Tous les articles par Katia Bayer

Djiby Kebe : « La puissance de l’art et du cinéma, c’est de se mettre à la place d’autres personnages »

Fin novembre 2024, Djiby Kebe a remporté au Festival Entrevues de Belfort le Grand Prix du Court Métrage André S. Labarthe pour son premier film, L’Avance, soutenu par la Ville de Paris. Le réalisateur a plus d’un mot dans sa besace et fait son bout de chemin, entre vieux films et grands espoirs. Son court métrage retrace le parcours d’un jeune artiste Aliou (Saabo Balde), vendant sa première toile pour une bouchée de miettes à une collectionneuse (Julia Faure), bien éloignée de ses repères. Influencé par Robert Bressson et Samuel Fuller, Djiby Kebe s’interroge sur sa place de cinéaste dans un milieu qu’il a choisi et dont il continue à décrypter les codes.

Format Court : Quel a été ton parcours avant L’Avance ?

Djiby Kebe : La première fois que je me suis retrouvé dans un cadre scolaire, officiellement, c’était en droit, à la Sorbonne. Ça a duré 6 mois. Ensuite, je suis allé à l’école Kourtrajmé, en section photo, pendant 6 mois. Après, je suis allé aux Beaux-Arts, deux ans après. J’ai arrêté mes études. Maintenant, je travaille à mon compte et j’écris des films. J’ai un projet de magazine à côté qui s’appelle Air Afrique. Ça me permet de gagner un peu d’argent de poche, de pouvoir me concentrer aussi sur des films et de ne pas avoir un boulot freinant.

Air Afrique, ça parle de quoi ?

D.K. : Air Afrique, c’était une compagnie aérienne qui a été fondée dans les années 60 par les 11 États fraîchement indépendants. Elle a existé jusqu’en 2002. En parallèle d’être une compagnie aérienne, Air Afrique a été mécène de cinéma africain, d’art africain, de littérature africaine, etc. Avec mes amis, on est super cinéphiles. On a regardé beaucoup de films, on s’est intéressés à la compagnie, on a décidé de reprendre le nom pour en faire un projet culturel.

Qu’est-ce que la critique t’apporte dans tes idées d’écriture de films ?

D.K. : Je suis hyper cinéphile. J’anime un ciné-club tous les deux mois au cinéma Christine, dans le 6ème arrondissement. Je fais partie de ces gens qui pensent que pour devenir cinéaste, c’est très important de connaître l’histoire du cinéma. En montrant des films qui partent de cette perspective africaine, afro-diasporique, ça me permet aussi de situer mon oeuvre, de la relier avec ces films-là. Mais en même temps, la réalité, c’est que j’ai grandi en France, que j’ai été nourri au cinéma occidental, que j’adore. J’adore aussi Hollywood, les grosses industries européennes. C’est hyper intéressant de faire le parallèle entre tous ces cinémas-là, et d’arriver avec un objet qui va essayer d’être différent de ce qui peut se faire en temps normal.

Pourquoi avoir étudié la photo à Kourtrajmé ? Qu’est-ce que tu y as appris ?

D.K. : J’écris des scénarios depuis que j’ai à peu près 16-17 ans sauf que je n’ai pas eu le courage de faire des films, parce que quand on pense au cinéma, on a l’impression que c’est compliqué, que ça nécessite d’avoir une équipe. Je m’auto-censurais pas mal, c’était compliqué pour moi de porter à l’écran un récit que j’avais moi-même écrit. Passer par la photo, justement, c’était passer par un biais un peu plus subtil, où je pouvais mettre en scène quelque chose de fragmenté, quelque chose qui reste bloqué dans le temps, comme une seule image. Je fais de la photo depuis que j’ai à peu près 15 ans. J’ai été vraiment inspiré par les photographes new-yorkais des années 80 qui ont beaucoup documenté la scène skate. Moi-même, j’ai été un skater.

Je suis allé à Kourtrajmé en section photo parce que j’étais à un moment de ma vie où je n’allais pas à l’école, j’avais 19-20 ans, je ne faisais pas grand-chose. Ma mère n’était pas très contente. Je ne pouvais pas retourner en cours comme ça du jour au lendemain. J’ai vu que ces formations existaient du coup, je me suis dit : « Pourquoi pas ? ». Je me suis dit que ça me ferait rencontrer des gens, essayer de nouvelles choses. Et puis, en étant aux côtés des cinéastes de l’école, des étudiants des autres sections, ça m’a aussi fait comprendre que le cinéma, c’était peut-être à ma portée, qu’il fallait potentiellement que je me lance aussi là dedans.

J’entends assez régulièrement de la part de jeunes qu’il ne faut pas forcément avoir besoin des commissions pour y aller, qu’il faut tourner et c’est comme ça qu’on apprend. Dans quelle mesure as-tu le sentiment que cette idée, c’était vraiment une réalité pour toi, que tu n’avais pas envie d’attendre et qu’il y avait une forme d’urgence ?

D.K. : Je pense qu’en tant que jeune cinéaste, on est nourri d’une certaine naïveté qui nous fait croire que c’est possible. Cette naïveté-là peut nous emmener dans des endroits hyper intéressants. Après, c’est vrai qu’il y a une réalité économique qui est que si on a des moyens et qu’on a une infrastructure qui peut nous permettre de faire des films, on aura beaucoup plus de facilité à faire quelque chose qui, à la fin, sera quelque chose de regardable, qui sera quelque chose de bien. Moi, j’ai eu de la chance. Le premier film que j’ai fait a eu une subvention de la Ville de Paris. Mais avant cela, j’avais quand même dit à mon producteur que si on n’avait pas la subvention, je voulais quand même qu’on fasse le film. Après, est-ce que ça aurait été le même film ? Je n’en suis pas certain. Le fait qu’on ait eu cette subvention-là a permis à ce que le film puisse être à Belfort et puisse être récompensé.

Parfois, les jeunes réalisateurs sont amenés, pour apprendre à réaliser, à faire des films dans des conditions un petit peu différentes. Tu as dû entendre parler des films Nikon et des films kino, réalisés en 48 heures à Trouville. Est-ce que c’est quelque chose qui t’a tenté ?

D.K. : J’ai voulu faire le film que j’avais en tête. Je ne voulais pas le limiter selon des contraintes temporelles ou esthétiques. Je n’ai pas fait le film en pensant à des festivals. J’ai pensé le film en sortant quelque chose de ma tête qui allait, au final, être porté à l’écran. Ça a été quelque chose d’hyper singulier, d’hyper personnel. Je pense que c’est pour ça que ça fonctionne, pour l’instant.

C’est quoi les attentes que tu avais de L’Avance ?

D.K. : La première chose que j’ai dit à mon producteur, à mon chef opérateur et à mon co-scénariste, c’est que je voulais qu’on fasse un film de cinéma et rien d’autre.

C’est quoi, un film de cinéma ?

D.K. : Pour moi, un film de cinéma, c’est un film ambitieux esthétiquement parlant et exigeant intellectuellement. Je pense que le cinéma vit une époque incroyable, il y a de la diversité. J’ai tendance à beaucoup regarder les films du passé. J’adore la période classique hollywoodienne. Je trouve que c’est vraiment l’apothéose du cinéma, en tout cas dans sa forme, que ce soit dans les costumes ou dans les décors. Je pense aux films des années 30-40-50. J’aime beaucoup les films de gangsters de la Warner, cette période m’inspire, jusque dans les années 70, avec le nouvel Hollywood et même le cinéma français qu’on a tendance à oublier. Les films de Bresson ou de Melville, la façon qu’ils avaient de filmer Paris, leurs personnages marginaux, c’est ce qui m’intéresse et que j’essaie de mettre en scène. Le personnage de L’Avance, qui est incarné par Saabo Balde, pourrait être un personnage mis en scène par un Robert Bresson ou un Maurice Pialat, il y a 40 ou 50 ans. J’aime beaucoup aussi assumer ce côté très français de mon cinéma et pas uniquement copier ce qui se fait aux États-Unis. Je pense qu’en France et en Europe, on a une histoire qui est forte et qu’on n’a pas le même contexte culturel qu’aux États-Unis.

C’est marrant que tu parles de Bresson parce qu’il y a une histoire d’argent qui intervient dans ton film.

D.K. : C’est vraiment un de mes cinéastes préférés, que j’ai beaucoup vu, que j’ai beaucoup entendu parler. J’adore sa façon de penser le cinéma. Ce que j’ai vraiment aimé dans son cinéma, qui m’a vraiment marqué pendant ma jeunesse et qui m’a aussi éveillé, c’est sa façon de mettre en scène ces marginaux qui vivent un peu une espèce de fatalité et qui ne peuvent pas être plus forts que le système, que leur destin. C’est ce que j’ai essayé de montrer avec cette scène de fin, où le personnage d’Aliou ne peut pas sortir de cette pièce où il est enfermé, où il est bloqué, c’était un peu dans cette tradition d’un cinéma bressonien.

Tu as l’impression, toi, d’être bloqué dans ton quotidien ?

D.K. : Dans ma réalité, je pense qu’en fin de compte, les questions que je me pose souvent, justement, c’est : à quel endroit je me situe, qui je suis vraiment, comment les autres me perçoivent ? En réalité, j’ai la chance d’avoir côtoyé des milieux très intellectuels et en même temps, ma mère était femme de ménage, mon père était cuisinier plongeur dans une cuisine, dans le quatorzième. Il est arrivé en France dans les années 70, du coup, il a fait ça toute sa vie.

Il est arrivé d’où ?

D.K. : Il est arrivé de Bamako, du Mali. Et en fin de compte, il y a un peu un écart entre ce que j’étais et ce que je suis devenu, dans la mesure où, aujourd’hui, je ne pense pas qu’être un cinéaste, c’est quelque chose qui m’était offert sur un plateau d’argent. J’ai bénéficié du fait de vivre à Paris, d’avoir grandi dans le 20e arrondissement. Encore une fois, j’ai encore plus de chance que des gens qui habitent en banlieue ou même en province qui, eux, justement, ne sont pas à 30 minutes du Quartier latin pour aller voir des films d’art et essai et qui ne sont pas à côté du Musée du Louvre, qui n’ont pas le métro à proximité. C’est aussi ça qui est intéressant, de par mon parcours personnel, j’ai côtoyé plusieurs écosystèmes, plusieurs milieux qui sont un peu opposés, mais qui, en fin de compte ont un sens, C’est vraiment ça que j’ai essayé de retranscrire dans le film. Une scène fait le lien entre les Beaux-Arts, Strasbourg-Saint-Denis et le 19e arrondissement. On a vraiment fait cette scène en pensant, au parcours que je mène dans ma vie de tous les jours. J’étais au Beaux-Arts, je rentrais tout le temps dans le 20e, dans mon logement social à côté de Cité. Je ne suis pas dans la cité, mais j’ai grandi à côté de Cité, j’étais près de ces gens qui avaient beaucoup moins de chance que moi.

Je n’aime pas trop le mot « diversité ». Mais en même temps, aux Beaux-Arts qui est un peu une école d’initiés, est-ce que tu as pu trouver ta place ?

D.K. : L’école a élargi son champ d’étudiants. Ce n’est plus que c’était il y a 30 ans. Cependant, on peut toujours sentir l’écart qui existe entre certains étudiants. Moi-même, je faisais partie un peu des marginaux de l’établissement. Mes parents n’étaient pas artistes, je n’ai pas grandi dans ce milieu. C’est un peu par accident que je suis arrivé là, mais en même temps, c’est un accident que j’ai provoqué. J’ai rencontré pas mal d’étudiants autour de moi qui, eux aussi, m’ont fait part de leur expérience. C’est justement ce mélange-là de parcours qui m’a intéressé et que j’ai voulu mettre en scène. Le point de départ du film, c’est vraiment mon arrivée aux Beaux-Arts et dans le 6ème arrondissement. C’est devenu mon quartier. Je l’apprécie énormément, j’y ai passé beaucoup de temps, c’est un quartier qui est hyper important pour la culture française, parisienne. Avoir été là, ça a été vraiment un reboost d’énergie intellectuelle. Ça m’a permis aussi de capter beaucoup plus de choses de moi-même. J’ai l’impression que je ne suis pas de ce milieu-là, mais en même temps que j’y appartiens.

Tu as remporté le Prix André S. Labarthe. Est-ce que tu savais qui était André S. Labarthe avant de venir à Entrevues ?

D.K. : Oui. J’aimais beaucoup les séries documentaires qu’il faisait sur les réalisateurs. C’est quand même quelqu’un qui a vu Capra, Fleischer, enfin, les cinéastes qui ont changé ma vie. Je pourrais donner tout mon argent, ne serait-ce que pour les rencontrer. Et lui, il les a rencontrés !

Ça représente quoi, un prix portant son nom ?

D.K. : C’est quelque chose d’extrêmement honorifique parce qu’il m’a vraiment permis de faire évoluer ma cinéphilie. Et puis, Belfort, ça compte aussi pour moi parce qu’en 86, je crois, Samuel Fuller, mon cinéaste préféré, est venu ici. Ça fait trop bizarre de se dire que je suis au même endroit que lui et qu’il est là, en fait. Son cinéma me bouleverse. Je peux regarder ses films à l’infini, son travail me fait comprendre qu’en fait, être un être humain, c’est quand même quelque chose de puissant. Être capable de capter tout ce qui se passe autour de nous et de le mettre en forme, de le mettre en scène, via le cinéma, ou via même d’autres formes, ça me fait croire en l’art, en la vie. Je suis trop content de faire partie de cette famille-là !

Tu connais tous les lauréats du prix ?

