Tous les articles par Katia Bayer

Szelest de Leszek Korusiewicz

Les (mur)mur(e)s ont des oreilles

Étonnant que ce “murmure” polonais qui s’ouvre sur un jardin d’Eden résolument enfoui dans le doute et les non-dits.

La nature engloutit le quotidien d’un couple, qui se retrouve à échanger des banalités pour éviter les sujets sensibles, ceux qui fâchent et qui blessent car ils ne trouvent pas les mots pour les exprimer. L’arrivée d’un élément déclencheur, un autre couple, beaucoup plus jeune, beaucoup plus libre, beaucoup plus sensuel vient perturber les deux tourtereaux et les ébranler jusqu’à les retrancher aux confins de leurs fondations fragiles, vulnérables et bancales. C’est que chacun se sent attiré par l’un pour sa force ou par l’autre pour sa dangereuse sensualité. Tout est permis quand rien n’est dit. Autour de tout cela, un univers, sauvage, beau irrésistible et primitif qui en plus de leur faire écho, laisse transparaître les fissures et les failles qui s’agrandissent à mesure que les protagonistes se côtoient.

Ce film de fin d’études est remarquable autant dans ce qu’il met en évidence que dans sa manière de le raconter. L’image, le montage, le son sont inévitablement au service de l’intention du réalisateur de montrer les murs fragiles qui parfois s’érigent autour de ceux qui s’aiment.

Marie Bergeret

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S comme Sophie Lavoie

Fiche technique

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Synopsis : Un huis clos contemporain qui devient le théâtre d’une déroute personnelle, celle d’une jeune femme moderne.

Genre : Fiction

Durée : 8’

Année : 2009

Pays : Canada

Réalisation : Anne Emond

Scénario : Anne Emond

Image : Philippe St-Laurent Levesque

Son : Simon Gervais

Montage : Denis Pilon

Interprètes : Catherine de Lean, Emile Proulx-Cloutier

Production : Anne Emond

Article associé : la critique du film

Sophie Lavoie d’Anne Emond

Cette année, le Fidec mettait le Québec à l’honneur. L’occasion pour nous de confirmer que la patrie de Denis Villeneuve et de Denys Arcand recèle de petits bijoux cinématographiques. Aux côtés des excellents « Next Floor », « Les Journaux de Lipsett », « Les Poissons » et « Mokhtar », on a pu apprécier « Sophie Lavoie », un court métrage simple et atypique d’Anne Emond.

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A l’instar de Yvon Marciano dans son « Emilie Muller », Anne Emond privilégie le plan fixe pour filmer l’évolution des sentiments d’une jeune femme bien dans son temps. Un plan immobile qui n’offre jamais de contrechamp visuel pour percevoir le malaise grandissant de Sophie, venue à un dépistage de MST (maladies sexuellement transmissibles). L’entretien qui se veut professionnel et banal pour le médecin prend une tournure bien personnelle et dérangeante à mesure que les questions se font plus indiscrètes. De la nonchalance du début, répondent le tremblement des mains, les hésitations, le trémolo dans la voix et le regard fuyant de la fin.

A l’aide d’un dispositif simple, Emond dresse le portrait de la société moderne qui fait fi du poids de la possibilité d’aimer qui on veut, quand on veut, comme on veut. Sophie Lavoie est une jeune femme moderne qui, malgré tout, plie sous le fardeau des conséquences de cette liberté sexuelle car elle ne l’assume pas complètement. Elle n’est pas malade, du moins elle l’espère, mais elle se rend bien compte que sa façon d’aborder ses relations affectives est symptomatique d’un mal-être.

Subtilement, sans poser de jugement moral, la réalisatrice arrive à présenter une magnifique illustration en demi-teinte de noirs et de blancs d’une femme d’aujourd’hui dans un huis clos des plus révélateurs.

Marie Bergeret

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Dans le cochon tout est bon de Iris Alexandre

Au Fidec cette année, se trouvait une pléthore d’animations en compétition nationale et internationale, montrant que celles-ci occupent une place importante dans l’enseignement cinématographique. Dans ce cadre – et la plupart de films présentés au festival en témoignent – il n’est pas inhabituel que le genre animé serve principalement à démontrer un travail technique, aux dépens du sujet qui, lui, est réduit à un simple prétexte narratif à des fins purement formelles. Il est rafraichissant alors, de voir un film qui renverse ce constat, qui montre un sujet délicat avec respect à l’aide des facultés à la fois représentative et symbolique de l’animation. Tel est le cas de « Dans le Cochon tout est bon » d’Iris Alexandre (La Cambre, Belgique).

Se basant sur l’idée de la transformation au lieu de la création ou la destruction de la matière, Iris Alexandre montre, par le biais de l’animation en volume, la métamorphose d’un cochon, passant d’un être vivant à la source d’un repas infini. Sang, os, morceaux de chair s’intègrent tous dans les rangs du festin avec une discipline digne d’un restaurant 3 étoiles. Un acte plutôt brutal et, indépendamment de son utilité sociale, peu humain, s’enjolive en une chorégraphie de formes et de couleurs gracieuses. Procédant par contraste, Alexandre détermine une structure narrative ingénieuse. Au début de son récit, entre le plan emblème du film montrant la répartition gastronomique de la bête en pâte à modeler et le reste de l’animation, la réalisatrice intercale une image filmée, celle d’un vrai cochon abattu et égorgé. Le cri poussé par l’animal massacré symbolise l’exception à l’adage dont fait référence le titre. Ainsi, Alexandre dose bien ironie et réprobation tout en évitant tout côté moral. La partition originale de Michel Capelier fait écho à cet équilibre en se balançant elle-même entre ironie et charge émotionnelle.

Loin de la lourdeur écœurante et (trop puissante) du « Sang des bêtes » de Georges Franju, de la froideur clinique de « Avaca » de Gustavo Rosa De Moura, ou encore de l’humour ludique et sardonique de « The Cow Who Wanted to Be a Hamburger » de Bill Plympton, le message est ici plus digeste mais reste néanmoins pertinent et, à sa propre manière, efficace.

Adi Chesson

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FIDEC 2011

Le FIDEC (Festival International des écoles de cinéma) qui s’est tenu au Centre culturel de Huy du 19 au 23 octobre proposait une fois de plus une sélection reflétant la diversité et la richesse de la création cinématographique actuelle, réalisée dans un cadre académique.

Avec ses compétitions nationale et internationale, 19 pays et 37 écoles représentés, une séance « culottes courtes » pour le jeune public, une mise à l’honneur du Québec, un atelier d’analyse cinématographique, une collaboration avec l’asbl 68 Septante et une exposition d’Antonin De Bemels, …, le FIDEC a une fois de plus, permis de faire découvrir une nouvelle génération d’artistes qui font le cinéma d’aujourd’hui et de demain.

Découvrez dans ce focus :

le critique de « Selfportrait » de Isobel Blank (Italie, 2009)

la critique de « Tant qu’il y aura del poussière » de Marie Devuyst (Belgique, 2009)

la critique de « Szelest » de Leszek Korusiewicz (Pologne, 2011)

la critique de « Sophie Lavoie » d’Anne Emond (Canada/Québec, 2011)

la critique de « Dans le cochon tout est bon » d’Iris Alexandre (Belgique, 2011)

Et nos anciens sujets en lien avec le festival :

la critique de « Je criais contre la vie. Ou pour elle. » de Vergine Keaton

Court Métrange. Anecdotes aléatoires

Il y a trois semaines, avait lieu le festival Court Métrange spécialisé dans le cinéma fantastique. Curieuse et avide de sensations novatrices, une fine équipe du site se retrouvait au même moment à Rennes, avec quelques paquets de mouchoirs en trop (pour les mômes) et une forte envie de (re)découvrir la Bretagne. Reportage.

