La réalisatrice française Mia Hansen-Løve présidera deux jurys avec pour mission de découvrir un cinéaste du court métrage et révéler l’auteur d’un long métrage. Elle remettra le Prix Découverte du court métrage, succédant ainsi à João Pedro Rodrigues qui a récompensé l’an passé Un dimanche matin de Damien Manivel. Accompagnée d’un jury composé de producteurs et de directeurs de festivals, elle décernera le Prix Découverte à l’un des 10 films de cette compétition, qui a révélé des artistes de renom : François Ozon, Gaspar Noé ou Andrea Arnold.
Mia Hansen-Løve poursuit cette mission en présidant le Jury Révélation France 4, un prix qui reflète l’enthousiasme de jeunes cinéphiles du monde entier pour les nouveaux talents du cinéma. Entourée de 4 jeunes critiques internationaux, elle récompensera l’un des 7 longs métrages de la Compétition.
Après un premier rôle au cinéma en 1998 dans « Fin août, début septembre » de Olivier Assayas, Mia Hansen-Løve intègre le conservatoire d’art dramatique de Paris puis collabore aux Cahiers du Cinéma jusqu’en 2005. Elle réalise plusieurs courts métrages dont « Après mure réflexion » sélectionné au Festival de Locarno. Réalisé en 2007, son premier long métrage « Tout est pardonné » est sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs, puis obtient le Prix Louis-Delluc. « Le père de mes enfants », hommage au producteur Humbert Balsan, est sélectionné en 2009 dans la section Un Certain Regard où il est primé. « Un amour de jeunesse », son troisième long métrage, est présenté au Festival de Locarno en 2011.
Sensible au cinéma d’antan, le site internet Format Court, spécialisé dans le court métrage, vous invite à sa nouvelle soirée mensuelle, le jeudi 11 avril prochain, au Studio des Ursulines (Paris, 5ème), pour une carte blanche consacrée à Lobster Films, société parisienne spécialisée dans la conservation et la restauration de films anciens. Lors de cette séance exceptionnelle, pas moins de 16 curiosités et autres raretés (documentaires, dessins animés, burlesques, soundies, publicités, bandes annonces, scènes à trucs, …), réalisées entre 1904 et 1948, vous seront proposées, en présence de Serge Bromberg, président de Lobster Films.
En pratique
► Projection des films : jeudi 11 avril 2013, à 20h30. Durée du programme : 77’
► Studio des Ursulines : 10 Rue des Ursulines, 75005 Paris
► Accès : BUS 21, 27 (Feuillantines), 38 ou 82 (Auguste Comte), 84 ou 89 (Panthéon). RER B Luxembourg (sortie rue de l’Abbé de l’Épée).
Le Festival Silence, on court !, que nous couvrons pour la première fois et dont nous sommes partenaires cette année, débute ce soir aux Voûtes. Jusqu’au 13 avril, il se déplacera dans Paris, au Studio des Ursulines, à la Péniche Cinéma, à Confluences et au Forum des images. Pour sa sixième édition, parrainée par Bertrand Bonello, ce festival mettant en avant le travail de jeunes réalisateurs tous âgés de moins de trente ans a sélectionné 24 films français et étrangers. En voici les titres, jugés très prochainement par le jury du festival (Vanja Kaludjercic, programmatrice, Nathalie Lapicorey, Gizem Zeynep, productrices/Partizan Films, Manuel Chiche, distributeur et éditeur DVD/Wild Side Films, Amaury Augé, rédacteur/Format Court).