D.K. : Non, mais pour le coup, je me suis intéressé au festival lorsqu’on a été sélectionnés. J’ai vu qu’il y avait tous ces noms qui y étaient passés, comme Sean Baker ou les frères Safdie. C’est fou, parce que finalement, ce sont des gens qui font partie de la plus jeune génération de cinéastes aujourd’hui. Ce sont des artistes forts, exposés à l’international. Justine Triet et Arthur Harari aussi en font partie. Ces cinéastes qui sont dans la quarantaine, ont un nouveau regard sur le monde, ils ont grandi avec des dynamiques différentes de leurs prédécesseurs. Maintenant, moi aussi, je fais un peu partie de cette lignée-là, ça me rend très optimiste. Ça veut dire que peut-être qu’un jour, je serai à leur niveau aussi.

Est-ce que le fait de ne pas appartenir à ce milieu-là te procure une forme de rage pour te donner les moyens d’y arriver ?

D.K. : Bien sûr. Cette espèce de rage, c’est propre au commun des mortels, je pense. La littérature en parle depuis longtemps, Rastignac, par exemple, c’est quelqu’un qui a la rage et qui veut tout défoncer. Le fait de ne pas avoir été quelqu’un de privilégié, ça a créé pas mal de complexes en moi dans ma jeunesse que j’ai maintenant réussi à déconstruire. Aujourd’hui, je suis beaucoup plus apaisé avec la question. Au final, je ne pense pas être en mission. Ce qui est important pour moi, c’est juste d’être épanoui dans la vie, d’être heureux, de faire plaisir à ma famille, de rendre fier mes proches et c’est pour ça que je suis très content qu’on ait gagné ce prix-là. Maintenant, autour de de moi, des gens vont être contents et ça va même peut-être les inspirer. J’ai eu des prédécesseurs, je ne suis pas le premier à avoir fait ça et je ne serai pas le dernier non plus.

Mon film est amené à parler à tout le monde. Il n’est pas amené à fermer les portes parce qu’au final, je pense que la puissance de l’art et du cinéma, c’est de se mettre à la place d’autres personnages. Moi, j’ai appris ce que c’était être une femme japonaise à travers le cinéma de Mizoguchi. J’ai appris ce que c’était d’être un Italo-américain à travers les yeux de Martin Scorsese et je pense que c’est pareil pour quelqu’un qui regarde mon film. Il peut comprendre ce que c’est d’être quelqu’un issu de l’immigration en France, dans les milieux de l’art. Je pense qu’on doit plus être dans une dynamique d’échange plutôt que de renfermer les choses pour soi et qu’en partant de cette perspective-là, on ira vers des choses beaucoup plus radieuses à l’avenir.

C’est quoi, les difficultés pour toi aujourd’hui ?

D.K. : Je ne pense pas avoir énormément de difficultés Je pense que je suis même très privilégié dans les projets que j’essaie de mettre en place. J’ai eu la chance d’avoir des gens qui m’ont soutenu, des marques surtout par rapport au magazine. Maintenant, j’ai quand même une communauté qui grossit petit à petit et il y a beaucoup de marques qui viennent me voir pour mettre à bien mes projets, du coup, je suis très heureux. Je pense qu’il y a 30 ans, quelqu’un comme moi n’aurait pas eu la même chance, ça a changé avec la démocratisation des réseaux sociaux. Même s’il y a du mauvais dedans, il y a aussi du bien dans la mesure où maintenant c’est plus possible d’être vu, d’être entendu, mais encore une fois, je ne pense pas être la norme. Je ne pense pas que tout le monde vit la même situation que moi.

Et les difficultés propres au film ?

D.K. : Ça a été extrêmement compliqué, mais je pense qu’encore une fois, ce sont des dynamiques que le plus petit cinéaste comme le plus grand vont rencontrer. Ce n’est jamais facile de faire un film, c’est toujours compliqué et tu as des moments de doute, mais après, ce qui compte, c’est comment on va gérer tout ça personnellement. Moi, je pense que j’ai plutôt été bon, même si j’ai eu des énormes phases de stress où j’ai été bloqué sur mon scénario.

C’est pour ça que tu as travaillé avec un co-scénariste ?

D.K. : J’ai travaillé avec un co-scénariste qui s’appelle Ahmadou Bamba-Thiam. Au-delà d’être mon meilleur ami, c’est quelqu’un qui me comprend énormément et moi, avant tout, ce que j’aime, c’est rigoler en faisant des films. Ça peut paraître bête, mais j’adore rigoler. Écrire tout seul, c’est marrant, on rigole à ses propres blagues, mais écrire avec quelqu’un, c’est encore mieux et j’ai beaucoup aimé ça. Là, pour mon nouveau projet, j’écris seul parce que maintenant, j’ai envie de me fixer le défi de faire quelque chose seul. Ça ne veut pas dire que je vais tenir la promesse. Mais en tout cas, pour L’Avance, je l’ai fait parce que je me sentais bien avec Ahmadou et que surtout, c’était quelqu’un qui me comprenait.

C’est quoi ta culture du court-métrage ?

D.K. : Elle est plutôt faible pour être tout à fait honnête. J’ai juste regardé les courts-métrages des metteurs en scène que j’aimais beaucoup pour voir comment ils avaient commencé. C’est plus pour voir à quelles étapes ils étaient de leur cinéphilie, comment ils avaient digéré l’information et comment ils l’avaient transformée en court. C’est vraiment ça qui m’a intéressé.

Propos recueillis par Katia Bayer

P comme Papillon

Fiche technique

Synopsis : Dans la mer, un homme nage. Au fur et à mesure de sa progression, les souvenirs remontent à la surface. De sa petite enfance à sa vie d’homme, tous ses souvenirs sont liés à l’eau. Certains sont heureux, d’autres glorieux, d’autres traumatiques. Cette histoire sera celle de sa dernière nage. Elle nous mènera de la source à la rivière – des eaux des bassins de l’enfance à ceux des piscines – d’un pays d’Afrique du Nord aux rivages de la Méditerranée – des stades olympiques aux bassins de rétention d’eau – des camps de concentration aux plages rêvées de La Réunion. L’homme finira par disparaître dans le bleu infini de la mer.

Genre : Animation

Durée : 14’26

Pays : France

Année : 2024

Réalisation : Florence Miailhe

Scénario : Florence Miailhe

Direction photo : Guillaume Hoenig, Sébastien L’Hermitte

Montage : Nassim Gordji-Tehrani

Animation : Florence Miailhe, Aurore Peuffier, Chloé Sorin

Décors : Florence Miailhe, Margaux Duseigneur

Musique et montage son : Pierre Oberkampf

Voix : Fayçal Zafi, Jessica Jaouiche, Alexandre Liebe, Johannes Oliver Hamm, Olivier Peissel, Hocine Ben, Foued Kemeche, Yassine Mestaoui

Production : Sacrebleu Productions, Xbo Films

Articles associés : la critique du film, l’interview de Florence Miailhe

Papillon de Florence Miailhe

Papillon, ce n’est pas l’histoire d’un battement d’ailes, mais celle d’un battement de bras dans l’eau, qui permet au nageur de s’élancer de souvenir en souvenir. Ce court-métrage d’animation tout en peinture, signé Florence Miailhe, présélectionné aux César 2025, retrace l’histoire personnelle d’Alfred Nakache, connu aussi sous le nom d’Artem, grand champion de nage papillon français. Florence Miailhe, réalisatrice reconnue pour son style unique, a souvent exploré des récits intimes et marqués par la mémoire, mêlant le personnel et le collectif dans ses courts-métrages, avant de passer au long avec La Traversée (2021). Son travail se distingue par l’utilisation de la peinture animée, qui confère à ses œuvres une texture aussi vivante que poétique.

Le film commence sur fond de bruit de vagues et de respirations. Un homme de dos se met de l’eau sur le visage afin de se réveiller – ou de se rappeler, puis s’en va nager. C’est le début de l’histoire, la (re)plongée dans les souvenirs d’Artem. Le motif de l’eau, qui nous guide tout au long du film, nous permet de plonger – littéralement – dans la mémoire du personnage. Par coups de pinceaux ou vagues couvertes d’écume, on découvre doucement les paysages de la vie du personnage. Le premier paysage, très coloré, se concentre sur une eau tremblotante, traversée par des poissons et effleurée par des insectes. On voit là un jeune garçon au bord d’un bassin, sur lequel est posé un papillon jaune vif. Ce sera là la seule allusion imagée de la spécialité d’Alfred Nakache en nage, le papillon, un mouvement de natation très réputé, notamment en raison de sa difficulté. Ce mouvement naît par ailleurs dans les années 1930, au moment où ce dernier se met à nager. Cette variante de brasse, avec le retour des bras hors de l’eau, permet aux nageurs d’aller plus vite lors des compétitions.

Si le court se construit autour des souvenirs progressifs du personnage, il n’en reste pas moins une véritable ode à l’eau, comme source de vie mais aussi de danger. Les premières images de l’enfance sont très parlantes et nous rappellent son omniprésence au cours de la vie : l’eau réconfortante du bain pour se laver, mais aussi l’eau comme source d’angoisse (sauter d’une cascade) ou comme plaisir simple (se prélasser dans un bassin). Artem passe de la peur de l’eau à son plaisir, et du coin de la mer à la piscine. Il n’y a pas que le corps du nageur qui se transforme (humain, dauphin et même oiseau), les lieux aussi se renouvellent inlassablement.

Le temps des compétitions vient rapidement rythmer la vie d’Artem et se reflète dans le court-métrage de Florence Miailhe. C’est là qu’il y expérimente les moments les plus doux de l’existence, mais aussi les plus durs. À la fin d’un championnat, Artem remonte l’échelle qui mène au bord de la piscine, puis se retourne : il nous fait face, ou plutôt regarde derrière lui. C’est la rencontre de l’amour, de la beauté, qui se joue encore une fois sur l’eau : sur le plongeoir, une gymnaste effectue un salto et rejoint ses partenaires pour effectuer un spectacle de natation synchronisée. Artem reste au bord de l’eau, et quand elle passe devant lui ses cheveux flottent, avant de prendre la forme de vagues, dans lesquels il plonge sans hésiter. Alors la nage devient un ballet à deux, chaque coup de pinceau est un remous de plus dans cette danse aquatique.

C’est dans ce contexte de compétition que surgissent les prémisses de la Seconde Guerre mondiale, marqué par la montée des extrémismes et l’arrivée des régimes totalitaires. Les compétitions s’enchaînent, en Afrique du Nord d’abord, puis en Europe. Dans l’eau claire et chlorée de la piscine, apparaissent progressivement un drapeau nazi et des pancartes “Interdit aux Juifs” derrière des cris de haine allemands. Alfred Nakache, athlète juif, participe aux Jeux olympiques de 1936 à Berlin, des Jeux très inscrits dans la propagande nazie. Très vite, on voit la situation basculer. Artem, sa femme et son enfant se font sortir de l’eau, littéralement : la piscine leur est interdite. Plus tard, il se fait également sortir d’une compétition “selon les lois raciales” : cette fois-ci, on entend très distinctement des voix françaises l’annoncer. La collaboration avec le régime nazi et l’antisémitisme en France à cette époque sont montrés sans aucun détour. C’est en outre la violence des voix – françaises ou allemandes – qui résonne particulièrement, en contraste avec les bruits d’eau qu’on peut trouver tout au long du court (agitée, tremblotante, chuchotante même). Il faut par ailleurs souligner que jamais nous n’entendons la voix d’Artem, ou celle de sa femme et de sa fille. Nous ne voyons les événements qu’à travers ses yeux.

La musique, discrète mais omniprésente, accompagne le spectateur dans cette plongée émotive. Les bruits d’eau, mêlés à des mélodies subtiles, renforcent un sentiment d’immersion saisissant. Chaque détail visuel et sonore semble minutieusement conçu pour offrir une expérience profondément sensorielle et humaine, rendant hommage à la fois à l’histoire d’un homme et à une mémoire collective.

Dans un mouvement de nage encore, on revient à la mer, cette fois-ci sombre et agitée, devant une dune de sable, en pleine nuit. Les sons sont indistincts, la peur monte, on entend un enfant pleurer. Sur les flots sombres, une barque arrive, les touches de couleur s’animent en tourbillons fiévreux, un chien aboie. Dans l’ombre, la famille se cache, sans pouvoir venir en aide à ce personnage perdu sur l’eau – peut-être une métaphore de ce qu’il va leur arriver. Très vite tout s’enchaîne : la séparation, la violence – tout est suggéré sans pour autant être montré, c’est l’aller vers les camps d’extermination. Seule une scène dans la piscine, profondément choquante, nous rappelle l’appellation du “nageur d’Auschwitz” : des officiers lancent un bout de pain dans l’eau, que le prisonnier doit s’efforcer d’aller récupérer. Des voix acérées encore résonnent dans le fond, les corps deviennent des ombres floues, des squelettes esquissés et peu à peu, le corps rouge-brun remonte à la surface : c’est le retour.

Un retour dans la solitude lié à la perte (de sa femme et de sa fille), à la compétition, à la marque du traumatisme de la guerre. Nous retrouvons enfin Artem sur cette première plage colorée comme professeur de natation : le film se finit comme il a commencé, dans l’eau. À la fois ode à l’eau et hommage à Alfred Nakache, Papillon, plein de couleurs, est important, traitant une mémoire personnelle mais également une mémoire historique à travers des thématiques universelles, aussi bien le sport que la mort, les discriminations et l’amour et que la solidarité.

Amel Argoud

Consulter la fiche technique du film

Article associé : l’interveiw de Florence Miailhe

Le nouveau Top 5 de l’équipe de Format Court

Depuis 15 ans déjà, les membres de Format Court se prêtent à l’exercice du Top 5 des meilleurs courts-métrages vus pendant l’année écoulée. Rituel oblige, voici les films qui ont le plus marqué notre équipe cette année, par ordre de préférence !

Retrouvez par ailleurs les résultats du Top 5 des internautes. Nous en profitons pour vous souhaiter une bonne et heureuse année 2025, remplie de jolis courts !