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L’affiche

Devant l’affiche du festival, des bonds peuvent s’exécuter devant cette irrésistible blancheur ambiante aux faux airs de pâte à tartiner. Dans un deuxième temps, un corps plutôt pas mal, une tête qui n’est plus et une manucure discrète apparaissent. Du rouge sang aurait pu rebuter sur ce visuel, ce blanc « écrémé » rassure par sa douceur et son onctuosité. On en arriverait presque à oublier le crime qui a pu se jouer là et ne pas voir les gouttes qui se dispersent sur les marches. Impensable vu qu’on commence tout juste à se frotter au domaine de l’horreur et de l’étrange.

Rennes

Pour déjouer les creux de l’après-midi (les projections n’ont lieu que le soir au festival), une visite de la ville s’improvise. Au quartier Saint-Anne, impossible de trouver une soupe brûlante, malgré le froid ambiant. Un marché coloré, des maisons à colombages, une joyeuse fanfare, un café sympa, c’est bien plus facile à identifier. Les pas s’approchent d’une cathédrale sans âge, de rues pavées, de bateaux qui font mouche, avant de s’arrêter dans une crêperie, d’ironiser sur le tennis de table (un sport, ça ?) et d’évoquer les raisons les plus loufoques liées au nombre d’oiseaux dans le ciel rennais.

Les films

Quarante films, pas moins, pas plus, constituaient cette année la programmation européenne de Rennes. Beaucoup de films d’animation faisaient partie de ce programme, certains très bons (comme « Body Memory », « Condamné à vie », « Nuisible(s) » ou « Danny Boy », notre prix Format Court), d’autres réellement moins passionnants (« Love Patate », « Judas and Jesus » alias le Métrange du Jury). Coté fiction, certains films particulièrement originaux se dégageaient de la masse (« Le Vivier », « E pigs », Next Floor », « The death of an insect », « Labyrinth within ») alors que d’autres étaient franchement insoutenables (« Ella », « Hungry Hickory », « Brutal relax ») ou très simplistes dans leur récit (« The astronaut on the roof », « Mandragore », « 36eme sous sol »). Parallèlement, Court Métrange avait prévu des cartes blanches consacrées aux Etats-Unis, au Japon et aux Mexique, en partenariat avec des festivals spécialisés implantés dans ces pays. Peu de ces films, pourtant, sortaient du lot, chose dommageable au final, au vu de la production prolifique et intéressante de ces trois pays.

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Les trois lettres magiques

Rien de très formel aux soirées d’ouverture et de clôture à Rennes : les organisateurs et le jury se réunissent à l’espace pro qui accueille également un mannequin de cire au regard vicieux, des bras et des jambes suspendus dans les airs et des murs ensanglantés. Pour la circonstance, quelques jeunes gens ont préféré troquer leurs tenues contre celles de maîtresses corsetées et d’elfes maléfiques tandis que des hommes préhistoriques abattent leurs massues devant des journalistes hilares et que les sandwiches disparaissent à vue d’œil. A la clôture, la formule ne varie pas. Point de discours à rallonge et de remerciements très publics, ici, le rassemblement a lieu en petit comité, les prix sont délivrés rapidement avant la photo souvenir. La reprise des films primés n’a lieu que le lendemain, certains courts étant projetés au même moment que la remise des prix.

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Le bal des Vampires

Après la prise de connaissance du palmarès, direction la loge pour ressembler le plus possible à un gentil vampire ou à une méchante fée (ou les deux à la fois). Au fait, qu’amène-t-on pour un tout premier bal des vampires ? Quelque chose qui peur, affirme l’entourage. Du côte du festival, Aurélien est plus éloquent dans ses mails : « Pour le déguisement, sois tu décides de faire simple (cape/grosse canine) soit tu innoves un peu le genre. En cas de panne créative, prends un personnage célèbre (De Gaulle, Gandhi, Christophe Maé, Nicolas Sarkozy…) et vampirise-le (succès assuré). Sinon, tu peux choisir l’option  »old school » avec une longue robe et une moumoute sur la tête ou choisir un vampire contemporain, cuir/latex, moderne quoi ! ». Les meilleurs costumes étant, paraît-il, ceux que l’on crée soi-même, on embarque un reste d’Halloween dans sa valise, mais une fois à Rennes, on ressort d’un magasin de farces et attrapes avec des faux cils qui préfèrent, malgré toutes les prières connues et inconnues, rester sur les doigts plutôt que sur les paupières. Par dépit, on pique le nez rouge du collègue plus chanceux qui récupère, lui, un serre-tête « couteau » (la manche d’un côté, la lame de l’autre) en lieu et place d’un hachoir tant souhaité. Pour aller ensuite s’encanailler avec des nonnes, des morts-vivants et d’autres créatures bizarres de la nuit, avant de rentrer pour une after au sel marin et aux croûtons au chèvre et de quitter Rennes le lendemain épuisés et enrhumés (chic, il reste des petits mouchoirs). Elle n’est jamais très fine, l’équipe, en rentrant de festival.

Katia Bayer

Sujet associé : Court Métrange. Dépôt photo

Court Métrange. Dépôt photo

A Court Métrange, ça aime les elfes et les créatures étranges, ça se déguise tous les soirs pour hanter l’espace VIP, ça propose des massages gratuits mais publics, ça avale le plat unique à l’Huluberlu (le resto du festival), ça lèche le sang sur les murs, ça fait des folies à la Boîte à rires (magasin de farces et attrapes), ça fait la file pour voir les films en compét’, ça hésite entre une crêpe et une conférence sur les femmes vampires, ça apprend la mort de Kadhafi au petit-déjeuner (avec photos à l’appui, la cuillère en suspens devant le bol de Miel Pops), ça parle de dessin animé et de jeu vidéo en buvant du Pastis ou du Ricard, ça fonce au Mont Saint-Michel en 3h chrono quand on est japonais, ça grimpe les trois étages du TNB (Théatre National de Bretagne) sans prendre l’ascenceur, ça lorgne vers le buffet pendant les discours officiels, ça remet des prix en lorgnant toujours autant le buffet, ça parle d’iphone déguisé en soubrette, ça prend des bénévoles en  A (Arnaud, Aurélien, Agathe, …), ça dit autour d’un verre : “Je te trouve de plus en plus sanglant”, ça s’entend répondre : “C’est vrai, c’est parce que j’ai mangé”.

Texte : KB

Crédits photos : KB, GC

Article associé : notre reportage sur le festival

Média 10-10 : le Prix Format Court de l’OVNI

A l’occasion de la 33ème édition du Festival du court métrage Média 10-10 (Namur), du 15 au 19 novembre, Format Court décernera le Prix du Meilleur Film dans la catégorie OVNI (Objet Visuel Non Identifié). Le jury sera composé de Marie Bergeret, Adi Chesson et Bibiana Vila (Artatouille asbl et Short Screens). Le film gagnant sera annoncé le 19 novembre et bénéficiera d’un focus spécialisé consacré à son auteur, ainsi que d’une projection en salle de cinéma à Bruxelles et/ou à Paris.


Miramen (Khristine Gillard / Marc Rebuttini)

Miramen — du provençal, mirage. La Camargue est une île qui demande à l’homme qui l’habite de faire corps avec elle. Ce monde de l’entre deux, entre terres et eaux, est celui de la rencontre du fleuve, de la mer et de la communauté des étangs. C’est un monde de gestes — ceux du gardian-centaure, du pêcheur d’étang, du tellinier, du chasseur des marais — inscrits dans les corps et les paysages. Une relation au sauvage.
Là veille la Bête.

