Tous les articles par Katia Bayer

La Maladie blanche, Prix Format Court au Festival de Vendôme 2011

Après avoir assisté aux six programmes de la compétition nationale, le Jury Format Court présent à la 20e édition du Festival du Film de Vendôme (Isabelle Mayor, Franck Unimon et Camille Monin) a décidé de remettre le prix Format Court au court-métrage « La Maladie blanche » de Christelle Lheureux. Le film a séduit le Jury, non seulement par sa forme qui vacille entre le documentaire, l’expérimental et la fiction, que par son fond traitant de la mémoire et de la sensible frontière qu’il existe entre l’enfance et l’âge adulte.

« La Maladie blanche » de Christelle Lheureux – 2011 – 42′ – Production: Les Films des Lucioles

Un soir de fête dans un village isolé des Pyrénées. Un père et sa fille de cinq ans, Myrtille. Des adolescents, un chasseur, un berger, des lucioles, des brebis et des chats. Un monde nocturne où des histoires d’ombres chinoises, de miroir magique et de peintures préhistoriques s’entremêlent. Dans la nuit, un être préhistorique vient chercher Myrtille.

Le film primé bénéficie d’un dossier spécial en ligne ainsi que d’une projection au Studio des Ursulines (Paris, 5) le jeudi 11 octobre 2012.

Le Jury Format Court a également décidé de remettre une Mention Spéciale au film « Un monde sans femmes » de Guillaume Brac – 2011 – 57′ – Production : Année Zéro.

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Floris Kaayk. Anticipation, insectes et symbolisme

“The Origin Of Creatures” est un film qui n’a pas laissé indifférent le jury du prix Format Court – Paris Courts Devant 2011, ce n’est d’ailleurs pas un hasard si ce premier court métrage de fiction a été sélectionné pour représenter la Hollande aux Oscars. Dans cet interview, Floris Kaayk, son réalisateur, nous explique avec précision et sincérité ses influences, son travail et son parcours.

Vous avez commencé votre carrière avec deux docu-fictions dans lesquels technologie et réalité interagissent : « The Order Electrus » et « Metalosis Maligna ». Qu’avez-vous cherché à faire avec ces deux oeuvres ?

Dans ces deux films, j’ai voulu dépeindre une vision futuriste angoissante, en jouant sur les conséquences imprévues que peut entraîner la phase initiale des développements technologiques. Chaque phase de début est souvent accompagnée de problèmes inattendus. Dans « Metalosis Maligna » et « The Order Electrus », je montre quelques uns de ces détours.

La fiction dans ces films est représentée de manière plausible, à l’aide du documentaire informatif. On associe ce format avec la précision scientifique, ce qui a garanti la confusion entre réalité et fiction et m’a permis de présenter mon univers inventé comme étant la réalité. Ça renforce le côté absurde et crée l’humour étrange qui caractérise ces deux films.

Vous réalisez ensuite un court métrage totalement fictionnel et en animation, “The Origin Of Creatures”. Comment vous est venue l’idée d’adapter le récit biblique de Babel en utilisant des membres du corps? Pouvez-vous nous expliquer ce choix et l’origine de ce projet ?

Je suis passionné par le monde des insectes. Chaque fois que je vois un documentaire sur ces merveilleuses créatures, je suis hypnotisé par leurs formes, leurs habitudes et leurs modes de communication bizarres. Pour ce film, je me suis particulièrement inspiré du mode de fonctionnement des colonies et du fait que les fourmis ne fonctionnent qu’en collaboration. En même temps, je voulais que mon sujet reste proche du corps humain. J’ai donc décidé de créer une colonie de membres humains, chacun avec son rôle précis, à l’instar des colonies d’insectes.

En cherchant un récit pour situer cette colonie de membres, j’ai découvert une des histoires les plus célèbres sur la collaboration, celle de la Tour de Babel. Le lien entre cette fable et mes colonies m’a fasciné, surtout en raison du développement dramatique dans l’histoire biblique, quand Dieu sème le désordre en donnant à chaque personne une langue différente. J’ai pensé que cet élément serait utile pour la chute de mon film.

Dans mon film, Dieu est représenté par le soleil, source éternelle de vie sur notre planète, ce qui a servi de lien également avec certaines espèces de fourmis qui construisent leurs nids en direction du soleil, pour capter la chaleur pour la reine et ses larves. Du coup, le soleil joue un rôle très important dans « The Origin of Creatures », qu’on peut interpréter de deux manières bien contrastées : religieuse ou scientifique, évolutionnaire.

Ce qui fait basculer le sort du fragile édifice est une petite faute d’inattention (le pouce devant l’œil) qui va suffire pour casser l’élan qui a réuni tous ces petits êtres. Est-ce une forme de fatalisme pour vous ? Pourquoi avoir choisi ce petit détail comme origine de la chute de la construction?

Avant que le doigt n’aveugle l’œil, le ciel devient nuageux et couvert. C’est alors que la tour fragile grandit pour s’approcher du soleil. Dans la fable de la Tour de Babel, c’est à ce moment-là que Dieu attribue une langue à chaque personnage, pour freiner leurs actions. Donc pour moi, c’était aussi le moment de diffuser l’incommunication dans la Colonie. Le doigt qui couvre l’œil symbolise le déclenchement du chaos et la disparition de l’espoir. La confusion commence lorsque l’œil ne voit plus et se répand comme une réaction en chaîne sur tous les collaborateurs.

Parlez-nous du personnage étrange qui accouche dans une grotte sous la Tour. Quel est son lien avec le soleil ?

Ce personnage est la reine de la Colonie des Membres et est construit à l’image de la reine des fourmis. Elle seule peut donner naissance à de nouvelles créatures. Du coup, c’est le personnage le plus important, la source de vie, sans pour autant être le chef, car il n’y a pas de chef dans cette société.

La reine peut accoucher seulement si elle sent la chaleur du soleil. C’est pourquoi tous les aides et les infirmières la dirigent vers le soleil. Ils veulent créer des conditions idéales pour que la colonie puisse grandir.

Les deux premiers « personnages » qui apparaissent dans le film – les doigts et l’œil – ne proviennent pas de la « matrice ». Ils émergent des gravats et finissent par y retourner. Que représentent-ils symboliquement à vos yeux?

En fait, ils proviennent de la matrice, comme tous les personnages. Ils sont nés avant les autres et ont survécu des chutes antérieures de la Tour. Ensuite, ils se sont cachés dans les gravats. Comme tous les autres personnages, ils attendent l’apparition du soleil pour sortir des ruines. Ces deux personnages symbolisent les messagers de la colonie et sont présents à l’ouverture et à la fin du récit, en tant que protagonistes en quelque sorte.

L’utilisation de parties du corps ayant leur propre vie peut faire penser par moments à certains travaux de Jan Švankmajer. Est-ce un rapprochement dont vous avez conscience?

Je connais le travail de Švankmajer et j’aime beaucoup ses films. Il est possible que je sois influencé par son œuvre, étant donné que c’était le premier animateur qu’on a étudié en cours d’histoire de l’animation à l’académie. J’aime son sens de l’absurde, qui fait que ses films sont à la fois humoristiques et poétiques.

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Pouvez-vous nous parler des différentes techniques employées dans le film (3D, maquettes, etc…)? Est-ce que ça a été un projet compliqué à animer?

Tout l’arrière-plan a été réalisé avec des maquettes issues du modélisme ferroviaire, qu’on a filmées avec un objectif périscopique. C’était difficile de filmer des maisons aussi petites. On a fini par construire un stabilisateur qui nous a permis de programmer des mouvements de caméra à cette petite échelle. Ça à l’air fou, j’aurais pu tout faire en numérique, mais j’aime bien l’aspect naturel de l’image. Les imperfections de l’objectif, la texture des surfaces des bâtiments, et le caractère aléatoire des gravats, tout ça aurait paru trop soigné en digital.

J’ai ensuite assemblé les personnages numériques aux images filmées à l’aide du tracking de la caméra. Les personnages sont tous animés en volume et numérisés. Je les ai basés sur des photographies de mon propre corps, avec lesquels j’ai fait du « compositing ». Finalement, j’ai dû m’y reprendre à plusieurs fois pour arriver au même bokeh (flou au second plan) et aux mêmes couleurs que mon objectif. Je suis très content du résultat, même si cela a été un sacré défi à relever !

