personnes attendant l’ouverture d’une soupe populaire. La représentation de ce qui impliquait pour le cinéaste l’adhésion de la Hongrie à l’UE : une longue attente pour se nourrir.
Constitué uniquement d’un lent traveling latéral dirigé par l’acclamé Robby Müller, le film est un point de condensation de tous les éléments que le réalisateur affectionne : l’absence de dialogues, la patience, la répétition, les visages désolés, les lents mouvements de caméra, le noir et blanc. La musique, composé par Mihály Víg, musicien crédité comme co-auteur des films de Tarr, est une mélodie lancinante qui anticipe le rythme du court métrage, de ce prologue à une nouvelle vie et à un nouveau pays.
À l’occasion d’une master class où la question de la durée parfois extrême de ses films était le sujet d’un long débat (il suffit de voir le monumental « Sátántangó » de 435 minutes), Béla Tarr disait volontiers que « Prologue » était plutôt un haïku.
Le Parc de la Butte du Chapeau-rouge a vu ses pelouses envahies par de nombreux festivaliers le mois dernier, venus pour découvrir la programmation éclectique de la quatorzième édition du Festival Silhouette. Une sélection internationale où se sont mélangés différents genres, de la fiction au documentaire en passant par l’animation et des formes plus expérimentales, offrant ainsi un panel de courts-métrages assez riche et varié aux spectateurs. Si chacun des programmes réunissaient des films très différents, l’on constate que certains des courts-métrages les plus stimulants découverts lors de cette nouvelle édition prenaient en charge les mêmes questions, en plaçant l’intime au cœur de leurs récits.
La mise en scène d’une intimité suppose avant tout la définition d’un cadre physique dont l’échelle peut varier d’un film à l’autre : de l’exiguïté d’une chambre de bonne parisienne (« Printemps » de Jérôme Clément-Wilz) en passant par les vestiaires d’une patinoire (« Kiss me not » d’Inès Loizillon) pour finalement s’ouvrir à une ville toute entière (Athènes dans « Archipels, granites dénudés » de Daphné Hérétakis), les auteurs de ces films investissent à chaque fois des espaces qu’ils transforment en théâtres de questionnements intimes, où la possibilité d’une utopie ou d’une révolte peut germer et partir du particulier pour résonner avec le collectif.
Anatomie d’un rapport
Disons-le d’emblée : « Printemps » de Jérôme Clément-Wilz agace autant qu’il séduit. Cette chronique d’une passion amoureuse racontée à la première personne par le réalisateur lui-même nous plonge dans un précipité de matière intime à l’intérieur duquel il est difficile pour le spectateur de trouver sa place tant la proximité qu’il fabrique avec ses protagonistes frise plus d’une fois l’impudeur. Confinés dans une chambre de bonne parisienne, le cinéaste et son amant d’alors, un jeune comédien noir fraîchement débarqué à la capitale, vivent au jour le jour leur passion naissante : ils discutent, plaisantent, se racontent leurs rêves à tour de rôle en se complaisant parfois dans une niaiserie propre à la jeunesse qui découvre ses premiers émois sentimentaux et sexuels. L’on se retrouve dans un premier temps un peu démuni face à ces images, car quand bien même les motifs de ce récit renverraient tout à chacun à ses propres aventures sentimentales, les attitudes de ces deux tourtereaux se révèlent bien irritantes et empêchent le spectateur de développer à leur égard une empathie véritable. Il est regrettable, d’ailleurs, que les afféteries du langage et du comportement des protagonistes résonnent jusque dans la mise en scène qui multiplie les séquences clippées pour restituer de manière un peu caricaturale les embellies de la vie de couple.
Le film émeut moins dans ce qu’il montre des moments de joie et de communion vécu par les amants que lorsque le revers de la passion affleure et que la chambre de bonne exiguë, offrant dans un premier temps un cadre propice à l’expression sans gêne des sentiments prend des allures de cellule. Le cinéaste amoureux ne filme la ville qu’à travers les fenêtres de la chambre, dans l’attente du retour de l’être aimé. C’est finalement dans ce rapport à l’espace que la puissance de la passion devient palpable, le cinéaste préférant s’assigner à domicile qu’affronter le monde extérieur, donnant ainsi l’exclusivité à son histoire d’amour. Cette dépendance à l’autre fait alors poindre une forme de toxicité des rapports amoureux qui s’accentue lorsque les tensions commencent à apparaître au sein du couple, tensions exacerbées aussi bien par la présence de la caméra que part le cadre étouffant que constitue cette petite chambre bas de plafond. Le rapport de chacun des membres du couple au dehors dessine également une piste intéressante, entre celui qui reste confiné à l’intérieur de la chambre (le cinéaste) et celui qui s’en absente (l’amant qui se rend à ses cours de théâtre). Un renversement bienvenu des rapports de force s’opère alors, celui censé détenir les codes se retrouvant en situation de dépendance par rapport au nouveau venu qui s’en va explorer le monde extérieur.
Au fond, c’est bien dans sa périphérie que le récit de « Printemps » trouve sa matière la plus riche, dans l’espace qu’il ménage pour son hors-champ, à la fois physique et politique. Les origines africaines de l’amant sont évoquées à plusieurs reprises, sous un versant folklorique d’abord puis sous l’angle plus problématique d’un attachement à la famille et aux traditions qui finiront par faire obstacle à la poursuite de son histoire d’amour avec le cinéaste. L’insistance avec laquelle ce dernier évoque dans leurs conversations la question du mariage gay émeut parce qu’elle fait alors office de mise à l’épreuve des sentiments tout en convoquant l’air de rien le hors-champ politique et social des événements récents de l’histoire de France. Cet élément singulier donnant plus de corps au récit ne s’en trouve que plus dévoyé lorsque le cinéaste décide, au moyen d’une ultime séquence clippée et à grand renfort de musique et d’une voix-off au lyrisme pompier, de raccorder directement leur histoire d’amour impossible aux événements politiques contemporains (des images des manifestations en faveur du Mariage pour Tous sont insérées dans le montage). Le film donne ainsi l’impression de se transformer en tract militant à la dernière minute, réduisant paradoxalement la portée de son récit en en faisant l’étendard d’une cause particulière. Ironie du sort voulant que, après s’être constitué prisonnier à l’intérieur de son film, le cinéaste l’enferme à son tour dans le carcan du film queer militant quand il aurait pu se contenter de n’être qu’un film d’amour.
L’Ordre
« Archipels, granites dénudés » se présente comme un objet très plaisant, aussi bien de par l’hétérogénéité des corps qu’il accueille dans ses cadres (lieux, objets, humains, animaux…) que dans la texture de l’image qui harmonise l’ensemble (un 16 mm très doux). Dès l’ouverture du film, la réalisatrice Daphné Hérétakis s’emploie à mélanger différents régimes d’images en composant un montage frénétique à partir d’extraits de vieux films de science-fiction et de péplums. Des images de la destruction d’un palais, d’humains quittant la terre pour rejoindre un vaisseau spatial ou encore d’éboulements de roches sont agencées pour rendre compte du chaos, de l’avènement d’une catastrophe. Ces images de fiction semblent prendre en charge la représentation d’un désastre tout en la sublimant par les moyens du montage et de la bande son, plaçant d’emblée le geste de la cinéaste du côté de l’essai poétique. En effet, la valeur des séquences documentaires qui constituent la suite du métrage repose moins sur leur qualité de documents que sur leur force évocatrice. C’est leur organisation les unes par rapport aux autres qui produira du sens et, par extension, un constat : celui de la fuite en avant d’une jeunesse qui trouve les racines de son désenchantement dans la crise qu’a récemment traversé la société grecque.