Trinkler (Marie-Catherine Theiler)

Quel est le lien entre, par exemple, des opticiens, des musiciens ou des éleveurs de moutons? Une topographie du travail au cœur des Alpes suisses, avec pour commun dénominateur le son des cloches.

Death of Conversation (the) (Francisco Saco)

A reflection on the sorry state of communication. Two gentlemen comment upon the nature of talking through talking. It becomes a routine, as they tend to observe and reflect upon mundane scenarios
and situations, never really reaching a specific destination.

Djoûû (Djamil Beloucif)

C’est l’histoire d’une rencontre entre deux clandestins qui ont « faim » de liberté. « Djoûû » signifiant « faim » en arabe.
Métaphore du mythe de la « Tour de Babel », le film met en scène des « maudits » qui, portés par leur rêve, s’échouent quelque part où leurs mots se heurtent sans s’entrelacer.Doivent-ils parler la même langue pour se comprendre ?

I KNOW YOU CAN HEAR ME (Miguel Fonseca)

A film about love inside a film about war.

Metalliszt – The Road to Victory (The) (Robert Sawallisch)

The Music Clip « The Metalliszt – Road to Victory » puts Franz Liszt into the 21th Century as a Rockstar. He tours through different european cities that influenced him in his life and comes to a furious final to Weimar. Meanwhile he experiences an autobiographic Time-Travel through a part of his life that was dominated by excess and euphoria. In those days Liszt became a kind of prototype of what we would call a modern european citizen. And therefore this film is a winking hommage to Liszt, as an early visionary, who lived the dream of a united europe.

New Hippie Future (Dalibor Baric)

In a surreal and psychedelic atmosphere this film deals with life, freedom and transcendence of limitations.

Stick Climbing (Daniel Zimmermann)

A contemplative walk leads to a bizarre climbing tour. The camera that has just panned over everyday village life now homes in on a construction of wooden slats to then follow a breakneck route up a vertical rock face. From the perspective of the invisible climber, we experience a seemingly impossible ascent while hearing his breath growing heavier and heavier with every move. Having reached the top, the camera roams one more time over the point of departure – the village now in the distance, only a few exciting minutes of film and a tangible eternity away below the rock face. (Robert Buchschwenter)

Reconstructing Sudan (Marta Kucza)

En quête de la représentation parfaite de mes mémoires du Sud-Soudan, je rassemble les morceaux de conversations, images et sons quisemblent ne pas faire partie de la réalité soudanaise. C’est une histoire sur la lutte entre la fascination exotique, la frustration des représentations existantes et l’impossibilité de transmettre la mémoire. Comment aborder à la fois la beauté de la vie et sa représentation ? Dans Re-constructing Sudan, l’amitié et l’amour est le canal par lequel une image me semble possible.

Tran (Miguel Aparicio)

Late February 2011 I was invited to spend some days in the city of Vitoria to shoot a short-film. The final result is this logbook from trips in the city’s tram, filmed with a 16mm string camera and developed by hand those same days.

Un film abécédaire (Saintagnan Eléonore)

Hommage à des individus cherchant le bonheur en dehors des sentiers battus, là où n’est pas l’évidence. Ceux qui alimentent leurs mythes et adorent leurs dieux, qu’il s’agisse des Dieux Vikings ou du Rock’n Roll, un Saint Nicolas ou un frère Joseph.

Spiral Hill (Jean De Lacoste)

This film is a part from my psychic diary. It’s why I wanted to translate a psychic travel with different « affect » places : like a road movie. Also, my relation to filming locations inspire my work every time.

Romain Roll : « A Cannes, il faudrait y avoir une salle Méliès. Ce serait un vrai hommage à ce grand personnage qui a su révéler le vrai cinéma »

Romain Roll, natif du Luxembourg, s’est fait connaître pour plein de trucs (critique, directeur de festival, producteur). C’est pourtant en tant que coordinateur de la Fédération du Festival du Film Fantastique Européen (plein de F, ça donne EFFFF) et organisateur du Méliès d’Or qu’il a été invité cette année au festival Court Métrange. Dans quel but ? Celui de juger si la manifestation de genre rennaise remplissait les conditions d’adhésion à la Fédération (la réponse est oui). Rencontre autour du fantastique, de l’éducation à l’image et de Georges Méliès.

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Tu as commencé à œuvrer autour du cinéma via le ciné-club de ton école. Quel souvenir en gardes-tu ?

A l’époque des ciné-clubs, dans les années 70, c’était assez particulier au Luxembourg : chaque grande école avait son ciné-club. On choisissait les films (en 16 mm) d’après un catalogue très spécifique. Une fois par an, avait lieu un grand meeting avec tous les ciné-clubs : on discutait des films qu’on voulait programmer et si un même titre intéressait plusieurs écoles, on créait un circuit pour réduire les coûts de circulation. Dans mon école, on était à deux à faire la programmation, l’un de nos professeurs, un fanatique de cinéma, nous a beaucoup conseillé sur des films qu’on ne trouvait pas en dehors des salles commerciales. A cette époque, j’allais aussi beaucoup à la Cinémathèque et je suis très vite arrivé au fantastique.

Les ciné-clubs existent-ils encore au Luxembourg ?

Non, malheureusement, ça n’existe plus aujourd’hui. C’était une sorte d’éducation à l’image, les écoles y consacraient beaucoup de valeur. A l’époque, il n’y avait pas de festivals, la programmation des cinémas était très médiocre parce que les films arrivaient au Luxembourg assez tard.

Tu as mentionné le mot fantastique. Qu’est-ce que ce que cinéma a pu apporter à ton parcours ? En quoi est-ce une source de référence, d’influence aussi ?

Le fantastique reflète notre société dans diverses circonstances, dans ses hauts et ses bas. Ayant longtemps été directeur d’un festival fantastique, j’ai remarqué que des gens ont osé sortir de leur cocon et tissé des liens entre eux. Ces gens qui avaient des peurs et des faiblesses (peur de la société, de se dévoiler, …), qu’on retrouve dans leurs film, ne se sentaient plus prisonniers ou seuls et ont commencé à s’exprimer et à former petit à petit une grande famille. Je crois que je me suis retrouvé et que je me retrouve encore dans cet univers assez unique.

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Comment est-ce que ça s’est passé quand tu as monté ton festival (The Luxembourg International Film Festival Cinénygma) ?

J’ai commencé début 92. On a vu dès la première édition que les gens voulaient découvrir un genre et des films qu’ils n’avaient jamais vus auparavant ou qui sortaient beaucoup plus tard après leur sortie en salle. Voir ces films en salle avec des invités (réalisateurs, producteurs, acteurs), c’était quelque chose qui n’existait pas au Luxembourg. Les amis du BIFF (Brussels International Fantastic Film Festival) m’ont aidé à créer un festival et à éduquer les gens à quelque chose de nouveau et les inciter à participer activement dans la salle. A Bruxelles comme à Luxembourg, les gens étaient libres d’applaudir, de crier, de s’exprimer devant le film qu’ils voyaient, si ils le voulaient.

Le projet de la Fédération du Festival du Film Fantastique Européen (EFFFF) est-il juste de réunir les festivals européens et de donner plus d’éclat au cinéma fantastique ? Ou bien ressentez-vous une fragilité, un besoin de lutter contre des a priori face au cinéma de genre ?

Chaque festival adhérent peut très bien se débrouiller sans la Fédération. Il a dans son propre pays son identité, sa place dans la vie culturelle, cela ne veut pas dire que sans la Fédération, il serait moins crédible. Par contre, en étant regroupés, les festivals sont beaucoup plus forts parce qu’ils s’entraident pour la programmation et peuvent faire circuler les copies de films qu’ils apprécient à moindre coûts. La Fédération marque aussi une amitié entre des gens qui se connaissent depuis très longtemps et a comme de devoir de soutenir avant tout le fantastique européen, raison pour laquelle on prime par le biais des Méliès d’or le meilleur long métrage et le meilleur court métrage européens.