Quels ont été les retours sur le film ?

Au début, je m’attendais à ce que le film soit mieux reçu, vu le temps (3 ans) et les efforts que j’y ai consacrés. J’aurai aimé faire la première à Cannes, mais ce n’était pas possible. Alors, j’ai voulu être candidat néerlandais aux Oscars, et heureusement, ça a marché. Depuis, les choses vont mieux. Après un an et demi de distribution, le film a été projeté dans plusieurs festivals de cinéma et d’art média et a gagné 9 prix. C’est mon film le plus réussi jusqu’ici.

Parlez-nous de votre processus de création. Quel est votre mode de fonctionnement ?

Le processus de création a lieu aux moments les plus inattendus. J’arrive à en maîtriser quelques-uns maintenant, par exemple, le trajet à vélo du studio jusqu’à mon domicile me donne toujours de nouvelles idées ou bien, c’est sous la douche que je trouve des solutions aux problèmes d’une longue journée. J’ai récemment découvert que j’ai des pensées créatives pendant des discussions ennuyeuses, quand mon esprit divague. Subitement, je tombe sur une idée pour un film. Me mettre devant une page Word ou un écran de Photoshop vide me coûte trop d’effort.

Pouvez-vous nous dire un mot sur votre style d’animation ? Etes-vous inspiré par d’autres films et/ou animateurs ?

Mon style d’animation est principalement basé sur des mouvements de la vie réelle, comme ceux des insectes ou des gens. Mon style est caractérisé par un mélange de réalisme. Je ne me focalise pas sur des styles de mouvement particuliers, comme on en voit dans les animations du type cartoons. J’ai du mal à identifier des réalisateurs qui m’inspirent. Souvent, c’est un détail ou un plan qui m’interpelle. Quelques films qui m’ont inspiré sont : « The Road », « Blade Runner », « Jona/Tomberry », « Born Free » et « Les possibilités du dialogue » de Švankmajer.

Avez-vous des projets de films à venir ou en cours ?

J’aimerais rester curieux, essayer de nouvelles choses, me lancer des défis constamment, et continuer à mettre en scène mes mondes imaginaires. Peu importe que ce soit de l’animation, de la live-action ou une combinaison des deux. Il ne s’agit pas de la technique mais de la créativité et de l’imagination. Je voudrais rester proche de cette pensée dans mes projets futurs.

Propos recueillis par Julien Beaunay et Julien Savès

Articles associés : « Le reportage « The Order Electrus et Metalosis Maligna« , la critique de « The Origin of Creatures »

O comme The Origin of Creatures

Fiche technique

Synopsis : La vision futuriste d’un monde après un désastre catastrophique. Dans cette parabole, des membres mutés autonomes sont à la recherche d’une coopération, mais en raison de problèmes de communication, cette mission est vouée à l’échec.

Genre : Animation

Durée : 12′

Pays : Pays-Bas

Année : 2010

Réalisation : Floris Kaayk

Scénario : Floris Kaayk

Image : Reinier van Brummelen

Animation : Floris Kaayk

Effets Visuels : Alex de Heus

Montage : Floris Kaayk

Son : Erik Griekspoor, Bart Jilesen, Elena Martin Hidalgo

Décors : Gijs Kaayk

Musique : Lennert Busch

Production : Koert Davidse, Marc Thelosen, Yan Ting Yuen

Articles associés : l’interview de Floris Kaaykla critique du film

Pologne en courts au festival Kinopolska

Le Festival Kinopolska célèbre, pour sa quatrième édition, le cinéma polonais du 7 au 13 décembre prochains, au Reflet Médicis (Paris, 75005), en mettant en avant le ciné bref à travers trois programmes mêlant des films de fiction et d’animation qui, selon des procédés esthétiques divers, posent un regard neuf sur les questionnements de la Pologne actuelle.

LA POLOGNE EN COURTS – PROGRAMME 1, Mercredi 7 décembre à 15h. En présence de Jarek Sztandera.

CE QUE DISENT LES MÉDECINS (Co mówią lekarze) – Un film de Michał Wnuk – 2009 – 24min. – Béta Num – VOSTF

Docteur Glik, une anesthésiste dont le métier est une passion depuis longtemps révolue, souhaite déclarer le corps d’une jeune fille, à peine décédée, comme potentiel donneur d’organes. Contrainte d’annoncer la mort à sa mère et de la convaincre, elle doit redoubler d’efforts et d’arguments pour lui faire comprendre l’urgence de la situation.

LUXURE (Luksus) de Jarek Sztandera – 2009 – 38min. – Béta Num – VOSTF

Réunis dans la pauvreté et le malheur, un adolescent et un enfant errent dans les rues de Varsovie. Commence alors une plongée dans le monde des laissés-pour-compte où les larcins deviennent la norme et où la prostitution est un moyen de survivre.

HORS D’ATTEINTE (Poza zasięgiem) – Un film de Jakub Stozek – 2010 – 30min. – Béta Num – VOSTF

Délaissées par leur mère, Klaudia et Karolina sont contraintes d’apprendre à devenir davantage indépendantes et responsables que les autres adolescentes. Matures, elles résolvent leurs problèmes toutes seules, se soutiennent en toutes circonstances.

NOISE de Przymyslaw Adamski – 2010 – 7 min. – Béta Num – VOSTF

Conçu comme un travail formel, le film donne néanmoins une rôle prépondérant au son, ce dernier anticipant l’émergence des images. Les bruits qui s’intègrent dans l’appartement du protagoniste sont des objets d’interprétation personnelle de ce dernier.

LA POLOGNE EN COURTS – PROGRAMME 2, Jeudi 8 décembre à 15h. En présence de Tomasz Jurkiewicz

MAMIE S’EN VA (Babcia wyjeżdża) – Un film de Tomasz Jurkiewicz – 2009 – 18min. – Béta Num – VOSTF

Jurek, un garçon de seize ans, a des problèmes d’intégration au lycée. Son problème : il ment tout le temps. Bientôt son habilité à repousser la réalité lui sera utile. Après que sa grand-mère, avec qui il entretient une relation proche, entre à l’hôpital, Jurek doit s’arranger avec son père alcoolique. Les mensonges lui permettront-ils de dépasser cette situation sociale et existentielle compliquée ?

TWIST AND BLOOD – Un film de Jakub Czekaj – 2010 – 32min. – Béta Num – VOSTF

Un jeune garçon est ridiculisé par ses camarades de classe à cause de son obésité. Ses parents désirent qu’il retrouve un poids normal à tous prix. Mais lui a trouvé sa manière de contourner ces pressions et de vivre comme il l’entend.

UN MORCEAU D’ETE (Kawałek lata) – Un film de Marta Minorowicz – 2010 – 24min. – Béta Num – VOSTF

La fin de l’été, la fin des vacances. Un garçon rend visite à son grand-père qui vit et travaille dans les forêts en montagnes. Entourés par une nature sauvage et la sévère réalité, il tente de retisser leurs liens.

UNDERLIFE – Un film de Jarosław Konopka – 2010 – 8min. – Béta Num – VOSTF

S’inspirant de la “Berceuse” (“Kołysanka”) du maître du jazz Krzysztof Komeda, ce court-métrage d’animation s’emploie à métaphoriser, à l’aide de motifs comme celui du berceau, l’influence destructrice des ancêtres sur l’homme et pose une question sur la capacité de se libérer d’eux. Il soulève le problème universel des déterminations de l’inconscient qui conditionnent et définissent nos vies.

LA POLOGNE EN COURTS – PROGRAMME 3, Vendredi 9 décembre à 15h. En présence de Bartek Konopka

LES TROIS GARNEMENTS (Trójka do wzięcia) – Un film de Bartek Konopka – 2006 – 37min. – Béta Num – VOSTF

Le film suit la vie d’Inga, une jeune fille de 16 ans, qui fait face à une situation difficile : à la mort de sa mère, Inga doit prendre en charge son petit frère et sa petite sœur. Inga erre, accompagnée de deux enfants, depuis la maison de son petit ami vers celle de sa tante. Progressivement, elle devient une véritable mère pour les enfants. Pour ces sacrifices, elle reçoit une récompense inhabituelle.

