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Mathieu Bompoint : « Il faut que Frédérique Bredin, l’actuelle présidente du CNC, reprenne vite conscience que c’est la création de demain qui naît dans le court métrage »

Après Ron Dyens (Sacrebleu Productions), Jean-Christophe Reymond (Kazak Productions) et Emmanuel Chaumet (Ecce Films), Mathieu Bompoint (Mezzanine Films) a remporté l’an passé le prix Procirep du Meilleur Producteur au festival de Clermont-Ferrand. Grâce à ce prix, il a bénéficié de 5000€ à redistribuer dans un ou plusieurs court(s) métrage(s) et d’une carte blanche présentée ces jours-ci au festival de Clermont-Ferrand.

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À la tête de Mezzanine Films créée en 2004, il a produit en dix ans pas moins de 34 courts métrages, 4 longs métrages et 4 documentaires. A l’occasion du festival de Clermont-Ferrand, il nous a parlé de ses choix de programmation liés à sa carte blanche mais également de son métier de producteur, des joies qu’il lui procure, et de son combat au jour le jour pour continuer à collaborer avec des gens dont il aime le travail. Le tout avec un ton des plus bienveillants envers le cinéma et plus particulièrement pour le court métrage.

Peux-tu nous parler de ton parcours de producteur?

J’ai très tôt voulu être producteur, je me sentais l’âme d’un organisateur plutôt que celle d’un réalisateur ou d’un acteur. Quand j’étais petit, je me rendais dans un festival en province où je voyais de nombreux producteurs. À partir de là, je me suis dit que c’était un métier que j’avais envie d’exercer et j’ai par conséquent orienté tout mon parcours pour devenir producteur. Comme je ne connaissais personne dans le cinéma, j’ai décidé de faire une école de commerce (HEC) pensant que ça m’ouvrirait plus de portes. En en sortant, j’ai travaillé six ou sept ans avec Frédérique Dumas à Noé Productions où je me suis formé au développement, à la post-production, au suivi de production des films. J’ai terminé avec elle en produisant un documentaire, « Enquête sur le monde invisible » de Jean-Michel Roux avant de me dire que j’allais créer ma boîte. Il s’est avéré que le faire n’était pas aussi simple que prévu. J’ai donc repris la fabrication et la production exécutive de longs-métrages pour d’autres. Sylvie Pialat créait aussi sa structure (ndlr : Les Films du Worso) et avait besoin de mettre de l’ordre dans tout ce qu’elle était en train de développer. J’ai donc travaillé avec elle pendant trois-quatre ans en parallèle du développement de ma propre boîte. Et puis, les premiers courts métrages sont arrivés, les premières rencontres en festivals jusqu’à arriver à aujourd’hui avec plus de 30 courts métrages et 4 longs métrages produits.

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« Nice »

On remarque en effet que tu es un producteur à la fois de courts et de longs métrages. Comment expliques-tu ces va-et-vient entre le court et le long ?

Il y a des réalisateurs avec qui il faut continuer de travailler en faisant des courts métrages avant de passer au long et il y a des réalisateurs que je croise, avec qui j’ai envie de faire des longs, mais pour lesquels il est intéressant de tester une collaboration grâce aux courts. Le court est un moyen d’expression important et surtout, de crédibilité vis-à-vis de l’expérience aussi bien pour tout un chacun que pour le duo réalisateur/producteur. Je vois mon travail de producteur comme celui d’un accompagnateur, ça me semble donc une évidence d’arriver à travailler sur la durée avec les auteurs. Après, ça ne veut pas dire que nous allons passer toute notre vie ensemble, mais lorsque je commence une collaboration, j’espère toujours que ça va aller loin. En effet, je ne sais jamais à l’avance si ça va fonctionner ; c’est une question de temps, d’expérience et d’atomes crochus. Par exemple, avec Maud Alpi, ça s’est très bien passé depuis le début : on a fait trois courts métrages ensemble (ndlr : « Lucas sur Terre », « Nice » et « Courir »), on vient de tourner un moyen métrage, on a une avance pour un long métrage, donc c’est plutôt positif, mais ça dépend des différents parcours de chacun. Il y a d’autres gens que j’accompagne un temps et qui partent ensuite sous d’autres horizons mais c’est la vie et c’est bien comme ça aussi.

Pourrais-tu décrire ton travail de producteur ?

J’ai conscience d’accompagner plutôt des auteurs que d’être sur des propositions de cinéma de l’ordre du divertissement. Peut-être que j’en ferai un jour, mais aujourd’hui, je fais plus volontiers attention à essayer de rendre faisables les idées des auteurs avec qui je travaille. Par conséquent, c’est un réel accompagnement. C’est-à-dire que je n’interfère jamais dans leurs histoires en pensant à ce qui va plaire ou ne pas plaire. Bien évidemment, il arrive que je conseille en voyant ce qui faisable ou non, mais on essaie toujours de trouver des solutions. Arrive à un moment où on se pose ces questions parce qu’il faut rester réaliste quant aux moyens qu’on a lorsqu’on fait un court. Je suis plutôt bienveillant en essayant d’être toujours le plus ouvert et positif possible pendant cette période qu’est le développement du scénario. Ce n’est certes pas évident, mais selon moi, c’est toute la différence entre la loi de l’offre et la loi de la demande. Le cinéma d’auteur en l’occurrence est sur la loi de l’offre où l’on propose et le public décide ensuite d’y aller ou non, d’adhérer ou non à cette proposition. Pour la loi de la demande, à l ‘inverse, on essaie de comprendre ce que les gens ont envie de voir et on cherche ensuite quelque chose qui y répond. Ce sont deux approches différentes et dans le court métrage, nous bénéficions encore de cette liberté. Par exemple, en court, la comédie est un genre qui est très délaissé mais lorsqu’il y a de bonnes propositions de comédies dans le court, elles sont loin d’être formatées. C’est la preuve qu’on peut réussir à populariser du cinéma d’auteur même compulsif.

Reconnais-tu que chez Mezzanine Films, il n’y a donc pas de ligne éditoriale à proprement parlé ?

De fait, je n’ai pas un genre prédéfini mais plutôt, des goûts très variés. C’est d’ailleurs ce que j’ai indiqué dans ma note pour accompagner cette carte blanche que je pense que depuis dix ans, on doit commencer à voir se dessiner un peu qui je suis à travers tous les films que j’ai produits. Effectivement, ils sont très variés, mais ça reflète forcément mes goûts et ça dit un peu qui je suis, sans aller jusqu’à dire que je fais ma psychanalyse en produisant des films (rires) ! C’est vrai en tout cas que je n’aime pas dire que j’ai une ligne éditoriale précise. J’ai fait des films sociaux, des films d’horreur fantastique, des films expérimentaux, etc. Tant que j’ai quelque chose à partager avec le porteur de projet, j’estime que j’ai encore à apprendre en tant que producteur et dans mes relations de travail. Qui plus est, je pense que c’est réciproque.

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Peux-tu nous raconter comment s’est passé l’aventure de production de « Todo lo que no puedes dejar atràs » (Tout ce que tu ne peux pas laisser derrière toi), un film de Nicolàs Lasnibat, entièrement tourné au Chili et en langue espagnole présenté en compétition nationale cette année à Clermont-Ferrand ?

Nicolàs Lasnibat est un Chilien qui vit en France depuis dix ans. Il a fait La fémis et il a besoin de parler de choses qui se sont passées dans son pays. Par chance, le CNC est tout à fait ouvert à l’idée d’aider les courts métrages tournés à l ‘étranger. Nous avons cherché à avoir un peu de financement au Chili, mais il n’y a qu’en France où l’on a cette réelle chance d’avoir autant de financements pour les courts métrages. À un mois du tournage, le seul financement que nous avions trouvé au Chili nous a malheureusement lâché, donc on a dû faire sans. On a pris des décisions à droite, à gauche et on y est arrivé. Ceci étant, je ne suis pas allé au Chili. On avait traduit le scénario pour tout ce qui était de la recherche de financements en France et on a trouvé au Chili, des gens de confiance avec lesquels on a travaillé. Nicolàs avait également déjà un peu travaillé là-bas ce qui facilitait les choses. Disons qu’on a réussi à faire de la production par Skype avec des rendez-vous quotidiens (rires) !

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« Luca sur Terre »

Ce n’est bien sûr pas la première fois que tes films sont sélectionnés en festival mais quel effet ça fait d’être sélectionné à Clermont-Ferrand ?

Je suis à chaque fois super content. Ça avait commencé avec Maud Alpi et « Lucas sur Terre » et ça m’avait déjà fait très plaisir. Depuis, ça ne s’est jamais arrêté. Je trouve que Clermont-Ferrand a en plus cette tendance à suivre les auteurs qui font des courts, à s’intéresser à eux. Ils essaient de résister malgré la pression des lignes éditoriales d’autres festivals. Ils proposent toujours des programmes très variés avec aussi bien des films d’école, de l’animation et tous types de genres différents. Et ça permet ainsi à chaque film d’exister en tant que tel dans leurs programmes plutôt que d’être immédiatement comparé. S’ils créaient des thématiques pour la compétition, ce serait dramatique. Ce sont au contraire des gens bienveillants à l’égard du court métrage. Ils permettent l’assurance que toutes les façons de s’exprimer dans le court métrage seront représentées à Clermont.