Le film de Daphné Hérétakis restitue l’image de la société à qui elle tend un miroir, imposant de ce fait une fragmentation et donc une multiplication des signes de la crise qu’elle traverse : il s’agit de ne pas donner un visage à cette jeunesse désorientée, mais plusieurs ; ne pas faire entendre une seule voix, mais un chœur tout entier. Ainsi, à des séquences de micro-trottoirs où s’expriment face à la caméra de jeunes Grecs sur leur quotidien et leurs aspirations, répondent des stases plus contemplatives où une voix-off déroule le rapport journalier d’une blogueuse détaillant les angoisses qui l’assaillent au quotidien face à l’absence de perspectives que la société lui présente. Sur ces paroles, une succession de courtes séquences défilent, où la caméra prend aussi bien le temps de circuler à travers les rues d’Athènes que de s’arrêter sur les visages de jeunes gens attablés à une terrasse de café, renvoyant l’image d’une jeunesse occidentale en apparence sereine mais que le désarroi exprimé par la voix-off vient contredire. Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres de la dialectique sur laquelle est construite chaque moment du film, sur ce souci de prendre acte d’une crise étendue à toutes les strates d’une société et que l’écriture filmique se doit d’intégrer et de contredire dans un même mouvement.
C’est par la mise en relief de la sensualité des corps que Daphné Hérétakis répond au terrible constat énoncé par les différentes voix tout au long du film. Le corps social dont le film restitue l’image n’est pas seulement constitué d’humains : les lieux, les objets et les animaux ont également leur place à part entière à l’intérieur du récit. La beauté de « Archipels, granites dénudés » réside dans cette ambition de donner à sentir littéralement la matière du monde, les textures dont sont faites les différentes peaux qui le compose. Il peut s’agir des poils et des moustaches d’un chat, de la pierre des murs de la ville qui se désagrège ou encore d’une guirlande de jeans séchant sur une corde à linge. Autant d’éléments disparates que le montage fait coexister au sein d’un même film, créant des raccords par moment bouleversants comme lorsque les plans de visages de jeunes Grecs sont montés en alternance avec ceux parcourant les corps de statues antiques rongées par l’érosion. En enregistrant la transformation d’une société au travers de la mutation des corps qui la constitue, Daphné Hérétakis accomplit un acte poétique puissant et replace le politique à son plus fort endroit de résonance : celui de l’écriture filmique.
Les rois du patin
Si le court-métrage « Kiss me not » d’Inès Loizillon s’éloigne d’une démarche documentaire pour embrasser les codes de la fiction, il rejoint néanmoins les films précédemment évoqués sur cette interrogation : comment représenter ce glissement de l’intime vers le collectif, et quel peut en être le lieu ? La réalisatrice choisit ici une patinoire comme espace pouvant libérer les gestes et les paroles de ses protagonistes, donnant la possibilité à ces derniers de l’agiter à leur tour par leur présence. Le film s’ouvre sur une séquence d’entraînement où nous est présenté un premier personnage : Blanche, une adolescente longiligne et gracieuse filant sur la glace sous les conseils avisés de sa coach. Elle n’est à cet instant qu’un corps glissant au milieu d’autres corps, à peine distingué par sa combinaison noire et quelques plans rapprochés que le montage met en perspective avec des plans plus larges révélant l’immensité du décor. Sa position de personnage principal est encore incertaine et la construction du récit à venir interrogera perpétuellement ce statut, révélant un enjeu commun à tous récit d’apprentissage : le rapport de l’individu au groupe et la nécessité de s’en extraire pour avancer.
Une séquence post-générique nous plonge au milieu d’une bande d’adolescents, tous fébriles à l’idée de se rendre à la patinoire pour s’amuser. Le filmage en caméra à l’épaule saisit l’effervescence du groupe en mouvement, dans un geste naturaliste auquel le format carré de l’image et le noir et blanc apporte un contraste bienvenu, une esthétisation affirmant d’emblée l’ambition de la cinéaste de créer des greffes impertinentes. Alors que le groupe chemine vers la patinoire, deux figures s’en détachent : Blanche, la jeune fille découverte dans la séquence d’introduction, et Werner, jeune skateur aux traits fins et doux. L’esquisse d’une attirance mutuelle se dessine alors, lançant un fil narratif que le récit déroulera par intermittence sans le dénouer complètement. Une fois rendu à la patinoire, Blanche se détache radicalement du groupe et décide de se cloîtrer dans les vestiaires. Elle occupe alors son temps à résoudre des mots croisés ou à se vernir nonchalamment les ongles de pieds sans tenir compte des remontrances de sa camarade, la frondeuse Dakota. C’est la manière de Blanche d’investir son espace, en ramenant sa chambre d’ado à l’intérieur des vestiaires pour retrouver une intimité et préserver ainsi un instant à elle, transformant un cadre trivial et impersonnel en écrin pour son amour débutant.
À la faveur d’un montage parallèle, la réalisatrice s’emploie à montrer les autres rituels auxquels se livrent le groupe d’amis sur la glace. Il s’agit pour eux de faire corps, de passer un bon moment ensemble même si des rapports de pouvoir et de jalousie finissent par s’installer et dicter les comportements de chacun. Il en va du personnage de Dakota, qui semble profiter de son statut momentané de seule fille du groupe pour s’imposer face aux garçons, quitte à détourner au passage l’attention du beau Werner en lui donnant une leçon de drague. Les ados de la bande n’en finissent pas de glisser sur leurs émotions, allant et venant les uns vers les autres sans jamais se rencontrer. Werner devra d’ailleurs attendre le départ du groupe pour pouvoir regarder enfin, et de loin, le ballet de Blanche sur la glace. La belle idée développée tout au long du film s’incarne alors pleinement : les premiers élans amoureux sont des instants figés, prisonniers des neiges éternelles que symbolisent ces plans de montagnes intervenant comme des ponctuations au sein du récit. L’intuition d’Inès Loizillon est bonne, car en donnant une paire de moufles et de patins à son teen-movie, elle en propose une variation surprenante, que le jury de Silhouette a su distingué d’un Prix Spécial amplement mérité.
Le Comité Animation de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma a sélectionné hier, lundi 5 octobre 2015, les 12 films de court métrage qui vont concourir au César 2016 du Meilleur Film d’Animation (Court Métrage). De ces 12 films, se dégageront les 4 finalistes pour les Césars 2016.
Le premier tour de vote, qui se déroulera du 4 au 26 janvier 2016, désignera les films nommés pour le César du Meilleur Film d’Animation (Court Métrage). Ils seront révélés lors de la conférence de presse d’annonce des nominations qui aura lieu le mercredi 27 janvier 2016.