DEUX PAS EN ARRIÈRE… (Dwa kroki za…) – Un film de Paulina Majda – 2010 – 8min. – Béta Num – VOSTF

C’est l’histoire d’une famille de paysans où se succèdent séparations, retrouvailles et adieux. Réalisé à partir de motifs découpés et d’une riche bande-son, ce court-métrage d’animation fait référence au problème de l’émigration des Polonais et tente de répondre à la question : Pourquoi ? Qu’est-ce qui pousse les citoyens à quitter leur maison, leur rue, leur espace, leur pays ?

JOUE AVEC MOI (Zagraj ze mną) – Un film de Rafał Skalski – 2010 – 30min. – Béta Num – VOSTF

Hania et Paweł, un couple récemment marié, traversent leur première crise. Incapable de trouver des moyens d’apaisement, chacun s’enferme dans son propre monde. Hania se captive pour un jeu vidéo où elle crée le personnage de Lucjan, l’homme parfait. Brusquement, un jour, Lucjan devient réel et s’installe dans l’appartement du couple. Une situation qui ouvre le film sur une exploration des rêves les plus personnels.

Infos pratiques

Reflet Médicis : 3, rue Champollion, 75005 Paris

Le site du festival : www.kinopolska.fr

The Order Electrus et Metalosis Maligna de Floris Kaayk

« The Order Electrus » et « Metalosis Maligna », respectivement sortis en 2005 et 2006, sont deux faux documentaires de sept minutes, qui s’intéressent aux dérives liées aux progrès technologiques du monde moderne. Au travers de ces deux œuvres courtes, le réalisateur néerlandais Floris Kaayk propose un univers unique, reposant sur le mélange habile d’effets spéciaux et d’images réelles, au service de récits d’anticipation remplis d’humour noir et d’imaginaire fantastique.

The Order Electrus

« The Order Electrus » se présente comme un documentaire animalier qui suit la naissance et la survie d’insectes dans des friches industrielles abandonnées en Allemagne. Cependant, il s’agit d’insectes bien particuliers, puisqu’ils sont constitués de pièces d’appareils électroniques obsolètes. Nous voyons ainsi évoluer à l’écran d’anciennes puces et diodes qui se sont adaptées à leur habitat naturel et ont muté vers une nouvelle forme de vie alliant mécanique et vie naturelle.

Détournant les scènes clés du documentaire animalier, Floris Kaayk donne un ton amusant et humoristique à son film, notamment lors d’un accouplement aux multiples « étincelles », ou encore lors d’une scène décrivant une colonie d’insectes-robots travaillant d’arrache-pied pour la construction de leur nid, ou enfin lors d’une attaque de prédateur sous la forme d’un raccordement électrique se fondant dans le paysage par mimétisme.

Le film se termine sur la présentation du fameux nid, sorte de ruche tout en métal, sur lequel les insectes doivent retirer l’eau minutieusement, car c’est une source de rouille. Il est d’ailleurs intéressant de noter l’utilisation de l’eau à l’inverse de la symbolique de vie intrinsèque qui, usuellement, en émane. La voix du narrateur se fait alors plus lyrique, la musique plus enlevée, on nous promet l’arrivée d’un nouveau monde « magique » appelé à se reproduire partout, un nouvel ordre électrique : « The Order Electrus ».

Avec cette première œuvre, Floris Kaayk développe un style particulier, mêlant la rigueur scientifique de la forme documentaire à l’imagerie fantastique des récits d’anticipation, appuyé par une utilisation parcimonieuse d’effets visuels 3D. Ce style va trouver son essor dans son deuxième film, plus abouti : « Metalosis Maligna ».

Metalosis Maligna

Adoptant la forme du documentaire médical, « Metalosis Maligna » part du principe que la population actuelle vivant plus longtemps, le corps a besoin d’être aidé biologiquement par des implants métalliques. Seulement, il arrive que des bactéries infectent ces implants et propagent une maladie grave qui remplace des sections entières du corps humain par des tissus métalliques : la fameuse « Metalosis Maligna ».

Le film montre l’évolution de cette maladie de la première infection non soignée qui cause des dommages intérieurs (l’implant étant touché par la bactérie, il se transforme et grandit), jusqu’à la disparition entière de parties du corps (des rougeurs et irritations apparaissent au niveau de la peau, là où il y a des implants ; ces derniers traversent alors la peau, deviennent extérieurs au corps et se substituent aux organes).

S’appuyant sur diverses figures visuelles et formelles crédibles comme une voix off féminine, informative et didactique, les interviews d’un docteur qui étudie la maladie et cherche à la comprendre, divers schémas, radios et mises en situation avec des patients malades, d’une grande précision scientifique, Floris Kaayk réussit à nous faire douter du côté fictionnel de l’histoire.

Un véritable tour de force dû en partie à la crédibilité des effets spéciaux qui se mettent au service du récit dans des scènes d’anthologie, comme la visite médicale du patient au docteur au cours de laquelle ce dernier lui demande d’émettre un son humain, ce que le visage composé de tubes métalliques devant lui, n’arrive pas à faire ; ou encore, cette expérience menée sur un petit rongeur dont la propre tête a été remplacée par un amalgame de fer.

Raconté avec beaucoup d’humour, « Metalosis Maligna » est un film inventif et habile, qui nous interpelle et dérange par son contenu visuel cru, rendu crédible par des effets spéciaux très soignés. Avec ce deuxième film, l’animateur néerlandais affine sa réalisation et nous procure bien des réflexions une fois le générique terminé.

Voilà deux œuvres hybrides, similaires thématiquement et dans leur approche visuelle, qui sont annonciatrices de l’éclosion d’un univers à part dans le monde de l’animation.

Julien Savès

Article associé : l’interview de Floris Kaayk

Floris Kaayk, Prix Format Court au Festival Paris Courts Devant 2011

Jeune animateur néerlandais fasciné par les problèmes liés aux avancées technologiques, Floris Kaayk a reçu le prix Format Court de la meilleure première oeuvre de fiction pour « The Origin Of Creatures » au Festival Paris Courts Devant 2011. Au détour de ce focus que nous lui consacrons, retrouvez un univers particulier, rempli de récits d’anticipation, de créatures technologiques, fruits de mutations environnementales, et de figures rhéthoriques au service de visions futuristes, pour le moins fascinantes.

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Retrouvez dans ce Focus :

La critique de « The Origin of Creatures »

L’interview de Floris Kaayk

Le reportage sur « The Order Electrus » et « Metalosis Maligna », les deux premiers films de Floris Kaayk

Format Court @ L’Entrepôt

Le mercredi 21 décembre, à l’issue d’une semaine d’exposition de films en ligne sur notre site (« La Semaine la plus courte »), Format Court organise sa première projection à Paris, au cinéma L’Entrepôt (14ème) à l’occasion du Jour le plus court. L’occasion de découvrir des films de qualité français comme étrangers ainsi que les films primés par Format Court en festivals.

Films programmés

La bouche cousue de Catherine Buffat et Jean-Luc Greco, Animation, 3’20 », France, 1998

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Un personnage au regard triste et « perdu » monte dans un bus avec une pizza dans les mains.

Tussilago de Jonas Odell, Animation, 15′, Suède. Prix Format Court à Anima 2011 (Bruxelles)

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Le terroriste ouest-berlinois Norbert Kröcher fut arrêté à Stockholm le 31 mars 1997. Il était à la tête d’un groupe qui avait pour projet de kidnapper la politicienne suédoise Anna-Greta leijon. Un certain nombre de suspects furent arrêtés, dont l’ex-petite amie de Kröcher, « A ». Voici son histoire.

I love you more de Sam Taylor-Wood, Fiction, 15′, Royaume-Uni, 2008

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Londres, été 1978. Giorgia est assise en cours de géographie et couvre son cahier de graffitis. Assis non loin d’elle, Pierre lui lance des regards que Giorgia feint d’ignorer. L’été 78 c’est aussi celui de la sortie du single ‘Love You More’ des Buzzcocks…

Suiker de Jeroen Annokkee, Fiction, 7’35 », Pays-Bas, 2010

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Klaasje, la voisine de Bert, sonne à sa porte, légèrement vêtue, pour lui emprunter un pot de sucre. Elle échappe le pot, ils se penchent en même temps pour le rattraper et se cognent la tête : Klaasje dégringole les escaliers.