Dans le cadre du Prix Procirep du meilleur producteur que tu as reçu l’an passé, tu bénéficiais de 5000€ à redistribuer dans un ou plusieurs court(s) métrage(s). As-tu déjà utilisé cette récompense ?

L’annonce du prix avec les 5000€ est tombée début février et nous avons tourné le film de Nicolás Lasbinat à peu près au même moment avec de l’argent en moins, la somme a donc directement été redistribuée. Du coup, cet argent ne pouvait pas mieux tomber !

Peux-tu nous expliquer tes choix de films dans le cadre de la carte blanche qui accompagne ce Prix ?

Je dois t’avouer que je me suis bien pris la tête avec cette carte blanche (rires) ! L’idée des premières cartes blanches, c’étaient de faire connaître des sociétés de production et leurs films maison, puis avec les années, l’idée n’était plus forcément de montrer leurs films mais aussi ceux qui leur plaisaient. Personnellement, j’ai eu envie de programmer des films qui m’avaient plu, des films que j’avais produits et des films de réalisateurs avec lesquels je vais travailler par la suite et dont les films m’ont marqués. Il y a donc des films très variés. Parmi les films qui m’ont particulièrement marqué, il y a « La peur, petit chasseur » de Laurent Achard, « L’amour existe » de Maurice Pialat ou « Prologue » de Bela Tarr. J’ai même pris un film de Chaplin (« A film Johnnie ») que j’avais choisi d’abord pour le sujet car le cinéma est l’objet même du film. Il s’agit d’un film de 1914, réalisé par quelqu’un d’autre dans lequel on voit déjà le personnage Chaplin qui se dessine. De plus, c’est un court-métrage sur le cinéma qui a aujourd’hui 100 ans et je me suis dit que ce serait l’occasion de le montrer. Je trouvais ça intéressant symboliquement. D’ailleurs, le festival de Clermont-Ferrand l’a repris dans sa séance d’ouverture. Après, j’ai aimé les films d’Estelle Larrivaz (« Notre Père ») et de Jean Denizot (« Mouche ») dont j’ai produit les premiers longs (ndlr : respectivement « Le paradis des bêtes » et « La belle vie »). Ce sont des films qui m’avaient marqué à mes débuts et qui m’ont conforté dans l’envie de travailler avec eux. Ensuite, puisqu’il s’agissait d’une carte blanche spécifiquement clermontoise, j’ai mis le premier film de Maud (ndlr : « Lucas sur Terre ») car c’était le début de mon histoire avec le festival donc j’avais envie de le montrer à nouveau. Après, j’ai tâché qu’il y ait un programme intégralement en 35 mm et un autre en vidéo.

Dans ce dernier programme, je voulais également composer entre des films qui m’avaient marqué et des films que j’avais produits, essentiellement ceux de l’année dernière (« Le retour » de Yohann Kouam et « Le verrou » de Laurent Laffargue) parce que ce sont des cinéastes dans lesquels je crois et dont je développe d’ailleurs leur long métrage. J’ai aussi mis un moyen métrage (« Vourdalak » de Frédérique Moreau) car c’est toujours compliqué, dans une carte blanche, de mettre des films longs, mais j’avais vraiment envie de montrer la diversité de ce que j’ai produit jusqu’à présent. Par ailleurs, c’est un moyen métrage que j’aime beaucoup, qui est extrêmement libre sur un ton un peu décalé.

Parallèlement à Mezzanine Films, tu es également vice-président au SPI (Syndicat des Producteurs Indépendants). Par conséquent, on te sent concerné par le métier de producteur et sa situation dans le milieu audiovisuel. Peux-tu nous donner ta vision de la profession ?

Lorsque je suis arrivé au SPI, j’ai remarqué que je n’étais pas le seul à galérer. C’est en effet un moyen de créer des liens, de se donner du courage, d’avancer sur nos projets en se disant qu’on n’est pas seul au monde. Au SPI, on a aussi été clairement identifié comme un syndicat qui essayait de défendre les intérêts du court métrage, de la même manière qu’il y a eu une volonté de professionnaliser ce secteur depuis une dizaine d’années en France. Les résultats commencent à se voir aujourd’hui avec les sociétés qui produisent aussi bien du court que du long et qui arrivent à produire des longs différemment. Elles dérangent sûrement encore le paysage audiovisuel français, mais c’est important de défendre un autre point-de-vue là de la production. Ces personnes défendent communément un film avant de penser qu’elles sont assises sur un tas d’or. C’est un peu comme ça que je le vois. A priori, ce qui motive l’ensemble des producteurs du SPI, c’est la création, l’accompagnement d’auteurs et de projets de manière très sincère.

Que penses-tu de la nouvelle présidente du CNC, Frédérique Bredin, lorsqu’on se souvient que son prédécesseur, Éric Garandeau, avait démontré une réelle passion pour le court métrage ?

Il ne faudrait pas, sous prétexte que son prédécesseur était fan de court, qu’elle veuille à tout prix se démarquer en laissant de côté le court. Je ne pense pas qu’elle éprouve un désamour du court métrage mais qu’il ne faut pas qu’elle l’oublie trop longtemps. C’est la première fois que la présidente du CNC ne se déplace pas depuis 7 ou 8 ans à Clermont-Ferrand. Ça se rajoute au fait que parmi les temps forts de 2013, le court métrage n’a même pas été mentionné. Il ne faut pas que ça dure trop longtemps. Il faut qu’elle reprenne vite conscience que c’est la création de demain qui naît là et que le CNC doit y prêter une attention particulière. Bien évidemment, on remarque ce que fait déjà le CNC, mais ça passe aussi par des marques d’affection de la présidente.

Le mot de la fin ?

Un mot pour remercier Format Court. Il y a beaucoup de bénévolat au sein de ce webzine comme c’est fréquemment le cas dans le court métrage en général, mais ça reste important qu’il y ait des gens qui parlent de ce qui se fait dans le court métrage.

Camille Monin

Interview réalisée le lundi 3 février 2014

Soirée Bref n°151, ce mardi 11 février 2014 : Spéciale Clermont-Ferrand

Rendez-vous mondial du court métrage, le Festival international de Clermont-Ferrand offre chaque année la trop rare opportunité de parcourir la planète côté courts. La sélection que vous propose la revue Bref, aussi éclectique que possible, n’a d’autre ambition que de faire partager quelques-unes des découvertes sélectionnées, puisées dans les compétitions internationale et labo.

Programmation

NOAH de Walter Woodman et Patrick Cederberg. Canada / 2013 / couleur / 17 mn / projection numérique. Grand Prix, Prix du Public Labo, festival de Clermont-Ferrand 2014

Matthew Kinch – Son : Aaron Yeung. Montage – Animation : Patrick Cederberg – Interprétation : Sam Kantor, Caitlin McConkey-Pirie – Production : KoalaMotion, Walter Woodman, Patrick Cederberg.

Une histoire d’amour et ses aléas à l’heure des réseaux sociaux et de l’ère numérique.

MONTAUK de Vinz Feller. Suisse / 2013 / couleur / 16 mn / projection numérique

Réalisation et scénario : Vinz Feller – Image : Martin Ahlgren et Filip Zumbrunn – Son : Andreas Litmanowitsch et Caleb Mose – Musique originale : Simon Ho – Montage : Vinz Feller et Aaron Yanes – Interprétation : Linda Geiser, Emilio Delgado, Hansrudolf Twerenbold, Ernesto Solo et Janice Acevedo – Production : Contrast Film, Ivan Madeo.

Les dernières volontés du mari d’Elisabeth étaient de se rendre à Montauk, où ils s’étaient rencontrés voilà bien des années. Elisabeth entreprend alors cet ultime voyage aux États-Unis avec les cendres de son époux.

WELKOM de Pablo Munoz Gomez. Belgique / 2013 / couleur / 18 mn / projection numérique

Réalisation : Pablo Munoz Gomez – Scénario : Pablo Munoz Gomez et Sarah Schenkel – Image : Kinan Massarani et Erika Meda – Son : Pierre Dozin et Marc Alberisio – Musique originale : Rafael Munoz Gomez – Montage : Cyril Delannoy – Interprétation : Jean Jacques Rausin, Simon André, Wim Willaert, Patricia Goemaere, Bart Cambier, Miel Van Hasselt et Daniel Vidovsky – Production : Mediadiffusion, Emmanuel Van Hoof.

Jorge aime son père. Son père aime une poule. Jorge n’aime pas la poule, il veut la mettre dans un poulailler. Avant de construire ce poulailler, Jorge doit avoir un permis de construire.