Films en lice
– Chulyen, histoire de corbeau, réalisé par Cerise Lopez et Agnès Patron
– Carapace, réalisé par Flora Molinié
– La chair de ma chère, réalisé par Calvin Antoine Blandin
– Chez moi, réalisé par Phuong Mai Nguyen
– Chulyen, histoire de corbeau, réalisé par Cerise Lopez & Agnès Patron
– Dans les eaux profondes, réalisé par Sarah Van den Boom
– Leftovert, réalisé par Tibor Banoczki et Sarolta Szabo
– La Nuit américaine d’Angélique, réalisé par Joris Clerté et Pierre-Emmanuel Lyet
– Le Repas dominical, réalisé par Céline Devaux
– Smart Monkey, réalisé par Winshluss et Nicolas Pawlowski
– Sous tes doigts, réalisé par Marie-Christine Courtès
– Tigres à la queue leu leu, réalisé par Benoît Chieux
La 17e édition du Festival des Cinémas Différents et Expérimentaux de Paris présente à partir du mercredi 7 octobre (et jusqu’au dimanche 18 octobre) huit programmes compétitifs ainsi qu’une série de séances focus sur le thème intitulé « Fiction/Déviation », dans différentes salles (Centre Pompidou, Le Grand Action, Maison de la culture du Japon, Le Luminor Hôtel de Ville, Le Studio des Ursulines, Les voûtes, Le Shakirail).
À cette formule, le festival adjoint une compétition consacrée aux cinéastes de moins de quinze ans, destinée à ouvrir un espace d’expression alternatif aux jeunes créateurs et valoriser les imaginations qui sortent des cadres.
Le public retrouvera dans la compétition internationale une production cinématographique couvrant une large palette d’esthétiques tout en devinant à travers les films quelques tendances caractérisant le cinéma expérimental contemporain. La thématique du festival ambitionne cette année de bousculer l’habitude consistant à opposer cinéma de fiction et cinéma expérimental.
Dans son nouveau court métrage présenté au festival d’Annecy et de Toronto cette année, Theodore Ushev met en scène un kaléidoscope d’images animées sur la chanson Opa Hey de son compatriote bulgare Kottarashky. Un poème audiovisuel au rythme palpitant qui respire l’âme des Balkans.
Des formes organiques, tantôt abstraites tantôt anthropomorphiques, s’animent sur une musique syncopée composée entre autres de captations de terrain de diverses régions de la Bulgarie. Des sombreros et des robes dansent dans le vent, entraînant ainsi le spectateur dans leur chorégraphie allègre et ensoleillée. Le résultat est une vidéo hypnotique et accrocheuse bien que très courte, qui nous fixe dans une sorte de transe et nous laisse en vouloir plus.
L’animateur multi-primé avait déjà eu l’occasion de collaborer avec le musicien considéré comme un maestro du psychédélisme balkan. Le clip qu’il a réalisé pour la chanson « Demoni » en 2013 avait déjà figuré en compétition officielle à Annecy, en plus de gagner de nombreuses récompenses dans le monde. Réalisée à partir de dessins sur des vinyles tournants, cette petite animation s’inspirait de la même esthétique de formes dansantes qu’on retrouve dans « Sonámbulo ».
Contrairement à la narration chargée des « Journaux de Lipsett » ou au discours hautement énigmatique des « Rossignol en décembre », nous assistons ici à une autre facette d’Ushev : celle du formalisme pur, évocateur des grands maîtres du cinéma expérimental tel Len Lye. Cependant, loin d’être gratuite, l’animation abonde de références dont la plus évidente est la citation de la Romance Sonámbulo de Federico García Lorca, qui ouvre le film et lui prête son titre :
« Dessus la lune gitane,
toutes les choses la regardent
mais elle ne peut pas les voir ».
Comme dans le poème de García Lorca, un certain surréalisme s’infiltre dans l’image, comme si tout était permis sous cette lune ignorante et dans cet état de semi-conscience. Le dessin par ailleurs est clairement inspiré de l’univers de Joan Miro, rappelant la fraîcheur et la simplicité enfantine du coup de pinceau de ce dernier.
Autre référence aussi frappante qu’improbable : l’usage de la police de caractères fétiche de Woody Allen, à savoir le Windsor. S’agirait-il d’un clin d’œil au roi de la comédie ou alors le jeune réalisateur autodidacte affirme-t-il ainsi sa volonté de se démarquer du courant dominant et de célébrer sa spontanéité et son originalité à travers son art ? La réponse est sans doute soufflée dans le vent qui caresse la robe de la bien aimée, titillant l’imaginaire avec ses couleurs et son sentiment de liberté et de folie.
Last minute ! La séance Format Court de ce mois-ci, prévue le jeudi 8 octobre est exceptionnellement annulée, Format Court étant invité au festival Ile Courts ayant lieu la semaine prochaine… à l’île Maurice !
La prochaine séance aura lieu le jeudi 12 novembre prochain, toujours à 20h30, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème), avec des films, des Prix Format Court, des équipes et des Carambar !
La religion pour fond et l’adolescence 2.0 pour forme
Rim, 18 ans, et Yasmina, 17 ans se gaussent, s’aiment et se détestent dans ce film tendre et vierge de toute superficialité. Ce moyen-métrage, Prix du public au festival Côté Court, actuellement visible dans quelques salles, nous dévoile – à juste titre – le cul et le sexe sous les différents aspects et questions dont se posent deux jeunes adolescentes musulmanes. Question d’actualité pour questions taboues, ce film met en perspective une nouvelle génération et ses complexes sociétaux, à travers le prisme de la religion, le choc des cultures et de ses contraintes potentielles (virginité avant le mariage).
On pourrait y voir un film d’époque corrélant avec l’actualité, néanmoins, en suivant le fil de l’histoire on se rend compte que le réalisateur représente cette jeunesse dans son essence pure. Des filles qui se posent les mêmes questions que n’importe quelle autre fille de France. Malgré tout, l’actualité est le thème sociologique. Il a pour fond une religion qui les soumets à de nombreuses questions : Qu’est-ce qui est Haram (interdit / illicite en arabe) ? Le godemiché ? Le tampon ? La méfiance des garçons : « Frères mus (cf : musulman) frères j’m’amuse ».
Cités, bétons, bâtiments, et jeunes qui discutent en bas des immeubles. Le décor est posé, dès les premières secondes, le contexte social est bien connu. Le plan est fixe, l’atmosphère y est froide. Nous sommes en hiver. Les deux jeunes filles donnent le ton. La mise en scène y est dénotée de toute chaleur et la joute verbale de mots crus et trash amène la petite touche de radiateur qui nous manque.
La froideur de la rue fait place à l’ambiance chaleureuse de la chambre, l’internet 2.0 prend le relais et c’est l’univers des réseaux de rencontre du plus trash au plus sage et sa magie du lien social qui viens porter une tentation liés à toutes ces interrogations. L’une va défendre les principes moraux pour éviter que l’autre ne passe pour une « pute » mais c’est dans un comique de situation – qui restera le passage phare de ce film – qu’elle associe les mots aux gestes pour décrire, avec précision, comment faire une fellation. Tout est dans le paradoxe de ces deux sœurs. Bien ou pas bien, la raison ou le cœur, la virginité ou l’amour. Haram ou pas Haram.
Jusqu’au bout on se demande si le désir va être plus fort que les principes moraux et religieux, si le ressort final va ajouter une touche de tentation ou une touche de politiquement correct peut-être un peu trop présent sur le sujet ces derniers temps.