Pourquoi ces prix ont-ils été appelés les Méliès ?

Georges Méliès est notre maître à tous. Pour certains, ce sont les frères Lumière, mais pour nous, Méliès est LE visionnaire, le maître du fantastique, forcément, on a souhaité donner son nom à nos prix. Il est protégé, mais la famille Méliès était ravie qu’on l’utilise pour ce prix. Lors de la première cérémonie du Méliès d’Or, à Bruxelles, en 1996, on a montré les vieux films Méliès en présence de Marie-Hélène Méliès et de son beau-fils qui accompagnait la projection au piano. C’était un moment magique qui reste encore aujourd’hui en mémoire.

Vous faites par cette occasion intervenir le fait que dès le départ, le cinéma était déjà fantastique…

Voilà, tout à fait. Dès le départ, le cinéma était un cinéma fantastique. Je crois que beaucoup de gens ont perdu cela de mémoire ou ne veulent pas le savoir. On le voit d’ailleurs à Cannes : il y a une salle Lumière (cf. Grand Théâtre Lumière), pourquoi n’y en a-t-il pas une consacrée à Méliès ?

Cette année, on a quand même montré « Le Voyage dans la lune », en version colorisée et musicale de Méliès à Cannes !

Oui, mais dans la salle Bazin. A Cannes, je crois qu’il faudrait absolument y avoir une salle Méliès, ce serait un vrai hommage à ce grand personnage qui a su révéler le vrai cinéma.

A la Fédération, vous avez d’abord soutenu les longs, puis les courts. Pourquoi remettez-vous dorénavant un  prix dans les deux catégories ?

Au début, on n’avait que des prix pour le long mais on a évolué : beaucoup de festivals de notre réseau avaient des compétitions de courts et on voyait des choses vraiment magnifiques dans ce format-là. Avec ce prix-là, je crois qu’on peut aider de nouveaux talents à émerger et leur donner une chance pour poursuivre sa carrière.

Cette année, vous avez primé « Balada Triste de trompeta » d’Álex de la Iglesia et « Suiker » de Jeroen Annokkee. Le premier a émergé depuis longtemps, Jeroen Annokkee, par contre, c’est quelqu’un que vous allez suivre ?

Tout à fait, c’est le futur. On veut suivre des carrières comme la sienne, à l’image de celle d’autres jeunes réalisateurs qui ont remporté le Méliès d’Or et qui ont poursuivi dans le long métrage de manière intéressante.

Si un festival comme Court Métrange a envie de vous rejoindre, quelles sont les conditions d’adhésion ?

On soutient les grands festivals comme les plus petits si les critères sont réunis. Evidemment, le festival doit être un festival de genre ou comporter une très grande section de fantastique, avec une programmation européenne et une projection dans de bonnes conditions. Il doit avoir une visibilité, un public, et travailler autour de l’accueil des invités et de la presse.

En faisant ce travail depuis plusieurs années, trouves-tu que le public généraliste s’est ouvert de plus en plus au fantastique ? Est-ce c’est lié au succès de certains films  ?

Oui. On a constaté une nouvelle approche vis-à-vis du fantastique avec à de très grandes productions, hollywoodiennes, comme « Le Seigneur des anneaux » mais aussi avec « Morse ». De façon générale, le fantastique devient de plus en plus important dans les pays scandinaves. Certains pays auxquels on ne pense pas sont en train d’émerger dans le fantastique. L’Afrique du Nord va bientôt suivre dans le domaine, et je suis certain que l’Inde aussi. On peut et on veut soutenir ces pays-là, via notre réseau.

Propos recueillis par Katia Bayer

Le site de la Fédération : www.melies.org

S comme Suiker

Fiche technique

Synopsis : Klaasje, la voisine de Bert, sonne à sa porte, légèrement vêtue, pour lui emprunter un pot de sucre. Elle échappe le pot, ils se penchent en même temps pour le rattraper et se cognent la tête : Klaasje dégringole les escaliers.

Genre : Fiction

Durée : 7’35’’

Pays : Pays-Bas

Année : 2010

Réalisation : Jeroen Annokkee

Scénario : Jeroen Annokkee, Dennis van de Ven

Image : Lex Brand

Montage : Marc Bechtold

Son : Anneloes Pabbruwee

Décors : Dirk Tolman

Musique : Sebastiaan Roestenburg

Mixage Son : Rens Pluym

Interprétation : Marije Uittenhout, Bert Hana

Production : LEV Pictures

Article associé : l’interview de Romain Roll

Body Memory de Ülo Pikkov

Présenté en compétition au dernier festival Court Métrange, ce film estonien vient de recevoir le grand prix au festival de Bucharest, Anim’est, et est en lice pour les prochains Cartoon d’Or.

Le court métrage s’ouvre sur un lent travelling vertical qui nous fait découvrir une campagne morne, monochrome, désolée. On se trouverait presque au début de « Nuit et Brouillard » d’Alain Resnais et pour cause. Des branches d’arbre dessinent sur des toiles blanches des traits qui s’apparentent à ceux d’un cardiogramme. Le rythme est donné. À partir de cette exposition, Ülo Pikkov mélange subtilement la prise de vue réelle et l’animation : ces deux éléments permettent à la fois de nous donner des repères, les marionnettes en bouts de ficelle étant très clairement parquées dans des trains menant vraisemblablement vers les camps de la mort, et de déréaliser également la situation en donnant au film une dimension métaphorique.

Le travail sonore contribue à cette subtilité : intercalant des râles d’animaux, des rires humains, des bruits de ficelles et des coups, il évoque la lente montée vers la déshumanisation qui menace les marionnettes. Les ficelles enchaînent ces êtres sans visages comme des animaux, à la fois objets de torture et béquilles vitales. Le film joue à maintenir cet équilibre précaire entre eux. Il dévoile également « les ficelles » du marionnettiste lui-même qui se trouve être le maître du destin de ces poupées. Le choix de la marionnette n’est donc pas fortuit, il est lui-même allégorique. Les personnages sont d’ores et déjà enchaînés à un même cordon et sont d’ailleurs semblables : ils se ressemblent et se perdent en une masse informe à la fin du film. Seul le sexe est visible, puisqu’une femme s’évertue à cacher un ventre rond symbolisé par un œuf.

A leur manière, ces êtres fragiles endossent les douleurs passées, celles des ancêtres, et celle, difficile, imposée par le devoir de mémoire : c’est bien le propos de « Body Memory  » (littéralement la mémoire corporelle). C’est dans le corps que se marquent les blessures : déjà, les images initiales des branches d’arbre évoquaient la nudité et le corps décharné. Le réalisateur suggère également une douleur morale : celle laissée par la culpabilité avec laquelle doivent souvent composer les enfants ou les petits enfants des personnes traversées par les camps de concentration. Le train qui passe à la fin du film devient une sorte de vers de terre gluant, laissant sur son passage une trace immonde, ultime clin d’œil à l’héritage mémoriel laissée par la terrible guerre.

Dounia Georgeon

Consulter la fiche technique du film

B comme Body Memory

Fiche technique

Synopsis : Notre corps se souvient de plus de choses que ce que nous imaginons, notre corps se souvient également des peines et tristesses de nos ascendances. Notre corps garde en lui la mémoire et les histoires de nos parents, grands-parents et de leurs ancêtres. Mais jusqu’où peut aller la mémoire de nos corps ?