Danny Boy de Marek Skrobecki, Animation, 9’58 », Suisse, Pologne, 2010 : Métrange du Format Court à Court Métrange (Rennes)

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Un jeune poète tombe amoureux dans un monde qui semble perdu. Une ville qui attend un drame dominant. Un temps de tristesse, un temps de décisions. Il y a de la lumière, il y a de l’espoir, il y a de la poésie derrière les nuages obscurs.

The Origin of Creatures de Floris Kaayk, Animation, 11’45 », Pays-Bas, 2010 :  Prix du Meilleur Premier Film à Paris Courts Devant (Paris)

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Dans les ténèbres d’un monde post-apocalyptique, des membres mutants font une tentative de reconstruction, mais par manque de communication, leur tâche est vouée à l’échec.

Vivre avec même si c’est dur de Pauline Pinson, Magali Le Huche et Marion Puech, Animation, 07’30 », France, 2004

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Une parodie d’émission de téléréalité nous présente une dizaine de petits reportages qui racontent les difficultés de l’existence d’animaux aux complexes drôles et absurdes.

Music For One Apartment And Six Drummers d’Ola Simonsson et Johannes Starjne Nilsson, 10′, Suède, 2002

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Six musiciens profitent du départ d’un couple de personnes âgées pour investir leur appartement et donner à partir de simples objets, un concert.

La France qui se lève tôt de Hugo Chesnard, Fiction, 22′, France, 2009

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Comme un nègre tu travailles dur, Paies nos impôts notre futur ! Cotises aussi pour nos retraites, Mais des papiers pour un métèques ?

Viejo Pascuero (Une petite histoire de noël) de Jean-Baptiste Huber, Fiction, 3′, France, 1993

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Au lendemain des fêtes de Noël, un gamin des bidonvilles de Santiago écrit au Père Noël pour se plaindre des cadeaux qu’il a reçus.

I Know You Can Hear Me de Miguel Fonseca, Expérimental, 4′, Expérimental, Portugal, 2011: Prix du meilleur film OVNI à Média 10-10 (Namur)

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Un film sur l’amour à l’intérieur d’un film sur la guerre.

Infos pratiques

Date : Mercredi 21 décembre 2011

Heure : 21h : Scène ouverte – 21h30 : Projection

Lieu : Cinéma L’Entrepôt

Adresse : 7/9 rue Francis de Pressensé, 75014 Paris – M° Pernety

Entrée libre dans la limite des places disponibles

Infos et réservation : info@formatcourt.com

Evénement Facebook consacré à cet événement : par ici !

Rêves et désillusions européennes

Au moment où se déroule ailleurs les Rencontres Henri Langlois spécialisées dans les films d’étudiants, notre dernier sujet sur Brest sort avec un petit retard et une nette priorité pour les premières et secondes oeuvres. En lien avec les écoles de cinéma, les programmations d’autres festivals et les auteurs déjà repérés précédemment, le festival a eu la qualité de nous dérouter par le passé avec des films tels que “Hostmannen” et « Moja biedna glowa » (Ma pauvre tête). Cette année, il n’y avait guère que “J’aurais voulu être un pute” (moyen), “Vahetus” (passable), “Le Vivier” (intriguant), “Suiker” (drôle) et « Casus Belli » (magistral) qui nous apparaissaient comme familiers et non inédits parmi les 41 films en compétition européenne. Pour clore ce dossier spécial sur Brest, quelques films de qualité manquaient à l’appel. Les voici, tous sous l’emprise du rêve et de la désillusion.

Apele Tac (La rivière silencieuse) d’Anca Miruna Lazarescu (Roumanie, Allemagne)

Ce film réalisé en Allemagne par une jeune femme d’origine roumaine glane pas mal de sélections et de prix depuis sa sortie d’école. Grand Prix à Brest, il suit le destin de Gregor et Vali marqués par l’envie de quitter leur Roumanie dure, vide et sans espoir, un certain jour de 1986. Ce désir d’immigrer n’est pas si simple : les contrôles sont réguliers et les sanctions sont lourdes (franchir illégalement la frontière équivaut à 3 ans d’emprisonnement, être pris dans le Danube en vaut 10). Les deux hommes ont besoin l’un de l’autre pour passer de l’autre coté de la frontière et laisser l’enfer derrière eux malgré les risques encourus. Sauf que le jour où ils prennent la route, les choses se passent bien différemment que ce qu’ils auraient pu imaginer.

“Je t’aide et tu m’aides. Après, c’est chacun pour soi”. Film sur la confrontation, l’espoir et la solidarité, “Apele Tac” est bel et bien un nouveau film déroutant venant s’ajouter à notre liste précitée. Totalement maîtrisé, il filme de nuit comme de jour, sur la route comme dans l’eau, une situation absolument prenante et une réalité totalement angoissante. Face à une cicatrice mal fermée, à une faute de frappe sur un permis de travail, à un passager clandestin, à un mauvais filet de pêche et aux dernières minutes, la tension provoquée par le film est permanente et grandissante. « Apele Tac » nous rend muets, démunis, désemparés. Il va de soi qu’on s’en souviendra et qu’on le défendra.

Lel Chamel (Vers le nord) de Youssef Chebbi (Tunisie, France)

Proche thématiquement d’”Apele Tac”, “Lel Chamel” est un premier film portant sur la traversée de passagers clandestins entre la Tunisie et l’Europe. Loin de se passer dans les années 80, il relate une histoire contemporaine et clandestine tournant mal, filmée elle aussi dans l’obscurité et l’isolement naturel.

Mehdi, le personnage principal, gagne sa vie en faisant passer clandestinement des groupes de pesonnes en mal d’ailleurs et de vie meilleure vers une Europe belle et différente. Ces temps-ci, il travaille avec la mafia albanaise et les cargaisons humaines dont il s’occupe n’arrivent pas à destination, terminant leur périple chez des traficants d’organes. Aujourd’hui, est un jour particulier : Mehdi découvre que son petit frère Mouja a embarqué pour un voyage sans retour. Chacun voit les choses différemment : pour Mouja, la mort, c’est rester. Pour Medhi, la mort, c’est partir.

“T’es amoureux de la misère ou quoi ?”. “Lel Chamel” est un film sur les idéaux déchus, la divergence d’esprit et la peur qui mérite réellement ses deux mentions spéciales (révélation et photo) obtenues à Brest. Forcément, au vu de son synopsis, ce premier court métrage professionnel n’est pas une histoire légère, simple et anecdotique. Le film met mal à l’aise, retient l’attention, fait basculer son titre vers les bons films de l’année, notamment pour son image (signée Amine Messadi) : le film s’ouvre sur des photographies, et vers la fin, lorsque le piège mortel est dévoilé, un nouveau découpage accompagne la fuite des personnages dans la nuit obscure. Une course saccadée, traversée par les ombres, les taches humaines et les coups de revolver offre une palette tout en contrastes à ce film sur l’aveuglement humain.

Salvatore de Fabrizio et Bruno Urso (Italie)

“Salvatore”, c’est le titre du deuxième film des frères Urso. C’est aussi le prénom que Alfio et Maria, les personnages de leur histoire souhaitent donner à leur enfant à venir. Seulement, en Sicile où ils vivent et survivent, les douceurs et les rêves ne sont pas nombreux tant la précarité et le chômage sont omniprésents. Le jour où Maria confie à une collègue de l’usine où elle travaille qu’elle attend un enfant, l’angoisse liée à son avenir professionnel se met à poindre. Alfio décide alors de prendre les choses en main et de s’en sortir pour trois en vendant du poisson en ville.

“Mais pourquoi tu lui as dit que tu étais enceinte ?”. Lauréat lui aussi d’une mention spéciale (il y en a beaucoup à Brest), “Salavatore” parle d’idéaux, d’altérité hypothétique, de faiblesse, de quête du salut et de petits arrangements avec le quotidien. Aucun film de la sélection ne fonctionne aussi bien que celui-ci dans l’interprétation de ses comédiens : Adele Tirante et Ture Magro sont pour le moins bluffants en Alfio et Maria, deux Siciliens désabusés mais amoureux, qui se raccrochent l’un à l’autre pour éviter de sombrer. Leurs silences, leurs regards, leurs cheveux épars, leur fragilité aussi apportent beaucoup à « Salvatore ».