SUBCONSCIOUS PASSWORD de Chris Landreth.  Canada / 2013 / couleur / 10 mn / projection numérique

Réalisation et scénario : Chris Landreth – Son : Andy Malcolm et Pierre Yves Drapeau – Musique originale : Daniel Janke – Animation : Sean Craig – Voix : John Dilworth et Don McKellar – Production : Office National du Film du Canada, Marcy Page.

Un prénom oublié provoque une troublante incursion dans l’inconscient sous forme de jeu-questionnaire.

METUBE : AUGUST CHANTE LA HABANERA DE CARMEN de Daniel Moshel.  Autriche / 2013 / couleur / 4 mn / projection numérique

Réalisation et scénario : Daniel Moshel – Image : Martin Bauer – Son : Bernhard Drax – Musique : Philip Preuss et Georges Bizet – Montage : Christin Veith – Interprétation : August Schram, Albert Maier et Elfie Wunsch – Production : Moshel Filmproduction, Daniel Moshel.

Hommage à ces milliers d’utilisateurs de YouTube et de blogueurs vidéo à l’ambition débordante.

RIVALISER AVEC LES VOISINS de Michael Pearce. Royaume-Uni / 2013 / couleur / 28 mn / projection numérique

Réalisation : Michael Pearce – Scénario : Selina Lim – Image : Benjamin Kracun – Son : Gunnar Oskarsson – Musique originale : Stuart Earl – Montage : Immanuel Von Bennigsen et Maya Maffioli – Interprétation : Maxine Peake, Geoffrey Bell et Adeel Akhtar – Production : Incendiary Pictures, Megan Rubens.

Celia, l’épouse d’un homme politique, se retrouve confrontée à deux malfrats qui en veulent à son mari.

Infos pratiques

Mardi 11 février, séance à 20h30

MK2 Quai de Seine – 14 Quai de la Seine – 75019 Paris
M° Jaurès ou Stalingrad
Tarif : 7,90 € (cartes illimitées acceptées)

A comme A Onda, O Vento Leva

Fiche technique

Synopsis : Rodrigo est un jeune sourd, installateur de systèmes audio pour voitures dans un petit atelier en banlieue de Recife, au nord-est du Brésil. En dépit de sa surdité, il vit en lien étroit avec les sons, dont il ressent les vibrations qui battent au plus profond de son corps.

Genre : Documentaire

Durée : 28’

Pays : Brésil, Espagne

Année : 2012

Réalisation : Gabriel Mascaro

Son : Joana Claude, Gabriel Mascaro

Montage : Eduardo Serrano

Production : Gerardo Peral (Art Aids) et Rachel Ellis (Desvia)

Article associé : la critique du film

A Onda Traz, O Vento Leva de Gabriel Mascaro

Présenté en compétition internationale du festival de Clermont-Ferrand cette année, « A Ondaz Traz, O Vento Leva » de Gabriel Mascaro est un documentaire sensible sur Rodrigo, un jeune sourd, installateur de systèmes audio pour voitures.

Dans la chaleur de Recife, au nord-est du Brésil, Rodrigo passe son temps à travailler dans son atelier et à s’occuper de sa petite fille Mariana dont il a la charge. Rodrigo est sourd mais cela ne l’empêche aucunement de ressentir les sons et les vibrations qui l’entourent.

Dans ce court métrage documentaire, Gabriel Mascaro porte un regard attendrissant sur son protagoniste que l’on suit dans ses pérégrinations diurnes et nocturnes. Il nous fait ressentir ses doutes, ses craintes, tout en évitant habilement tout côté mélo grâce à la personnalité rayonnante de Rodrigo qui, même s’il est atteint du sida, continue à aller de l’avant, à se battre pour lui et pour sa fille. Le film a d’ailleurs reçu l’appui du Art Aids Foundation, une association internationale qui vise à promouvoir des projets artistiques qui traitent du combat de la maladie.

Pour « A Onda Traz, O Vento Leva », le réalisateur brésilien recourt à une mise en scène qui invite à un voyage sensoriel pour toucher au plus près de l’humain. Il joue avec l’absence et la saturation sonores, chaque plan pousse à éprouver la réalité du jeune sourd pour mieux la comprendre. L’océan qui borde la ville fait écho à la vitalité qui anime son âme et la dernière image où Rodrigo, plongé dans l’eau, tient Marianna dans ses bras tout en les levant au ciel, est un appel à la vie.

Marie Bergeret

Consultez la fiche technique du film

36e Festival de Clermont-Ferrand, le palmarès

Le Festival international du Court Métrage s’est achevé à Clermont-Ferrand ce samedi 8 février 2014. En voici le palmarès.

Compétition nationale

Grand Prix : La lampe au beurre de Yak de Hu Wei, France, Chine

Prix Spécial du Jury : Molii de Carine May, Mourad Boudaoud, Yassine Qnia, Hakim Zouhani, France

Prix du Public : Inupiluk de Sébastien Betbeder, France

Prix de la Meilleure Musique Originale (SACEM), Prix de la Meilleure Photographie (Nikon) : Scars of Cambodia de Alexandre Liebert, France

Prix Meilleure 1ère Œuvre de Fiction : Prix S.A.C.D. (Société des Auteurs Compositeurs Dramatiques) : T’étais où quand Michael Jackson est mort ? de Jean-Baptiste Pouilloux, France

Prix ADAMI d’Interprétation Meilleur Comédien : Adel Bencherif pour La Fugue de Jean-Bernard Marlin, France

Prix ADAMI d’Interprétation Meilleure Comédienne : Nina Mélo pour Vos violences de Antoine Raimbault, France

Prix du Meilleur Film d’Animation francophone SACD : Lettres de femmes de Augusto Zanovello, France

Prix Canal + : Trucs de gosse de Emilie Noblet, France

Prix de l’ACSE (Agence Nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances) : Todo se puede de Elias Belkeddar, France

Prix de la Presse Télérama : La Fugue de Jean-Bernard Marlin, France

Prix Procirep du Producteur : ENVIE DE TEMPÊTE PRODUCTIONS, Frédéric Dubreuil pour Inupiluk de Sébastien Betbeder, France

Prix Etudiant de la Jeunesse : Peine perdue de Arthur Harari, France

Mentions Spéciales du Jury

Martine Schaambacher pour son interprétation dans D’où que vienne la douleur de Khalil Cherti, France

Lætitia Dosch pour son interprétation dans Ennui ennui de Gabriel Abrantes, France

Extrasystole de Alice Douard, France

Pedro malheur de Camila Beltrán, France, Mexique

Sexy Dream de Christophe Le Masne, France

Lame de fond de Perrine Michel, France

Mentions du Jury Telerama

Peine perdue de Arthur Harari, France

Shadow de Lorenzo Recio, France

Compétition internationale

Grand Prix, Nomination « European Film Awards » : Pride de Pavel Vesnakov, Bulgarie, Allemagne

Prix Spécial du Jury : Juke-Box de Ilan Klipper, France

Prix du Public, Prix du Rire Fernand Raynaud : Meu amigo Nietzsche de Fáuston da Silva, Brésil

Prix du Meilleur Film d’Animation : Junk Head 1 de Takahide Hori, Japon

Prix des Médiathèques (CVS) : Ud, spring over, ind de Thomas Daneskov, Danemark

Prix Canal + : Sequence de Carles Torrens, Etats-Unis, Espagne

Coup de Coeur CANAL+ family : Mia de Wouter Bongaerts, Belgique, Pays-Bas

Prix Etudiant de la Jeunesse : Ojcze Masz de Kacper Lisowski, Pologne

Mentions du Jury

Les Jours d’avant de Karim Moussaoui, Algérie, France

Namo de Salah Salehi, Iran

Olga de Kaur Kokk, Estonie

Zima de Cristina Picchi, Russie

Compétition Labo

Grand Prix, Prix du Public : Noah de Patrick Cederberg , Walter Woodman, Canada

Prix Spécial du Jury : Montaña en sombra de Lois Patiño, Espagne

N comme La Nuit américaine d’Angélique

Fiche technique

Synopsis : En allant voir La Nuit américaine de François Truffaut, Angélique découvre qu’on peut inventer sa vie. Se prendre pour Nathalie Baye, obtenir l’admiration de son père, choisir un métier incompréhensible, autant de perspectives ouvertes par ce film. Il faudra quelques années à la jeune fille pour comprendre que le cinéma ne règle pas tous les problèmes bien qu’il ouvre au grand plaisir d’être enfin libre.