Genre : Animation

Durée : 9’

Pays : Estonie

Année : 2011

Réalisation : Ülo Pikkov

Scénario : Ülo Pikkov

Image : Raivo Möllits

Animation : Märt Kivi

Montage : Ülo Pikkov

Son : Tiina Andreas

Musique : Mirjam Talli

Décors : Ülo Pikkov

Production : OÜ Nukufilm

Article associé : la critique du film

Etrange Court Métrange 2011

Dans les escaliers du Ciné TNB de Rennes, les murs ensanglantés vous indiquent la direction de la salle. Au détour d’un couloir, entre des candélabres ardents, un vampire livide vous accueille en souriant. Un peu plus loin, dans la foule qui s’entasse à l’heure de l’ouverture, vous croiserez sûrement encore quelques créatures inquiétantes, mais ne soyez pas surpris. Prenez quand même garde à votre cou et surveillez les palpitations de votre cœur, car ça y est, vous y êtes, c’est Court Métrange, et face à l’écran, attendez-vous à trembler !

Etrange… Insolite… Fantastique…

Trois concepts qui définissent à merveille le Festival et vous mettent dans le bain du frisson cinématographique. Films gore, d’épouvante, thrillers et contes à l’imaginaire débridé, poésie macabre, climax haletant, esthétique de l’angoisse, Court Métrange prend aux tripes en programmant au total près d’une soixantaine de bizarreries filmiques dont le point commun est de chercher à nous faire peur, rire ou pleurer.

La compétition européenne ne fait pas de quartier. Prenez donc un siège à la table de « Next Floor » de Denis Villeneuve pour goûter aux pesanteurs de l’abondance gastronomique. Onze complices tirés à quatre épingles vous y attendent pour se livrer à un furieux banquet. Pas besoin de mots pour avaler tous ces plats, l’important ici, c’est de manger ! Manger de la plus ignoble des façons, comme une ode à l’insatiable consommation, entre les valets affairés, les viandes saignantes et la musique de salon, car ici, on s’empiffre par passion, sans conscience et sans respiration. Sous les pieds des convives attablés que rien ne peut apaiser, le plancher commence à craquer. Succombant au poids de l’opulence, il s’écroule avec fracas. Le maître d’hôtel impassible et froid annonce à sa brigade que le service continue un étage plus bas. Descente aux enfers ou interminable fuite en avant, « Next floor » pointe du doigt l’absurdité d’un monde voué à s’effondrer.

Si la table de « Next floor » vous a laissé sur votre faim, invitez vous donc à celle de « Ctin » lorsque les douze coups de minuits sonnent. Avec le film horrifique et burlesque de Cyrille Drevon, venez vous offrir un délirant petit souper entre morts vivants dans une Ukraine radioactive. Régalez-vous donc d’un peu de démence post-apocalyptique, et entrez dans la danse macabre d’une pseudo science expérimentale. Entre tortures et rêves de création à la Frankenstein, un savant fou s’abîme dans une inconscience malsaine et morbide. Au milieu des décors désuets d’un monde glacé en un temps incertain, le docteur actionne les abominables machineries qui hantent son esprit. Dans un univers déjanté aux effets visuels très esthétiques assez référencés à Jeunet et Caro, « Ctin » dresse un sanglant tableau de la folie en jouant sur la frontière entre la vie et la mort.

Au registre des films purement terrifiants, le court métrage espagnol de Alberto Evangelio marque tant il réussit à vous faire tortiller d’effroi sur votre fauteuil. Avec « La Madre », pas de monstres effrayants ou d’effets spéciaux soignés, mais la narration d’un fait divers parfaitement amenée où une mère de famille modèle bascule dans une spirale infernale d’accidents domestiques qui la conduit à assassiner malgré elle ses trois enfants. Un déferlement de panique et de terreur qui, tout en vous tenant en haleine, parvient presque à chaque fois à vous faire deviner l’horreur de la scène suivante. Une intensité dramatique presque insoutenable pour un film qui réveille en nous les peurs les plus cauchemardesques.

Heureusement pour les cœurs plus sensibles, le cinéma fantastique n’est pas réservé qu’aux seuls films d’horreur, et Court Métrange s’ouvre à la large diversité du genre, notamment avec une programmation consistante de films d’animation. Parmi eux, « Cul de bouteille » de Jean-Claude Rozec, conte tendre et poétique d’un enfant atteint d’une infirmité banale, la myopie, et qui se trouve contraint de porter des lunettes. Seulement voilà… Plus rien ne ressemble au monde des enfants quand on doit voir avec les yeux des grands. Alors pourquoi abandonner sa vision d’un monde plein d’aventures incroyables, de figures légendaires et de mystères secrets pour mieux regarder une réalité médicale, insipide et froide ? Où sont donc cachés trolls, dragons et licornes derrière les épais carreaux d’un monde gris et uniforme ? Ne vaut-il pas mieux suivre les chemins de l’imaginaire, la liberté de vivre son propre rêve, d’être son propre héros ? Mais comment suivre ses chimères et se perdre dans de fabuleux univers, si pour de vrai, ce petit compagnon magique qui tient dans votre poche n’est finalement rien d’autre qu’une coquille vide ? Avec « Cul de bouteille », coproduction 100% bretonne réalisée en 2D et en noir et blanc, dont le dessin un peu caricatural joue sur la perception de la monstruosité, on est confronté à une certaine métaphysique de l’enfance, le dilemme du regard sur la vie et du refus de grandir. C’est surtout une invitation à réfléchir sur ce que devient l’enfant qui est en nous.

Pour les enfants un peu plus grands, peut-être ceux qui ont grandi dans les années 80 et qui se rappellent encore avoir passé des heures devant les premières consoles informatiques de l’époque Amstrad, le film incontournable de cette édition était peut-être « Pixels » de Patrick Jean. Lorsqu’un téléviseur à l’abandon se met à répandre une nuée de pixels sur la ville, la ville s’appelle New York, et les pixels s’incarnent inévitablement dans les avatars univoques de Space invaders ou de Tetris. Mêlant brillamment la 3D et la prise de vue réelle, les jeux sortent des écrans et envahissent le monde. Dans une attaque globale coordonnée, la ville est mise à sac par des créatures 8 bits : Pacman avale les lignes de stations de métro, Casse-briques envoie le Brooklyn Bridge dans l’Hudson, et Donkey (King) Kong, au sommet de l’Empire State Building, jette des barils de poudre qui pixellisent le monde en explosant. « Pixels », c’est l’histoire de la conquête technologique de toute une génération qui a réussi à transformer la planète en un énorme cube uniforme et sombre.

En complément de la sélection européenne, le festival proposait cette année trois focus sur des films internationaux avec des séances dédiées aux productions mexicaines, japonaises et américaines. Parmi les films mexicains, le court métrage en rotoscopie de Guadalupe Sanchez Sosa, « Niño de mis ojos », nous fait pénétrer dans l’univers intime d’une jeune femme qui partage son appartement avec un drôle de compagnon, un petit homme à peine plus haut qu’une pomme. Fraîcheur poétique d’une histoire d’amour irréelle et impossible, « Niño de mis ojos » nous invite, sur l’air envoutant de chansons traditionnelles mexicaines, à une tendre réflexion sur la pureté des sentiments amoureux.

Court Métrange est bel et bien un festival étrange. Une programmation riche et hétéroclite, une ambiance originale et décontractée, et un public rennais venu en nombre, Court Métrange sait créer de l’émotion pour nous faire passer un moment fantastique.

Xavier Gourdet

Brest, le palmarès 2011

Hier soir, s’est terminé le festival de Brest, aujourd’hui, avait lieu la reprise des films primés. Voici donc le palmarès.