Compétition nationale
► J’ai toujours rêvé d’être un robot, Robert Ly, 2012, Fiction, 5’17
► Nieuwpoort en juin, Geoffrey Couanon, 2012, Fiction, 30′, Shellac Sud
► La Maison d’Olga, Morgane Le Péchon, 2012, Animation expérimentale, 6’, École nationale supérieure des Arts Décoratifs
► Comme des lapins (Chroniques de la poisse, CHAP. 2), Osman Cerfon, 2012, Fiction animée, 8’, Production Je Suis Bien Content
► Rodri, Franco Lolli, 2012, Fiction, 23’, Les Films du Worso
► Chantier 00 – Journal d’Éric Melville, Denis Frêres, 2012, Fiction / Documentaire, 25’, Association Franciste
► En équipe, Steve Archiepo, 2012, Fiction / Documentaire, 21’10, Shaker Production
► Il n’y a pas de nom plus beau, Alexandre Donot, 2012, Documentaire, 30’, La fémis
► La terre, Vincent Le Port, 2012, Expérimental, 8’45
► Le Ballet, Thomas Louis, 2012, Animation / Fiction, 4’08, Gobelins
► Les Compliments d’Amour, Marie Madinier, 2012, Fiction, 16’, AGAT Films et Cie
► Mauvais coton, Sébastien Zaccoletti, 2012, Fiction, 25’
► Merci mon chien, Nicolas Bianco-Levrin & Julie Rembauville, 2012, Animation, 7’47, Folimage
► Riolette Autopsie, Rémi Gendarme, 2012, Documentaire / Expérimental, 21’
Compétition internationale
► Snail Trail, Philipp Artus, Allemagne,2012 Expérimental, 3’13, The Academy of Media Arts
► Men of the Earth, Andrew Kavanagh, Australie, 2012, Fiction, 9’50, Ramona Telecican
► Die Schaukel des Sargmarchers, Elmar Imanov, Allemagne, 2012, Fiction, 30’
► The River, Tarquin Netherway, Australie, 2012, Expérimental, 13’
► L’Amour bègue, Jan Czarlewski, Suisse, 2012, Fiction, 20’, ECAL École cantonale d’Art de Lausanne
► À nos terres, Aude Verbiguié, Belgique, 2012, Documentaire, 21’22, Médiadiffusion
► Head Over Heels, Timothy Reckart, Royaume-Uni, 2012, Animation / Fiction, 10’18, Fodhla Cronon O’Reilly
► L’incertitude d’Henseinberg, Richard Gérard, Belgique, 2012, Fiction, 16’33, IAD, Institut des Arts de Diffusion de Louvain-la-Neuve
► Os Vivos Tambem Choram, Basil Da Cunha, Suisse, 2012, Fiction / Expérimental, 30’, Box Productions
► Pièce à nouer, Ornella Macchia, Belgique, 2012, Animation, 5’26, Atelier de production La Cambre
Comédie burlesque, faux documentaire, western, danse : chacun de ces films flirte avec une matière – pour ne pas dire un genre – pour mieux en jouer, l’évoquer, la questionner ou s’en inspirer. Il se trouve que ce sont des premiers films programmés par la revue Bref mardi prochain, à 20h30, au MK2 Quai de Seine.
Le jardin des Eden de Sébastien Ors. France, 2012, couleur, 26 mn, Blu-ray.
Réalisation et scénario : Sébastien Ors • Image : Nathanaël Louvet • Montage : Rémi Dumas • Son : Bruno Auzet • Interprétation : Fabien Ara, Géraldine Martineau, Claire Nebout, Robin Renucci, Julien Boulinguez, Julia Kende Rozgonyi, Marie Puil, Hélier Cisterne et Hugo Cisterne • Production : Shellac Sud
Teddy et Juliette ne le savent pas encore, mais ils sont faits l’un pour l’autre. Teddy entame alors un véritable chemin de croix au long duquel nombre d’éléments – de la rivalité amoureuse aux caprices divins – vont se déchaîner. Quant à Juliette, son coeur est prêt à s’ouvrir. Encore faudrait-il qu’elle ose avouer à son prétendant sa passion secrète…
Réalisation : Yassine Qnia • Scénario : Mourad Boudaoud, Carine May, Yassine Qnia et Hakim Zouhani • Image : Marianne Tardieu • Son : Clément Maléo et Samuel Beaucamps • Montage : Linda Attab • Interprétation : M’Barek Belkouk, Rudolph Mendy, Mounir Idriss, Smail Chalaane et Mohamed Faroud • Production : Nouvelle toile
Yassine, jeune cinéphile passionné, veut tourner un film dans son quartier. Il souhaite associer ses amis d’enfance à son projet. Mais l’amitié a parfois ses travers…
Réalisation : Benjamin Parent • Scénario : Benjamin Parent et Joris Morio • Image : Nicolas Loir • Son : Arnaud Julien, Guillaume Dham et Olivier Do Huu • Montage : Béatrice Herminie • Interprétation : Leïla Choukri, Garance Marillier, Finnegan Oldfield, Malivaï Yakou et Damien Pinto Gomes • Production : Synecdoche
Le secret de Brokeback Mountain est passé hier soir à la télé. Vincent l’a regardé et ça l’a bouleversé. Il profite de la récréation et de l’intimité des toilettes du collège pour raconter de manière touchante et naïve le film à Moussa. De l’autre côté du mur, dans les toilettes des filles, Jessica, elle aussi très affectée, en profite pour poser pas mal de questions sur les deux papas homosexuels de Nadia, le tout avec beaucoup de maladresse.