Mona Affholder

1. 3350 KM de Sara Kontar (France, Syrie)
2. Chère Louise de Rémi Brachet (France)
3. L’homme qui ne se taisait pas de Nebojša Slijepčevič (France, Croatie, Bosnie, Slovaquie)
4. Les animaux vont mieux de Nathan Ghali (France)
5. Sanki Yoxsan de Azer Guliev (France, Azerbaidjan)

Amel Argoud

1. Nous ne serons pas les derniers de notre espèce de Mili Pecherer (France)
2. Adieu tortue de Selin Öksüzoğlu (France, Turquie)
3. Que les meilleurs gagnent de Noah Cohen (France)
4. Tako Tsubo de Fanny Sorgo et Eva Pedroza (Allemagne, Autriche)
5. Soleil gris de Camille Monnier (France)

Agathe Arnaud

1. Mémoires du bois de Théo Vincent (France)
2. Boucan de Salomé Da Souza (France)
3. Transalpin de Léo Gatinot et Clara Nicolas (France)
4. Les mystérieuses aventures de Claude Conseil de Marie-Lola Terver et Paul Jousselin (France)
5. Malgré la nuit de Guillermo García López (France, Espagne)

Katia Bayer

1. L’homme qui ne se taisait pas de Nebojša Slijepčevič (France, Croatie, Bosnie, Slovaquie)
2. Boucan de Salomé Da Souza (France)
3. Mille moutons de Omer Shamir et Santiago Zermeno (France)
4. Quelque chose de divin de Bogdan Stamatin et Mélody Boulissière (France, Roumanie)
5. Beurk !, de Loïc Espuche (France)

Dylan Librati

1. Very gentle work de Nate Lavey (États-Unis)
2. Montsouris de Guil Sela (France)
3. Au prix de la chair de Tomas Palombi (France)
4. Hymn of the plague de Ataka51 (Russie, Allemagne)
5. Boucan de Salomé Da Souza (France)

Augustin Passard

1. Une orange de Jaffa de Mohammed Almughanni (France, Pologne)
2. Mémoires du bois de Théo Vincent (France)
3. Volcelest de Éric Briche (France)
4. Les Marquises de Adrien Selbert (France)
5. Nino Lunaire de Manuel Billi (France)

Julia Wahl

1. Plus douce est la nuit de Fabienne Wagenaar (France)
2. Amélia Starlight de Laura Thomassaint (France)
3. Un conte très tordu de Catherine Buffat et Jean-Luc Gréco (France)
4. L’Avance de Djiby Kebe (France)
5. Volcelest de Eric Briche (France)

Vos films préférés en 2024 !

En janvier, Format Court fêtera ses 16 ans (bouchon !). Après avoir publié il y a quelques jours notre propre Top 5 des meilleurs courts-métrages de l’année, retrouvez les résultats de votre propre Top, suite à notre appel publié récemment sur notre site internet. Voici les 5 films, vus cette année, qui ont remporté le plus de suffrages du côté des internautes.

1. Mémoires du bois de Théo Vincent

2. Les Liens du sang de Hakim Atoui

3. Les Animaux vont mieux de Nathan Ghali

4. Une Orange de Jaffa de Mohammed Almughanni

5. Adieu tortue de Selin Öksüzoglu

Les 45 courts présélectionnés aux Oscars 2025 (dont certains visibles en ligne !)

L’Académie des Oscars a annoncé il y a quelques jours les films shortlistés dans 10 catégories dont celles liées aux courts-métrages. À ce stade, 45 films sont en lice pour l’Oscar du meilleur court 2025, que ce soit en fiction, en animation et en documentaire. Les nominations seront annoncées le 17 janvier tandis que la cérémonie des Oscars aura lieu le 2 mars prochain. Bonne nouvelle : le tiers de ces courts en présélection est visible en ligne !

Documentaires

– Chasing Roo de Skye Fitzgerald

– Death by Numbers de Samantha Fuentes

– Eternal Father de Ömer Sami



– I Am Ready, Warden de John Henry Ramirez

Incident de Bill Morrison

– Instruments of a Beating Heart de Ema Ryan Yamazaki

– Keeper de Hannah Rafkin

– Makayla’s Voice: A Letter to the World de Julio Palacio

– Once upon a Time in Ukraine de Betsy West et Khodakivska Tetiana

– The Only Girl in the Orchestra de Molly O’Brien

– Planetwalker de Dominic Gill & Nadia Gill

– The Quilters de Jenifer McShane

– Seat 31: Zooey Zephyr de Kimberly Reed

– A Swim Lesson de Will McCormack et Rashida Jones

– Until He’s Back de Jacqueline Baylon

Animations

– Au Revoir Mon Monde de Florian Maurice, Maxime Foltzer et Estelle Bonnardel, Baptiste Duchamps, Astric Novais, Quentin Devred

A Bear Named Wojtek de Iain Gardner

– Beautiful Men de Nicolas Keppens

– Bottle George de Daisuke ‘Dice’ Tsutsumi

In the Shadow of the Cypress de Shirin Sohani et Hossein Molayemi

– Magic Candies de Daisuke Nishio

– Maybe Elephants de Torill Kove

– Me de Don Hertzfeldt

– Origami de Kei Kanamori

– Percebes de Alexandra Ramires, Laura Gonçalves

– The 21 de Tod Polson

– Wander to Wonder de Nina Gantz

– The Wild-Tempered Clavier de Anna Samo

– Beurk! de Loïc Espuche

– A Crab in the Pool de Alexandra Myotte, Jean-Sébastien Hamel

Fictions

– Anuja de Adam J. Graves

– Clodagh de Portia A. Buckley et Michael Lindley

– The Compatriot de Pavel Sýkora and Viktor Horák

– Crust de Jens Kevin Georg

– Dovecote de Marco Perego

– Edge of Space de Jean de Meuron

– The Ice Cream Man de Robert Moniot

I’m Not a Robot de Victoria Warmerdam

– The Last Ranger de Cindy Lee

A Lien de Sam et David Cutler-Kreutz



The Man Who Could Not Remain Silent de Nebojša Slijepčević

– The Masterpiece de Àlex Lora

– Une Orange de Jaffa de Mohammed Almughanni

– Paris 70 de Dani Feixas

Room Taken de T.J. O’Grady-Peyton

Votez pour les meilleurs courts de l’année 2024 !

En janvier, Format Court fêtera ses 16 ans d’existence (bouchon !). Comme chaque année, notre équipe prépare son Top 5 annuel des meilleurs courts-métrages, exercice réalisé depuis 14 ans déjà. Depuis 9 ans, vous avez également la possibilité de voter pour vos 5 courts-métrages préférés de l’année par mail.

L’an passé, 5 films avaient remporté le plus de suffrages : La Cour des grands de Claire Barrault, Caillou de Mathilde Poymiro, La Vie au Canada de Frédéric Rosset, Cultes de David Padilla et Binaud & Claude de Mélanie Laleu.

Faites-nous part jusqu’au mardi 31 décembre inclus de vos 5 courts-métrages favoris remarqués cette année, tous pays et genre confondus, par ordre de préférence, en n’oubliant pas de mentionner leurs réalisateurs et pays d’appartenance.

Nous ne manquerons pas de publier les résultats de vos votes sur Format Court !

À vos top, prêts ? Partez !

Formats Longs : Vingt Dieux de Louise Couvoisier

C’est un sacré premier film. Vingt Dieux de Louise Couvoisier, en lice pour la Caméra d’or, fait partie de la sélection Un Certain Regard 2024. La réalisatrice est issue de la section scénario de la CinéFabrique, une école de cinéma vieille de seulement 9 ans, basée à Lyon et qui a ouvert il y a un an une école à Marseille.

Le film de fin d’études, Mano a mano, de Louise Couvoisier, réalisé à la CinéFabrique, avait obtenu le Premier prix de la Cinéfondation (ex-Cinef) en 2019. Nous en avions parlé sur Format Court.

Dans son court-métrage, Louise Couvoisier traitait du rapport amoureux, entre deux jeunes acrobates. Le réel, le rapport au corps, l’amour étaient déjà au centre de ses préoccupations et de son cinéma. Le premier Prix de la Cinéfondation est une garantie de revenir à Cannes avec son premier long-métrage. C’est chose faite avec Vingt Dieux, le premier long tout en douceur de Louise Couvoisier.

D’une famille très simple (le mot n’est pas péjoratif), elle raconte l’histoire de Totone (Clément Favreau), un jeune paysan jurassien de 18 ans qui passe son temps à traîner avec ses potes. Dans sa vie, il y a bien son père, mais comme tous les jeunes, il en a un peu honte, d’autant plus que le paternel ne tient pas bien l’alcool. Lui reste sa petite soeur de 7 ans (Luna Garret) dont il doit bien s’occuper. Et puis, il y a les filles, les bagarres, les courses de bolides et les fêtes.

Le jour où son père meurt, Totone quitte le monde de l’enfance. Il doit s’occuper de sa soeur et de la ferme. Devenir un adulte, faire à manger, gagner de l’argent, prendre des décisions. Comme faire ? Pourquoi pas en faisant du fromage, voire le meilleur comté du coin, dans l’idée de remporter les 30 000 euros du concours ? Ce projet devient son objectif principal, alors qu’il n’y connaît pas grand chose, quelques soient les moyens pour y parvenir. Dans l’intervalle, il fait la connaissance de Marie-Lise (Maïwene Barthelemy), une productrice de lait réputé dans la région dont il tombe amoureux.

Dans son film, Louise Courvoisier filme joliment la nature, les vaches, la drague, la jeunesse, le sexe, la dureté de la vie et l’accent du terroir. Avec simplicité, douceur, légèreté et humour, elle touche juste, notamment car elle filme ceux qu’elle connaît, de son village. Pour ce film, la réalisatrice s’est entourée de comédiens professionnels et de sa troupe. On retrouve plusieurs Courvoisier au générique, que ce soit côté décors (Ella) ou musique (Linda et Charlie).

« Vingt Dieux », c’est le juron qui exprime la surprise, l’émotion, c’est le « sacrebleu » ou le « flûte » du terroir. On le lâche au bar, sur un tracteur, dans le champ. Il fait partie du quotidien et de l’ADN du cercle de Totone. Ce quotidien, ce monde rural aussi beau qu’éprouvant, bien loin de l’effervescence de la Croisette, on le garde en tête après sa projection. Ce qu’on retient aussi du film, c’est le soin porté aux dialogues (co-écrits par Louise Courvoisier et Théo Abadie), la tendresse à l’égard de cette jeunesse, porteuse d’espoir, ainsi que la solidité du lien familial et la solidarité au sein du groupe.

Issue d’une famille d’artistes du cirque et d’agriculteurs, Louise Courvoisier nous avait intrigués avec son court Mano a mano, inspiré de son premier cercle. Avec Vingt Dieux, lié au deuxième, elle ose un premier film percutant dans lequel l’âpreté n’est jamais loin de la joie et l’amour au plus près de ses personnages et décors.

Katia Bayer

William Lebghil : « L’empathie est inhérente au travail d’acteur et de réalisateur »

Venu au Festival d’Arras présenter Joli, joli de Diasthème, William Lebghil évoque pour Format Court ses amitiés en courts et en longs, l’empathie qu’il associe à son métier et la lucidité qu’il a face à l’incertitude des tournages. Vu dans les films Grand Paris de Martin Jauvat, La vie de sa mère aux côtés d’Agnès Jaoui ou la série Hippocrate de Thomas Lilti, il est à l’affiche de Le beau rôle de Victor Rodenbach (sortie prochaine), un premier long accueillant une pléthore de jeunes comédiens, avec en premier plan Vimala Pons. En parallèle, l’acteur joue ou prête sa voix dans des courts de fiction et d’animation. Rencontre avec un comédien qui rit beaucoup, qui cultive le mystère (zéro info sur Instagram) et qui est aussi naturel que sympathique.

© Aurélie Lamachère / Arras Film Festival

Format Court : Tu fais confiance à des réalisateurs de premiers longs qui viennent du court. Comme tes rôles sont de plus en plus importants, qu’est-ce qui fait que tu libères quand même du temps pour faire des courts ? Est-ce que tu crois vraiment dans ce format, est-ce que ce sont vraiment les projets qui te parlent ou alors ce sont plutôt les relations qui jouent ?

William Lebghil : Les courts-métrages, dans le fond, je n’en ai pas faits énormément, mais c’est en général des liens d’amitié qui m’amènent à en faire.

Comme avec Félix Moati, par exemple, sur Après Suzanne ?

W.L. : Oui, voilà. Avant le film de Martin Jauvat, j’avais fait deux courts avec lui. Je l’avais rencontré sur le film Yves de Benoit Forgeard, il faisait le making of et il s’occupait un peu de la street credibility du film. On est devenus plutôt très copains. J’avais vu ses précédents courts-métrages que j’avais beaucoup aimés, du coup, j’ai eu confiance en lui. Il parle aussi de la banlieue, et d’un endroit où moi, j’ai grandi, parce qu’on vient tous les deux du 77, la Seine-et-Marne. Ça m’intéressait de découvrir un mec qui parlait de là où j’ai passé mon enfance, avec une forme de poésie et d’humour, avec un propos que je trouve assez profond sur ces zones-là, où on n’est pas dans la cité. On est dans des pavillons où on se fait un peu chier. Bref, ça me parlait vachement. En fait, mon lien, en tout cas avec les courts-métrages, est surtout sentimental. J’en fais aussi quand ça m’intéresse. Par exemple, Choucroute a été réalisé par mon meilleur ami, Benoît Moret. On joue ensemble, je l’ai rencontré quand j’avais 16 ans à Paris. On est encore amis aujourd’hui, et il a fait son premier film. On adore manger, donc ça me paraissait tout à fait logique de faire ce film ensemble ! Ce que j’aime bien avec les courts-métrages, c’est la promesse qu’il y a derrière. La promesse d’un cinéaste, d’un auteur, c’est assez excitant.

Avec Anthony Bajon, on a parlé du premier casting, du début, des désillusions aussi. C’est vrai qu’à un moment donné, quand on est lancé, on met un peu ça de côté, mais il faut quand même se faire repérer et surtout persévérer. Comment ça s’est passé pour toi, les castings ?