Genre : Animation

Durée : 7’30 »

Pays : France

Année : 2013

Réalisation : Joris Clerté, Pierre-Emmanuel Lyet

Scénario : Olivia Rosenthal

Son : Bruno Guéraçague, Martin Chapel

Interprétation : Louise Bourgoin

Production : Senso Films, Donc voilà Productions

Article associé : la critique du film

La Nuit américaine d’Angélique de Joris Clerté et Pierre-Emmanuel Lyet

Un lent fondu du gris au noir, des taches blanches, quelques murmures et accords à la guitare ouvrent « La Nuit américaine d’Angélique », sélectionné en compétition nationale à Clermont-Ferrand cette année. C’est un peu comme si les réalisateurs Joris Clerté et Pierre-Emmanuel Lyet étalaient leurs ingrédients bruts sur un plan de travail avant de préparer une recette.

Dans ce film d’animation de 7’30″, la recette est élaborée et complexe. Suivant le ressenti d’Angélique, devenue scripte après avoir vu « La Nuit américaine » de François Truffaut, les concepts s’enchainent. Le film est une adaptation d’un des récits de l’ouvrage d’Olivia Rosenthal, Ils ne sont pour rien dans mes larmes, paru en 2012 aux éditions Verticales. Reprenant la recherche de l’écrivain sur la réalité sensible et intime du cinéma, le film donne à ce récit une forme… de cinéma justement.

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« Le cinéma amplifie la puissance des drames humains en les redoublant », écrit Olivia Rosenthal. On trouve dans « La Nuit américaine d’Angélique » un dispositif de récit appelant un film, celui de Truffaut, mais le transmettant par un autre, celui de Clerté et Lyet. Alors que l’exercice pourrait donc paraître doublement tautologique, il permet, au contraire, par la limpidité du parcours du récit, de se concentrer sur l’indicible et le sensible.

L’indicible s’exprime ici grâce à une animation minimaliste, un retour à l’une des premières projections, celle des ombres chinoises tout autant que par la présence de l’écran dans l’écran et par la belle voix off de Louise Bourgoin.


Angélique inscrit le souvenir du personnage de la scripte du film de François Truffaut dans son histoire personnelle. Tout au long de son récit, elle donne ses raisons d’aimer le cinéma plus que la vie. Dépassant la simple mécanique d’appropriation d’un film, « La Nuit américaine d’Angélique » réussit à recouper les réflexions de tout cinéphile et au-delà, de tout spectateur ayant eu un film qui l’a un jour influencé dans sa vie.

Dans une scène importante de « La Nuit américaine », Truffaut fait dire à son personnage que « les films avancent comme des trains dans la nuit. » La phrase est au cœur de sa discorde avec Godard, comme on a pu le voir dans le documentaire d’Antoine De Baecque « Deux de la vague ». On peut dire aujourd’hui, qu’avec le film de Clerté et Lyet, le train a trouvé son phare.

Georges Coste

Consultez la fiche technique du film

Paul Wenninger, Prix Format Court au Festival Premiers Plans d’Angers 2014

Après avoir délibéré autour de 22 films d’animation proposés dans la catégorie « Plans Animés » du festival Premiers Plans d’Angers en janvier dernier, le choix du jury Format Court (composé de Amaury Augé, Katia Bayer, Agathe Demanneville, Camille Monin, Xavier Gourdet et Marc-Antoine Vaugeois) s’est arrêté sur le film autrichien « Trespass » (2012), première réalisation de Paul Wenninger.

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Ce chorégraphe et musicien, qui expérimente depuis de nombreuses années différents médiums, s’est dirigé vers le stop-motion et vient de présenter à Angers un film très soigné et très maîtrisé. Dans « Trespass », le réalisateur-interprète fait interagir son propre corps, la caméra et les objets au sein de l’espace filmique pour créer une autre réalité, en parvenant à se détacher, pour quelques minutes, des contraintes du temps et de l’espace. Le film sera projeté le jeudi 10 avril 2014 dans le cadre de la séance Format Court, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème).

Découvrez dans ce dossier spécial :

La critique de « Trespass »

L’interview de Paul Wenninger

Love Games de Joung Yumi

Présenté en programme labo L4, à Clermont-Ferrand, le très esthétique Love Games de la coréenne Joung Yumi apporte un petit moment de quiétude tout en volupté retenue, de la délicatesse dans le propos et dans le trait qui ravissent les yeux.

Joung Yumi est une réalisatrice trentenaire dont les films sont sélectionnés par les plus grands festivals de la planète. À chaque essai animé, elle glane des éloges du public et la reconnaissance de ses pairs. Après avoir été sélectionnée dans plus de 50 festivals internationaux dont la prestigieuse Quinzaine des Réalisateurs en 2009 avec son film Dust Kid, puis enchaîné avec Math test qui a également connu une très belle carrière, son Love Games a été présenté notamment à la Berlinale 2013. C’est à Clermont-Ferrand que le film poursuit sa brillante ascension.

Dans Love Games , le parti pris esthétique de la réalisatrice est particulièrement épuré. Il s’agit d’une animation 2D en noir et blanc dénuée de décor. Seule compte l’interaction entre les deux protagonistes, la femme et l’homme qui entrent dans un jeu de séduction. Ici, le seul repère spatial donné est un rectangle tracé en ouverture par la femme, comme un tapis imaginaire qui contraint l’espace et le temps de leur jeu. Un espace ritualisé où les deux individus ne pénètrent qu’après s’être déchaussés, l’une invitant l’autre à l’y rejoindre pour qu’à la fin le jeu s’arrête et que chacun sorte du «tapis».

Dans le rectangle, la femme mène le début de cette danse de couple, elle invite l’homme puis se laisse inviter à jouer. Le duo oeuvre avec délicatesse dans cet échange presque enfantin. Ils se cherchent, s’attirent et se repoussent en toute complicité. À chaque jeu, chacun donne à l’autre des indices sur ses intentions de séduction même si nous ne saurons jamais vraiment de quelle nature est leur relation : un origami se détourne en bouquet de fleurs, un colin-maillard en baiser volé, … .

Dans un rythme doux, les déplacements des corps sont presque chorégraphiés. Ils occupent l’espace intérieur du rectangle comme des danseurs investissent une scène. Leur spectacle est intime mais la réalisatrice nous l’offre comme une boîte à musique qu’on ouvre. À l’intérieur, la danseuse se meut puis s’éteint dès que le couvercle se referme, comme une parenthèse…

Sans mièvrerie, Joung Yumi suspend les quinze minutes de son film dans une bulle où l’on regarde ces personnages tout en retenue. C’est un regard original et doux sur la séduction qu’elle propose. La gentille désuétude qui flotte sur ce rendez-vous poétique gagne en puissance et en modernité par une maîtrise et un style formel très affirmé.

Festival de Clermont-Ferrand 2014

Jusqu’au 8/02, se déroule le festival de Clermont-Ferrand. Pour sa 36ème édition, le festival propose ses traditionnelles sélections de courts en compétition, organise un programme autour du centenaire de la première guerre mondiale, projette des courts avec et autour de Jeanne Moreau (collection Canal +), offre une carte blanche à Mezzanine Films et s’intéresse de près à l’école Tisch School of the Arts.

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    Retrouvez dans notre Focus :

L comme Love games

Fiche technique

Synopsis : Un homme et femme qui s’adonnent à des jeux amoureux. Assis sur un tapis imaginaire dessiné dans l’espace, ils plient et assemblent des pièces du Tangram, jouent au docteur et à l’infirmière, boivent du thé, jouent à cache-cache… Chaque jeu amoureux en entraîne un autre. Les situations stéréotypées se transforment en quelque chose d’unique ─ unique comme l’amour.

Genre : Animation

Durée : 15’

Pays : Corée du sud

Année : 2013

Réalisation : Joung Yumi

Son : SONG Youngho (Chungnam Techno Park)

Musique : Domenico Scarlatti, Sonata K 208 in A major

Production : KIM Kihyun

Article associé : la critique du film

Soirée Format Court, spéciale Court Métrange, jeudi 13 février, à 20h30, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème)

Après trois Prix Format Court remis au festival Court Métrange (Rennes) et au vu des dix ans de la manifestation, nous organisons notre prochaine projection Format Court aux couleurs du Festival, le 13 février prochain, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). Découvrez lors de cette séance spéciale un aperçu de ce qui fait la force de Court Métrange, avec une sélection de films de fiction et d’animation étranges, insolites, aux formes bizarres et débridées, qui repoussent les limites du réel et laissent le spectateur hagard, perdu dans une sorte de rêve éveillé. Prenez goût à cet imaginaire fort et laissez-vous porter par ce florilège de courts issu d’un des plus intéressants festivals européens de cinéma fantastique, en présence de Cédric Courtoux (programmateur), Olivier Calmel (« L’Art des Thanatier ») et Renaud Bajeux (« Peau de chien »).

Programmation

Fuga de Juan Antonio Espigares, animation, 15’, 2012, Espagne,  Andale Films. Prix Format Court au festival Court Métrange 2013, Meilleur film d’animation au Festival de Sitges 2013

Syn. : Sara vient d’arriver au conservatoire de Ste Cécile et découvre qu’il y a plusieurs façons d’interpréter le prisme à travers lequel elle perçoit sa réalité et son talent.