Les prix décernés par le jury officiel

Grand Prix du Film Court de la Ville de Brest : Apele Tac d’Anca Miruna Lazarescu – Allemagne

Prix Révélation du Festival Européen du Film Court de Brest : Deux inconnus de Lauren Wolkstein & Christopher Radcliff -France

Mention spéciale à Lel Chamel de Youssef Chebbi – France

Prix Européen du Conseil régional de Bretagne : Det kommer aldrig att gå över d’Amanda Kernell – Suède

Mention spéciale à Salvatore de Bruno Urso & Fabrizio Urso – France

Prix du Moyen Métrage du Conseil général du Finistère : Sing me to sleep de Magnus Arnesen- Pologne

Mention spéciale à Baby de Daniel Mulloy – Royaume-Uni

Prix d’interprétation : Oliver Woollford dans Jam Today de Simon Ellis – Royaume-Uni

Mention spéciale à Shelly Levy dans Tro, håb og sex d’Emma Balcázar – Danemark

Les prix décernés par les autres jurys

Prix du Public : Suiker de Jeroen Annokkee – Pays-Bas

Prix Européen France 2 : La Huida de Victor Carrey – Espagne

Prix de la meilleure direction photo : Le Vivier de Sylvia Guillet – France

Mention spéciale : Lel Chamel de Youssef Chebbi – France

Prix Beaumarchais : Un homme debout de Foued Mansour – France

Prix du jury presse : Moški de Mina Bergant – Slovénie

Mention spéciale : Återfödelsen d’Hugo Lilja – Suède

Prix des passeurs de courts : Skallamann de Maria Bock – Norvège

Prix du jury jeune : Sing me to sleep de Magnus Arnesen – Pologne

Mention spéciale : Finale de Balazs Simonyi – Hongrie

Les prix décernés par les autres jurys

Prix Canal + Cocotte Minute : Šarena Laža de Miloš Tomic – République Tchèque

Prix du public Cocotte Minute : Maybe… de Pedro Resende – Portugal

Le Vivier de Sylvia Guillet

Après des films insolites comme « Le Serrurier » ou « O jeunesse », la jeune réalisatrice Sylvia Guillet, toujours entre le réel et l’imaginaire, réussit une fois de plus à nous surprendre. L’histoire, c’est celle de Mathilde, qui se barricade dans sa maison avec son mari André, fusil au bras. Quel est donc ce secret qu’elle cherche à préserver ? De quelle étrange maladie André souffre-t-il ?

Le titre du film constitue un premier indice : si le vivier est destiné à conserver des poissons vivants dans un espace restreint, la maison de Mathilde répond clairement à cette définition. Il ne reste, aux spectateurs que nous sommes, qu’à contempler cette femme nageant dans son bocal, vouée à contempler une photographie de mariage et cette peinture qui orne le mur de la chambre comme seules fenêtres sur le monde extérieur et sur une vie qui n’est plus. Mathilde, tel un poisson, parcourt cet espace clos de long en large, arpente les couloirs et tourbillonne dans les escaliers.

Dans cette maison isolée, la frustration et le désir se font sentir, notamment dans la magnifique scène où Mathilde s’allonge près de son mari. La sensualité des corps et des mouvements ainsi que le son perceptible des peaux qui se touchent, accompagné par cet air de piano doux-amer, et le bruit des vagues, tout deux invoqués à plusieurs reprises dans le film, ne font que souligner l’importance des corps et de leur fluidité.

Vagues, gouttes d’eau et glaçons constituent en effet un deuxième indice et remplissent les verres tout comme la maison en créant un univers visuel et sonore qui se déploie jusqu’au débordement soudain. Dégoût et effroi, c’est ce que provoque la vision du mari de Mathilde lorsqu’elle soulève le drap qui le recouvre. On partage le choc de celle-ci, et frissonne en découvrant cette chose qui cherche le regard du spectateur lorsqu’un gros plan nous met nez à nez avec le mari transformé en… poisson ! La situation tourne rapidement à l’horreur lorsque Mathilde, vêtue de sa robe de mariée déguste paisiblement son époux, assise autour d’une table où se dresse un véritable banquet de fête. Pour accompagner ce plat étonnant, Sylvia Guillet nous ressert ce même air de piano, qui monte en intensité comme pour souligner la cruauté de la scène.

On se délecte de cette histoire à la fois belle et absurde, et on se laisse volontiers emporter par la musique envoûtante de Lori Shonberg et par une ambiance sonore qui aura permis à Sylvia Guillet de remporter le Métrange Sonore au festival Court Métrange. Enfin, on se prend également au jeu d’Agnès Adam, formidable en épouse protectrice et pleine de sensualité.

Agathe Demanneville

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V comme Le Vivier

Fiche technique du film

Synopsis : Mathilde s’est barricadée dans la maison. Non, on ne lui prendra pas celui qu’elle aime. Elle veillera sur André jusqu’au bout. Mais au fait de quoi souffre-t-il ? D’une maladie étrange ça c’est sûr…

Genre : Fiction

Durée : 18’30 »

Pays : France

Année : 2010

Réalisation : Sylvia Guillet

Scénario : Sylvia Guillet

Image : Raul Fernandez

Son : Christophe Moreno, Ivan Broussegoutte, Henri Puizillout

Montage : Emmanuelle Pencalet

Décors : Véronique Barneoud

Musique : Lori Schonberg

Interprétation : Agnès Adam, Baptiste Roussillon, Bernard Mazzinghi

Production : Paris-Brest productions

Article associé : la critique du film

Court Métrange. Etrange, vous avez dit étrange ?

Fin octobre, la ville de Rennes accueillait un festival de courts de genre, Court Métrange, agrémenté de films d’animation et d’épouvante. Pendant quatre jours, les projections de films en compétition se sont succédées, en alternance avec des tables rondes (la femme vampire, le fantastique nippon) et des séances spéciales japonaises, mexicaines et américaines, avant de se clore dans le faux sang et les tenues invraisemblables au bal des Vampires. Focus sombre & fantastique de circonstance.

Retrouvez dans ce Focus :

Hugo Chesnard : « L’art recherche la nuance et peut craindre le pathos »

C’est un régisseur qui parle de rossignols maléfiques, c’est aussi un réalisateur qui cite de mémoire des passages en vers de son film. Militant social, Hugo Chesnard, l’auteur de « La France qui se lève tôt », pré-sélectionné aux César, évoque, après la séance de son film à Paris Courts Devant, la puissance du montage, les libertés à prendre avec le réalisme et la volonté de crier sans y parvenir.

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Tu as fait trois courts en dix ans, après une formation plutôt théorique (la Sorbonne, le Conservatoire Libre du Cinéma français). Comment as-tu été confronté à l’idée de faire un film ?

Très jeune, je me suis intéressé au cinéma. J’ai vu beaucoup de films et commencé des études spécialisées mais mon approche restait très théorique. J’ai fait des petits films qui ne sont pas montrables, plus des films de potes qu’autre chose. Au début, on mettait une semaine pour faire un film, après, les envies se sont approfondies et le temps s’est rallongé : trois semaines, puis trois mois, puis trois ans pour faire un film.

J’ai commencé à faire des stages. Je savais que je serais incapable de rester six mois dans une salle de montage, mais je cherchais à comprendre la puissance du montage dans une optique de réalisation. J’avais 20-21 ans, j’entendais parler de cette force de création mais cela me dépassait complètement. La compréhension est arrivée par déclics. Pendant un an, j’en ai parlé avec des apprentis monteurs et des professeurs, puis, j’ai été amené à monter pratiquement tout seul mon premier film, « Le bal des familles ». La compréhension est arrivée par déclics : deux-trois ans plus tard, on repense à une conversation et on percute. On a grandi.