El pibe de oro d’Aymeric Messari (France)

“Le gamin en or”, le surnom donné à Diego Maradona, est lié à ce film, imparfait mais interpellant dans son ton et son message qui relate le retour d’un ex-enfant prodige de la balle dans sa ville natale. Si Wahid a un jour réussi, aujourd’hui, il n’a plus rien, raison pour laquelle il revient parmi les siens. Seulement, son départ a eu lieu il y a longtemps et son retour réveille de vieilles rancoeurs mal éteintes chez sa mère et ses anciens amis du foot, Jeg en particulier. Remballé de tous, Wahid ne fait pas grand chose pour retisser les liens avec ses proches, en choisissant de leur asséner des vérités qu’ils ne veulent pas entendre.

el_pibe_de_oro

Malgré certains manques de clarté et quelques redondances dans son scénario, ce film fait partie des titres intéressants vus au festival de Brest. Il ne joue pas la carte d’un émotionnel charmant mais peut-être un peu facile, comme “Einstein était un réfugié” ou d’une vision d’horreur complètement stressante, comme “3 hours”. Il traite d’un sujet simple pour le moins original en parlant d’exclusion, de rêves trop grands, de frustrations, de cécité face au réel, de pelouses foulées et de réussite refoulée. La banlieue, les désirs de gamins, les jours de matches, la mise sauvée pour un Coca, le-Dieu-le-Foot, la retenue de jeu de Jérémie Bénoliel (Jeg), toutes ces choses sont captées de façon précieuse par Aymeric Messari dont « El Pibe de oro » est le tout premier film.

Katia Bayer

Nouveau Prix Format Court au Festival de Vendôme

A l’occasion du 20e Festival du Film de Vendôme qui s’est ouvert hier soir et qui se clôturera le 9 décembre 2011, Format Court décernera le Prix Format Court du Meilleur Film de la Compétition Nationale.

Le jury sera composé de Franck Unimon, Isabelle Mayor et Camille Monin. Ils verront pas moins de 20 courts-métrages produits en France et remettront le Prix Format Court lors de la Cérémonie de clôture le vendredi 9 décembre. Le film gagnant bénéficiera d’un focus spécialisé consacré à son auteur, ainsi que d’une projection en salle de cinéma à Bruxelles et/ou à Paris.

Les films sélectionnés en compétition nationale

Les larmes – Laurent Larivière – 2010 / fiction / 26 minutes

Une île – Anne Alix – 2011 / fiction / 59 minutes

Cross – Maryna Vroda – 2011 / fiction / 15 minutes

Sous la lame de l’épée – Hélier Cisterne – 2011 / fiction / 13 minutes

La maladie blanche – Christelle Lheureux – 2011 / documentaire / 42 minutes

Parmi nous – Clément Cogitore – 2011 / fiction / 30 minutes

Tania – Giovanni Sportiello – 2011 / fiction / 20 minutes

Petite pute – Claudine Natkin – 2011 / fiction / 27 minutes

Odéon dancing – Kathy Sebbah – 2011 / documentaire / 24 minutes

Le Marin masqué – Sophie Letourneur – 2011 / fiction / 35 minutes

Et ils gravirent la montagne – Jean-Sébastien Chauvin – 2011 / fiction / 33 minutes

Le commissaire Perdrix ne fait pas le voyage pour rien – Erwan Le Duc – 2011 / fiction / 27 minutes

Un monde sans femmes – Guillaume Brac – 2011 / fiction / 57 minutes

Planet Z – Momoko Seto – 2011 / animation / 9 minutes

La mystérieuse disparition de Robert Ebb – FX Goby, Matthieu Landour et Clément Bolla – 2011 / fiction / 13 minutes

Sylvain Rivière – Guillaume Bureau – 2011 / fiction / 22 minutes

Tempête dans une chambre à coucher – Laurence Arcadias et Juliette Marchand – 2011 / animation / 11 minutes

Courir – Maud Alpi – 2011 / fiction / 35 minutes

Les pseudonymes – Nicolas Engel 2011 / fiction / 33 minutes

Là où meurent les chiens – Svetlana Filippova –  2011 / animation / 12 minutes

Baby de Daniel Mulloy

Après « Sister » (2004), « Dad » (2006), « Son » (2007), voici « Baby », le dernier-né de Daniel Mulloy (elle était facile). Le réalisateur multi-récompensé est revenu cette année glaner des prix un peu partout en festivals dont la mention spéciale du jury à Brest le mois dernier.

« Baby » marque surtout la première collaboration entre Mulloy et l’actrice Arta Dobroshi, la Lorna des frères Dardenne, ici tout simplement méconnaissable. Le cinéaste anglais et l’actrice originaire du Kosovo ont tourné un court métrage supplémentaire ensemble depuis et ont également déjà deux longs métrages en préparation. Mulloy semble bel et bien avoir trouvé sa muse en la personne de cette actrice originaire du Kosovo qui porte le film de bout en bout.

« Baby » est urbain, nocturne et filmé quasiment en temps réel, l’unité de temps étant un élément clé dans chacun des films de Mulloy. On suit ici une jeune femme sur son trajet de retour chez elle. A l’arrêt de bus elle est témoin d’un vol de portable et dénonce l’acte en train de se faire devant les délinquants en question, prise de position courageuse qui pose dès le début du film les contours d’un personnage fort et singulier.

Un des initiateurs du vol monte dans le bus avec elle et tente de façon appuyée de créer le contact et de la séduire, sans succès. La tension qui en découle est quasiment palpable ; Mulloy, caméra à l’épaule, filme ses acteurs au plus près et s’attache à décrire la gêne, la peur mais aussi le désir qui naît de cette confrontation. L’attention qu’il porte aux détails, des gestes et des regards est exemplaire.
Contre toute attente, la jeune femme laisse le garçon la suivre chez elle sans qu’un mot ne soit échangé entre eux. Leur corps à corps, maladroit et laborieux, ne durera pas, la jeune femme décidant soudainement de renvoyer l’intrus qu’elle avait elle-même mené jusqu’à sa chambre.

On pourra regretter que « Baby » finisse sur une révélation – que nous ne dévoilerons pas ici – qui rapproche la fin d’une chute. Mais le talent évident et la maîtrise visuelle de Daniel Mulloy laisse présager d’un bel avenir pour l’auteur qui prépare son passage au long. Dans le paysage du court métrage, rares en effet sont les cinéastes qui construisent une œuvre aussi cohérente et constante en termes de qualité que celle de Mulloy.

Amaury Augé

Consultez la fiche technique du film

B comme Baby

Fiche technique

Synopsis : Une jeune femme intervient pour aider une autre femme qui se fait agresser par un groupe d’hommes. À la suite de quoi, l’un d’entre eux refuse de la laisser tranquille.

Genre : Fiction

Durée : 25 min

Pays : Royaume-Uni

Année : 2011

Réalisation : Daniel Mulloy

Scénario : Daniel Mulloy

Image : Lol Crawley

Montage : Dan Robinson

Interprétation : Arta Dobroshi, Daniel Kaluuya, Etela Pardo, Joseph Atlin, Aymen Hamdouchi

Production : Sisters Films

Article associé : la critique du film

L’envol

Vous l’avez peut-être constaté sur le site depuis la rentrée. Format Court remet des prix en festival. À Paris Courts Devant, à Court Métrange, à Média 10-10 et bientôt (on vous l’annonce déjà) à Vendôme.