Dans cette mise en scène, peu importe au final, ces longs plans fixes qui ne bougent que lorsque les deux sœurs montent le ton. Le réalisateur associe à la « dynamique » du film des enchaînements qui auraient pu parfois paraître monotones. Un cadrage frontal, un décor simpliste relatif à ces banlieues que la « majorité traditionnelle » ne voudrait pas voir, et c’est toute la réalisation d’Antoine Desrosières qui met en valeur une sociologie des dialogues.
Les deux jeunes actrices sont novices dans le jeu du cinéma et démontrent une innocence qui « pue le vécu », des situations farfelues qui nous amusent. Dirigées parfois, lâchées beaucoup, on remarque une improvisation qui nous amène une grande bouffée d’air frais à travers cette pollution morose des villes et des banlieues. La bande sonore n’est pas en reste puisqu’elle représente la jeunesse rêvée des années yé-yé. Ces jeunes qui, déjà, souhaitaient vivre leur sexualité plus librement et s’exclamaient « Jouir sans entraves » ou « Prenez vos désirs pour des réalités ». Parfois la ferveur de la jeunesse est là où beaucoup trop de gens ne l’attendent pas.
Cette petite aiguille dans la botte de foin du non-dit sur la communauté musulmane fais plus que du bien et l’on ne peut qu’encourager ces histoires « banales » du quotidien qui font rire, sourire, s’esclaffer devant la générosité des actrices et devant la logique subtile est nécessaire de parler de ces situations trop peu vues au cinéma.
Synopsis : On ne badine pas avec l’amour. Rim, dix-huit ans, rappelle à sa soeur Yasmina, dix-sept ans, qu’elle ne doit pas parler au garçon qui lui plaît. Mais à force de parler de tout ce qui est interdit, cela donne des envies. De rappels en conseils, Haramiste raconte l’histoire de ces deux soeurs au dress code voile – doudoune – basket, qui s’adorent, s’affrontent, se mentent, se marrent, se font peur, découvrent le frisson de la transgression et du désir amoureux.
Genre : Fiction
Durée : 40′
Pays : France
Année : 2014
Réalisation : Antoine Desrosières
Scénario : Antoine Desrosières, Anne-Sophie Nanki, Souad Arsane, Inas Chanti
Image : George Lechaptois
Son : Jules Pottier
Montage : Simon Thoral
Interprétation : Inas Chanti, Souad Arsane, Jean-Marie Villeneuve, Samira Kahlaoui
Production : Les Films de l’autre cougar, Hybrid Films
Fort d’une édition anniversaire mémorable l’année dernière, l’Étrange Festival a continué sur sa lancée avec une 21ème édition (3-13 septembre, Forum des Images) sous le signe du passage très remarqué des Residents, ces illustres inconnus adeptes de versatilité et d’explorations artistiques totales.
Carte blanches de réalisateurs (Guy Maddin, Benoît Delépine, Ben Wheatley), nuit « apocalyptique », programmations spéciales de courts métrages (« 20 ans d’Étranges Courts »), séance Retour de Flamme (le magnifique « L’Inhumaine » de Marcel L’Herbier), sans oublier les diverses sélections de Pépites de l’Étrange, les avant-premières attendues et la programmation documentaire particulièrement soignée : l’Étrange Festival a de nouveau fait le plein cette année en films différents attisant la curiosité et flattant la rétine.
Pour la cinquième année consécutive (un anniversaire en soi !), l’entité insolite formée par les deux Julien a couvert la manifestation, au nom de Format Court, et vous ramène deux interviews de Guy Maddin et Alain Burosse, ainsi qu’un compte-rendu global sur le court métrage qui fêtait ses vingt années de programmation en fanfare, avec pas moins de six programmes de courts et deux séances spéciales 20 ans (à venir).
Défricheur de grand talent qui fit de la télévision un terrain de jeu pour tous les allumés de formes courtes sortant de l’ordinaire, Alain Burosse est le créateur d’émissions cultes (Haute Tension, L’œil du Cyclone, Avance sur Images) qui ont façonné l’imaginaire collectif de plusieurs générations, mais également le « Mr court métrage » de Canal + pendant deux décennies, fonction qu’il occupe depuis à l’Étrange Festival. Rencontre avec un homme passionné d’images, passeur invétéré et cinéphile insatiable.
Quel est votre parcours et comment en êtes-vous venu à créer les Programmes Courts de Canal + ?
Je me suis retrouvé un peu « bombardé » responsable des Programmes Courts, c’était un nouveau titre à Canal + en 1984, et notre mission était de remplir des cases qui s’appelaient les « Surprises », avec des durées variées, diffusées entre deux films ou alors entre du sport et des films. Un peu comme, je déteste cette appellation et ce qu’elle sous-entend, des programmes de complément, faisant office de bouche-trou.
Je n’y connaissais franchement rien quand je suis arrivé. Il se trouve que je faisais avant une émission sur la 2, dans Les Enfants du Rock, quelque chose de plutôt néo-punk qui s’appelait Haute Tension et qui diffusait essentiellement de l’art vidéo. Mais tout de suite, j’ai plongé dans le bain en achetant des courts métrages un petit peu partout, et j’ai eu un déclic, en février 1985, la première fois que je suis allé au Festival de Clermont-Ferrand, beaucoup plus petit et modeste à l’époque. C’est vraiment là où j’ai découvert le court métrage.
Après ce festival, je suis allé au Festival d’Annecy, ainsi qu’au Festival de vidéo de Montbelliard. Au bout d’un an, j’avais une idée assez précise de tout ce qui pouvait se faire en court métrage. Nous avions les moyens pour acheter des films, et puis, petit à petit, Canal + a commencé à gagner de l’argent, donc nous avons eu aussi les moyens de produire et de pré-acheter. C’était un peu l’âge d’or de Canal + par rapport au court métrage, nous sommes devenus partenaires de Clermont-Ferrand et d’Annecy, et nous avons créé des émissions spécifiques de courts métrages. Nous pré-achetions un nombre considérable de courts métrages de tous genres, il pouvait y avoir de la fiction, de l’expérimental, de l’animation. Cela pouvait être des petits films de cinq minutes comme d’autres plus longs, par exemple « Carne » de Gaspar Noé, qui débordait considérablement de notre case, censée durer une vingtaine de minutes au départ. Mais de temps à autre, nous débordions quand le film nous semblait important.
Je suis parti en 2001, et Pascale Faure, qui travaillait déjà avec moi, a pris le relais. Depuis, elle s’occupe des courts métrages à travers Mickrociné notamment, ainsi que les pré-achats de courts métrages et les partenariats comme Clermont.
Pouvez-nous parler de la création de L’œil du Cyclone ?
Avant L’œil du Cyclone, il y a eu une émission qui a duré au moins deux ans, mais qui est beaucoup moins connue et qui s’appelle Avance sur Images. C’était un magazine centré sur l’art vidéo. Au bout de deux ans, nous avons pris conscience que nous manquions de matière. Nous nous sommes dits que nous allions créer un nouveau projet, une émission qui ne ressemblerait à rien de connu et qui montrerait un foisonnement d’images provenant du monde entier, mais aussi en fabriquant nos propres images, ce fut L’œil du Cyclone.