W.L. : Au début, je faisais beaucoup de théâtre, et je m’étais donné tout seul du travail en produisant une pièce dans un petit café-théâtre. Je jouais tous les soirs. Après les castings, je n’en ai pas passés tant que ça non plus, mais parmi les premiers que j’ai passés, il y en avait un pour une pub pour la Wii. J’étais tellement stressé que j’ai découvert des muscles de mon visage que j’ignorais ! Ensuite, j’ai pris le métro et j’ai failli m’évanouir, j’ai eu comme un black out parce que j’étais vraiment ultra stressé.

Tu l’as eu, le casting ?

W.L. : Non, pas du tout (rires) ! En tout cas, je ne sais pas ce qu’il faut faire exactement, mais l’objectif pour un acteur, c’est de réussir à être assez détendu pour pouvoir être disponible pour pouvoir jouer, et pour pouvoir avoir une attention un peu aiguisée.

Comment conçois-tu ce métier ? Le reste du temps, comment est-ce que tu fonctionnes quand tu ne tournes pas ? Il y a quand même des périodes de doutes, des incertitudes.

W.L. : C’est ça qui est difficile. Si on arrive à faire deux films par an quand on est acteur, c’est que ça va, c’est chouette. Deux films par an, ça représente en termes de temps peut-être six à huit mois de travail, donc il y a six ou quatre mois à la limite dans l’année où il ne se passe rien, où on est au chômage en fait, où on est comme des retraités. C’est un peu ça qui est intéressant aussi je trouve, et qui est une vraie chance, c’est de réussir à remplir ce temps-là, et à le mettre à profit pour soi-même, pour son travail, pour son métier d’acteur. Moi, j’aime bien aussi aller au théâtre quand je ne tourne pas, parce que justement ça me fait continuer à travailler, parce que c’est un métier où on approfondit tout le temps, et c’est infini. Notre expérience de vie se mélange, elle se greffe, on grandit en même temps qu’on approfondit notre art dans ce métier. Moi en dehors, j’aime bien cuisiner, voir mes amis, voyager, faire des choses tout à fait normales.

Est-ce que ça t’arrive de revoir les images d’avant, et de réaliser comment tu as évolué, grandi, changé mentalement ?

W.L. : Je ne regarde pas vraiment les images. En fait, je ne vois pas trop quel serait l’intérêt de revoir des films dans lesquels j’ai joué. Non, je ne le fais vraiment pas du tout (rires) ! Mais je peux retomber parfois sur des films que j’ai faits et les revoir avec nostalgie. En fait, plus le temps passe, plus le film est derrière nous, moins on a un regard jugeant sur ce qu’on a fait, moins on se voit parce que c’est assez difficile de se voir à l’écran quand même. Et puis voir un film dans lequel on a joué, c’est comme regarder un film de vacances. On se souvient de ce qu’on avait mangé le midi à la cantoche, la blague qu’on avait faite à untel ou untel… Je trouve que c’est assez difficile quand on a joué dans un film de voir le film tel qu’il est. Notre regard, il est biaisé. En fait, plus le temps passe, plus on oublie ce qui s’est passé et plus on peut regarder le film tel qu’il est. Pour le coup, c’est assez intéressant.

« La cache »

Tu as joué dans le dernier film de Lionel Baier, La Cache. Tu y as joué aux côtés de Michel Blanc, tu as également joué dans son film Voyez comme on danse (2018). Comment fonctionnais-tu avec lui ? De manière plus large, tu t’es retrouvé avec des gens de ta génération, avec tes potes, comme sur Hippocrate, mais aussi avec des acteurs plus chevronnés, des références. Comment est-ce que tu arrives à trouver ta place ?

W.L. : Je suis évidemment probablement plus impressionné par des gens qui m’ont bercé quand j’étais enfant et que j’admire beaucoup, ça, c’est sûr. Mais en même temps, mes expériences sont plutôt positives. Par exemple, quand j’ai rencontré Michel, c’était quelqu’un de plutôt simple, qui est devenu après un ami. Il me donnait des conseils sans m’en donner d’ailleurs, parce que ce n’était pas un donneur de leçons du tout. Je sais pas, sa façon d’être et de vivre, elle ressemblait plutôt à la mienne. Et en fait, je suis plutôt souvent agréablement surpris de voir que les gens qui font ce métier depuis longtemps et qui le connaissent bien sont des gens plutôt simples. En tout cas, c’est l’expérience que j’ai. Je le vis plutôt comme une chance de rencontrer ces gens-là et de pouvoir travailler avec eux, que ce soit Michel ou Agnès Jaoui. Que ce soit des acteurs ou des réalisateurs chevronnés, ils ont de l’expérience et donc de l’empathie, puisque c’est un métier qui tourne vachement autour de ça. Vu que ce sont des gens qui font ce métier depuis longtemps, ils arrivent à se mettre à la place d’un jeune acteur qui arrive et à l’aider. Moi, je me suis senti vachement dorloté, protégé et compris, en fait, par ces acteurs et réalisateurs et actrices et réalisatrices. L’empathie est inhérente à ce travail, il faut en avoir, c’est obligé.

Tu prêtes ta voix à un film d’animation réalisé par des étudiants des Gobelins, Au revoir Jérôme. Le héros est un personnage avec des grandes jambes, ta voix est méconnaissable, le dessin est ubuesque. Qu’est-ce qui t’a donné envie d’accepter ce projet ?

W.L. : Moi, j’adore. C’est un exercice qui m’a trop plu, qui est assez étonnant et qui est assez différent du jeu d’acteur. J’y vais avec plaisir, mais parce que ça me plaît. Si on m’avait envoyé un film qui ne m’avait pas plu, je ne l’aurais pas fait. Je fais confiance à mon intuition, à ce que je ressens à la lecture du scénario et à la rencontre aussi avec la réalisatrice ou le réalisateur.

Qu’est-ce que le court-métrage peut représenter ? On lui associe souvent cette expression de carte de visite.

W.B. : Un petit peu, oui. C’est ça, parce que le court-métrage ne passe pas en salle alors que le long, oui (rires) ! Ça ne fait pas vendre des confiseries, les courts-métrages (rires) !

Au Festival Format Court, il y a un distributeur ! On te filera des confiseries si tu viens.

W.B. : Génial !

Comment es-tu guidé dans tes choix ?

W.B. : Je fais très, très confiance à mon agent aussi. J’aime ses goûts, j’aime la manière qu’il a de parler des films, même de penser au casting des films. Je trouve que c’est un être précieux.

Dans tes projets super différents, il y a ce truc du mec souriant, « populaire », qui revient. Est-ce que tu as l’impression que tu renvoies à ça ?

W.B. : D’être sympathique ?

Oui, ce côté proche, pote, peu dans le star system.

W.B. : Ouais, tout à fait. Je regardais récemment une interview de Patrick Dewaere que j’aime beaucoup. Il dit : « Si les spectateurs me voient en train de faire une pub pour les pâtes et après une autre pour un parfum, ils ne vont jamais réussir à croire que dans un film à venir, je vais être le petit boulanger de quartier ». En fait, j’aimais bien cette approche du métier, c’est pareil avec les réseaux sociaux, je trouve que c’est hyper important de garder du mystère pour simplement ne pas dévoiler toute sa vie non plus, pour qu’en fait le spectateur puisse croire que tu es un rôle et puis un autre. Je me dis que le spectateur de cinéma, si il t’a vu juste avant sur son portable en train de faire cuire des saucisses et que tu joues un employé de banque, il va moins accrocher facilement, il va moins croire facilement que tu l’employé de banque. Tiens, j’espère qu’on me proposera un jour ce rôle (rires) ! Au final, j’ai quand même fait une pub pour la BNP [Mes colocs].

« Mes colocs »

Et là, tu ne stressais pas ?

W.B. : Non, pour le coup j’étais hyper détendu, c’était le premier casting que j’avais, que j’ai réussi et c’était Riad Sattouf qui réalisait cette pub. Je me souviens que j’arrivais dans la salle et qu’il n’y avait pas de texte. Au dernier moment, il nous filait un texte qui était totalement absurde. Du coup, c’était hyper relax, il n’y avait pas de pression. Tu savais que de toute façon, on ne te demandait pas d’apprendre un texte et de le savoir, on te demandait juste d’être naturel.

Le stress du casting est très différent de celui du théâtre.

W.B. : Oui, tu es en concurrence alors que le théâtre c’est vraiment autre chose et puis il y a un rapport au public alors que quand tu es dans une salle de casting avec une petite caméra et que tu dois faire semblant de lancer une machine à laver, c’est une autre façon de jouer.

Tu as des copains qui galèrent ?

W.B. : Bah oui, c’est une profession où il y a beaucoup de gens qui galèrent, ça fait vraiment partie de ce métier. J’ai écouté l’autre jour une interview de Charlotte Rampling, qui est une immense actrice dont je suis trop fan ! Elle racontait qu’elle a eu une espèce de traversée du désert pendant une dizaine d’années. On ne lui proposait rien et aujourd’hui, on la voit dans Dune de Denis Villeneuve. En fait, j’aime bien écouter ces acteurs et actrices qui parlent du métier où en fait de toute façon, on sait qu’à un moment donné, ça va être galère.

Tu en es conscient ?

W.B. : Mais bien sûr, c’est le jeu (rires) ! C’est en même temps ça qui est un peu excitant. On se prépare et si ça arrive, ça arrive. Il y a eu déjà des périodes où je n’ai pas ou très peu travaillé pendant un an ou deux. Là non, j’ai beaucoup travaillé ces derniers temps donc je suis très content.

Je trouve intéressant d’écouter des histoires de vies, des témoignages de gens qui ont eu une longe carrière. Est-ce que pour toi, l’idée, c’est d’en tirer une leçon ?

W.B. : Ou de me rassurer. En tout cas ça m’intéresse d’écouter l’expérience de vie d’acteurs qui font ce métier depuis très longtemps parce que c’est mon métier, ça m’intéresse, ça me passionne et du coup j’ai envie d’en savoir plus, je suis curieux.

Propos recueillis par Katia Bayer

Les Prix Louis Delluc 2024 remis à Alain Guiraudie et Jonathan Millet

Le Prix Louis Delluc est une récompense cinématographique française décernée depuis 1936 et nommée en hommage à l’écrivain et réalisateur Louis Delluc. En 1999, a été créé le prix Louis Delluc du premier film. Mercredi 4 décembre, deux réalisateurs, passés par le court, ont reçu ces 2 distinctions honorifiques. Un bon encouragement avant les Lumière et les César.

Alain Guiraudie a remporté le prix Louis Delluc pour son film Miséricorde, présenté à Cannes dernier. Il succède ainsi à Thomas Cailley, primé l’an denier pour son film Règne animal. En février 2023, nous interviewons Alain Guiraudie à l’occasion de sa participation en tant que juré à Clermont-Ferrand. Nous vous invitons vivement à (re)lire son long et passionnant entretien mené par Pierre Guidez.

Composé d’une vingtaine de critiques et personnalités, sous la présidence de Gilles Jacob, l’ancien président du Festival de Cannes, le jury du Prix Delluc a également récompensé, dans la catégorie Premier film, Les Fantômes de Jonathan Millet, présenté en séance d’ouverture lors de la 63ème Semaine de la Critique en mai dernier. Là encore, nous vous proposons de retrouver la riche interview conduite par Katia Bayer et David Khalfa, avec le réalisateur, sa productrice (Pauline Seigland, Films Grand Huit) et son monteur, Laurent Sénéchal.

Coup de sifflet à Cinébanlieue

Cette année, le festival Cinébanlieue nous a offert un large panorama de court-métrages, recouvrant pour un certain nombre le thème du ou des « Mouvement(s) », explorant ainsi le sport comme vecteur de changement social et personnel. Coup de projecteur sur deux films de la sélection compétition Talents en Court qui nous ont marqués.

« Hors jeu » de Paolo Mattei

Hors jeu de Paolo Mattei, c’est l’histoire d’un jeune garçon qui, à défaut d’être numéro 10 au foot, souhaite devenir un arbitre professionnel. Tout sauf reprendre le bar-tabac de sa mère aveugle en Normandie. À la fin de la semaine, la demi-finale de la coupe régionale sera déterminante pour son avenir en tant qu’arbitre… et pour son frère aussi, le numéro 10 du FC Offranville.

Comme pour le personnage principal, la tension monte au fil des entraînements jusqu’au jour fatidique, mais on se surprend à rire : le duo coach (Sandro Renault) – élève (Victor Lefebvre) marche parfaitement à cet effet-là. Et puis, on finit par s’attacher, et à prendre ce match aussi à cœur que les deux frères le prennent. Une histoire fraternelle qui remet à l’honneur une position oubliée du terrain, pour notre plus grand plaisir.

Que les meilleurs gagnent de Noah Cohen, c’est le court-métrage révélation de la sélection Talents en Court, qui a gagné le prix du meilleur court-métrage. Ici, on ne fait plus de sport, on assiste à une pratique sportive, la course de chevaux. Alex est un enfant de dix ans qui aime regarder la télé. Jusque là, rien d’anormal : la mère discute au téléphone au balcon, le père essaie de réparer la télévision puis prend de l’argent dans le porte-monnaie de sa femme, sans doute pour faire des courses.

« Que les meilleurs gagnent » de Noah Cohen

D’un seul coup, nous sommes transportés avec les personnages hors du foyer, à l’hippodrome. Le père, furtif, absorbé, tient un carnet de comptes entre ses mains. Et c’est parti, première course, premiers paris. Gros plan sur le visage d’Alex, il crie : “Cravache ! Cravache !”. Montée d’adrénaline qui redescend aussi vite que la course est finie.