Articles associée : la critique du film, l’interview du réalisateur 

L’Art des Thanatier de David Le Bozec, animation, 14’26, 2012, France, Butterfly Productions. Prix du Meilleur Film d’Animation au Festival International du Court Métrage de Drama (Grèce)En présence du compositeur Olivier Calmel et de la productrice, Pauline Seigland

Syn. : Au XVIIIe siècle, Prosper Thanatier, dernier né d’une longue lignée de bourreaux, exerce avec passion son métier qu’il considère comme un art. A l’aube de la Révolution, il se voit forcé d’abandonner ses outils et son savoir faire ancestral, au profit d’une toute nouvelle machine d’exécution. Privé de son ancien art de vivre, Prosper ne s’adapte pas au « progrès », et refuse de voir son rôle d’exécuteur relégué à une simple machine…

Comme des lapins de Osman Cerfon, animation, 8’, 2012, France, Je Suis Bien Content. Grand prix au Festival national du film d’animation de Bruz 2013 (France)

Syn. : Comme des lapins est le second volet des Chroniques de la poisse. L’homme à la tête de poisson poursuit sa balade mélancolique dans une fête foraine, distribuant au hasard ses bulles de malheur. Ainsi que son titre le suggère, il y est beaucoup question de lapins, mais que cela ne vous fasse pas oublier les corbeaux. Et si vous voyez dans ce film un portrait sordide d’une humanité mal barrée, c’est sans doute que vous avez l’esprit mal tourné.

Article associé : la critique du film

Un monde meilleur de Sacha Feiner, fiction, 23’30, 2012, Belgique, Suisse, France, Anga Productions, Panache Productions, Rita Productions. Prix du meilleur réalisateur au Festival Hollyshorts 2013 (Etats-Unis)

Syn. : Henry, citoyen zélé d’un état dictatorial impitoyable dont il suit les lois à la lettre, assiste du jour au lendemain à la transformation de ce monde froid en une étendue idyllique et caricaturale de champs verdoyants, chantants et libres..

Article associé : l’interview des réalisateurs

Peau de chien de Nicolas Jacquet, animation, 13’20, 2012, France, Joseph Productions. Prix Beaumarchais du festival Court Métrange 2013. En présence du compositeur Renaud Bajeux

Syn. : Pour échapper à une fin violente et certaine, un chien errant vole le manteau d’un mort. En le posant sur ses épaules, le chien disparaît et se dissimule dans la vie de son ancien propriétaire. Une étrange métamorphose s’opère, où le chien se change en homme. Il prend pour un jour la place de cet étranger et finira par rejoindre son destin.

The Heart of The World de Guy Maddin. Expérimental, 6’19 », Canada. Prix FIPRESCI et Prix du Meilleur court métrage au Festival de Miami 2001

Syn. : Anna, scientifique travaillant pour l’Etat, découvre que le cœur du monde est sur le point d’avoir une attaque…

Article associé : l’interview du réalisateur

En pratique

► Séance : Jeudi 13 février 2014, à 20h30

► Durée du programme : 70′

► Adresse : Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris

► Accès : RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Epée), BUS 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon)

► Entrée : 6,50 €

► Réservations vivement conseillées : soireesformatcourt@gmail.com

Pour faire la guerre de Cosme Castro et Léa Forest

Cela pourrait commencer comme un film d’Eric Rohmer, « Le rayon vert » par exemple. Sept cousins autour d’une table. Une discussion banale qui vire à la dispute. « Pour faire la guerre » présenté la semaine passée à Angers, dans le programme « Figures libres », commence ainsi, avec ce sens rare du dialogue, de la justesse. Premier court de Léa Forest et Cosme Castro, le film est un terrain de jeu au grand air pour ses sept acteurs tous étonnants – dont les réalisateurs eux-mêmes.

Cosme Castro et Léa Forest auraient pu filmer une « cousinade », ces fameuses réunions anxiogènes où l’on reprend contact avec des cousins éloignés ou volontairement oubliés. Mais leur film évite fort heureusement cette option généalogique et glisse vers un récit mélancolique puissant.

Avec une énergie jouissive et une apparente simplicité, ils font retomber en enfance sept adultes pas tout à fait sevrés. Après une fin de déjeuner un peu tendue, la découverte d’une valise emplie de déguisements apaise temporairement les nerfs et entraine le groupe à pratiquer leur jeu favori d’antan : faire la guerre. On fabrique des cabanes, on élabore deux camps, ça court, ça crie et la guerre fictive devient vite plus menaçante, plus changeante. Le jeu n’est plus drôle et malgré les moustaches dessinées au feutre noir, les garçons et les filles ne roulent plus des mécaniques.

On sent chez Léa Forest et Cosme Castro ce goût absolu pour le jeu – celui de l’acteur –, cet amour des visages de cinéma, de la troupe de saltimbanques dont ils font partie (on se souvient notamment de Cosme Castro dans « C’est plutôt genre Johnny Walker » et « Robert Mitchum est mort » d’Olivier Babinet).

Loin de la pose ou de la posture, plus proche de l’improvisation et du naturalisme, le jeune duo étonne et touche juste. C’est un autre jeune duo – de producteurs cette fois-ci, Punchline Cinema, qui accompagne les auteurs. Comme quoi, à deux on est plus forts.

Amaury Augé

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P comme Pour faire la guerre

Fiche technique

Synopsis : 7 cousins se retrouvent pour un dernier séjour dans la maison de leur enfance. Alors qu’ils s’ennuient, ils retrouvent la malle conservant les costumes avec lesquels ils se déguisaient pour jouer quand ils étaient enfants. Ils décident de lancer une partie de « Pour faire la Guerre » une dernière fois, le temps d’un après midi…

Genre : Fiction

Durée : 28’

Pays : France

Année : 2013

Réalisation : Cosme Castro, Léa Forest

Scénario : Cosme Castro, Léa Forest, Delphine Eliet

Image , Balthazar Lab

Montage : Cosme Castro

Son : Thomas Vivance

Interprétation : Bastien Bouillon, Cosme Castro, Léa Forest, Clara Hedouin, Mathias Pradenas, Paul Renoult, Justine Bachelet

Production : Punchline cInema

Article associé : la critique du film

Trespass de Paul Wenninger, Prix Format Court au Festival Premiers Plans d’Angers 2014

Après avoir délibéré autour de 22 films d’animation proposés dans la catégorie « Plans Animés » du festival Premiers Plans d’Angers, le choix du jury Format Court (composé de Amaury Augé, Katia Bayer, Agathe Demanneville, Camille Monin, Xavier Gourdet et Marc-Antoine Vaugeois) s’est finalement arrêté sur le film autrichien « Trespass » (2012), première réalisation de Paul Wenninger.

Ce chorégraphe et musicien qui expérimente depuis de nombreuses années différents médiums s’est dirigé vers le stop-motion et vient de présenter à Angers un film très soigné et très maîtrisé. Dans « Trespass », le réalisateur-interprète fait interagir son propre corps, la caméra, et les objets au sein de l’espace filmique pour créer une autre réalité, en parvenant à se détacher, pour quelques minutes, des contraintes du temps et de l’espace.

Le film bénéficie d’un dossier spécial en ligne et sera projeté le 10 avril 2014 dans le cadre des séances Format Court, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème).

Trespass, 11′, 2012, Autriche, Sixpack Film

*** Local Caption *** Trespass, , Paul Wenninger, A, 2012, V'12, Kurzfilme

Synopsis : En anglais, « trespass » signifie s’immiscer, mais peut aussi faire allusion à une entrée non autorisée ou, dans le jargon légal, à une « perturbation domestique ». Ce film d’animation joue avec toutes ces significations.

Ilan Klipper : « Un artiste peut ressentir le besoin de s’isoler, de se calfeutrer pour créer comme il l’entend, sans être influencé par des interventions extérieures »

Ilan Klipper a déjà réalisé des longs-métrages documentaires, en duo avec Virgil Vernier (le diptyque sur la police composé de « Flics » et « Commissariat ») ou seul (« Saint-Anne », réalisé au sein de la célèbre institution psychiatrique). Il s’essaye à la fiction avec « Juke-Box », premier court-métrage remarquable et déjà salué dans les festivals. Lauréat du Prix One+One au dernier festival Entrevues de Belfort et plus récemment du Prix des Bibliothécaires lors de la dernière édition du festival Premiers Plans d’Angers, le film a retenu l’attention de Format Court qui est allé à la rencontre de ce jeune réalisateur talentueux.

ilan-klipper

Format Court : Comment es-tu arrivé au cinéma ?