Nous voulions qu’il n’y ait aucun présentateur, ou du moins qu’il y ait une présentation, mais qui soit différente à chaque fois. Nous avions seulement la contrainte de la durée, qui était de 26 minutes, et l’horaire de programmation, en règle générale, le samedi en début d’après-midi. Nous avions cette chance de posséder les moyens financiers de faire ce que l’on voulait ainsi qu’une grande liberté artistique. Évidemment, il y avait des choses un peu pointues et tout ce qui relevait de la pornographie ou de l’humour trop potache, nous ne devions pas y toucher. Nous nous sommes quand même rattrapés dans La Nuit du Cyclone en faisant passer les images qu’on adorait et qui nous étaient interdites de diffusion.
Puis, l’émission s’est terminée, mais sans que l’on nous demande d’arrêter. Nous nous sommes plutôt sabordés nous-mêmes en nous disant que ce n’était pas plus mal de s’arrêter sur une bonne note. Je me suis rendu compte, au bout de quelques années, que le système que l’on avait mis en place pouvait être interminable, sans fin, donc nous avons préféré arrêter avant de nous lasser. Ce qui m’intéressait, c’était avant tout de créer une émission culte, un ovni de la télévision.
Comment avec Canal +, ainsi que personnellement plus tard, en êtes-vous venu à collaborer avec l’Étrange Festival ?
Cela remonte à l’époque où l’Étrange Festival se déroulait au Passage du Nord-Ouest, c’est-à-dire au « millénaire dernier ». Au sein des programmes courts, nous avons tout de suite vu que Frédéric Temps assurait une programmation plus originale par rapport à ce qui faisait alors. Donc, nous avons naturellement commencé à le soutenir et, assez rapidement, à devenir partenaire de l’Étrange, notamment en remettant un Prix Canal du meilleur court métrage.
Je ne participais pas encore à la programmation, j’ai commencé à m’y investir une fois parti de Canal +. À l’époque, j’étais président d’une autre manifestation, le Festival du Film Gay et Lesbien de Paris, et au moment de mon départ de ce festival, Frédéric Temps m’a proposé d’intégrer l’Étrange, j’ai dit oui assez facilement.
La compétition de courts métrages existe depuis de nombreuses années, mais au départ, il n’y avait pas autant de séances. Il y en a eu quatre pendant longtemps, puis l’année dernière, nous sommes passés à cinq, et maintenant six pour marquer le coup. Il y a également les programmes spéciaux « 20 ans d’Étranges courts » préparés par Canal + qui montrent un panel de films importants qui ont marqué toutes ces années, avec des auteurs que l’on a suivis au fil des ans et qui sont devenus des réalisateurs confirmés, comme Bill Plympton (« Santa : The Fascist Year »), Guy Maddin (« Sissy Boy Slap Party »), Bill Morrison (« Light Is Calling »), Patar et Aubier (« Les Baltus au Cirque »), David Lodge (« La Comtesse de Castiglione »), etc.
Comment définiriez-vous la ligne directrice de l’Étrange Festival ?
Si l’on entend par là la ligne artistique ou esthétique, les films doivent posséder quelque chose relevant de « l’étrange », mais la définition étant plutôt large, cela permet de faire entrer dans la compétition de nombreux courts différents allant de l’expérimental pur et dur jusqu’à de la comédie plus classique, avec juste un petit côté bizarre.
Ce que nous avons essayé de faire en plus cette année, c’est de thématiser les différentes séances. Nous avions eu des retours de spectateurs qui se plaignaient que ce soit un peu bric-à-brac au niveau de l’agencement de la programmation, que l’on passait d’un genre à l’autre, ce qui personnellement ne me gêne pas vraiment et fait la richesse des propositions. Pour la première fois, nous avons regroupé les films sous des thèmes particuliers. Mais, j’ai l’impression qu’au final, malgré tout, les spectateurs viennent surtout voir les courts de l’Étrange parce qu’ils savent qu’ils vont voir des choses différentes qu’ils ne verront pas ailleurs.
Avez-vous eu envie de passer à la réalisation pendant toutes ces années de défrichage et de programmation ? Et si oui, pouvez-vous nous dire quelques mots sur vos films ?
J’ai surtout réalisé des films documentaires, mais jamais de fiction, c’est quelque chose qui me fait peur. J’aurais du mal à travailler avec des comédiens, par exemple, je ne saurais pas comment les gérer. Je me sens beaucoup plus à l’aise dans la forme documentaire ou expérimentale.
En documentaire, j’ai fait deux épisodes de L’œil du Cyclone, un qui portait sur les personnes hermaphrodites, et qui s’appelle « L’hypothèse Hermaphrodite », l’autre, « Glozel », en rapport avec un mystère archéologique, sujet qui m’intéresse par dessus tout, puisque j’ai fait des études d’archéologie à la base. Je me suis retrouvé un peu par hasard dans le monde merveilleux des médias, mais ce que je voulais faire, c’était égyptologue.
J’ai également réalisé un film pour Arte, un voyage dans une oasis égyptienne, « Siwa », endroit très particulier, à trente kilomètres de la Lybie, ainsi qu’un autre film, co-réalisé avec une amie, sur la deuxième île de Cuba qui est moins connue et qui s’appelle « l’Île de la jeunesse ». Je travaille actuellement sur un nouveau projet, expérimental, mais je ne peux pas en dire plus, car c’est tellement à l’état d’embryon que j’ai peur de faire une fausse couche…
Je n’ai cependant jamais officié dans la fiction, c’est quelque chose qui me fait peur. Les comédiens, par exemple, je ne saurais pas comment les gérer. Je me sens beaucoup plus à l’aise dans le documentaire que dans une forme fictionnelle. Je travaille actuellement sur un nouveau projet, expérimental, mais je ne peux pas en dire plus, car c’est tellement à l’état d’embryon que j’ai peur de faire une fausse couche…
La prochaine édition du festival Henri Langlois (27 novembre-4 décembre) rebaptisé il y a 1 an Poitiers Film Festival se prépare. Sur 1412 films reçus d’un peu partout, le comité de sélection en a retenu 47, issus de 34 écoles. Voici la liste des films en compétition. Bonne info : deux réalisateurs ont été lauréats de nos Prix Format Court, Simon Gillard et Guido Hendrikx !