Deuxième, troisième course. Images impressionnantes des chevaux en mouvement, démonstration de leur rapidité et de leur force. Puis on ne compte plus les courses, on a un sentiment désagréable. Le père d’Alex veut qu’il parie aussi, comme un jeu, c’est amusant – il n’a plus de pièces dans sa poche ? C’est là que va résider toute la force du court : le regard de la caméra, c’est celui de l’enfant vers son père, celui du passage de l’héroïsation à la déception.

Du coup d’envoi au coup de sifflet final, la sélection Compétition Talents en Court du festival Cinébanlieue nous aura fait (re) découvrir des pratiques sportives, et surtout, des liens qui entourent ces pratiques – fraternels, paternels, et même personnels, le sport permet de raconter de belles histoires, qui sur grand écran, résonnent bien au-delà du terrain.

Amel Argoud

Le court-métrage à l’honneur du Festival du Film franco-arabe !

Pour sa 13ème édition, le Festival du Film franco-arabe de Noisy-le-Sec programmait à nouveau une séance consacrée au court-métrage. Le cinéma le Trianon de Romainville proposait ainsi dimanche 24 novembre une compétition, avec sept courts-métrages en lice.

Un thème commun parcourait l’essentiel de la sélection, celui de la mémoire. L’abordaient ainsi le film Me-Moire, de Amel Zikikout, mais aussi 3350 km, de Sara Kontar, Le Cinéma Massara, de Stéphanie Amin ou D’Oran à Almeria, de Lina Saïdani. Me-Moire et Le Cinéma Massara reliaient la question de la mémoire avec celle de la filiation, avec comme fils conducteurs les relations petite-fille/grand-mère (Me-Moire) ou l’évolution d’un cinéma de quartier dirigé par la famille de la réalisatrice (Le Cinéma Massara). Ces films posent la question de l’héritage familial avec tendresse et subtilité. 3350 km nous plonge davantage, comme son titre l’indique, dans la distance qui sépare la narratrice de sa famille en rendant celle-ci palpable par un jeu sur la cartographie ; D’Oran à Almeria rend cette question de la mémoire davantage collective, puisque la réalisatrice y rend compte de la traversée de la Méditerranée par son frère sur une embarcation de fortune. Elle nous livre ainsi un beau film documentaire animé, dans lequel ciel et mer semblent se confondre.

« 3350 km »

D’autres questions de société étaient abordées lors de cette soirée, comme ce rite de passage qu’est le mariage d’un ami dans Le Verre de thé de Sara Bernanos ou la survie dans un quartier créé de façon anarchique à Tunis en 2011 dans Generous Bodies de Achref Toumi. Le travail du son et la beauté de certains plans font de ce film une véritable pépite. Une petite note d’humour, enfin, avec Boussa, de Azedine Kasri, qui met en scène un jeune couple cherchant désespérément un endroit où s’embrasser sans être importuné.

Le court-métrage à Noisy, toutefois, déborde de cette compétition : le film lauréat du Festival international du film d’Amman, partenaire du festival, était projeté en début de soirée. Il s’agissait de Rolling, de Omar Al-Taher. Quant à la séance d’ouverture, elle proposait en première partie la projection du film Vibrations from Gaza, de Rehab Nazzal, film-documentaire sur des enfants gazaouis sourds ou malentendants. Il ressort de l’ensemble de ces sélections une programmation en prise sur le monde et des films forts et émouvants, témoins de la maîtrise de leurs auteurs et autrices.

Julia Wahl

Formats Longs : Les Reines du drame de Alexis Langlois

Au milieu de milliers de tragédies grecques, le choix cornélien entre succès et amour se présente comme un sujet matriciel qui a toujours été réapproprié pour commenter son époque. Prenez comme exemple les quatre films A Star is Born, qui vont de l’œuvre classique hollywoodienne au film post-MeToo, en passant par l’œuvre rock pré-Reagan. Ici, à travers son propre prisme queer, Alexis Langlois nous raconte dans Les Reines du drame, sélectionné en séance spéciale à la Semaine de la Critique, le destin de la diva pop Mimi Madamour, au sommet de sa gloire en 2005, et de sa descente aux enfers précipitée par son histoire d’amour avec l’icône punk Billie Kohler.

L’excitation était grande tant nous connaissions le talent d’Alexis Langlois, qui a montré avec ses courts-métrages comme De la terreur, mes sœurs ! et Les démons de Dorothy un univers singulier, rempli d’influences, quoique foutraque et qui n’avait jamais été encore porté sur grand écran. Une impatience qui vaut le détour tellement on sort de la séance avec l’impression d’avoir assisté à deux heures de jouissance queer, fun, incontrôlable et absolument formidable. Avec Les Reines du drame, Alexis Langlois nous livre une œuvre baroque et musicale, toujours au bord de l’artificialité et de la facticité par son dispositif et le décorum qui l’entoure, mais qui ne passe jamais la ligne grâce notamment à l’humour de ce dernier. Cela nous est montré dès le début, dans un futur proche, avec l’apparition hilarante du personnage de Bilal Hassani, botoxé jusqu’aux chevilles, qui se présente à nous, spectateurs, comme le narrateur, celui qui va donner le ton de cette fable. Cette scène d’introduction se révèle ainsi comme la lettre d’intention d’un film qui utilise l’humour comme ouverture vers des personnages revendicatifs et fiers d’être ce qu’ils sont.

Une fierté, une pride qui transpire de tous les pores de l’œuvre et jusqu’à son genre, la comédie musicale, dont il respecte les codes, jusqu’à sa construction narrative en rise and fall. Ainsi en allant chercher du côté de Starmania ou encore de La La Land dans son histoire d’amour parasitée par la recherche du succès, Alexis Langlois se présente comme un auteur réellement passionné par ce genre et par les tensions qui en découlent. Et ceci tout en pervertissant les paroles et les musiques qui lui sont accolées, y ajoutant une couche extrêmement jouissive au film (petit coup de cœur pour la musique “Pas touche” de Mimi Madamour).

Une réjouissance qui se retrouve principalement dans l’envie de Langlois de nous livrer une œuvre pop qui se réapproprie les codes autant visuels que musicaux des années 2000. À l’intersection de plusieurs icônes féministes et queer des années 2000 comme Lorie, Priscilla ou encore Britney Spears, on retrouve le personnage principal de Mimi Madamaour, se présentant comme un melting pot, un pastiche de toutes ces influences, qui se reflète dans l’esthétique pink, kitsch et théâtrale.

Une esthétique et une mise en scène tellement propres à son auteur que le film ne présente que très peu d’aspérités et de sorties de piste, ce qui est rare pour un premier film. Notamment dans son traitement de la figure de la femme comme sujet, comme action de comédie et action de résistance face aux normes de la société. Avec une énergie fédératrice et une mise en scène qui met ses personnages et leurs doutes au cœur du régime de narration et d’esthétique, Alexis Langlois nous livre un female gaze absolument passionnant. Dans la continuité de ses courts-métrages comme De la terreur, mes sœurs !, il nous offre ainsi un éventail de personnages et de femmes en tout genre, chacun à leur manière iconisés et adoubés au niveau de reines. Le seul point noir au milieu de cet océan d’idées nouvelles est l’essoufflement de la relation entre Mimi et Billie qui, dans son dernier tiers, vire à une banalité qui nous fait regretter la première heure du film.

Issu du format court, Alexis Langlois ne semble pas en oublier l’inventivité, s’appropriant le format long comme un immense parc de jeux où il peut étendre toute une panoplie thématique inédite.

Dylan Librati

Maïté Sonnet : « La question des personnages féminins est assez centrale dans tout ce que je fais »

Avec ses courts métrages, tous deux nommés aux César, Maïté Sonnet transporte les spectateurs vers un univers méconnu et étrange. Dans Massacre (2019), deux sœurs forcées de quitter leur île décident d’empoisonner les touristes. Avec Des jeunes filles enterrent leur vie (2022), la réalisatrice peint l’escapade mélancolique d’un groupe de demoiselles d’honneur lors d’un enterrement de vie de jeune fille. Pour son prochain film, un premier long métrage intitulé Tu feras tomber les rois, Maïté Sonnet est l’une des cinq lauréat.e.s du prix d’Aide à la Création de la Fondation Gan, qui accompagne les cinéastes dans le développement de leur premier ou second long métrage. L’occasion pour Format Court de la rencontrer et de revenir plus en détails sur son travail, son expérience à travers le court métrage et le processus de réalisation d’un long.

© Julien Liénard

Format Court : Dans tous vos films, il y a une ambiance un peu particulière qui joue avec l’étrange et le fantastique. Comment écrivez-vous ces histoires et comment le processus du scénario se construit-il ?

Maïté Sonnet : C’est un mélange entre des influences qui viennent, notamment, un peu du conte et d’un imaginaire presque proche du merveilleux en littérature. En fait, j’écris ces ambiances étranges mais elles viennent aussi du fond de l’intimité psychique des personnages, c’est-à-dire que c’est toujours les personnages et leurs émotions qui projettent à travers la mise en scène, sur les lieux dans lesquels ils sont par exemple, une émotion qui crée une atmosphère. Dans mon film Des jeunes filles enterrent leur vie, c’est le personnage d’Axel (le personnage principal) qui est un peu, on va dire, en dépression, qui est triste dans un moment qui devrait être joyeux, ce qui fait que le décor en devient triste, la musique en devient triste, etc. C’est vraiment une manière de jongler, pour moi, entre le cœur le plus enfoui des personnages, qui déteint sur leur environnement, et aussi avec quelque chose de plus distancié, qui serait un rapport presque magique au monde contemporain, comme si c’était un conte.

Dans les deux courts métrages, il y a une attention d’autant plus particulière à la nature. L’ambiance fantastique de vos films est-elle aussi liée à cela ?

M.S : Oui, tout à fait, c’est une des manières que j’ai de faire ressentir, encore une fois, les états émotionnels des personnages. Par exemple, dans Des jeunes filles enterrent leur vie, il y a tout ce rapport au liquide et à l’eau, notamment, qui est filmé de deux manières dans le film. Au début, c’est une eau stagnante dans laquelle les personnages sont plongés, comme dans un bain mortuaire presque, une eau qui ne bouge pas, qui est coincée, bloquée, un peu comme le personnage lui-même est bloqué. À la fin, quand enfin la vie reprend, la vie rejaillit, l’eau se met à couler à nouveau. Je la filme, mais cette fois, c’est une eau vive, de rivière, qui coule dans tous les sens, et ça, par exemple, c’est quelque chose qui avait été très réfléchi. Au tournage, j’avais vraiment décidé d’exclure la rivière. On la voyait dans pas mal d’endroits dans lesquels on a tourné, et je ne voulais pas la filmer avant la toute fin, avant que le personnage lui-même soit prêt à laisser couler son émotion et à repartir. La nature est donc un des éléments, j’imagine, desquels je me sers pour écrire le monde extérieur, toujours en lien avec l’intimité du personnage, mais c’est aussi le cas des objets, ça peut passer par plein de choses.

Vos films décrivent des groupes de femmes unies par des liens familiaux ou amicaux. Comment souhaitiez-vous aborder cette idée de sororité ?

M.S : C’est quelque chose d’assez instinctif, parce que j’ai moi-même une sœur. Je crois que c’est aussi une manière, pour moi, d’inventer des figures. Dans Massacre, je me souviens qu’à l’époque, j’avais très envie de filmer des enfants violents, ou plutôt, j’avais envie de filmer des enfants qui se transforment en êtres violents, un peu métaphoriquement. La première image que j’avais, c’était un petit garçon. Finalement, le fait que ce soit des filles m’a permis de trouver quelque chose d’un peu singulier, et de trouver autre chose pour le film, qui sortait un peu de ce que j’avais déjà vu. La question des personnages féminins est assez centrale dans tout ce que je fais, mais ce n’est pas une démarche, c’est ma vie, je pense que je suis beaucoup plus entourée de filles que de garçons, depuis mon enfance, donc ça coule de source.

« Filles du feu »

Vous avez écrit une série (Filles du feu, 2023) sur les sorcières, pourriez-vous parler de ce projet ?

M.S : C’est un sujet qui me tient beaucoup à cœur, qui rejoint d’ailleurs un peu les figures des personnages de mes films, qui pourraient avoir quelque chose de sorcier, de sorcière. C’est une série que j’ai co-écrite, il y a quelques années pour France 2 avec une co-scénariste qui s’appelle Giulia Volli, à partir d’une histoire réelle terrible : une chasse aux sorcières au Pays Basque, qui a eu lieu au XVIIe siècle, pendant laquelle, durant un été, un juge mandaté par le roi de France est allé chasser les soi-disant sorcières du Pays Basque. Environ 200 femmes ont été condamnées d’après les archives. Avec Giulia, ce qu’on a voulu faire, c’était un travail historique, essayer de comprendre ce phénomène-là, évidemment à travers nos yeux d’aujourd’hui. Mais, c’était aussi essayer de comprendre ce qui s’est joué à ce moment-là en Europe dans les relations hommes-femmes, et qui a été un grand traumatisme à travers toute l’Europe, pas seulement en France. Giulia est italienne et on a trouvé aussi beaucoup de choses similaires qui s’étaient passées en Italie au même moment. C’était une démarche, bien sûr, fictionnelle mais aussi presque comme un questionnement, puisque ça nous interrogeait beaucoup.

Tous les sujets que vous venez d’aborder influencent-ils votre projet de long ?

M.S : Oui, bien sûr. Je ne sais pas si c’est que ça l’influence ou si tout ça s’est construit en parallèle, puisque le long, c’est aussi un projet que j’ai créé depuis longtemps. Finalement, ces choses ont avancé ensemble, en secret. Et oui, le long métrage, c’est à la fois, comme dans les courts, une sorte de terreau social et politique assez clair et contemporain, et une mise en scène proche du magique et presque du fantastique, qui accompagne encore une fois, l’état émotionnel d’un personnage.

Que pouvez-vous nous raconter sur ce projet ?