Je sens le beat qui monte en moi de Yann Le Quellec. France/Belgique, 2012, couleur, 32 mn, DCP.
Réalisation et scénario : Yann Le Quellec • Image : Nicolas Guicheteau • Son : Antoine Corbin, Fred Meert, Benoît Biral • Montage : Martial Salomon • Interprétation : Rosalba Torres Guerrero, Serge Bozon, Véronique Hervouet et Julien Playe • Production : White Light Films, Kinoko Films et La Parti
Rosalba, jeune guide touristique, souffre d’une affection étrange : la moindre mélodie provoque chez elle gesticulations et danse de façon aussi subtile qu’incontrôlable. Malgré ses ruses pour cacher son excentricité, ce corps indomptable pourrait bien séduire son surprenant collègue Alain…
Infos pratiques
Séance à 20h30
MK2 Quai de Seine
14 Quai de la Seine
75019 Paris
M° Jaurès ou Stalingrad
Tarif : 7,90 € (cartes illimitées acceptées)
Il y a plus d’une semaine, Format Court rentrait d’Aubagne, petite ville du sud de la France connue pour son écrivain maison (Marcel Pagnol) et son festival annuel, combinant musique et cinéma. L’an passé, nous vous avions présenté cette manifestation très proche du court métrage, mettant à égalité les réalisateurs et les compositeurs. Cette année, nous sommes retournés trois jours à Aubagne, pour glaner un peu de soleil (raté) et repérer de nouvelles perles courtes (rares au regard de l’importante sélection)
Cette année, 73 courts métrages étaient en compétition internationale au festival. Au départ, la page 21 du catalogue, introduisant les 11 programmes de courts, promettait des « énergies créatrices (…), un nouveau cinéma (…), des petits moments délicieux ». Curieux, nous sommes allés en salle et avons puisé dans le carton de DVD pour faire le lien entre les séances (deux programmes de courts étant seulement projetés quotidiennement), en faisant l’impasse sur les déjà vus « Tennis Elbow », « Kali le petit Vampire », « Tram » , « Prora », « Topo Glassato al Cioccolato », « La Bifle » et « Abgestempelt » (dont l’interview de son réalisateur Michael Rittmansberger fait partie du focus consacré au festival). À l’arrivée, sur 37 nouveaux films, nous avons trouvé 7 exceptions remplissant cette fameuse promesse.
Commençons par les points d’interrogation et les franches consternations. Le Prix du Public, « Du Poil de la bête » de Sylvain Drécourt (France, 2ème film), mettant en scène Philippe Nahon, déçoit par le traitement très inabouti d’une histoire entre un fils et un père, sur fond de chasse à l’homme et de course au Goncourt. « Les cerises du bateau » de Sarah Hatem (Liban, France, 1er film) agace profondément par ses longueurs et son propos (une rencontre soi-disant improbable, dans un Beyrouth, « tiraillé » entre modernité, blabla et tradition). « Dans le pas de Léa » de Renaud Ducoing (France, 3ème film) offre le même sentiment par son histoire tirée par les perruques entre Léa, ex-prostituée, et Maryline, toujours active dans le métier, qui papotent (à poil) de la fidélité et de la liberté, à l’intérieur d’une caravane (logique).
« Return to Sender » de Denise Hauser (Finlande, 1er film), s’intéresse (sans nous) à une scientifique cherchant tant mal que bien l’homme de sa vie sur Internet, alors que « Leon & Barbara » de Marcin Mikulski (Pologne, 2ème film) mêle sans grande originalité petits vieux, fins de mois difficiles et culture de la marijuana, sur un air d’accordéon lancinant et insupportable. Enfin, « Sex, Lies and Flowers » de Jan Santroch (République tchèque, 1er film) ose se présenter comme un film d’humour noir et ironique (cf. synopsis) là où on ne voit qu’un film à sketches bancal avec pots de fleur et tromperies à gogo.