Le Park, Randa Maroufi, fiction, Le Fresnoy, France
My Milk Cup Cow, Yantong Zhu, animation, Tokyo University of the Arts, Japon
Ob sich die Sehnsucht vererbt (Si la nostalgie est héréditaire), Gitte Hellwig, documentaire-animation, Filmuniversität Babelsberg KONRAD WOLF, Allemagne
Edmond, Nina Gantz, animation, NFTS, Royaume-Uni
Stillstand, Bela Lukac, fiction, Filmakademie Wien, Autriche
Yaar, Simon Gillard, documentaire, INSAS, Belgique
Estela, Joacenith Vargas, fiction, EICTV, Cuba
Fulfilament, Rhiannon Evans, animation, NFTS, Royaume-Uni
Matka Ziemia, Piotr Zlotorowicz, fiction, PWSFTviT, Pologne
Goodnight Birdy, Zara Zerny, fiction, Super 16, Danemark
Volando Voy, Isabel Lamberti, documentaire, Netherlands Film Academy, Pays-Bas
Deux amis, Natalia Chernysheva, animation, La Poudrière, France
Le Vol des cigognes, Iris Kaltenbäck, fiction, La fémis, France
Knife in the Wife, Vita Drygas, documentaire, Krzysztof Kieslowski Faculty of Radio and Television at the University of Silesia, Pologne
Ten Buildings Away, Miki Polonski, fiction, Minshar for Art, Israël
Brume, cailloux et métaphysique, Lisa Matuszak, animation, EMCA, France
Porn Punk Poetry, Maurice Hübner, fiction, Filmakademie Baden-Württemberg, Allemagne
Dinosaurios, Amanda Gomez, fiction-documentaire, Facultat de Comunicació Blanquerna, Espagne
Bloody Sour Grapes, Indeed, Deveroe Aurel Langston, animation, HfG Offenbach, Allemagne
Approaching the Puddle, Sebastian Gimmel, fiction, KHM – Academy Of Media Arts Cologne, Allemagne
Elle pis son char, Loïc Darses, documentaire, UQAM, Canada
Offside, Jimmy Dean, fiction, University of Westminster, Royaume-Uni
Persefone, Grazia Tricarico, fiction, Centro Sperimentale di Cinematografia, Italie
Wellington Jr., Céline Paysant, animation, La fémis, France
La nube, Marcel Beltrán, fiction, EICTV, Cuba
That Day of the Month, Jirassaya Wongsutin, fiction, Chulalongkorn University, Thaïlande,
Herman the German, Michael Binz, Fiction, KHM – Academy Of Media Arts Cologne, Allemagne Among Us, Guido Hendrikx, documentaire, Netherlands Film Academy, Pays-Bas
La Légende du Crabe Phare, Gaetan Borde, Benjamin Lebourgeois, Claire Vandermeersch, Alexandre Veaux, Mengjing Yang, animation, Rubika, France
Komm ich fackel deine Eigentumswohnung ab! (Let’s Burn Something on My Way Out!), Dennis Stormer, fiction-expérimental, Filmakademie Baden-Württemberg, Allemagne
Esel, Rafael Haider, fiction, Filmakademie Wien, Autriche
MANoMAN, Simon Cartwright, animation, NFTS, Royaume-Uni
Foal, Vanessa Gazy, fiction, AFTRS, Australie
The Guardian, Pan Yiran, fiction, Beijing Film Academy, Chine
In God We Trash, Thijs De Block, fiction, RITS School of Arts, Belgique
The Satanic Thicket – 1, Willy Hans, fiction, HfbK Hamburg, Allemagne
Automne, Kun Yu, animation, La Poudrière, France, 4 min
Alles Wird Gut (Everything Will Be Okay), Patrick Vollrath, fiction, Filmakademie Wien, Autriche, 30 min
Janus, Sung Hwan Kim, fiction, KAFA, Corée du Sud, 15 min
I’m Twenty Something, Marija Kavtaradzè, fiction, LMTA, Lituanie, 20 min
Chhaya, Debanjan Nandy, animation, NFTS, Royaume-Uni, 10 min
Chaque fois qu’on se dit au revoir, Chao Liang, fiction, Le Fresnoy, France, 37 min
The Living of the Pigeons, Baha’ AbuShanab, documentaire, Dar Al-Kalima University College of Arts & Culture, Palestine, 16 min
El pasado roto, Sebastián Schjaer, Martín Morgenfeld, fiction, Universidad del Cine, Argentine, 16 min
In the Garden, Ondrej Dolejsi, animation, FAMU, République tchèque
Hotaru, William Laboury, fiction, La fémis, France
Roadtrip, Xaver Xylophon, animation, Kunsthochschule Berlin Weißensee, Allemagne
Synopsis : L’ombre autour de la ceinture / elle rêve à son balcon (…) Dessous la lune gitane / toutes les choses la regardent / mais elle ne peut pas les voir. Sonámbulo est un voyage surréaliste à travers les formes et les couleurs, inspiré du poème « Romance Somnambule » de Federico García Lorca; une poésie visuelle qui se déploie au rythme d’étranges rêves et de nuits passionnantes.
Genre : Animation
Année : 2015
Pays : Canada
Durée : 4’20 »
Scénario, réalisation et animation : Theodore Ushev
Fiction, 8′31’’, 1980, Den Danske Filmskole, Danemark
Réalisé alors que Lars von Trier était en troisième année à l’école nationale de cinéma du Danemark, Nocturne reflète déjà les obsessions narratives et stylistiques du cinéaste. Primé au premier festival de court métrage de Munich, cet opus de Trier explore au-delà de toute description réaliste les arcanes de la psyché humaine en proie à l’angoisse nocturne où l’obscurité empêche de voir le monde avec précision et netteté.
À mi-chemin entre le rêve et le cauchemar, le film jouit d’une bande son composée essentiellement de bruits qui rappelle la faune tropicale contrastant ainsi avec la froideur clinique des images en noir et blanc au milieu desquelles une ampoule rouge attire l’attention. Les références cinématographiques sont nombreuses, allant du cinéma avant-gardiste à Buñuel en passant par Hitchcock.
Au contraire de certains de ses films qu’il réalisera par la suite, Nocturne offre un final des plus lyriques, teinté d’espérance. À découvrir absolument!
Le GREC et le Musée de l’Histoire de l’Immigration lancent un troisième appel à projets « Frontières » pour une résidence avec réalisation d’un premier ou deuxième court métrage (hors films d’école ou films auto-produits).
D’une durée de 6 mois, la résidence permet à un réalisateur de préparer et de réaliser un court métrage autour des sujets des frontières, de l’exil, de la migration et de mener des activités au sein du Musée.
Les candidats ont jusqu’au 16 octobre pour envoyer leurs projets.
Avant de s’intéresser au cinéma d’animation, le Canadien Claude Cloutier a d’abord affuté ses crayons avec la bande dessinée, développant un style graphique à la fois précis et libre, défendant une vision du monde engagée mais jamais partisane sur de grands sujets de société.
En 1988, il se lance dans la réalisation avec « Le Colporteur », une étude de mœurs burlesque sélectionnée à Cannes, puis il résume l’histoire humaine à sa manière en 2000 avec « Du big bang à mardi matin ». Il montre qu’il tient sur la durée avec la série « Une minute de science, SVP » récompensée la même année au Carrousel du film de Rimouski, au Canada. Après « Isabelle au Bois dormant » (2007), court-métrage remarqué revisitant le conte de Perrault et le très âpre « La tranchée » en 2010 au sujet des poilus de la guerre de 1914-1918, il revient cette année avec « Autos Portraits » pour chanter et faire chanter son amour autant que son inquiétude pour “la chose automobile“. En juin dernier, au festival d’Annecy, il nous expliquait ce qui avait motivé ses choix dialectiques et artistiques.
Racontez-nous vos débuts.
Je voulais faire de l’animation, mais pour y parvenir, il fallait aller directement frapper à la porte de l’ONF (L’Office National du Film canadien, équivalent de notre CNC). Etant très jeune, à peine 20 ans, je me suis dit que je ferais de la bande-dessinée pour commencer. J’ai travaillé pendant une dizaine d’années à Montréal pour un magazine mensuel « d’humour et de bande dessinée » qui s’appelle « CROC », puis j’ai fait de l’illustration, du graphisme, et de la bande dessinée. A produire 2 à 4 pages par mois, j’ai accumulé une certaine quantité de dessins, ce qui m’a permis d’élaborer deux albums.
À partir de là, j’ai basculé dans le cinéma d’animation. C’est finalement l’ONF qui m’a invité à faire un film. J’ai sauté sur l’occasion car c’est ce que je voulais faire en fait !