M.S : L’histoire du film, c’est l’histoire de Sybille qui a 12 ans et qui vit une enfance des plus heureuse et magnifique dans ses vignes du sud-ouest de la France, jusqu’au jour où elle vit un choc terrible, puisque son petit frère a un accident respiratoire dans les vignes. Elle le retrouve allongé par terre, elle a l’impression qu’il est mort. En fait, il n’est pas mort, mais il a inhalé des pesticides qui étaient répandus sur les vignes à ce moment-là. Il va donc se retrouver à l’hôpital pendant quelques semaines et c’est pendant ces quelques semaines que le film se déroule. Le personnage de la grande sœur, Sybille, livrée à elle-même à la maison, puisque ses parents passent tout leur temps au chevet de son frère, se retrouve à plonger littéralement dans une crise d’angoisse géante, qui la prend petit à petit. Le monde qu’elle connaissait autour d’elle comme un paradis devient un vrai enfer. Elle se rend compte tout à coup de la mort, qu’elle existe, qu’elle est liée à plein de choses, mais, notamment, à la Terre qui, elle-même, meurt à cause de nous. Dans cette expérience morbide qu’elle vit seule, elle va rencontrer, en se rendant à l’enterrement de quelqu’un qu’elle ne connaît même pas, attirée par toutes ces images morbides, une jeune fille de son âge à qui elle fait croire que son petit frère est vraiment mort. À travers ce mensonge, elle continue d’expérimenter son angoisse la plus profonde, qui est que son frère meurt, tout en nouant cette nouvelle amitié.

Comment s’est déroulé l’écriture et le financement du long ? Et quelles sont les différences avec votre expérience du court métrage ?

M.S : Comme je vous le disais, c’est un film que j’ai commencé à écrire il y a longtemps, et de ce fait, qui a beaucoup changé au fur et à mesure des années, puisqu’à chaque fois, j’avais besoin de le réadapter à ma sensibilité du moment. C’était un peu un travail de longue haleine. On a eu très vite des soutiens de la Nouvelle-Aquitaine, d’abord en écriture, puis en développement, du Lot-et-Garonne aussi en développement, et on a eu l’aide au développement du CNC. On a fait la résidence du Clos puisque c’est dans la région où je veux tourner. Il y avait une sorte de logique assez imparable. L’écriture s’est passée sur tellement d’années que je ne saurais même pas trop la raconter. On a été bien accompagnés, on a eu des bons retours, ça s’est plutôt bien passé. Je devais à chaque fois réadapter le film à mon sentiment actuel, ce qui est normal. C’est vrai que sur un long métrage, on doit tenir des années et des années avec le même projet contrairement au court, c’est ça la différence. Pour un court, on n’a pas le temps de le changer 36 000 fois puisque que le financement et le développement ne durent pas 5 ans. Mais c’est à peu près les mêmes façons d’écrire, à part ça. J’écris toute seule. Là, j’ai quand même travaillé avec un consultant pour ma dernière version, qui s’appelle Yacine Badday, ce qui m’a bien aidée.

« Des jeunes filles enterrent leur vie « 

Par rapport à ce que vous décriviez, comment s’est passé le cheminement du court métrage au long métrage dans le travail ?

M.S : Le cheminement s’est passé assez naturellement je dirais, parce qu’en plus, le dernier film que j’ai fait, Des jeunes filles enterrent leur vie est assez long, il fait 33 minutes. Ce qui est vraiment nouveau, c’est la confrontation à ce qu’est le marché. Ça, c’est quand même quelque chose de très obscur pour moi. Je n’ai fait que des courts jusqu’ici, la question du marché n’y est pas présente. Il s’agit seulement de faire des films et certains ne rapportent même pas d’argent à personne. Il n’y a donc pas de pression, on va dire, à ce que le film rentre dans une forme de marché. Et là, évidemment, la question se pose plus. C’est plutôt ça qui est nouveau, mais à vrai dire, dans le travail, c’est la même chose pour moi.

La question de « marché » que vous évoquez, et « l’après du film » sont des choses qui vont venir participer en amont à l’écriture du film, dans le cas du long métrage ?

M.S : Ça, c’est plutôt des choses que je découvre un peu au jour le jour. Il y a quelque chose dans le long où il faut presque, avant même d’avoir fait le film, pouvoir réussir à le situer dans une sorte de catégorie pour essayer de faire en sorte que les gens projettent le bon film et aient envie de le financer. Alors que dans le court, je ne me posais pas du tout ces questions. Il y a plus d’enjeux de savoir bien raconter et définir le film pour le donner à voir à nos interlocuteurs avant. C’est ça que j’ai l’impression de découvrir, mais c’est peut-être une évidence.

Que représente le soutien de la Fondation Gan dans ce processus de création ?

M.S : C’est vraiment quelque chose d’énorme pour le film parce qu’on est plutôt au début du financement. C’est une grande reconnaissance, ça nous donne confiance pour la suite et ça va nous permettre, je pense, de pouvoir parler du film à d’autres interlocuteurs à partir de ce point de départ là. C’est génial. Et puis surtout, ça ancre le film dans quelque chose de concret. J’y pense beaucoup plus depuis qu’on a eu l’aide. J’ai réécrit un peu le scénario parce que le jury nous a donné certains conseils qui étaient intéressants. Le film est plus présent et plus concret.

« Tu feras tomber les rois »

Vous écrivez aussi pour d’autres projets, que retenez-vous de votre expérience en tant que scénariste ?

M.S : Je suis scénariste à côté et tout s’alimente. Par exemple, j’écris de plus en plus de longs métrages pour d’autres. C’est une forme que je commence un peu mieux à appréhender de film en film. C’est en faisant les choses qu’on comprend comment elles fonctionnent, je pense. Je ne saurais pas dire qui alimente quoi. C’est un cercle vertueux. C’est aussi le fait d’être entourée de gens qui font des films, qui écrivent aussi leurs premiers longs, qui sont dans les mêmes questionnements, les mêmes choses. D’être entourée par ces gens, les gens de ma génération, ça nous aide beaucoup, je crois.

Vous avez le même producteur sur vos deux courts métrages précédents, est-ce celui qui vous accompagne aussi sur ce long ?

M.S : Oui, c’est Ethan Selcer, de Quartett Production. Toujours le même.

Que pouvez-vous dire de la relation auteur.ice-producteur.ice, comme vous travaillez avec lui depuis longtemps ?

M.S : C’est une relation qui est très forte. J’ai fait mes films avec Ethan. C’est le premier qui m’a fait confiance depuis le début pour réaliser un premier court, alors que je n’avais jamais rien réalisé. Il y a une sorte d’énorme confiance entre nous. Lui, il me fait confiance. Il sait que j’ai raison quand je dis où je veux aller. Alors que, comme je vous l’ai dit, ça m’est arrivé des fois de changer radicalement de cap. À chaque fois, il m’a bien accompagnée parce qu’il sait que je sais moi-même où je veux emmener mon film, ce qui n’est pas le cas de tous les producteurs. Je pense qu’il y a des producteurs qui auraient été un peu plus bousculés par cette méthode. Et moi, de la même façon, je lui fais confiance sur sa partie. Ça s’est très bien passé sur les deux courts, donc, c’était aussi évident de faire le long ensemble.

En est-il de même avec les équipes du film? Est-ce important pour vous de travailler avec les mêmes personnes ?

M.S : J’espère faire le long avec au maximum la même équipe technique et artistique que mes courts. Tout ça est la continuité des courts. Comme avec la production, ce sont vraiment des relations qui se tissent au fil des années et qui font que les films ressemblent à ça. C’est parce qu’on les fait tous ensemble.

« Massacre »

Des jeunes filles enterrent leur vie a été sélectionné aux César l’année dernière. Qu’est-ce que cette nomination a représenté pour vous? Comment l’avez-vous vécue, sachant que le film avait déjà été sélectionné à la Quinzaine des cinéastes ?

M.S : Massacre avait aussi été sélectionné aux César. Pour moi, c’est vrai que le plus important, ça avait quand même été la Quinzaine des cinéastes. C’est là où les gens ont le plus vu le film, c’est à partir de là où j’ai eu le plus de retours, où j’ai rencontré le plus de gens. C’était plutôt ce moment-là qui était très important pour le film. Après, les César, c’est génial. Ce que ça a fait, j’imagine, c’est que d’autres gens l’ont vu, donc des nouvelles personnes, mais c’est vrai que je l’ai moins ressenti. En fait, c’est aussi arrivé après toute une fin de vie du film. Ça faisait au moins un an et demi qu’il était sorti. Il avait déjà tourné beaucoup. Les gens l’avaient déjà vu. Néanmoins, c’est génial d’être sélectionné aux César. Je suis vraiment très heureuse que mes deux films l’aient été.

Vous parlez de visionnage, du fait que le film soit vu par le plus de gens. Les parcours de diffusion des courts métrages sont très différents de ceux des longs, est-ce donc une question primordiale, lorsque vous faites des courts, de savoir comment il vont pouvoir être diffusés ?

M.S : Je ne pense pas trop à ça. Quand je fais un film, ceci est la partie que je ne maîtrise pas de toute façon. Je ne peux rien faire pour cette diffusion moi-même. J’espère juste que le film sera vu par des gens, si possible différents. Par exemple, je suis très contente que mes deux courts aient été projetés dans des lycées, des collèges, notamment beaucoup en Nouvelle-Aquitaine parce que je les ai tournés en partie là-bas. Ils sont aussi sur une plateforme qui s’appelle Comett, qui est la plateforme de courts métrages de la Nouvelle-Aquitaine, un peu destinée aux scolaires, mais pas seulement. Cela me réjouit parce que même si je ne suis pas toutes les diffusions, je sais que des jeunes ont vu les courts, ce qui n’est pas si commun, de voir des courts métrages quand on a cet âge-là, et en plus qu’ils ont été bien accompagnés par tout un travail de pédagogie, de beaucoup d’associations qui existent, notamment en Nouvelle-Aquitaine, que je ne saurais pas définir vraiment. C’était génial. Je peux juste espérer ça, pour le long, mais je ne peux rien faire à part espérer.

Revenons justement sur le long. Quelle est la place du territoire, et plus précisément de la région dans ce projet ? Vous venez de Nouvelle-Aquitaine par ailleurs ?

M.S : Oui, j’ai grandi dans le Poitou-Charentes, en région Nouvelle-Aquitaine, dans la campagne de Poitiers. C’est donc assez naturel de tourner dans cette région au fur et à mesure des films, parce que c’est une région que je connais et qui m’intéresse beaucoup. Il y a beaucoup de choses dans cette région. Mais ce qui est génial, c’est qu’il y a des rencontres qui se tissent au fil du temps. La région, on l’a eue en production, on est sûr de tourner là-bas, et notamment dans le Lot-et-Garonne et en Gironde. Les gens du Lot-et-Garonne, par exemple, ceux du bureau d’accueil des tournages, ce sont des personnes que j’ai rencontrés en montrant mes courts là-bas, en les diffusant auprès d’établissements scolaires, en les accompagnant. Je commence à connaître aussi des gens qui font du cinéma et qui permettent au cinéma d’être fait et diffusé dans cette région de plus en plus. Je suis très contente d’être ancrée là-bas pour mes films, il y a tellement de territoire, ce n’est pas infini mais presque.

Propos recueillis par Garance Alegria

After Short Documentaire, lundi 2.12, 19h à l’ESRA

Après deux After Short consacré aux courts de fiction et d’animation présélectionnés aux prochains César (en présence de nombreuses équipes), retrouvez-nous le lundi 2 décembre prochain dès 19h à l’ESRA pour notre 3ème After Short de l’année centré sur les courts documentaires en lice aux César, auquel participeront 9 équipes de films et 18 professionnels.

Ce nouveau cycle d’After Short, organisé par le magazine Format Court, en collaboration avec l’ESRA et le soutien de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma, a lieu à l’ESRA Campus Beaugrenelle (Amphithéâtre Jean Renoir, 37 Quai de Grenelle, 75015 Paris). Pas moins de 4 rencontres, autour des équipes des courts-métrages en lice aux César 2025, sont proposées entre novembre et décembre dans l’amphithéâtre de l’école accueillant plus de 250 places. Elles sont accessibles aux étudiants comme au grand public.

Vous voulez en apprendre davantage sur les parcours d’auteurs et producteur.trice.s qui bâtissent le cinéma d’aujourd’hui et de demain, découvrir leurs films, échanger avec elles et eux sur leurs œuvres, leurs choix artistiques, leurs expériences et le déroulement de leur travail, comprendre le fonctionnement de l’Académie des César et poursuivre ces discussions autour d’un verre ?

Un After Short, comment ça se passe ? 

En amont : les photos et bios des intervenants ainsi que les liens de visionnage des courts sont mis à la disposition des personnes ayant réservé leur place. Le jour J, le public a ainsi la possibilité de participer activement à la discussion qui s’engage avec les équipes de films.

Lors de l’évènement : les équipes (réalisateurs.trices et/ou producteurs.trices, anciens lauréats des César, membres de comités de sélection de l’Académie) se succèdent sur scène pour une intervention et un échange avec le public d’une dizaine de minutes chacune. Deux animateurs sont là pour introduire leur travail et vous donner la parole.

Info, rappel : il n’y a pas de projection de films au cours de la soirée. 

Après la rencontre : un cocktail est organisé à l’ESRA. C’est entre autres l’occasion de poursuivre les discussions de façon plus informelle avec les équipes présentes.

Intéressé(e)s par l’After Short ? Téléchargez la présentation (PDF) de nos invités ainsi que leurs bios et les synopsis de leurs films, représentés lors de notre soirée animation de l’année, le lundi 2 décembre 2024 à 19h à l’ESRA. 9 films sur 12 seront présentés lors de ce nouvel échange accueillant 15 pros. Si vous souhaitez assister à l’événement et visionner les films qui seront évoqués, reportez-vous aux infos pratiques mentionnées ci-dessous.

Nos invités :

Gala Hernández López, réalisatrice de La Mécanique des fluides, César du meilleur court-métrage documentaire 2024.