Ilan Klipper : J’étais d’abord journaliste à la télévision, je réalisais des petits reportages de treize minutes. J’ai aimé faire ça un temps mais je n’étais pas satisfait, je trouvais à chaque fois le rendu un peu vain. À un moment donné, j’ai eu l’opportunité de réaliser un reportage sur une école de police. J’ai proposé à Virgil Vernier qui commençait lui aussi à réaliser et qui avait du temps libre de venir faire ce reportage avec moi. On s’est retrouvé dans cette école de police où des instructeurs lançaient des grenades et tiraient au taseur sur les élèves. Ils avaient recréé un décor de rue dans l’enceinte de l’établissement et organisé des simulations avec des comédiens. On a décidé d’en faire le cadre de notre premier documentaire, qui est devenu « Flics », un long-métrage de 74 minutes que je considère aujourd’hui comme mon premier film.

On a tourné un second long-métrage, « Commissariat », en quelque sorte la suite du premier film, à l’occasion d’un stage pratique exercé par les élèves que l’on suivait dans « Flics ». Ce long-métrage est devenu autonome, même s’il entretient quelques correspondances avec le précédent opus. Ces deux documentaires ont été remarqués, puis j’ai obtenu l’autorisation de tourner dans un hôpital psychiatrique, à Saint-Anne. J’ai travaillé sur ce projet pendant un an et demi, c’est devenu ma première réalisation solo. Aujourd’hui, je travaille sur un nouveau film documentaire autour des affaires familiales, qui a pour cadre un palais de justice dans une petite ville de province. En parallèle, je développe mes premières fictions.

Il y a un fil conducteur qui apparaît dans chacune de tes réalisations : la récurrence d’espaces clos où des individus sont amenés à se livrer, à exprimer des pensées souvent hors-normes. Tu mets en place des dispositifs où les conventions volent progressivement en éclats, tu guettes l’instant où les choses vont se dérégler. J’ai l’impression que la dimension claustrophobique est importante.

I.K. : C’est très juste. Je suis moi même très claustrophobe, et c’est vrai que dans mes films, on retrouve de manière implicite ou frontale cette thématique de l’enfermement. Je ne l’avais jamais formulée de façon aussi limpide. Ça relèverait presque de quelque chose d’organique, d’inconscient chez moi.

Dans « Juke-Box », tu mets en scène un personnage de chanteur déchu, marginalisé, qui vit seul dans un grand appartement. D’où est venue l’envie de filmer ce personnage ?

I.K. : Pendant le tournage de « Saint-Anne », j’ai assisté à des visites à domiciles. Il s’agit de patients au long court qui ne donnent plus de nouvelles à leur médecin, qui disparaissent dans la nature. Le médecin essaye de contacter son patient, sa famille, et en dernier recours il finit par débarquer chez lui avec la police. J’ai essayé de filmer ça dans le cadre de ce documentaire. C’était très intéressant car à chaque fois, on pénétrait dans un univers : les patients avaient retourné leurs appartements, fait des trous dans les murs, construit des installations étranges. Ça c’est finalement révélé impossible à filmer, notamment à cause de la paranoïa des patients qui se méfiaient de la présence de la caméra. Je suis parti de cette expérience pour écrire un scénario de fiction.

Ensuite, est venue ma rencontre avec le chanteur Christophe, par hasard au sortir d’une projection. On a commencé à se fréquenter, on a joué au poker pendant un an, j’allais le voir en concert. À un moment donné, Sabrina (Seyvecou, actrice et compagne d’Ilan Klipper) et Christophe ont manifesté l’envie de travailler ensemble. Je leur ai alors proposé d’adapter le scénario inspiré des visites à domicile pour eux. J’ai réécrit le projet en y ajoutant une dimension artistique qui était fondamentale pour moi car je ne voulais pas tomber dans la redite par rapport à « Saint-Anne ». Je voulais aborder la question de la reconnaissance des artistes qui travaillent mais dont les oeuvres ne sont pas nécessairement reçues ou comprises, ceux qui continuent à créer dans leur coin et se retrouvent marginalisés.

Le film met en scène le rapport étroit entre la folie et la création artistique. Le personnage de Daniel s’est coupé du monde et se retrouve dans un état presque animal, à tourner en rond dans son appartement comme un lion en cage. On sent qu’il travaille à quelque chose, qu’il essaye de composer une chanson de façon très brouillonne. Ce n’est qu’à la fin du film, lors de cette envolée lyrique où, posté derrière ses machines, il donne vie à son morceau de musique que l’on comprend que la création passe par le ressassement, l’isolement voire le rejet du monde extérieur.

I.K. : Tu résumes bien mes intentions, même si pour moi, ça ne traite pas directement de la folie. J’ai voulu filmer un moment d’errance psychique, lorsque tu te lances dans le processus de création et que tu te retrouves dans un état d’incertitude très angoissant. Un artiste peut ressentir le besoin de s’isoler, de se calfeutrer pour créer comme il l’entend, sans être influencé par des interventions extérieures. Je voulais faire de la trajectoire de ce personnage une allégorie de cet état d’errance.

Le fait d’écrire pour Christophe a conditionné beaucoup de choses ?

I.K. : Je voulais faire ce film avec lui pour plusieurs raisons : d’abord parce qu’il a lui-même connu dans sa carrière de chanteur des moments creux, la traversée du désert. Il comprenait tout à fait le sujet et le personnage. Il a également connu la psychiatrie, il a vécu des moments difficiles où il a failli sombrer. Je me suis dit que son expérience personnelle résonnerait parfaitement avec le sujet du film et en deviendrait même le centre. La possibilité de jouer sur différents niveaux de lectures, de questionner la frontière entre la fiction et le documentaire me plaisait.

Christophe a commencé à apparaître dans des courts-métrages, chez Yann Le Quellec (« Le Quepa sur la Vilni ! ») ou Isabelle Prim (« Déjeuner chez Gertrude Stein »). Dans ces films, les réalisateurs ne montrent de lui que son personnage public, celui qu’il s’est créé depuis des dizaines d’année (costume blanc, lunettes fumées, etc). Dans « Juke-Box », j’ai l’impression qu’il joue pour la première fois, qu’il compose un personnage.

I.K. : C’est drôle, car souvent des spectateurs qui sortent du film pensent que je me suis directement inspiré de lui, ils s’imaginent qu’il vit comme ça aujourd’hui, que c’est un artiste déchu. Alors qu’à la fin du tournage, Christophe est venu me voir pour me dire : « C’est la première fois que je suis comédien »? C’est probablement l’aspect du film dont je suis le plus fier, d’être parvenu à l’amener véritablement dans le jeu. Je lui ai offert son premier rôle.

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Sabrina Seyvecou joue un petit rôle dans le film, mais elle est également créditée au générique en tant que « directrice d’acteur ». Comment s’est déroulée cette collaboration au moment du tournage ?

I.K. : Sabrina et Christophe avaient une relation privilégiée, une envie de travailler ensemble. Il a fallu que je m’insère dedans. Sabrina croyait beaucoup au projet, elle était très investie. Sa contribution lors de la préparation du film était capitale, elle faisait la passerelle entre mes envies et Christophe pour l’aider à construire le personnage en amont. Ça s’est compliqué au moment du tournage où il a fallu trouver le juste dosage entre son travail de coach et ma mise en scène. C’était un fonctionnement assez complexe, mais indispensable.

Après ce documentaire sur les affaires familiales, as-tu d’autres projets de films ?

I.K. : Je travaille actuellement sur deux projets de longs-métrages que j’essaye de développer : un premier sur le mode documentaire centré sur la vie d’adolescents en province, et un autre projet de fiction qui serait dans la continuité thématique de « Juke-Box », focalisé sur un personnage qui ne sortirait que la nuit pour arpentait la capitale et qui ferait des rencontres insolites. Avec Christophe, évidemment, comme premier rôle.

Propos recueillis par Marc-Antoine Vaugeois

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J comme Juke-Box

Fiche technique

Synopsis : Daniel est un chanteur qui, après avoir connu son heure de gloire, a plongé dans l’oubli. Il passe ses journées reclus dans son appartement. À force de tourner en rond, il est devenu confus et amer. Connaîtra-t-il de nouveau le succès ? Son obsession frôle la folie…

Genre : Fiction

Durée : 23′

Pays : France

Année : 2013

Réalisation : Ilan Klipper

Scénario : Ilan Klipper, Alicia Harrison

Image : Lazare Pedron

Son : François Meynot

Montage : Nicolas Boucher

Musique : Christophe

Interprétation : Daniel Bevilacqua, Sabrina Seyvecou, Marilyne Canto

Production : Ecce Films

Article associé : l’interview de Ilan Klipper

César 2014, les résultats du premier tour

Le premier tour de vote des César s’est arrêté hier, à minuit. Les résultats sont tombés aujourd’hui après la traditionnelle conférence de presse des César d’annonce des nominations. Voici les sept finalistes « courts » ayant leurs chances à la cérémonie des César, le 28 février prochain. Bouchon ! Nous en avons chroniqué quatre et projeté cinq en salle (le bien trop discret « Marseille la nuit »), dans le cadre de nos soirées Format Court.