Nos prix ne s’évaluent pas en chèques ou en espèces, nous n’en avons pas les moyens. Notre façon de soutenir les réalisateurs et les films est toute autre. Nous consacrons une place éditoriale à un auteur et nous projetons son film en salle. Cette envie s’est révélée l’année passée lors du festival Anima, à Bruxelles, avec « Tussilago » de Jonas Odell. Le film a depuis fait l’objet d’un focus et a été montré à trois occasions différentes, au détour de trois initiatives proches du court métrage et de Format Court : Short Screens (Bruxelles), Les Courts du Grand (Paris) et le Festival International de Films Indépendants (Saint-Germain-de-Salles). Au tour maintenant de Floris Kaayk, Marek Skrobecki, Miguel Fonseca de faire l’objet d’attentions aussi spéciales.

floris

Si vous nous suivez, vous savez que les extraits de films sont monnaie courante sur Format Court. Il y a peut-être de la répétition dans ces éditos mais les films qualitatifs et entiers mis légalement sur le net sont encore rares, raison pour laquelle nous sommes à l’affût des histoires complètes, inspirantes et non fragmentées, qui se posent sans prévenir devant nos cyber fenêtres.
Depuis près de trois ans (et oui, déjà), nous fouillons et déblayons les films et les auteurs qui ont quelque chose à dire et qui le font formidablement bien, ceux qui allient fond et forme de manière pertinente, évocatrice et contemporaine. Cette substance, nous y tenons, nous ne la lâchons pas. C’est pour cela que nous vous la faisons connaître à travers différentes actualités telles que celles de l’Etrange Festival, le festival Off-Courts de Trouville, le Festival Franco-Coréen du Film, l’Atopic Festival, les films mis en ligne sur le site de Court-circuit (ARTE) qui disparaissent de la Toile une semaine après leur passage sur la chaîne.

Nous aurions pu choisir de rester encore longtemps dissimulés derrière nos écrans et ce virtuel facile et imbécile. Heureusement pour nous, des soubresauts ont opéré car le monde extérieur nous a fait des signes. Le premier s’est manifesté lors d’une rencontre en province, à Bourges et à Montargis, organisée par Centre Images autour de la déambulation amoureuse. Parler de films, de parcours personnels, d’envies de réalisateurs, se confronter à un public cinéphile, curieux, peu en contact avec le court, partager un moment à table, délaisser le micro, briser la distance avec la salle, repartir avec un t-shirt à l’effigie d’un renard, tout cela n’existe pas en http://www.

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© Julien Lelièvre

Cette évolution ne peut plus faire marche arrière. Ce lundi 5 décembre, aura lieu la toute première carte blanche Format Court aux Vidéophages de Toulouse, une association proche des cinématographies indépendantes et des élans babas cool à lunettes. Dès le mercredi 14 décembre, nous lançons la Semaine la plus courte à l’occasion du Jour le plus court mis en place par le CNC. Pendant une semaine, des films empruntant à l’animation, à la fiction, au documentaire, au clip et à l’expérimental s’exposeront sur le site. Le mercredi 21 décembre, enfin, le film court basculera sur un écran plus large, celui du cinéma L’Entrepôt (Paris, 14ème) le temps d’une séance de cinéma. Format Court @ L’Entrepôt ? L’occasion de découvrir des films que nous aimons et de nous, de vous rencontrer*. Format Court a franchi un cap et on en est enchanté.

Katia Bayer
Rédactrice en chef

* Toutes les informations sur « La Semaine la plus courte » et « Format Court @ L’Entrepôt » seront publiées très prochainement sur le site.

Gros plan sur l’animation polonaise & rétrospective Marek Skrobecki

Demain, 1/12, s’ouvre la 9e édition du Carrefour de l’animation au Forum des images. Quatre jours durant, des projections, rencontres, démonstrations et tables rondes sont prévues dans le lieu le plus rose de Paris. Un avant-goût du festival national du film d’animation de Bruz, des rendez-vous autour de l’animation tunisienne, le nouveau Eric Khoo et le Best of du Computer Animation Festival Siggraph vous sont recommandés par notre équipe courte, sans omettre le gros plan sur l’animation polonaise qui nous intéresse particulièrement, avec la venue de Marek Skrobecki, réalisateur de « Danny Boy », lauréat de notre Prix Format Court au festival Courtmétrange.

Rétrospective Marek Skrobecki : 1/12, 18h30

Pol. / anim. 1988-2011 coul. 1h20 (35mm et vidéo)

Marek Skrobecki est considéré comme l’un des meilleurs réalisateurs d’animation polonais. Travaillant d’après les techniques traditionnelles de marionnettes, il a réalisé notamment Episode (1988), D.I.M. (1992), Ichthys (2005) et Danny Boy (2010), tous primés en festivals. Très lié au studio Se-ma-for, il a participé à l’animation de Pierre et le loup de Suzie Templeton et coréalisé un film sur Chopin, le très attendu World of Flying Machine.

Au programme : Epizod/Episode (1988), Tort Urodzinow /Birthday Cake (1989), Ostatnia Kanapka/Last Sandwich (1991), D.I.M. (1992), OM (1995), Ichthys (2005), Danny Boy (2010), et des extraits de Marchenbilder/Obrazki Z Bajek/Pictures from Fairy Tales (1998), Pierre et le loup de Suzie Templeton (2009) et The Flying Machine (2011).

En présence de Marek Skrobecki

"Millhaven"

"Millhaven"

Nouveaux talents polonais : 2/12, 17h

Pol. / anim. vosta 2010-2011 n&b et coul. 1h20 (35mm et vidéo)

Les récentes découvertes en festivals le prouvent : l’animation polonaise contemporaine est aussi extraordinaire que par le passé, de par la force des sujets traités ou la maîtrise des techniques employées, qu’elles soient liées aux dernières technologies ou dans la tradition des marionnettes ou de l’animation dessinée à la main.

Au programme : Bits and Species (U. Palusińska, 2010) ; Galeria (R. Proch, 2010) ; Underlife (J. Konopka, 2010) ; Every Girl Has A Boy (M. Kuczyniecka, 2011) ; Sleepincord (M. Pajek, 2011) ; Protozoa (A. Kwiatkowska-Naqvi, 2011) ; Who Would Have Thought? (E. Borysewicz, 2009) ; Gibbon’s Island (M. Pakalska Bosek, 2010) ; Lumberjack (P. Debski, 2011) ; Millhaven (B. Kulasa, 2010).

Les maîtres du studio Se-ma-for : 3/12, 15.30

Ściany/Walls

Ściany/Walls

Pol. / anim. vosta 1947-1987 n&b et coul. 1h20 (vidéo et 35 mm)

Fondé à Lodz en 1947, le studio d’animation Se-ma-for produit des films aux techniques très variées : dessin, stop motion et marionnettes. Dans les années 50, il emploie des artistes pionniers souvent liés au mouvement de “l’école polonaise de l’affiche”, dont Jan Lenica et Walerian Borowczyk. Après leur départ en Europe de l’Ouest, ce courant perdure grâce au travail de Daniel Szczechura et Kazimierz Urbański, ainsi que d’auteurs plus jeunes dont Zbigniew Rybczyński et Piotr Dumała. Le programme proposé par Se-ma-for permet de retrouver la plupart de ces grands maîtres.

Au programme : Attention, le diable/Uwaga, diabeł (Z. Wasilewski, 1958) ; Batifole Igraszki (K. Urbański, 1962) ; Jour de fête/Święto (Z. Rybczynski, 1976) ; L’Ange gardien/Człowiek i anioł (E. Sturlis, 1966) ; Wykres/A Graph (D. Szczechura, 1966) ; Le Petit Déjeuner sur l’herbe/Sniadanie na trawie (S. Lenartowicz, 1975) ; Le Sac/Worek (T. Wilkosz, 1967) ; Zdarzenie/The Occurrence (H. Neumann, 1987) ; Wykrzyknik/Point d’exclamation (S. Schabenbeck & H. Ryszka, 1967) ; Ściany/Walls (P. Dumala, 1987) ; Ondraszek (W. Kondek, 1959).

En présence de Zbigniew Zmudzki, président de Se-ma-for

Retrouvez toutes ces infos, polonaises et animées, sur le site du Forum

Carte blanche Format Court à Toulouse !