Jacky Evrard, membre du comité et directeur artistique du festival Côté Court

Clarisse Tupin et Camille Genaud, productrices (Paraiso Production) de Tornades.

Stéphane Rizzi, réalisateur, et Stanley Woodward, producteur (Les Films de la nuit) de Retour à Mamanville.

Nicolas Bailleul, réalisateur, et Manon Messiant, productrice (Iliade films) de Boolean Vivarium.

Paul Heintz, réalisateur de Nafura.

Marcello Cavagna, producteur (G.R.E.C) de Petit Spartacus, réalisé par Sara Ganem.

Inès Sieulle, réalisatrice de The Oasis I deserve.

Narimane Baba Aïssa, Lucas Roxo et Nicolas Brevière, réalisateurs et producteur (Local Films) de Aucun homme n’est né pour être piétiné.

Nader S. Ayache, réalisateur de La Renaissance.

Marcel Mrejen, réalisateur de Memories of an unborn sun.

En pratique

* After Short Documentaire. Lundi 2 décembre 2024, à 19h, à l’ESRA. En présence de 9 équipes ! PAF : 5€. Billetterie en ligne, dans la limite des 50 places encore disponibles). Pour les (ex-)étudiants de l’ESRA, les réservations gratuites se font à l’adresse communication@esra.edu

* Notez d’ores et déjà la date de notre 4ème et dernier After Short consacré aux courts de fiction, prévu le lundi 9 décembre prochain, à 19h, toujours à l’ESRA. En présence de nouvelles équipes ! PAF : 5€. Billetterie en ligne, dans la limite des 50 places encore disponibles). Pour les (ex-)étudiants de l’ESRA, les réservations gratuites se font à l’adresse communication@esra.edu

Ana Čigon : « J’adore utiliser la satire, l’ironie et l’humour »

Réalisatrice, vidéaste et peintre, Ana Čigon est une artiste slovène polyvalente, abordant majoritairement des sujets et problèmes de société dans son œuvre. On l’interroge aujourd’hui sur son court-métrage d’animation Catsland présenté dans la section Panorama du festival Cinémed en octobre 2024 à Montpellier. Catsland est une satire illustrant la manière dont l’Union Européenne traite ses réfugiés en mettant en scène des chats. On se questionne ici sur la manière dont la satire est utilisée dans l’animation pour dénoncer des lois et systèmes politiques.

Format Court : Qu’est-ce qui vous a donné le désir de vous lancer dans le cinéma, en particulier celui d’animation ?

Ana Čigon : J’ai étudié la peinture, puis l’art de la vidéo et l’art interactif. Si vous mixez la vidéo et la peinture, ça devient en quelque sorte de l’animation (rires) ! J’aime l’animation parce qu’on peut présenter des travaux plus conceptuels. Quand on n’a pas de photos à présenter, on peut dessiner. Je pense que c’est ce qui m’a amenée dans le monde de l’animation.

Quel a été votre processus de création pour Catsland ? Quelles techniques d’animation et de dessin avez-vous utilisées ?

A.C : Ces chats sont la continuation d’une autre animation que j’ai faite, utilisée dans mon film précédent, Rebellious Essence (2017). C’était un style similaire, il avait eu du succès dans les festivals de cinéma queer, car la thématique correspondait, et il comportait aussi des chats. Il s’agissait d’un style plus simple mais qui m’a amenée à l’idée de cette animation-ci, Catsland. Il s’agit d’une animation digitale cut-out (animation numérique de papiers découpés). Quand je réfléchis à la manière dont les personnages et le story-board vont ressembler, je dessine beaucoup sur papier, à partir de là, je crée numériquement le story-board et les dessins. Pour ce type d’animation (digital cut-out), il faut faire beaucoup de petites pièces qui sont ensuite déplacées et peuvent être distordues. Nous avions une équipe très cool, surtout composée de femmes, dont cinq qui travaillaient à l’animation. De la même manière, pour l’apparence des personnages, je vérifiais l’apparence des politiciens dont je m’inspirais pour l’animation.

Vous étiez inspirée par des politiciens européens ?

A.C : Oui !

S’agissait-il de politiciens slovènes ou aussi d’autres pays ?

A.C : Il y a un Français (rires) !

Ah, vous vous êtes inspirée d’Emmanuel Macron ?

A.C : Oui, il y a un chat qui est inspiré d’Emmanuel Macron, si vous arrivez à le trouver (rires) !

Il s’agit du chat principal au pelage bleu ?

A.C : Non, ce chat est inspiré de notre ancien ministre. Dans le film, il y a différents espaces, et plus vous allez vers le sud, plus c’est pauvre. Dans l’espace le plus riche, chez le chat rouge, tous les chats aisés et politiciens se retrouvent dans cette villa, et l’un d’eux est Emmanuel Macron ! Tous les chats ne représentent pas forcément des politiciens, j’en avais trois en tête : Miro Cerar, l’ancien Premier ministre slovène, Angela Merkel, puis Emmanuel Macron. Mais sinon, c’est davantage symbolique que concret, au sud, j’imagine un mélange entre une frontière macédoine ou grecque.

Pourquoi avez-vous choisi de représenter des chats en particulier ? Étiez-vous inspirée par des satires ou dystopies représentant aussi des animaux tels que Les animaux de la ferme de George Orwell par exemple ?

A.C : C’est difficile de localiser d’où vient l’inspiration. Bien sûr, j’adore les chats, mais aussi en choisissant de les représenter, je crée de la distance avec les spectateurs : c’est sympa d’avoir cette distance parce qu’on ne se sent pas tout de suite mal dès le début du film, on se dit : « Ah c’est une histoire drôle sur les chats, ça ne me concerne pas ». On baisse alors sa garde et on regarde jusqu’à la fin. L’univers de Catsland représente aussi l’Union européenne dans mon esprit. Comment les personnages pourraient communiquer avec toutes ces différentes langues, incluant celles des réfugiés ? C’est donc pratique d’avoir ces chats qui miaulent uniquement pour ne plus avoir ce problème de barrière de langue. On doit deviner et imaginer ce qu’ils disent quand ils miaulent. On est nous-mêmes renvoyés à cette position où on doit s’efforcer de comprendre ce que l’autre nous dit. Cela me semblait être la meilleure idée.

Les chats sont également des animaux très territoriaux marquant et délimitant leur territoire, ce qui constitue aussi le sujet du film.

A.C : Oui, j’aimais beaucoup l’idée des chats qui marquent leurs territoires dans l’animation, puisqu’ils le font dans la vraie vie. Je ne savais pas comment le représenter au début : « Est-ce qu’ils urinent simplement ? » Non. J’ai donc eu cette idée de pancartes représentant les parties intimes des félins qu’ils font apparaître en urinant : cela représente aussi en quelque sorte la bêtise et l’absurdité de tous ces pays obsédés par leurs territoires ! On est trop strict sur cela.

Pourquoi avoir fait le choix du chat bleu en personnage principal qui initie l’expulsion des réfugiés ?

A.C : Selon moi, il n’y a pas vraiment de personnages principaux. Je voulais vraiment parler des Européens, et de la manière dont on agit afin de prendre conscience de l’héritage qu’on laisse derrière nous. Ce chat bleu est celui qui est dans le territoire du milieu. Il ne s’agit pas du territoire le plus riche, ce n’est pas le pire non plus. Il s’agit de la position de la Slovénie. Les réfugiés veulent plutôt traverser notre territoire, pour aller en Allemagne, France, Angleterre, etc…Très peu veulent rester en Slovénie. Cependant, les médias en Slovénie laissent entendre que tous ces réfugiés qui traversent le pays veulent y rester. Mais ce n’est pas vrai. C’est aussi la position avec laquelle j’étais le plus familière pour faire une déclaration sur ce que nous sommes en train de faire. Nous ne pensons pas aux humains. Comment être humain, comment intégrer les réfugiés ? Le problème, c’est qu’on réfléchit à comment créer des barrières et les envoyer au loin. C’est pourquoi j’ai choisi de commencer l’histoire à partir de ce chat bleu. Je voulais aussi faire un point sur ces différents statuts au sein de l’Union européenne, car beaucoup de réfugiés sont bloqués en Grèce ou en Italie : dans ces pays du sud à cause du Règlement Dublin où l’on doit rester dans le premier pays par lequel on arrive. On délègue donc beaucoup de pression à ces pays. Je ne sais pas si ça répond à votre question !

Si ! Et vous anticipez même la prochaine qui porte sur votre avis sur la situation politique en Slovénie à propos des lois pour les réfugiés.

A.C : Je peux aussi vous dire qu’en Slovénie, on attend juste de voir comment agissent les pays comme la France ou l’Allemagne, et on suit. Je ne suis pas du tout impressionnée par cela, on n’a pas d’idées originales : « Voyons ce qu’ils font et on fera la même chose ». Je pense que c’est dommage, car on pourrait trouver différentes initiatives, mais pour l’instant, il s’agit surtout de suivre.

Vous utilisez des ressorts comiques comme ces pancartes, un alphabet félin, des miaulements qui peuvent faire sourire. Vous aviez déjà cette veine comique dans l’un de vos précédents court-métrages Rebellious essence. C’est important pour vous d’utiliser l’humour comme un moyen de dénoncer des problèmes de société ?

A.C : J’adore utiliser la satire, l’ironie et l’humour, car je pense que cela a pour effet de rendre du pouvoir à celui qui n’en a initialement pas. Quand vous riez, vous oubliez en quelque sorte l’oppression et à quel point vous vous sentez mal, vous prenez le pouvoir de celui dont vous vous moquez. Je pense que c’est l’effet de la satire. Si j’arrive à faire de la satire, j’en suis très contente et je veux en faire plus. Je pense que cela a vraiment le pouvoir de redonner de la confiance aux gens. Enfin, j’espère ! En 2020-2022, nous avions ce gouvernement de droite très oppressant en Slovénie. Dès que nous parvenions à manifester avec de l’humour, c’était très bien pour tout le monde, car nous laissions retomber la pression et le stress.

Vous militiez également avec votre art ?

A.C : Je rejoignais les manifestations où il y avait d’ailleurs beaucoup d’artistes impliqué.es, qui ont fait beaucoup de blagues. Par exemple, le gouvernement disait qu’on ne pouvait pas du tout se rejoindre pour manifester, et la première idée qui émergea, partagée sur Facebook, a été de placer des pieds dessinés sur le sol pour montrer qu’on était là. Un mouvement qui a duré longtemps a également été de manifester en vélo : on ne pouvait pas marcher, on y allait donc en vélo ! On pédalait autour du Parlement et cette manifestation avait lieu à nouveau chaque semaine. J’aimais aller là-bas, cela faisait du bien au moral. Une autre fois, les militants ont décidé de marcher à reculons dans une grande rue qui avait rendu célèbre le Premier ministre de droite afin d’illustrer qu’on voulait remonter le temps et modifier les évènements pour qu’il ne soit plus Premier Ministre ! Ces éléments humoristiques ont un réel pouvoir.

Pensez-vous refaire des courts-métrages d’animation à l’avenir, avec peut-être un style artistique similaire ? Avez-vous déjà des projets en tête ?

A.C : Oui, je veux vraiment faire un film avec des chats, je devrais en faire un troisième car j’en ai déjà fait deux maintenant (rires) ! Mais je n’ai pas encore d’idées pour cela. Actuellement, je travaille sur trois différents projets qui sont tous en cours de développement. L’un est un documentaire animé qui traite du travail contemporain et des “bullshit jobs” définis par l’anthropologue David Graeber. Un autre projet est une très courte série en trois parties sur une critique féministe de littérature slovène. Le troisième sujet est politique, mais il est encore trop tôt pour en parler ! On verra lequel des trois projets avancera le plus vite ! Pour les chats, j’ai le plan de faire une troisième animation, mais je ne sais pas encore sur quel sujet. Cela pourrait porter sur le travail !

Ça tournera toujours autour des sujets de société.

A.C : Oui, ces sujets m’intéressent vraiment. J’aime vraiment l’idée que l’art soit connecté à la société. Je pense qu’on est trop enfoncé dans cette entité économique où chacun pense pour soi. Je veux casser cette idée et penser, en tant qu’artiste, à agir pour la société, et pas pour moi. Je me sens plus à l’aise de traiter ces sujets-là plutôt que des sujets plus intimes.

Propos recueillis par Laure Dion

Article associé : le reportage sur le festival Cinémed

Pendant ce temps sur Terre de Jérémy Clapin

Elsa (Megan Northam, nommée aux Révélations des César 2025) a 23 ans. Elle vient de perdre son frère Franck, astronaute porté disparu lors d’une mission spatiale. Perdre, ce n’est pas exactement le terme, car une entité venue des abysses de l’univers va lui proposer de le lui rendre. Néanmoins, tout se paye, pour les humains comme pour leurs voisins interstellaires.

Pendant ce temps sur Terre est le premier long-métrage en prise de vues réelles de Jérémy Clapin, réalisateur du film d’animation J’ai perdu mon corps (2019), lauréat du Grand Prix de la Semaine de la Critique à Cannes et nominé aux Oscars outre-Atlantique. Avec ce film, Jérémy Clapin signe un hommage réussi à sa passion du cosmos, et partage avec nous une vision sincère et gracieuse de la vie et des relations humaines (mais pas que) sous toutes leurs formes. Sélectionné à la Berlinale dans la section Panorama, le film est produit par Marc du Pontavice, qui avait déjà accompagné Jérémy Clapin sur J’ai perdu mon corps. Le film, distribué par Diaphana, sera disponible en DVD et Blu-Ray le 15 novembre 2024.