Plusieurs années peuvent s’écouler entre deux films. Tu fais beaucoup de régie, sur des gros projets comme « Munich » ou « Le Diable s’habille en Prada ». Tu m’expliques ?!

Il faut gagner sa vie. J’ai rencontré un régisseur général qui collaborait à des grosses pubs et des gros films américains. On a travaillé ensemble sur des tournages importants, Scorcese, Eastwood, Nolan, …. Ça figure sur un CV, ça veut dire quelque chose, mais aujourd’hui, je travaille beaucoup plus en pub et en clip. J’adore ce métier de logistique, ce côté chef de troupe même si il n’y a rien d’artistique derrière ça. Il y a plein de choses auxquelles il faut penser, on est en amont du tournage, on est le premier arrivé et le dernier parti. Après, ça reste un métier pour gagner sa vie; si demain, je peux gagner ma vie de la réalisation, j’arrêterai progressivement la régie.

Le côté chef de troupe, c’est quelque chose qui t’aide à diriger un tournage ?

Pour un réalisateur, je ne suis pas sur mon nuage, genre « il n’y a que la création qui compte ». Je suis très conscient des problèmes techniques, logistiques, budgétaires. Quand un projet se fait, j’envoie beaucoup de mails à beaucoup de gens. Pour les courts où les gens ne sont pas payés, voire très peu payés, ça mâche déjà le travail.

« Le bal des familles » était-il un film très écrit ?

Non, pas du tout. Des amis et voisins à Malakoff avaient un groupe qui générait une ambiance fabuleuse en concert. Toutes les générations, les couleurs, les classes sociales se mélangeaient. J’avais une petite caméra, un banc de montage, ils m’ont proposé de faire un film sur eux. On a commencé à filmer le groupe pendant quelques minutes, mais ce n’étaient pas les musiciens qui étaient vraiment intéressants. C’était le contre-champ, le public. On a choisi différentes personnes et le film s’est axé autour du rapport entre la danse et la séduction. On a suivi plusieurs femmes de générations différentes en leur posant des questions.

C’était le premier film, un documentaire de vingt minutes qui parlait aux autres, auto-produit avec un vrai travail de montage. J’ai appris à raconter une histoire avec des images. Pouvoir recréer un puzzle, placer un personnage, l’enlever parce que l’histoire ne tient pas, a été une vraie école de réalisation.

« La France qui se lève tôt » aurait pu être un autre documentaire. Il s’inspire d’une histoire vraie, mais c’est une fiction. Quelle en est sa genèse ?

Je venais d’avoir l’idée de mon deuxième film, « Un grain de beauté » quand je suis tombé sur un fait divers dans un journal. Dans un encart, on parlait du cas d’un sans-papiers, Souleymane Bagayogo, qui venait de se faire expulser après avoir participé à un mouvement de protestation de grève dans le magasin dans lequel il travaillait. Le premier avion n’avait pas décollé car les passagers s’étaient soulevés, le deuxième avion, par contre, avait emmené Souleymane.

Cette histoire me plaisait parce qu’on était dans la vraie vie et que les thèmes étaient très riches : ça mêlait le droit du travail, les sans-papiers, la lutte, la désobéissance civile. Je me suis beaucoup documenté sur cette affaire-là, j’ai écrit une version réaliste de cette histoire-là en m’en détachant un petit peu mais ça restait quand même celle de Souleymane, version réaliste.

Ce scénario a été reçu aux ateliers d’écriture de Gindou où des scénaristes sont accueillis et encadrés dans le Lot pendant une semaine. On les coache par rapport à leurs scénarios et aux problèmes qu’ils rencontrent. Personnellement, je me rendais compte qu’il y avait une brutalité de la vie dans cette expulsion de sans-papiers où ça criait, pleurait, pissait le sang à chaque page. J’avais le choix : je pouvais amoindrir le propos donc retenir de l’information ou je me risquais du côté de la caricature en montrant des flics qui étaient des brutes et qui gagnaient des points quand ils expulsaient des sans-papiers. Mais c’est vrai que c’était trop pour le cinéma et pour l’art. L’art recherche la nuance et peut craindre le pathos. Est arrivée une troisième possibilité : le recours à la comédie musicale.

On pouvait rester complètement crédible par rapport à une expulsion de sans-papiers, faire quelque chose de dur, de fort, interpellant en choisissant de faire parler les acteurs en vers, de les faire danser et de les faire chanter. Cela a permis des libertés assez énormes. Le policier n’est plus une brute d’1m90 avec un physique de rugbyman, il a un côté bon père de famille, genre rossignol maléfique, il peut se permettre de dire : « Je suis un policer qui raccompagne les sans-papiers. Je suis un simple flic qui raccompagne les gens en Afrique. C’est la démocratie de suivre l’ordre établi ». Le choix de la comédie musicale peut permettre ce genre de choses et même de sortir d’une certaine forme de réalisme pour mieux le retrouver plus tard.

Ne craignais-tu pas que ton message se déforce en passant par la comédie musicale ?

Ça a pu être une crainte à l’écriture et même avant le tournage. Je me suis dit que l’idée d’une comédie musicale sur les sans-papiers était peut-être une mauvaise idée, que ça n’allait peut-être pas marcher. Au fil du tournage, on a quand même vu de belles choses, de supers plans, une intensité dramatique. Comme on a tourné le film en continu, on a terminé le tournage dans l’avion avec des figurants qui étaient des militants sans-papiers. Les gens qui étaient à droite de la caméra avaient des paroles de droite, celles qui étaient à gauche avaient un discours plus humaniste. On n’a pas peur dans l’opérette d’aller vers ces idées-là. Je ne cherchais pas spécialement des personnes investies, mais à la fin du film, quand ils se lèvent tous, on sent l’implication et l’émotion. Je pense que beaucoup de gens se lèvent, sont révoltés pour différentes choses sans être révolutionnaires. On est offusqué, gêné par plein de choses mais le cri ne sort pas parce qu’on n’a pas les mots. C’est aussi pour ça que j’aime beaucoup la chanson de la fin qui pose la question : « Qui a raison, qui a tort ? Celui qui crie, qui dort ? ».

C’est très différent d’écrire un film que d’écrire une chanson. Peux-tu me parler de ta démarche musicale ?

J’ai attaqué le film en deux parties. J’ai transformé les dialogues grâce à la version réaliste du départ, elle m’a aidé à retrouver les mêmes situations et les bons mots qui allaient faire mouche à chaque fois. Puis, j’ai travaillé avec le compositeur, Serge Balu qui joue le rôle du geôlier. Il a écrit pas mal de chansons dont celle de la fin, « Ils arriveront quand même ». Je lui donnais des idées, des sentiments, des émotions et il réfléchissait à une musique. Par exemple, dans une scène, le geôlier vend les mérites du centre de rétention comme s’il vendait son appartement. Cette idée est venue en épluchant un dossier qui parlait d’un centre de rétention, une petite phrase m’avait interpellé : « les usagers ont un distributeur de bonbons à leur disposition ». On enferme des gens qui travaillent, cotisent, payent des impôts, font le choix de vivre en France, ont des enfants scolarisés dans ce pays, on les arrache de leur famille pour les renvoyer dans un pays qu’ils ne connaissent plus parce que ça fait cinq-dix ans qu’ils n’y ont plus mis les pieds, mais ils ont droit à des bonbons…

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Qu’est-ce qui t’a incité à travailler avec Ricky Tribord, le Souleymane de ton film ?