Ce lundi 5 décembre 2011, Format Court présente sa toute première carte blanche aux Vidéophages de Toulouse, organisateurs de soirées mensuelles de courts métrages français et étrangers. Trois films (plus un bonus) soutenus par le site seront présentés lors de cette projection : La France qui se lève tôt de Hugo Chesnard, Conversation Piece de Joe Tunmer, The Origin of Creatures de Kaayk Floris, Prix Format Court au Festival Paris Courts Devant 2011

Programmation

One Day I Woke Up and I Was Angry de Lucinda Clutterbuck. Animation, 10′, 2011, La Ménagerie

Sur le thème de la colère adolescente

La France qui se lève tôt de Hugo Chesnard, Fiction, 22′, France, 2009, Butterfly Production

Comme un nègre tu travailles dur, Paies nos impôts notre futur ! Cotises aussi pour nos retraites, Mais des papiers pour un métèques ?

Articles associés : la critique du film, l’interview de Hugo Chesnard

Conversation Piece de Joe Tunmer. Expérimental, Fiction, 7′, 2009, Royaume-Uni. New Treatment

Synopsis : Un dimanche matin, Jean remarque que son vase préféré a été ébréché. Elle accuse Maurice, son mari, qui nie en bloc. Mais Jean veut absolument savoir ce qu’il s’est passé. Dans cette extraordinaire comédie musicale, chaque syllabe prononcée correspond à une note précise de « Conversation piece », un morceau improvisé en 1966 par le cornettiste de jazz rex Stewart.

Article associé : le reportage Programme Films de musique

On se partage les miettes de Collectif. Fiction, 7′, 2011, France, Ciné 2000.

Vente aux enchères des dépouilles d’un service public à la culture. L’Association régionale de diffusion technique (ARDT), parc de location de matériel technique à prix réduit pour toutes les associations et collectivités de la région Midi-Pyrénées, se fait liquider arbitrairement par le Conseil Régional après 27 années de service fondamental à l’ensemble du tissu d’acteurs culturels de la région. Le 15 novembre, certaines personnes attachées à ce service ont décidé de se dresser une dernière fois devant le rouleau compresseur. Vente reportée.

Homesick de Ingrid Chikhaoui. Fiction, 19′, 2010, France, ESAV (Prod)

Elise rentre d’un séjour à l’étranger et se dérobe face à tout ce qui a changé : sa maison, sa famille, et sa place.

The Origin Of Creatures de Floris Kaayk, animation, 12′, 2010,  Pays-Bas, prod. : Koert Davidse, Marc Thelosen, Yan Ting Yuen. Prix Format Court au Festival Paris Courts Devant 2011

La vision futuriste d’un monde après un désastre catastrophique. Dans cette parabole, des membres mutés autonomes sont à la recherche d’une coopération, mais en raison de problèmes de communication, cette mission est vouée à l’échec.

Articles associés : l’interview de Floris Kaaykla critique du film

Infos pratiques

Espace JOB : 105 route de Blagnac – Toulouse /// Accès : bus 70 et 16

Clermont-Ferrand, la compétition nationale

La sélection nationale du 34ème Festival de Clermont-Ferrand est de sortie. Découvrez-la en un clic.

L’Attaque du Monstre Géant Suceur de Cerveaux de l’Espace – Guillaume Rieu
Boro in the Box – Bertrand Mandico
Ce qu’il restera de nous – Vincent Macaigne
Le Ciel en bataille – Rachid B.
City of Silence – Robert Ly
Les Conquérants – Sarolta Szabo, Tibor Bànòczki
Conte de faits – Jumi Yoon
Corps solidaires – Pascal Roy
Courir – Maud Alpi
De Riz ou d’Arménie – Hélène Marchal
La Dérive – Matthieu Salmon
La Dernière caravane – Foued Mansour
La Détente Bertrand Bey, Pierre Ducos
Diagonale du Vide – Hubert Charuel
Dis moi non – Axel Victor
Double mixte – Vincent Mariette
Douce – Sébastien Bailly
Egaro – Anaëlle Moreau, Maïwenn Le Borgne, Bruno Salamone, Simon Taroni, Alexia Provoost
L’ Ere bête – Thomas Caudron
Le Facteur humain – Thibault Le Texier
Fireworks – Giacomo Abbruzzese
Folksongs and ballads – Mathieu Vernerie
Fragments d’un voyage immobile – Lionel Mougin
La France qui se lève tôt de Hugo Chesnard
Fuir – Virginia Bach
Hors saison – Victoria Saez
How Fear Came – Anaïs Caura, Bulle Tronel
I’m your man – Keren Ben Rafaël
In Loving Memory  – Jacky Goldberg
Je ne suis personne – Jonas Schloesing
Jean-Luc persécuté – Emmanuel Laborie
Jeudi 19 – Raphael Holt
Looking at the dead – Jean-Gabriel Périot
Manque de preuves – Hayoun Kwon
Méditerranées – Olivier Py
Les Meutes – Manuel Schapira
Mkhobbi fi kobba – Leyla Bouzid
Mollement, un samedi matin – Sofia Djama
Mon amoureux – Daniel Metge
The Monster of Nix – Rosto
La Mystérieuse disparition de Robert Ebb – Matthieu Landour,  François-Xavier Goby, Clément Bolla
Oh Willy – Emma de Swaef, Marc Roels
Parmi nous – Clément Cogitore
Petite pute – Claudine Natkin
Plume – Barry Purves
Les Poisons – Benjamin Charbit
La Promotion – Manu Joucla
Pyskessa – Kirran Bruce
Rêve de 1er avril 1999 – Maxence Martin, Bastien Létoile, Camille Perrin, Julien Hazebroucq, Hél Papillon
Rosette – Romain Borrel
La Sole, entre l’eau et le sable – Angèle Chiodo
Sous la lame de l’épée – Hélier Cisterne
Sur la route du paradis – Uda Benyamina
Tempête dans une chambre à coucher – Laurence Arcadias, Juliette Marchand
La Tête froide – Nicolas Mesdom
Une Île – Ugo Bienvenu
La Veuve Caillou – Agnes Patron
La Vie parisienne – Vincent Dietschy
Yasmine – Karim Bengana

Bretagne, scénars & courts métrages

Depuis un an, le DVD traînait dans la pile des non vus, non traités, non évalués. Dépoussiéré, “Estran – 21 courts métrages” intègre, une édition plus tard, notre dossier spécial consacré au Festival du Film Court de Brest.

En 1998, apprend-on à la lecture du livret accompagnant ce coffret, le Festival du film court de Brest en est à sa 13ème édition et aucune production régionale ne marque la sélection. Le concours de scénarios Estran naît avec l’envie de faire émerger des auteurs locaux et de faire tourner des films de fictions en Bretagne, genre un peu délaissé en région par rapport au cinéma documentaire et d’animation. Des thèmes sont imposés, des lauréats sont choisis et accompagnés dans la recherche d’un producteur et sur le tournage de leurs films. Des premiers et deuxièmes films apparaissent ainsi. Dix ans après ses balbutiements, Estran compte de cette façon une petite vingtaine de films repris dans ce coffret divisé en chapitres.

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Le projet se veut sympathique. Lié intimement au scénario, il donne à voir du court, se balade entre les années (2000-2010) et promeut le travail de jeunes auteurs, scénaristes comme réalisateurs proches de la Bretagne. C’est un soutien à part à la création comme à la diffusion, les différents programmes ayant été diffusés pendant le Festival de Brest et au Marché du Film de Clermont-Ferrand. Cependant, en s’y penchant de plus près, peu de films de ce coffret marquent véritablement l’esprit. La faute à des erreurs de jeunesse, à des comédies pas drôles (« Le Cadavre qui voulait pas qu’on l’enterre », « Comptes pour enfants ») des faux drames (« Le Secret de Lucie », « Chute libre »), des histoires qui ne tiennent pas la route (« L’Absence de vertige reste un mystère », « Nuit d’hiver ») ? Quelque soit la réponse, seuls quatre films se laissent regarder et apprécier, en toute subjectivité.

Baignade obligatoire d’Olivier Pouteau

Légère comédie de bord de mer, « Baignade obligatoire » évoque l’histoire de Rémy, un fils thésard piégé par son père, maire d’une petite île, le faisant porter volontaire pour être le maitre-nageur de la piscine locale afin d’éviter la démission que lui réclame le conseil municipal. Rémy, lui, n’est pas spécialement enthousiaste face à cette proposition et surtout, il ne sait pas nager. Sa mère dissimule cette information de première importance à son mari et encourage son fils à affronter ses peurs. Rémy se retrouve donc à 25 ans avec une bouée canard et une incitation à utiliser le bien d’autrui, face à l’exigence de son père et la bénédiction de sa mère. Amen.