Comment êtes-vous passé de la BD à l’animation et quels rapports entretiennent-ils selon vous ?
J’ai appris l’animation en tant que tel sur place en fait. J’explique souvent que la bande dessinée et le cinéma d’animation se ressemblent beaucoup. Pour moi, le langage cinématographique gère la BD. Ce sont les mêmes outils qui font ce langage. On retrouve autant en BD qu’en cinéma les notions du temps qui s’écoule et l’importance du cadrage, les différences entre le verbal et le non verbal. Ce qui sépare fondamentalement ces deux formes d’expression, c’est le dessin en mouvement. C’est une chose qui se pratique et qu’on apprend en la faisant.
En cinéma d’animation, les positions-clés (cf. les images servant d’étapes à un mouvement dessiné) sont complexes à élaborer. C’est ce qui demande le plus de travail, et c’est quelque chose que l’on fait aussi en BD. Les mouvements, c’est à dire les dessins entre deux positions-clés sont pour moi très faciles à faire.
C’est un intérêt accru pour le corps et l’humain qui vous a amené à l’animation ?
En règle générale, si je regarde ma filmographie, je suis assez dans l’humain. Je suis énormément intéressé par le portrait, par l’animal aussi, donc le vivant.
Ça a été le problème de mon dernier film en fait. J’ai beaucoup souffert à dessiner les voitures pour « Autos Portraits ». C’est justement un objet dur, complexe, en trois dimensions, qui est très difficile à dessiner. L’avant de la voiture a les caractéristiques d’un visage humain. Les traits sont importants et si on change le moindre aspect de la morphologie automobile, le modèle est différent. Les modèles automobiles, leurs portraits, ne tiennent parfois en réalité qu’à un petit détail, à une seule ligne.
Dans votre film, il y a des voitures masculines et des voitures féminines. Comment avez-vous attribué des genres aux voitures ?
J’ai envisagé le film comme des séances de casting. C’était un peu à l’instinct. Je feuilletais des catalogues automobiles et me demandais : « Est-ce que c’est un garçon ou une fille ? ». Je cherchais aussi des « automobiles petites filles » avec des voix très aigues. J’ai donc trouvé pour cet usage les toutes petites Fiat 500 et Austin Mini avec leurs petites bouches. À l’arrivée, j’espère que ça marche !
Et pourquoi avoir choisi des couleurs vives ?
J’avais un gros questionnement par rapport à ça. Je préfère le noir et blanc pour plusieurs raisons : je suis dessinateur, j’aime donc le trait et puis, je suis un peu daltonien… J’ai essayé de vendre l’idée du noir et blanc à ma productrice à l’ONF, Julie Roy qui, elle, voulait que le film soit en couleurs. Et elle avait raison car ces couleurs vives évocatrices des autos de cette époque-là correspondent à une idée, celles de l’optimisme de la société américaine des années 1950. Les couleurs ont donc un rôle éditorial.
Ça a été difficile pour moi de choisir les couleurs. Au début, je voulais prendre des couleurs officielles que je trouvais sur les photos. Mais en dessin, je me suis rendu compte qu’il fallait tricher un peu. Il fallait chercher l’idée des couleurs de cette époque-là plutôt que les vraies couleurs.
Dans le film, j’ai fait ressortir les couleurs avec un projecteur suiveur, comme au théâtre. Je me suis également inspiré des éclairages crus des ballets aquatiques des comédies musicales hollywoodiennes de Busby Berkeley.
Justement, pourquoi avoir fait chanter les voitures ?
Je voulais justement m’opposer au long-métrage « Cars » dès le début, dès la conception du film car je voulais faire passer un message inverse par rapport au film de Pixar. Mon message est un peu l’antithèse du message de « Cars ». Là où « Cars » était dans l’apologie de l’automobile toute puissante, mon message est plutôt : « Soyons un peu critique envers la bagnole. »
L’idée m’est venue de ma production parallèle à l’animation. J’ai toujours eu une fascination pour l’aspect anthropomorphique de l’automobile, faite par des hommes à leur image. Il y a véritablement des visages automobiles, avec une bouche, un nez… Il y a des « gueules d’autos » avec des tempéraments clairement définis. C’est la première chose qui m’intéressait. Et puis, j’avais le goût comme animateur de faire un film chanté, avec un lipsync (cf. synchronisation du mouvement des lèvres avec une chanson). C’était une conjonction intéressante de faire chanter des voitures, mais il manquait la chanson. Je l’ai cherché pendant deux ans.
Qu’est-ce qui vous a attiré dans la chanson « Que sera sera ? » reprise dans votre film ?
J’ai d’abord pensé à des extraits d’opéra, mais je voulais quelque chose de différent, une référence universelle pour chercher à illustrer ce rapport à l’avenir automobile que je cherchais à introduire. Et les paroles de la chanson « Que sera sera » me l’offraient. Il y est question d’insouciance à une époque optimiste à outrance et révolue. Derrière l’exacerbation de l’American Way Of Life, on trouvait une gloire de l’automobile rutilante et colorée dans cette chanson du remake américain de « L’homme qui en savait trop » d’Alfred Hitchcock.
Vous êtes donc passé dans votre film d’un optimisme premier pour l’automobile à un réel pessimisme ?
Même si on a des signaux d’alerte énormes, il y a peu de choses faites pour préserver l’air de la planète. On est dans cette problématique. On consomme, on a des bagnoles, on extrait du pétrole et on pollue. Au Canada en tout cas, les gens sont assez décomplexés avec la consommation automobile et la pollution ne les dérange pas. Je pense qu’il faut illustrer les conséquences de cette attitude dans le monde industrialisé actuel. Mon idée, c’était de faire un lien entre les belles voitures des années 1950, l’insouciance de cette époque et la réalité d’aujourd’hui, nettement plus morbide.
Je voulais mettre l’accent sur l’attitude des humains, de la société, par rapport à cette problématique de surconsommation. Cette chanson dit mot pour mot : « Whatever will be, will be », on se moque carrément du futur. Mais le paradoxe, c’est que le futur, ce sont nos enfants.
Considérez-vous votre film comme politique ?
Oui, un peu, social et politique avec un message que je souhaite porter. Je voulais que le message soit progressif dans le film. L’expression artistique et le message politique vont ensemble dans ce cas-là. On a l’impression que ces conséquences tragiques font partie du spectacle. C’est difficile à expliquer mais il y a une part d’improvisation dans la création de ce film-là.
Comment introduisez-vous de l’improvisation dans un film aussi préparé ?
Dès le début, dès le canevas du film en fait, j’aime bien, en travaillant, me ménager des espaces de création. Je fais tous les dessins, ce qui me prend deux ans et demi. J’ai le temps d’avoir de nouvelles idées et j’aime bien me garder l’espace pour les incorporer au film.
Je travaille donc souvent avec un canevas rigoureux et suis sûr de la présence dans le film de beaucoup de scènes à mon sens fondamentales. Des fois, je fais des ponts, j’improvise certaines étapes.
« Autos Portraits » est-il un adieu à l’automobile ?
J’aime l’automobile et j’aimerais qu’elle survive. C’est un symbole toujours positif, celui d’une forme de liberté. Je suis sûr qu’on pourrait imaginer des autos beaucoup moins polluantes et qui pourraient toujours avoir leurs places dans la société actuelle. Je crois en l’automobile mais j’ai peu confiance en l’humanité.