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Meilleur Film de Court Métrage

Avant que de tout perdre de Xavier Legrand

Bambi de Sébastien Lifshitz

La fugue de Jean-Bernard Marlin

Les lézards de Vincent Mariette

Marseille la nuit de Marie Monge

Meilleur Film d’Animation

Lettres de femmes de Augusto Zanovello

Mademoiselle Kiki et les Montparnos d’Amélie Harrault

Concours : 10 places à gagner pour la reprise du palmarès court du festival Premiers plans d’Angers mardi 4/2 au Forum des images !

Dans le cadre de notre focus consacré au festival Premiers plans d’Angers, nous avons le plaisir de vous offrir 10 places pour assister à la reprise du palmarès d’une partie des courts primés à Angers le weekend passé. La séance, composée de 5 films, aura lieu le mardi 4 février prochain à 18h30, au Forum des Images.

Pour participer à ce concours, rien de plus simple, répondez à nos deux questions ultra faciles :

– Lequel des 5 films programmés a remporté le Prix Format Court au festival du film francophone du film de Namur ?

– Quel est le nom du film d’animation qui concourait ces jours-ci au César du meilleur film d’animation ?

Clôture du concours : lundi 3 février, 12H

Programmation

Norman de Robbe Vervaeke.  Belgique / 2012 / animation / couleurs / numérique / 10’. Prix de la création musicale – Courts métrages européens et français, films d’écoles

Norman est obnubilé par les gens qui passent dans la rue. Il est obsédé par de petits détails et des habitudes étranges. Nerveux et solitaire, il erre dans la ville. Il faut rester sur ses gardes face aux personnes étranges. Qui sait ce dont elles sont capables ?

Betty’s Blues de Rémi Vandenitte. France-Belgique / 2013 / animation / couleurs / numérique DCP / 11’. Prix du public – Courts métrages français

Un jeune guitariste tente sa chance dans un vieux bar de blues de Louisiane. Il évoque la légende de Blind Boogie Jones, dans la Nouvelle-Orléans des années 1920. Une histoire d’amour et de vengeance.

Lágy Eső (Bruine) de Dénes Nagy. Hongrie / 2013 / fiction / couleurs / numérique DCP / 28’. Grand Prix du jury – Court métrage européen

Dans un village hongrois, Dani, un adolescent élevé dans un orphelinat, tombe amoureux d’une fille de sa classe. Il essaye de se rapprocher d’elle de façon obscène et maladroite. Il ne comprend pas les règles du jeu de l’amour, personne ne lui en a jamais enseigné les règles.

Flocon de neige de Natalia Chernysheva. Russie / 2012 / animation / couleurs & noir et blanc / 5′. Grand Prix du jury – Plans animés

Un petit garçon africain reçoit un flocon de neige dans une lettre envoyée par un ami. Et là, le miracle commence.

Les Jours d’avant de Karim Moussaoui. France – Algérie / 2013 / fiction / couleurs / numérique DCP / 44’. Grand prix du jury – Court métrage français et Prix d’interprétation féminine pour Souhila Malem

Une cité du sud d’Alger, au milieu des années 90. Djaber et Yamina sont voisins mais ne se connaissent pas. Pour l’un comme pour l’autre, il est si difficile de se rencontrer entre filles et garçons qu’ils ont presque cessé d’y rêver. En quelques jours pourtant, ce qui n’était jusque là qu’une violence sourde et lointaine éclate devant eux, modifiant à jamais leurs destins.

Festival de Brest, les plus, les moins

Ce vendredi 31 janvier, le festival de Clermont-Ferrand rouvre ses portes. Avec ses trois sélections, ses cartes blanches et son pays à l’honneur (les États-Unis cette année), le rendez-vous mondial du court voit large. Rien qu’en sélection internationale, plus de 70 titres sont attendus. En comparaison, le festival de Brest, bien moins médiatisé et financé, offre plus de visibilité à un nombre restreint d’élus. À titre d’exemple, 42 films en compétition ont reflété, cette année comme l’année dernière, l’état de la production européenne.

Chaque année, les deux festivals permettent de faire de passionnantes découvertes. Au hasard des programmes, on se souvient ainsi avec enthousiasme des pépites de Clermont (« Tanghi Argentini », « John and Karen », « Deweneti », « Luksus », « Mademoiselle Kiki et les Montparnos », « Andong », « Oh Willy », …) comme celles de Brest (« Dounouia, la vie », « Höstmannen », « Baby », « Moja biedna glowa », « Ünnep » ou « Apele Tac »).

L’évènement clermontois n’ayant pas encore commencé, il nous est à ce stade difficile d’en parler même si quelques films nous sont très familiers (« Subconscient Password », Cristal du court à Annecy, « Lettres de femmes », préselectionné au César du meilleur court d’animation ou « Les Jours d’avant » (Prix Format Court au festival francophone du film de Namur, lauréat du Grand Prix du Jury des courts français à Angers ce weekend).

Nous vous proposons donc de revenir sur les derniers “crû brestois”. L’an passé, nous avions attribué pour la première fois un prix à l’un des films de la compétition européenne. Nous avions ainsi pu véritablement juger la programmation dans son ensemble. Le niveau général de la sélection nous était apparu excellent et certains films magnifiques s’étaient même invités dans nos top 5 de l’année 2012 (« Tiger Boy », « Abgestempelt », « Hiljainen viikko », « Flow », « Prematur » , notre Prix, pour ne citer qu’eux). Notre intérêt s’était par contre considérablement réduit devant les sélections française et Cocote Minute (films très courts). Moins subtiles et originales, elles alimentaient des programmes inférieurs en qualité que leur consoeur européenne.

Bonnes idées

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Cette année, à l’occasion de sa dernière édition, le festival de Brest a cultivé plusieurs bonnes idées. La première : avoir osé une affiche culottée et mis enfin les hommes à poil (voir ci-dessus). La deuxième : avoir installé une table de ping-pong à proximité des salles, faisant la joie des revers festivaliers. La troisième : avoir maintenu le cap sur l’Europe, son vrai fil rouge, via différentes séances permettant de découvrir des festivals (Go Shorts aux Pays-Bas et Vilnius Film Short en Lituanie) et une école de cinéma (E.C.A.M., Madrid). La quatrième : avoir libéré un créneau dans sa grille pour une carte blanche à Format Court (nous permettant entre autres d’offrir un peu de visibilité à de bons films peu montrés en festival (« Tania » , « Solecito » , « Mamembre »).

Violence & famille

Quant à la programmation, le festival a remis à l’honneur les films européens et français et remplacé son programme Cocote Minute par une sélection OVNI (films inclassables au niveau de la forme et du fond). À Format Court, nous nous sommes à nouveau focalisés sur les films d’ailleurs. Sur le papier, les 42 films retenus cette année en compétition étaient supposés refléter “toute la magie du cinéma européen”. Sauf que ladite magie n’a concerné qu’une poignée de films réellement fascinants/fabuleux/décalés (voire les trois en même temps).

Tous les deux primés par le Jury officiel, « Die Schaukel des sargmachers » et « Hvalfjordur » se sont distingués par l’intelligence, la maîtrise et l’émotion qui s’en dégagent. Récompensé du Grand Prix, le premier est un film d’école allemand réalisé par un jeune réalisateur très prometteur, Elmar Imanov. Très pudique, le film évoque le rapport difficile entre un père et son fils sur fond de Azerbaïdjan local. La montagne, les routes difficiles, la solitude, le handicap, la violence, le malaise intergénérationnel sont les clés de ce film dur, intense, profond. « Hvalfjordur », lui, précédemment repéré par notre équipe au mois de mai (le film était en compétition officielle à Cannes où il a remporté une mention spéciale), s’intéresse aussi à la complexité des rapports familiaux (une tendance décidément sociétale et cinématographique) via la relation entre deux frères, dans d’éblouissants décors naturels islandais. Dans son film, Gudmundur Arnar Gudmundsson scrute autant le passage à l’âge adulte, la solitude et l’émotion à l’état pur que les contrastes esthétiques et dramatiques. Le résultat, magistral, a offert au film le Prix européen du Conseil régional de Bretagne.

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Parmi les films repartis bredouilles, on repère deux autres excellentes propositions. Du côté de la Grèce, un film difficile, « 45 Vathmi » de Georgis Grigorakis, évoque le quotidien d’un père de famille au chômage, aidé financièrement par son beau-frère, chauffeur de taxi. Un jour de grosse chaleur, celui-ci lui propose de gagner beaucoup d’argent en échange d’une descente musclée dans un quartier immigré d’Athènes. Loin de la Grèce-carte postale, « 45 Vathmi » n’échappe pas à son actualité (la crise et le mouvement Aube dorée) pour nous parler de torpeur, de lâcheté, de violence crue, de normalité et d’hypocrisie.