 

Entre effarement filial et intolérance paternelle, ce film vieux de dix ans, scénarisé autour du thème « Au bord de l’eau… » s’en sort plutôt bien pour donner à son histoire une touche locale et multiplie les dialogues savoureux. Au choix : “Mais vous débloquez à la mairie. Qui est l’ahuri qui a eu une idée pareille ?”, Je ne sais pas trop ce que tu vaux comme maire mais alors comme père… « 
Erémia Erèmia d’Anthony Quéré et Olivier Broudeur

Dans un tout autre registre, se présente « Erémia Erèmia », le premier film d’Anthony Quéré et Olivier Broudeur, les co-réalisateurs de « Dounouia, la vie ». Autour du thème « Demain, j’arrête », se profile une histoire non conventionnelle autour du rapport au corps et de l’effort à l’extrême. Dépouillé de tout dialogue, le film se construit autour du souffle et du corps. L’homme filmé pratique le vélo et la natation, il repousse ses limites, goûte à la liberté, profite de la nature, s’endort nu dans son lit. Le temps d’une pause très physique, les conventions (l’habillement, le travail, l’asservissement, la société) s’éloignent pour esquisser un sourire et un apaisement chez lui.

Film-expérience, « Erémia Erèmia », Prix du Jury à Clermont en 2008, fonctionne autour de plusieurs partis pris redoutables : tout d’abord, la présence d’un comédien, Vincent Deniard, véritable bloc de muscles et de concentration, la particularité apportée au son (éléments naturels, souffle individuel, paroles étouffées), la caméra très peu éloignée de son sujet et le montage alterné (solitude, liberté versus socialisation, étouffement).

Une sauterelle dans le jardin de Marie-Baptiste Roches

Ce titre-ci, de loin le favori de la sélection, s’est lui aussi imaginé autour de la thématique « Demain, j’arrête ». S’occupant plutôt mal de son petit frère Zadig en l’absence de leur mère, Solène, seize ans (voire douze) parfait son bronzage sur la chaise longue du jardin, dans sa commune de ploucs de province. Ici, les attractions se font rares, le passage est inexistant et l’ennui est profond. Lolita esseulée, Solène passe son temps à moitié dénudée, sans que cela attire grand monde, tout juste un anecdotique adolescent du coin. Lorsqu’Antoine, un ami de sa mère, magnifique, viril et bien plus âgé qu’elle fait son apparition devant le pas de la porte, le quotidien de Solène s’éclaircit et son désœuvrement se met par enchantement à disparaître.

Prix de la meilleure première œuvre de fiction au Festival de Clermont-Ferrand 2009 (on comprend aisément pourquoi), le film de Marie-Baptiste Roches percute tout d’abord pour sa sauterelle personnifiée, alias Cindy Colpaert, gamine hyper provocante (la scène où elle indique à Antoine où pourrait se trouver son briquet en se retournant pour montrer ses fesses – “Antoine, poche arrière !”- est juste délectable), ainsi que pour la façon très progressive dont le jeu entretenu par Solène se retourne contre elle, se transforme en piège et la fait accéder au monde dangereux des adultes.

Sortir de Nicolas Leborgne

Le tout dernier film de la sélection, « Sortir », lié au programme « Offre spéciale », le plus récent concours Estran, convoque le temps d’un road-movie la relation tendre et difficile entre un fils malade, ayant décidé de mourir et son père, refusant de le laisser partir, puis l’accompagnant dans son voyage. Rassemblant deux comédiens toujours justes, Bruno Todeschini et Philippe Nahon, « Sortir » parle de l’adieu du fils au père, et non du père au fils, comme l’ont tenté et le tenteront encore d’autres scénarios. Il parle d’euthanasie, sujet toujours compliqué mais finalement plutôt rare dans le court.

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Rester, se quitter, se réconcilier, disparaître pour toujours ou le temps d’aller acheter un paquet de cigarettes, parler des femmes, évoquer le souvenir le plus beau rossignol du Finistère, faire la route, passer le volant, vieillir, disparaître, c’est de tout cela dont parle « Sortir ». Même si la scène de fin aurait pu gagner en clarté, on est touché par ce film qui doit beaucoup au couple formé par Todeschini et Nahon, rares mais précieux au cinéma français.

Katia Bayer

Consulter les fiches techniques de « Baignade obligatoire », « Erémia Erèmia »« Une sauterelle dans le jardin »« Sortir »

Coffret DVD édité par la Cinémathèque de Bretagne et l’Association Côté Ouest

Le Concours Estran sur la Toile

 

S comme Sortir

Fiche technique

sortir-nicolas-leborgne

Synopsis : Sortir est l’histoire d’un adieu. L’adieu d’un fils à son père. L’action se passe quelque part sur la route entre Brest et Genève, dernière étape dans la vie de Fred avant de procéder à son euthanasie.

Genre : Fiction

Durée : 22’

Pays : France

Année : 2010

Réalisation : Nicolas Le Borgne

Scénario : Nicolas Le Borgne

Image : Pierre Souchar

Montage : Julien Cadhilac

Son : Martin Descombels

Musique : Lionel Mauguen

Interprétation : Bruno Todeshini, Philippe Nahon, Muriel Riou

Production : Takami Production

Article associé : le sujet DVD Bretagne, scénars & courts métrages

S comme Une Sauterelle dans le jardin

Fiche technique

Synopsis : Solène, 16 ans, s’ennuie copieusement au mois d’août, dans sa zone pavillonnaire. Sa mère n’est jamais là et elle doit garder son jeune frère Zadig. Mais quand Antoine débarque, avec son cuir, sa moto et ses 40 ans, ça change tout !

Genre : Fiction

Durée : 24’

Pays : France

Année : 2008

Réalisation: Marie-Baptiste Roches

Synopsis : Marie-Baptiste Roches

Image: Nathanaël Louvet

Musique: Pierre Chevrier

Son: Arnaud Julien

Montage: Damien Maestraggi

Décors : Françoise Philippe

Interprétation : Baptiste Bertin, Bruno Boulzaguet, Cindy Colpaert, Guénolé Loterie, Valérie Crouzet

Maquillage: Aurore Chauchat

Production: Ysé Productions

Article associé : le sujet DVD Bretagne, scénars & courts métrages

B comme Baignade obligatoire

Fiche technique

baignadeobligatoire2

Synopsis : Rémi est venu chercher le calme chez ses parents qui habitent une petite île bretonne pour écrire sa thèse. Mais son père, qui est aussi maire de l’île, l’a porté volontaire au poste de maître nageur bénévole.

Genre : Fiction

Durée : 20’

Pays : France

Année : 2000

Réalisation : Olivier Pouteau

Scénario : Olivier Pouteau

Image : Philippe Elusse

Montage : Estelle Fouque

Son : Vincent Pessogneaux

Musique : Grégory Libessart

Interprétation : Vincent De Bouard, Marie Pillet, Jacques Mathou, Céline Thiou

Production : Les Films En Hiver, Aber Images

Article associé : le sujet DVD Bretagne, scénars & courts métrages

Rencontres cette semaine avec Claire Simon et Alain Cavalier

Demain et jeudi, Documentaire sur grand écran et la librairie Ciné Reflet vous invitent à rencontrer Claire Simon et Alain Cavalier autour de leurs coffrets de courts métrages récemment édités en DVD. Info intéressante en attendant notre focus consacré à ces deux cinéastes.

29 novembre, 19h : Claire Simon autour de son coffret Du Super 8 à la vidéo, les premiers films édité au sein des « collections particulières” de Documentaire sur grand écran

Discussion avec la réalisatrice, échanges autour d’un verre.

1er décembre, 19h : Alain Cavalier autour de son coffret les Braves (trois portraits inédits de Alain Cavalier) édité au sein des « collections particulières” de Documentaire sur grand écran

Discussion avec le réalisateur, échanges autour d’un verre.

Librairie Ciné Reflet

14, rue Monsieur le Prince 75006 Paris – Métro Odéon – tél. : 01 40 46 02 72
cine.reflet@wanadoo.

Evénement Facebook : ici !