Gardons le meilleur du pire pour la fin avec deux premiers films ex-aequo : a) « La promotion » de Manu Joucla (France), une comédie pas drôle sur les rapports dominant/dominé dans le monde du travail et de l’amour trop libre, et b) « You Missed Sonja » de Félix Koch (Allemagne), un film d’école bourré d’hémoglobine, de dialogues pas possibles et d’images de caméras de surveillance, plus proche du thriller pathétique que du cinéma de demain.
"La Ville lumière"
Heureusement, à Aubagne, nous avons trouvé des « films gentils », possédant certaines qualités sans pour autant nous emballer complètement. Commençons par « Grace » de Jo Kelly (Etats-Unis, Suisse, Belgique, 1er film), Mention du festival, qui lie Jérôme, handicapé mental et physique à Via, prostituée vieillissante, sur fond musical plus ou moins tolérant, mais qui oublie de finaliser son histoire. Poursuivons avec « The Rattle of Benghazi » de Paco Torres (Espagne, Irlande, 3ème film), dans lequel on troque la guerre contre des jeux d’enfants mais dans lequel les bons sentiments et les mauvais acteurs ne font pas bon ménage. « La Ville Lumière » de Pascal Tessaud (France, 3ème film), autre film aimable, confronte un jeune homme à ses pairs, lors de certaines séquences empruntes d’une belle émotion, face aux femmes aimées, pour la vie ou pour un soir.
"How Dave and Emma Got Pregnant"
Terminons avec deux films d’animation très distincts. En premier lieu, une autre Mention, « Fuga » de Juan Antonio Espigares (Espagne, 3ème film) dont on n’a pas compris grand chose, mais dont la musique qui l’accompagne est tellement belle que le film peut bien être mentionné dans ce reportage. Enfin, « How Dave and Emma Got Pregnant » de Joost Lieuwma (Pays-Bas, 3ème film) a le mérite de déclencher l’hilarité par son idée crétine de base : un homme, frustré de ne pas devenir père, voit dans la graisse de son épouse sa progéniture tant rêvée au point de la bercer et de l’accompagner au parc à la vue de tous (sa graisse, oui, vous avez bien lu). Le film, déjanté à souhait, tient plutôt bien la route, mais se ratatine vers la fin, en n’assumant pas son délire jusqu’au bout. Dommage tant cette histoire absurde convoque le rire gras (sans mauvais jeu de mots), changeant de la morosité ciné ambiante.
Parlons maintenant des films réjouissants, vus à Aubagne (car oui, il y en a eu, n’allez pas croire tout ce qu’on vous écrit). À nos yeux virtuels, sept titres valaient le détour cette année au festival. « Korosteoria » d’Antti Heikki Pasonen (Finlande, 3ème film), Prix du Meilleur film de fiction au festival, illustre avec drôlerie et finesse le lien entre deux jeunes paumés, dans une Finlande dépressive et esseulée. sur un air de Dr Alban (aah, It’s My life), de caisses IKEA et d’envies de changement (l’ailleurs ou l’amour ?). « Le Chevreuil » de Rémi St-Michel (Canada, 3ème film) lui emboîte le pas en suivant Marc, un fumeur de joints nonchalant, qui troque le corps de son père contre celui d’un chevreuil percuté sur la route (!), en empruntant à l’humour absurde et à la musique fun & rock toutes leurs saveurs.
Côté belge flamand, deux premiers films nous ont également plu : « Dood van een schaduw » de Tom Van Avermaet, dernièrement nominé aux Oscar (excusez du peu), montre un Matthias Schoenarts méconnaissable (oubliez la masse, la force, concentrez-vous sur son regard, ses émotions), en proie à l’amour et au sacrifice dans ce conte fantastique, plongé dans l’ombre et les ténèbres. Sans autre lien avec ce film si ce n’est sa nationalité, « Natasha » de Roman Klochkov (interviewé au festival), lauréat du prix du Meilleur film d’animation à Aubagne, suit, sous le couvert de l’animation, un ours russe Nicolaï, confronté aux clichés, à la destruction du rêve européen et à l’amour brûlant pianoté un soir de tristesse éthylique. Dans la lignée d’« Administrators », le film de fin d’études de Klochkov, Natasha touche par son graphisme soigné, son humour teinté de mélancolie et le soin apporté à sa partition musicale (un plus à Aubagne).