Vous disiez que l’ennui avec ce film, c’était l’absence d’incarnation des personnages. Allez-vous rebondir sur un autre projet plus « organique » ?
Mon prochain film « Mauvaise herbe » sera exclusivement avec des plantes. Ne me parlez pas ni d’un film avec des avions, ni avec des bateaux ! J’ai un besoin vital de dessiner à nouveau des personnages organiques.
Afin de donner plus de visibilité aux jeunes talents du court métrage francophone, le laboratoire numérique Média Solution, le partenaire de nos Prix Format Court, a lancé en mars dernier le Coup de pouce DCP. Le principe de ce concours est simple : permettre à un réalisateur ou une réalisatrice de voir son court-métrage diffusé en salle de cinéma et en festival en lui offrant le DCP de son film (encodage au format Cinéma Numérique).
Après avoir choisi de récompenser « Mourir, oui mais au son des violons tsiganes » d’Isabelle Montoya en mai, comme premier Coup de pouce, un jury de professionnels (Jean-Christophe Soulageon, Caroline Hartman, Peggy Desplats, Guillaume Rio, Isabelle Montoya, Géraldine Frery, Francoise Lefeuvre, Katia Bayer) s’est réuni hier soir pour visionner et départager les six derniers films en lice de cette deuxième édition.
Parmi les 70 films reçus, le jury a décidé de récompenser « La nuit, tous les chats sont roses » de Guillaume Renusson. Le réalisateur remporte ainsi un encodage DCP de son film, offert par Média Solution.
Film de fin d’étude de Clément Decaudin, étudiant au département son à la Fémis, « À coup de couteau denté » filme le processus de création du groupe Pneu.
Dans ce documentaire musical, sélectionné à la 63ème Berlinale, en 2013, le duo se donne à voir et à entendre. Ces artisans d’un son brutal, tanné et pointu ont accepté que la caméra les filme lors d’une résidence de création puis pendant deux concerts. C’est en prenant le parti d’un dispositif filmique sobre, une succession de plans fixes sur les musiciens, que le réalisateur plonge le spectateur dans une immersion totale. Un court moment de tension et d’énergie où la transe n’est pas loin.
Le Festival international du court-métrage de Lille s’est achevé ce weekend. Voici les différents films primés par le jury (composé uniquement de spectateurs) et le choix de Bref Magazine y attribuant le Prix de la presse. Ce vendredi 25 septembre, l’intégralité des films primés sera diffusée à 20h30 dans la chouette salle de L’hybride. Réservez-y d’ores et déjà votre coin de canapé !
Aux premiers abords, rien de très spectaculaire dans ce film, une certaine monotonie s’en dégage même. On y voit une jeune femme qui déambule dans un bureau administratif. Elle remplit des feuilles, répertorie des cartes. Des petits gestes anodins qui font le quotidien d’une employée de bureau. Et pourtant, au détour de ces regards furtifs, notre imagination se met en marche. Et c’est en cela que consiste le tour de force de László Nemes : il fait jouer notre imaginaire comme un espace en plus de l’écran pour y déployer la véritable histoire de son film.
Réalisé en 2007 par ce jeune réalisateur hongrois, alors tout juste âgé de 30 ans, « With A Little Patience » interroge avec habileté la notion de représentation. Cela tient tout d’abord à une mise en scène minutieusement orchestrée qui sert de manière maligne les intentions du réalisateur. Unité de temps et d’espace, l’action se vit en temps réel sous la forme d’un plan séquence. Filmé avec une focale longue, le décor environnant est perdu dans un flou mystérieux. L’unique point net de l’image reste cette jeune femme silencieuse, repère central de l’écran. Tout au long de ce court métrage, László Nemes cache intentionnellement ce qui pourrait nous informer sur la nature et le contexte du film, obligeant le spectateur à scruter l’image et à tendre l’oreille plus qu’à l’habitude. Chaque détail anodin devient une information capitale, poussant notre imagination à tergiverser et à supposer un contexte.
Ce n’est qu’à la toute fin du film que le titre du court métrage prend tout son sens. Avec un peu de patience, ce mystérieux flou se délie dans un plan final où la focale longue laisse place à une image nette et frontale. Le contexte se révèle alors violemment à nous : la jeune femme travaille dans un camp d’extermination nazi et son bureau longe l’entrée des chambres à gaz. La limite de ce qui est montrable joue sur la limite géographique du lieu : on reste en périphérie du camp. Comme pour montrer son incapacité à aller plus loin dans la représentation, le réalisateur s’arrête à la fenêtre du bureau laissant le spectateur libre d’imaginer le reste.
Ce plan final élargit la durée du court métrage, poussant l’histoire au-delà de sa frontière filmique. Comme un déclencheur, il amène notre curiosité de spectateur à remonter le temps du film dans le but de comprendre. Qui est cette jeune femme ? Quel est ce bijou qui lui est discrètement donné au début de la séquence ? La mise en lumière d’un petit geste caché habilement sous une masse de gestes banals s’apparente à un jeu de piste. On tente de recouper les actions entre elles pour déceler ce qui nous est indirectement montré. Avec un tel procédé narratif et visuel, László Nemes fait appel à notre imaginaire lié à la mémoire collective que nous avons de la Shoah. On pense immédiatement aux objets volés aux déportés juifs lors de leurs arrivées aux camps. Cet appel à la mémoire immédiate – celle de la séquence du cout-métrage – liée à une mémoire plus grande, qui est celle de l’Histoire, met l’accent sur la difficulté que cela peut être de retracer les évènements du passé afin de rétablir la vérité. Perdu dans le temps, ce vol d’objets a pourtant participé à faire l’Histoire de la Shoah.
« With A Little Patience » a reçu le prix du meilleur court métrage au festival de l’Hunguerian Film Week, pour « le traitement inhabituel de ce sujet délicat ». En novembre, sortira « Le fils de Saul », le premier long-métrage de de László Nemes. Il reprend le même procédé filmique que ce court, dans un contexte quasiment identique. Le film a remporté cette année le Grand prix au festival de Cannes. Il a cette fois-ci beaucoup divisé, provoquant nombreux débats sur la question de la représentation de la Shoah. Mais à tous, il a laissé ce même sentiment terrible de malaise et d’horreur. Dans « Le fils de Saul », le réalisateur a, cette fois-ci, choisi le point de vue d’un Sonderkommando, ces déportés juifs choisis par les SS pour accompagner les convois des déportés jusqu’aux chambres à gaz et par la suite extraire leurs cadavres et les brûler. Maintenant l’horreur est là, rendue floue à l’image certes, mais sous la forme de silhouettes ensanglantées, torturées. Dans les extraits disponibles avant la sortie du film, le son prend une place très importante, il devient l’élément le plus perceptible de la souffrance humaine. Très évocateur, il pousse le spectateur à supposer le pire. On en vient à regretter le personnage de la jeune employée des camps qui nous empêchait la projection totale dans l’horreur tant son regard semblait se restreindre à son petit monde bureaucratique.
Enfin, on peut s’interroger sur la part de manipulation que présage ce long métrage. Le réalisateur semble dorénavant savoir utiliser l’imaginaire du spectateur avec brio. Il nous balade vers ces recoins les plus obscurs, sans cette fois-ci poser de limites.