Autre film évoquant la violence contemporaine : « Colectia de arome » de Igor Cobileanski, venant de Roumanie et de Moldavie,  projeté ces jours-ci à Clermont. Le film est porté par une bonne idée scénaristique et deux jeunes comédiens très convaincants. Il s’intéresse à deux enfants travaillés par des questions de leur âge (“Qui est le plus fort ? Bruce Lee ou Mike Tyson ?”) mais qui sont incités par leurs propres pères à se battre contre d’autres jeunes pour nourrir leurs familles respectives. À l’instar de son homologue grec, Igor Cobileanski ne juge pas la situation ni ses personnages. La pauvreté marque les protagonistes et leur environnement. La seule porte de sortie est la violence, synonyme d’enrichissement et de survie. Les valeurs humaines, elles, ne comptent plus.

À côté de ces quatre films brillants, deux autres courts vus à Brest, traitant eux aussi de violence, soulèvent des questions tant leur réalisation et/ou leur histoire pose problème.

Commençons par l’espagnol « Aquel no era yo ». Certes, le film de Esteban Crespo concourt pour l’Oscar du meilleur court métrage (avec « Avant que de tout perdre » de Xavier Legrand et trois autres chanceux). Seulement, cette histoire se passant en Afrique, dans une zone de guerre interethnique, provoque un certain malaise. Lorsqu’un couple de médecins espagnols en mission humanitaire est arrêté par une milice d’enfants soldats, dirigée par un Général fou à lier, l’espoir est aussi mince que la tension est palpable. Comment retrouver l’insouciance de la jeunesse quand on est une machine à tuer, âgée de dix ans ? Comment apprendre à pardonner quand on a perdu son double et qu’on a subi un viol ? Comment vivre après la guerre et pourquoi témoigner ? Le film propose ses propres réponses via des flashbacks et le témoignage d’un ex-assassin racontant son histoire à des adolescents de son âge. Parmi les points forts du film, relevons le traitement du mal et de la tension ainsi que les sentiments d’appartenance/d’exclusion à une communauté et de culpabilité/d’acceptation face à la violence. Parmi les points faibles, certaines images insoutenables ne passent pas tout comme le tire-larmes appuyé provoqué par les gros plans et la musique de fin. Dommage.

Autre film du genre pas assez abouti à nos yeux : « Skin » de Cédric Prévost. Dans le métro parisien, à une heure tardive, une jeune femme noire cherche à éviter un homme louche, passablement ivre, au regard hagard. Il la rattrape cependant dans un couloir et lui réclame son portefeuille, en la menaçant d’une arme. S’ensuit un dialogue où il est question de skinheads, d’amour, de fratrie et de crime raciste. Malgré un début réussi, un casting efficace (Fatou N’Diaye, Grégory Givernaud) et une tension ressentie de A à Z, le film ne prend pas. La faute à un simpliste “pardon” peu significatif et un clap de fin survenu trop tôt ou trop tard.

Du côté des comédies

Pour souffler un peu entre ces films durs, Brest a heureusement retenu quelques comédies. Si « Stufe Drei » de Nathan Nill (Allemagne) et « Metube » de Daniel Moshel (Autriche) peuvent passer pour des films sympathiques (le premier confronte un jeune délinquant à un groupe handicapés, le deuxième propose un air d’opéra décalé), deux autres comédies, bien ficelées quoique très différentes, nous ont réellement marqués. En premier lieu, « Misterio », réalisé par un auteur espagnol que nous avions déjà repéré par le passé, Chema Garcia Ibarra, auteur de  « Protoparticulas ». « Misterio » évoque le quotidien plus que banal de Trini, une femme d’âge moyen passionnée par l’exploration de l’espace et les chats (malgré son allergie à ceux-ci). Sa vie bascule le jour où elle apprend que le fils d’une connaissance est en contact étroit avec la Vierge. Complètement décalé, assumant des silences et des plans totalement absurdes, le film dénote par son aspect totalement ubuesque et son invitation au voyage, aussi lointain soit-il. Le film a remporté notre Prix Format Court et a emmené son réalisateur dans de nombreux festivals, en premier lieu à la Berlinale et tout récemment au festival de Sundance.

Dans un tout autre genre comique, isolons « Locked Up », une comédie brève de Bugsy Riverbank Steel. Le film raconte avec un humour de situation sans pareil le braquage d’une banque tournant mal, avec comme originalité celle de coincer ses protagonistes à proximité des lieux de leur méfait et de libérer leur parole de malfrats amateurs. Ping-pong verbal, humour en cascade, nonsense, huis clos : le savoureux « Locked Up » nous ravit et nous renvoie à « Höstmannen », un autre film (suédois) découvert il y a quelques années à Brest, racontant également le quotidien de pauvres minables.

Voilà pour les réussites humoristiques et décalées de Brest. Du côté des comédies recalées vues au festival, mentionnons « La femme qui flottait » de Thibault Lang Wilar, un polar totalement inintéressant sur deux voisins cherchant à faire disparaître une jeune femme inconsciente, retrouvée dans la piscine d’un d’eux. Service minimum des comédiens, chute pas drôle, histoire peu originale : l’ennui est de mise devant ce film censé représenter la France à Brest. L’ennui, c’est ce qu’on retrouve aussi devant « Arbuz », un film d’école polonais de Tato Kotetishvili, évoquant la concurrence entre deux vendeurs de pastèques aux abords d’une route peu fréquentée. Difficile de déterminer la substance de film bien fade, mis à part son énergique lancer de grosses pastèques.

Drôle de drames

Dernière catégorie de ce reportage brestois : les films dramatiques. Du côté de l’originalité et de la différence, difficile de passer à côté de « Stew and punch » du britannique Simon Ellis. Auteur de nombreux courts, le réalisateur du très remarqué « Soft », Prix du Jury à Sundance en 2008 (chroniqué il y a quelques temps sur notre site), nous propose cette fois un film en “trois actes, trois pièces et trois prises de vues.” Lorsqu’un couple accueille des amis à sa pendaison de crémaillère, le ponche s’invite à la fête et les langues s’autorisent tous les excès. Paré d’une mise en scène très maîtrisée, d’un sens du plan-séquence et de comédiens au jeu très naturel, « Stew and punch » fait partie de nos films préférés vus à Brest.

Dans un tout autre genre, on retrouve « Chefu » de Adrian Sitaru, sélectionné à Indie Lisboa, Rotterdam et Oberhausen. Adrian Sitaru est l’auteur de plusieurs courts à succès. Son dernier projet, « Chefu », illustre la relation entre un fils et sa mère de retour chez elle après quelques jours passés à Bucarest. Pendant son absence, son fils resté seul à la maison a organisé une fête, ce qui a déchaîné les passions des voisins de l’immeuble. Dénonciation, suspicion, rapports de proximité, esprit de famille. Adrian Sitaru prend tout son temps pour croquer ces thèmes avec subtilité et grande intelligence.

Terminons avec nos deux derniers recalés. « Lucas », de l’Espagnol Álex Montoya, évoque l’histoire d’un adolescent cherchant à améliorer son quotidien et à s’intégrer parmi les jeunes de sa classe en acceptant de faire des photos “innocentes” chez un particulier. En voulant explorer les limites de la jeunesse et de l’autonomie, le réalisateur propose un drame tendu ayant trait au voyeurisme, à la pédophilie et à la quête de soi sans grande valeur. Si l’innocence de l’adolescent disparaît au fur et à mesure que le vrai visage de l’adulte surgit, il manque indéniablement de la substance à ce film pourtant shortlisté pour les Goyas (les Oscars espagnols).

Quant à « 216 mois » de Valentin et Frédéric Potier déjà peu apprécié au festival de Grenoble, il cumule toujours de curieuses idées. L’histoire, d’abord, celle d’une chanteuse ventriloque obèse, enceinte en secret de son fils âgé de 18 ans (comprenez 216 mois) et refusant la liberté à ce dernier. Les aberrances scénaristiques, ensuite : la naissance accidentelle de l’enfant, son histoire d’amour, son futur role de père. L’univers visuel, enfin : le cocon dans lequel évolue l’enfant, censé représenter le ventre maternel, souffre d’un manque de crédibilité, faute de moyens peut-être. Dans ce film, les thèmes imaginés (l’emprisonnement, le mensonge, le chantage, l’amour filial et conjugal) ne marchent pas une seule seconde à l’écran. Dommage tant le refus de couper le cordon était une bonne idée de base.

Voilà pour les plus et les moins de Brest. Malgré tout, le festival reste à nos yeux un repaire incontournable de nouveaux auteurs européens. Raison pour laquelle, comme l’an passé, nous organiserons une nouvelle séance autour du festival de Brest, le jeudi 13 mars 2014 au Studio des Ursulines (Paris, 5ème). « Die Schaukel des sargmachers », « Hvalfjordur », « Misterio », « Locked Up » ainsi que « Miniyamba » et « Guillaume le désespéré », seront présentés sur grand écran, en présence de leurs équipes.

Katia Bayer