Côté français, « Lisières » de l’acteur devenu réalisateur Grégoire Colin (2ème film) porte bien son nom et son pluriel puisque le film joue beaucoup sur l’entre-deux (forêt/ville, marginalisation/intégration) en suivant Tchavo, un jeune rom perdant quelque peu ses repères le jour où sa famille disparaît, le laissant seul, malgré lui.
Nos deux derniers intérêts vont à deux films d’écoles, l’un anglais, l’autre israélien. « Head over Heel » de Timothy Rechart (Royaume-Uni), sélectionné cette année à la Cinéfondation et lui aussi nominé aux Oscar (ens animation, pour le coup) propose de s’immiscer dans la vie de Walter, vivant au sol et de sa femme, Madge, vivant au plafond, dans une maison dans laquelle ils se sont éloignés l’un de l’autre depuis bien longtemps. Ce film de marionnettes fonctionne par l’originalité de sa construction (en haut/en bas, le monde à l’endroit/à l’envers), son absence de parole, ses petits regards par dessus les lunettes et ses pas chassés de rapprochement. De son côté, « The House on the Water » de Omer Regev (Israël) s’en sort plutôt convenablement, pour un film d’école, en abordant le choc post traumatique d’un ancien soldat et ses conséquences néfastes sur sa vie d’artiste, d’homme marié et de père de famille. Le sujet n’est certes pas nouveau, mais le film adopte dans sa forme des partis pris intéressants servant son histoire (de l’obscurité des flash-back à la lumière du jour, de l’image tremblante, reflet des incertitudes et des tourments intérieurs à la dissimulation d’un enfant apeuré, derrière un bol de céréales matinales).
Profitons de la nationalité et du sujet de ce dernier film pour parler, une fois n’est pas coutume d’un long-métrage. Cette année, un autre film israélien était en compétition à Aubagne : « Rock The Casbah » de Yariv Horowitz. À la clôture du festival, le film a obtenu une Mention spéciale du Jury à la grande joie du réalisateur (“Merci la France !”). Ce n’est que quelques jours plus tard qu’on a appris que le réalisateur avait perdu connaissance pendant quelques minutes après s’être fait agresser physiquement et verbalement pendant le festival, à l’issue de la projection de son film lié à un souvenir personnel de l’armée (après la mort brutale de l’un des leurs dans la bande de Gaza, quatre soldats israéliens sont réquisitionnés pour retrouver le meurtrier, sur le toit d’un immeuble).
À Aubagne, le contact entre les gens est aisé, et c’est une bonne chose. On se rencontre au petit déjeuner, en terrasse, à une fête, devant le ciné (Le Marcel Pagnol, pour rester simple) ou au resto de pâtes pas terribles. Pendant le festival, nous avons ainsi pu un peu échanger avec Yariv Horowitz et son compositeur, Assaf Amdursky, tout comme avec l’équipe de « The House on the Water » et avec les autres.
Nous n’avons pas pu voir « Rock The Casbah ». À en juger par la bande-annonce, ci-dessus, il est fort possible que le film interroge, interpelle et dérange. Pourquoi pas ? Tous les films ne sont pas lisses, bien heureusement. Mais si certains se défoulent sur d’autres au nom d’une nationalité et d’un sujet traité (par besoin de catharsis ou non), pendant un festival, lieu de culture, de découvertes et d’échanges, on est en droit de se poser des questions et de dénoncer, à notre minuscule échelle, ce genre d’agissements confondant fiction et réalité, cinéma et actualité.
Le 23 mars, se terminait le Festival international du film d’Aubagne, très copain avec l’image, la musique et le son, et mettant les compositeurs autant en avant que les réalisateurs. Beaucoup de courts figuraient au programme de cette édition : u une compétition de 73 films, subdivisés en 11 programmes, quatre cartes blanches à quatre festivals européens (Festival de Clermont-Ferrand, Festival Anima/Belgique, Zagreb Film Festival/Croatie et DOCsk/Slovaquie) ainsi qu’un programme de courts avant les longs et un autre de « Courts qui rendent heureux », spécialité du festival ces dernières années. Après avoir suivi le festival pendant trois jours, nous vous invitons à nous retrouvez ces jours-ci pour notre compte-rendu de cette toute dernière édition.