Je ne le connaissais pas. J’ai épluché les sites d’agences, j’ai casté pas mal d’acteurs noirs, je cherchais au début un physique à la Spartacus, même si je ne restais pas bloqué uniquement là-dessus. Un jour, Denis Gravouil, le chef op du film, me parle de Ricky Tribord, avec qui il avait tourné en me disant qu’il était vraiment bon. Je le reçois pour un essai, on joue ensemble la séquence du contremaitre et j’en garde vraiment une bonne impression. C’est un punchy, j’avais l’impression d’être en face d’un boxeur qui me donnait des droites à chaque réplique. Boum, boum, boum.

Est-ce qu’il a donné quelque chose en plus parce qu’il était touché parce que c’était une histoire ou il était juste dans son rôle d’acteur ?

Je pense que le scénario et que cette situation inhumaine l’avaient touché. Après, ce n’est pas un militant qui défend des causes chaque weekend, il a vraiment pris ça comme un rôle d’acteur, comme un vrai travail pour camper ce personnage peu à peu détruit par un rouleau compresseur.

« La France » est un film pro, ambitieux. Ça a été difficile de le produire ?

Je considère qu’« Un grain » est aussi un film pro, il a eu un visa CNC et une aide d’une région, mais c’est sûr que « La France » n’a rien à voir. C’est un court métrage qui coûte cher, on devait être 50 à table. Je remercie les producteurs (Buttlerfly Productions) qui n’ont pas eu peur de ce genre de projet. Je l’avais envoyé à différentes boîtes de production avant de trouver preneur. Les gens me disaient : « C’est super mais ce n’est pas pour nous. Ça va nous prendre trop de temps, trop d’énergie, et on n’est pas sûr qu’on va réussir à le faire ».

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Est-ce que Souleymane Bagayogo a vu ton film ?

Oui, il l’a vu, il l’a beaucoup aimé. Il s’est retrouvé dedans sans s’y reconnaître complètement. On a gardé le prénom en hommage à lui mais des Souleymane, il y en a plein, il y a plusieurs dizaines de milliers d’expulsions de sans-papiers par an. On a raconté une histoire, mais beaucoup de libertés ont été prises par rapport à ce qu’il lui est arrivé. Ce qu’il a connu était encore plus dramatique. Il m’a raconté une anecdote : quand il était dans le centre de rétention, il était dans un tel stress qu’il n’arrivait plus à porter ses bras à sa bouche pour manger, il se nourrissait donc à même l’assiette. Quand je te disais tout à l’heure que je voulais raconter son histoire en version réaliste, qu’est-ce que j’avais dans mon scénario ? Des cris, des pleurs, de la douleur, une famille impuissante, des passages à tabac, un mec paralysé qui bouffe à même l’assiette, une expulsion musclée, … C’est tellement dur à chaque seconde que ça ne se tient pas d’un point de vue cinématographique.

Le passage au long, c’est quelque chose que tu envisages déjà ?

J’y pense, oui. Je suis en train de développer sur un long métrage le même concept que « La France », je voudrais garder ce côté social, poétique, chorégraphique et peut-être m’orienter un peu plus vers la comédie, sur la solidarité populaire, vers un film un peu moins grave, un peu plus joyeux.

Tu as besoin à ce stade-ci de faire un film plus joyeux ?

Non, je n’en ai pas besoin Après, il y a une réalité de production : faire un film qui coûte cher et qui est une tragédie, c’est quelque chose de très dur à monter. J’aimerais me diriger vers un film mi-drôle, mi-triste, une sorte de bouillon humain qui croiserait un « West Side Story » et un Brecht.

Propos recueillis par Katia Bayer

Article associé : la critique du film

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Média 10-10, la compétition OVNI

Le Festival du court métrage de Namur Média 10/10 s’ouvre bientôt, avec une compétition moins connue que l’officielle, celle des films OVNI (Objets Visuels Non Identifiés).

Compétition 1 OVNI

Miramen (Khristine Gillard / Marc Rebuttini)

Miramen ¬— du provençal, mirage. La Camargue est une île qui demande à l’homme qui l’habite de faire corps avec elle. Ce monde de l’entre deux, entre terres et eaux, est celui de la rencontre du fleuve, de la mer et de la communauté des étangs. C’est un monde de gestes — ceux du gardian-centaure, du pêcheur d’étang, du tellinier, du chasseur des marais — inscrits dans les corps et les paysages. Une relation au sauvage.
Là veille la Bête.

Trinkler (Marie-Catherine Theiler)

Quel est le lien entre, par exemple, des opticiens, des musiciens ou des éleveurs de moutons? Une topographie du travail au cœur des Alpes suisses, avec pour commun dénominateur le son des cloches.

Death of Conversation (the) (Francisco Saco)

A reflection on the sorry state of communication. Two gentlemen comment upon the nature of talking through talking. It becomes a routine, as they tend to observe and reflect upon mundane scenarios and situations, never really reaching a specific destination.

Djoûû (Djamil Beloucif)

C’est l’histoire d’une rencontre entre deux clandestins qui ont « faim » de liberté. « Djoûû » signifiant « faim » en arabe. Métaphore du mythe de la « Tour de Babel », le film met en scène des « maudits » qui, portés par leur rêve, s’échouent quelque part où leurs mots se heurtent
sans s’entrelacer.
Doivent-ils parler la même langue pour se comprendre ?

I KNOW YOU CAN HEAR ME (Miguel Fonseca)

A film about love inside a film about war.

Metalliszt – The Road to Victory (The) (Robert Sawallisch)

The Music Clip « The Metalliszt – Road to Victory » puts Franz Liszt into the 21th Century as a Rockstar. He tours through different european cities that influenced him in his life and comes to a furious final to Weimar. Meanwhile he experiences an autobiographic Time-Travel through a part of his life that was dominated by excess and euphoria. In those days Liszt became a kind of prototype of what we would call a modern european citizen. And therefore this film is a winking hommage to Liszt, as an early visionary, who lived the dream of a united europe.

Compétition 2 OVNI

New Hippie Future (Dalibor Baric)

In a surreal and psychedelic atmosphere this film deals with life, freedom and transcendence of limitations.

Stick Climbing (Daniel Zimmermann)

A contemplative walk leads to a bizarre climbing tour. The camera that has just panned over everyday village life now homes in on a construction of wooden slats to then follow a breakneck route up a vertical rock face. From the perspective of the invisible climber, we experience a seemingly impossible ascent while hearing his breath growing heavier and heavier with every move. Having reached the top, the camera roams one more time over the point of departure – the village now in the distance, only a few exciting minutes of film and a tangible eternity away below the rock face.
(Robert Buchschwenter)

Reconstructing Sudan (Marta Kucza)

En quête de la représentation parfaite de mes mémoires du Sud-Soudan, je rassemble les morceaux de conversations, images et sons quisemblent ne pas faire partie de la réalité soudanaise. C’est une histoire sur la lutte entre la fascination exotique, la frustration des représentations existantes et l’impossibilité de transmettre la mémoire. Comment aborder à la fois la beauté de la vie et sa représentation ? Dans Re-constructing Sudan, l’amitié et l’amour est le canal par lequel une image me semble possible.

Tran (Miguel Aparicio)

Late February 2011 I was invited to spend some days in the city of Vitoria to shoot a short-film. The final result is this logbook from trips in the city’s tram, filmed with a 16mm string camera and developed by hand those same days.

Un film abécédaire (Saintagnan Eléonore)

Hommage à des individus cherchant le bonheur en dehors des sentiers battus, là où n’est pas l’évidence. Ceux qui alimentent leurs mythes et adorent leurs dieux, qu’il s’agisse des Dieux Vikings ou du Rock’n Roll, un Saint Nicolas ou un frère Joseph.

Spiral Hill (Jean De Lacoste)

This film is a part from my psychic diary. It’s why I wanted to translate a psychic travel with different « affect » places : like a road movie. Also, my relation to filming locations inspire my work every time.