Proposé en collaboration avec le site internet Critikat.com, le programme « Pays rêvés, pays réels » présenté ces derniers jours au Cinéma du Réel se compose d’une sélection de films contemporains courts et longs traitant au sens large de représentations imaginaires, fantasmées ou concrètes que les individus portent sur des espaces géographiques d’ici ou d’ailleurs.
La sélection de courts métrages s’articule autour de six films. Certains sont orientés vers un imaginaire fort, comme « L’île » de Pauline Delwaulle (France) qui explore une forme documentaire à la frontière de la fiction en utilisant des textes de récits de voyage qui illustrent les images contemporaines. D’autres, en revanche, sont très ancrés dans une réalité sociale comme « Mitote » où le réalisateur, Eugenio Polgovsky (Mexique) jongle entre contexte politique, rituels culturels et rassemblement sportif.
Comment rêver, s’extraire d’une réalité parfois trop dure à porter pour les populations, les individus ? Comment s’accomplir dans un monde en mutation ? Quelles vies peut-on s’autoriser dans la marginalité, dans la norme ? À quel moment basculer dans la folie douce pour mieux accepter sa condition réelle ? Autant de questionnements qu’abordent les réalisateurs dans ces films courts qui interrogent l’individualité et le groupe.
Chacun à sa manière, avec son propre spectre de connaissances et d’envies cinématographiques, explore les pays et paysages. Chez Bertille Bak, on regarde même du côté de l’art contemporain. Le film « Transport à dos d’hommes » (France) use en effet de procédés artistiques relevant du happening mis en scène au sein d’une population de voyageurs comme pour surligner leurs pratiques : le mouvement, toujours le mouvement vers l’ailleurs.
À l’opposé, dans son court métrage « A Cerbère » (France), Claire Childéric filme au plus près les gestes répétés d’ouvriers dans un entrepôt ferroviaire et fige ainsi leur vie dans cet espace unique où les trains partent sans jamais emmener les ouvriers à leur bord. À Cerbère, la vie continue mais flotte sur les vestiges d’un prestigieux passé qui n’est plus. Ultime trace architecturale du faste d’antan : l’hôtel qui n’est plus qu’une coquille vide presque muséifiée.
Dans ce programme, la part belle est faite aux productions récentes avec des films encore peu vus. Seul le court métrage de l’inimitable Luc Moullet datant de 1995 « Imphy, capitale de la France » ouvre un regard sur le contexte avant la crise dans laquelle ont été réalisés les autres courts métrages. Ce film offre ainsi une bouffée d’air rieuse dans ce programme qui tend plutôt vers la nostalgie d’un monde passé et une certaine mélancolie de l’ailleurs.
Pour autant, le programme ne donne pas dans le fatalisme, les hommes semblent tous trouver des ressources pour s’extraire de leur réalité par l’imaginaire. Le film biélorusse « Wooden People » de Victor Asliuk représente sans aucun doute le mieux la capacité humaine à s’inventer un monde pour survivre. Un vieil homme seul dans un village abandonné s’est ainsi récréé une vie où il est prophète en son pays, un pays peuplé de figurines en bois qu’il façonne de ses mains.
« Pays rêvés, pays réels » est un programme qui transporte le spectateur dans des moments de vie d’individus aussi différents dans leurs existences quotidiennes que semblables au regard de leurs rêves. L’imaginaire est, semble-t-il, le propre de l’homme, et pourtant dans les récits des courts métrages présentés ici, les pays les plus rêvés sont aussi ceux où les hommes sont les plus absents.
Le Cinéma du Réel, que nous avons suivi ces jours-ci, s’est terminé hier soir, avec la reprise des films primés hier. Voici le palmarès, côté court établis par les deux jurys.
– Jury officiel (Ariane Doublet (réalisatrice), Felice D’Agostino (réalisateur) et Fabien Gaffez (critique, directeur du festival d’Amiens)
Prix du court métrage : MAURO EM CAIENA de Leonardo Mouramateus / Brésil, 2012, 18′