Le film s’ouvre sur une conversation entre Elsa et son frère, une communication au son grésillant qui a eu lieu avant le départ de l’astronaute. Ils y parlent de l’avenir. L’avenir, c’est un thème central de Pendant ce temps sur Terre, habilement porté par un personnage principal réservé et au destin incertain. Elsa n’a aucun projet, aucune perspective depuis que son frère a disparu. On comprend, grâce à des séquences animées d’une beauté onirique nous offrant une fenêtre sur l’imaginaire d’Elsa, que la jeune femme dépendait beaucoup du soutien de son frère. Celui-ci, où qu’il soit, pense qu’elle étudie toujours aux Beaux-Arts, alors qu’elle occupe en réalité un poste d’aide-soignante dans la maison de retraite gérée par leur mère.

Megan Northam, interprète d’Elsa, incarne avec brio ce personnage replié sur lui-même, bloqué par les circonstances, à la recherche d’une issue au deuil de son frère. Cette issue se présente sous la forme d’une voix (Dimitri Doré) d’abord évasive, venue de nulle part. Elle résonne dans son esprit, claire et pourtant lointaine. Lorsque Elsa réussit à établir la communication avec l’entité mystérieuse, celle-ci lui affirme pouvoir lui ramener son frère sain et sauf. Pour le lui prouver, elle permet à la jeune femme de parler à Franck. Une fois certaine que son frère est en vie, un avenir se dessine. Elsa est investie d’une mission par la voix venue d’ailleurs, une mission qui va la mettre en péril et la forcer à affronter un parcours semé d’embûches.

L’entité qui s’adresse à Elsa est une forme de vie extraterrestre, capable de faire aller et venir les êtres humains d’un monde à l’autre. Pour revoir Franck, Elsa doit pactiser avec cet être, et payer le prix qui lui est imposé. Jérémy Clapin nous immerge dans cette aventure existentielle, intimiste, universelle. Il nous demande, en mobilisant un univers de science-fiction sobre et efficace, ce que nous serions prêts à faire pour rétablir ce qui s’est évanoui. Grâce à des dialogues simples et marquants, il arrive à mettre en place des rencontres qui permettent à Elsa d’avancer, toujours, malgré l’adversité. Ces rencontres sont naturelles et permettent un équilibre brillant entre humain et inhumain, entre ici et ailleurs. C’est cette collision qui nous est racontée, à la lumière de l’amour d’une sœur pour son frère qui traverse le cosmos.

Les séquences animées représentant l’imaginaire d’Elsa et son frère sont importantes : elles répondent à des plans qui la montrent en train de dessiner tout au long du film. Elsa est une artiste démotivée, mais une artiste. Elle écrit une B.D, qu’elle espère montrer à son frère à son retour, mais n’arrive pas à visualiser un monde où son frère et elle se retrouveraient. Au fur et à mesure que cette possibilité se précise, son carnet se remplit, au gré des rencontres. Les séquences d’animation survenant à des moments clés du film, impressionnantes de beauté et remplies d’émotions, permettent à Clapin de relever le défi de ce premier film en prise de vue réelle, de genre, et comportant quand même une partie animée.

Grâce à une mise en scène imaginative et élégante et à une écriture naturelle, Jérémy Clapin réussit à nous transporter dans une histoire exaltante à laquelle il est facile de s’identifier. Il arrive à nous faire part des peurs d’Elsa, de ses espoirs aussi. À travers un deuxième long-long-métrage confirmateur, il ouvre une porte sur son univers tout en élargissant notre propre perspective sur le nôtre.

Inclus dans ce DVD, un court-métrage d’animation réalisé par Jérémy Clapin en 2008 et qui témoigne déjà d’un univers esthétique à la fois vaste et maîtrisé. Skhizein raconte l’histoire d’un homme frappé par une météorite, qui se retrouve en décalage avec lui-même. Où qu’il aille, quoi qu’il fasse, il se trouve à 91cm (précisément) de son corps, et doit s’adapter à ce nouveau plan d’existence bancal et même périlleux. Grâce à une animation 3D fluide et à un style de dessin transmettant à merveille les émotions du personnage, on est plongé dans ce quotidien loufoque et émouvant à la fois, où le moindre geste est lourd de sens et de conséquences. Déjà, on distingue une nette passion pour le cosmos, qui se retrouve, comme avec Pendant ce temps sur Terre, inévitablement lié à l’être humain, dans un équilibre fragile mais décidément captivant.

Sirine Lehoux

After Short Animation, jeudi 21.11, 19h à l’ESRA

Après un premier After Short, organisé mardi 12 novembre dernier autour des courts de fiction présélectionnés aux prochains César (en présence de 8 équipes), retrouvez-nous le jeudi 21 novembre prochain dès 19h à l’ESRA pour notre 2ème After Short de l’année centré sur les courts d’animation en lice aux César, auquel participeront 10 équipes de films et 15 professionnels.

Ce nouveau cycle d’After Short, organisé par le magazine Format Court, en collaboration avec l’ESRA et le soutien de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma, a lieu à l’ESRA Campus Beaugrenelle (Amphithéâtre Jean Renoir, 37 Quai de Grenelle, 75015 Paris). Pas moins de 4 rencontres, autour des équipes des courts-métrages en lice aux César 2025, sont proposées entre novembre et décembre dans l’amphithéâtre de l’école accueillant plus de 250 places. Elles sont accessibles aux étudiants comme au grand public.

Vous voulez en apprendre davantage sur les parcours d’auteurs et producteur.trice.s qui bâtissent le cinéma d’aujourd’hui et de demain, découvrir leurs films, échanger avec elles et eux sur leurs œuvres, leurs choix artistiques, leurs expériences et le déroulement de leur travail, comprendre le fonctionnement de l’Académie des César et poursuivre ces discussions autour d’un verre ?

Un After Short, comment ça se passe ? 

En amont : les photos et bios des intervenants ainsi que les liens de visionnage des courts sont mis à la disposition des personnes ayant réservé leur place. Le jour J, le public a ainsi la possibilité de participer activement à la discussion qui s’engage avec les équipes de films.

Lors de l’évènement : les équipes (réalisateurs.trices et/ou producteurs.trices, anciens lauréats des César, membres de comités de sélection de l’Académie) se succèdent sur scène pour une intervention et un échange avec le public d’une dizaine de minutes chacune. Deux animateurs sont là pour introduire leur travail et vous donner la parole.

Info, rappel : il n’y a pas de projection de films au cours de la soirée. 

Après la rencontre : un cocktail est organisé à l’ESRA. C’est entre autres l’occasion de poursuivre les discussions de façon plus informelle avec les équipes présentes.

Intéressé(e)s par l’After Short ? Téléchargez la présentation (PDF) de nos invités ainsi que leurs bios et les synopsis de leurs films, représentés lors de notre soirée animation de l’année, le jeudi 21 novembre 2024 à 19h à l’ESRA. 10 films sur 12 seront présentés lors de ce nouvel échange accueillant 14 pros. Si vous souhaitez assister à l’événement et visionner les films qui seront évoqués, reportez-vous aux infos pratiques mentionnées ci-dessous.

Nos invités :

Chiara Malta, membre du comité court-métrage animation et co-réalisatrice de Linda veut du poulet !, César du meilleur film d’animation 2024

Mathilde Bédouet, réalisatrice de Été 96, César du meilleur court-métrage d’animation 2024

Hélène Vayssières, Directrice adjointe de l’unité Cinéma, Responsable des courts métrages et séries courtes humoristiques, membre du comité court-métrage animation

Kenza Manach, responsable du Département courts métrages et du pôle éducation à l’Académie des César.

Lucas Malbrun, réalisateur de Margarethe 89.

Fabienne Wagenaar, réalisatrice de Plus douce est la nuit.

Juliette Marquet et Manon Messiant, productrices (Ikki films et Iliade films) de Beurk !, de Loïc Espuche.

Carole Guignard-Chabouis, chargé de production (Miyu Production) de La Voix des sirènes de Gianluigi Toccafondo et de Misérable miracle de Ryo Orikasa.

Marie Vieillevie, réalisatrice de Kaminhu.

Cynthia Calvi, réalisatrice et Pierre Grillère, consultant scénario de Gigi.

Luigi Loy, chargé de distribution (Sacrebleu Productions) de Papillon de Florence Miailhe et Maurice’s bar de Tzor Edery et Tom Prezman, et Pierre Oberkampf, compositeur de Papillon.

Marc Faye, producteur (Novamina) de Soleil gris de Camille Monnier.

En pratique

* After Short Animation. Jeudi 21 novembre 2024, à 19h, à l’ESRA. En présence de 10 équipes ! PAF : 5€. Billetterie en ligne, dans la limite des 50 places encore disponibles). Pour les (ex-)étudiants de l’ESRA, les réservations gratuites se font à l’adresse communication@esra.edu

* Notez d’ores et déjà la date de notre After Short consacré aux courts-métrages documentaires, le lundi 2 décembre prochain, à 19h, toujours à l’ESRA. En présence de 9 équipes ! PAF : 5€. Billetterie en ligne, dans la limite des 50 places encore disponibles). Pour les (ex-)étudiants de l’ESRA, les réservations gratuites se font à l’adresse communication@esra.edu

2ème After Short Fiction (2/2), 9.12, à 19h à l’ESRA !

24 courts de fiction sont en lice aux César 2025. Après un premier After Short consacré le 12 novembre 2024 aux courts de fiction présélectionnés aux prochains César (en présence de 8 équipes), retrouvez notre nouvel After Short également centré sur la fiction, en présence de 13 autres équipes !

En collaboration avec l’ESRA et le soutien de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma, le magazine Format Court vous invite à la reprise de ses After Short, organisés cette année à l’ESRA Campus Beaugrenelle (Amphithéâtre Jean Renoir, 37 Quai de Grenelle, 75015 Paris).

Ce nouveau cycle, organisé entre novembre et décembre, propose pas moins de 4 rencontres autour des équipes des courts-métrages en lice aux César 2025, accessibles aux étudiants comme au grand public.

Vous voulez en apprendre davantage sur les parcours d’auteurs et producteur.trice.s qui bâtissent le cinéma d’aujourd’hui et de demain, découvrir leurs films, échanger avec elles et eux sur leurs œuvres, leurs choix artistiques, leurs expériences et le déroulement de leur travail, comprendre le fonctionnement de l’Académie des César et poursuivre ces discussions autour d’un verre ?

Un After Short, comment ça se passe ? 

En amont : les photos et bios des intervenants ainsi que les liens de visionnage des courts sont mis à la disposition des personnes ayant réservé leur place. Le jour J, le public a ainsi la possibilité de participer activement à la discussion qui s’engage avec les équipes de films.

Lors de l’évènement : les équipes (réalisateurs.trices et/ou producteurs.trices, anciens lauréats des César, membres de comités de sélection de l’Académie) se succèdent sur scène pour une intervention et un échange avec le public d’une dizaine de minutes chacune. Deux animateurs sont là pour introduire leur travail et vous donner la parole.

Info, rappel : il n’y a pas de projection de films au cours de la soirée. 

Après la rencontre : un cocktail est organisé à l’ESRA. C’est entre autres l’occasion de poursuivre les discussions de façon plus informelle avec les équipes présentes.

Intéressé(e)s par l’After Short ? Téléchargez la présentation (PDF) de nos invités ainsi que leurs bios et les synopsis de leurs films, représentés lors de notre 2ème soirée fiction de l’année, le lundi 9 décembre 2024 à 19h à l’ESRA. 13 films sur 24 seront présentés lors de ce nouvel échange accueillant 22 pros. Si vous souhaitez assister à l’événement et visionner les films qui seront évoqués, reportez-vous aux infos pratiques mentionnées ci-dessous.

Nos invités

– Kenza Manach, responsable du Département courts métrages et du pôle éducation à l’Académie des César

Nathalie Hertzberg, scénariste, membre du comité artistique

Grégory Audermatte, chargé des achats chez Arte France, membre du comité d’experts

Yohann Kouam, réalisateur d’Après l’aurore.

Avril Besson, réalisatrice de Queen size et Robin Robles, producteur (Topshot Films)

Jules Reinartz, producteur (Films Grand Huit) de Ce qui appartient à César de Violette Gitton

François Robic, réalisateur et Clémence Crépin Neel, productrice (Moderato) de Rien d’important.

Vibirson Gnanatheepan, réalisateur, Stanislas Wicker, co-producteur ((SIC) Pictures) d’Anushan.

Léa-Jade Horlier, réalisatrice, et Idris Lettifi, producteur (Piano Sano Films) de Na marei.

Nicolas Giuliani, réalisateur, et Gautier Raguenes, producteur (Les Films Hatari) de L’Envoûtement.

Adrien Selbert, réalisateur de Les Marquises.

Souliman Schelfout, réalisateur de Reset.

Johanna Canu, chargée de production (Kidam) de L’Anniversaire d’Enrico, réalisé par Francesco Sossai.

Guillermo García López, réalisateur de Malgré la nuit

David Frenkel, producteur (Synecdoche) de Une orange de Jaffa de Mohammed Almughanni

Augustin Bonnet, réalisateur, et Marie Lesay, productrice (Rue de la Sardine) de Grand Littoral

En pratique

* After Short fiction 2/2. Lundi 9 décembre 2024, à 19h, à l’ESRA. En présence de 13 équipes ! PAF : 5€. Billetterie en ligne, dans la limite des 50 places disponibles). Pour les (ex-)étudiants de l’ESRA, les réservations gratuites se font à l’adresse communication@esra.edu

1er After Short, mardi 12/11. Courts de fiction en lice aux César 2025 (1/2)

En collaboration avec l’ESRA et le soutien de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma, le magazine Format Court vous invite à la reprise de ses After Short, organisés cette année à l’ESRA Campus Beaugrenelle (Amphithéâtre Jean Renoir, 37 Quai de Grenelle, 75015 Paris).

Ce nouveau cycle, organisé entre novembre et décembre, proposera pas moins de 4 rencontres autour des équipes des courts-métrages en lice aux César 2025, accessibles aux étudiants comme au grand public.

Notre nouveau cycle s’ouvrira et se clôturera avec la mise en avant des courts-métrages de fiction présélectionnés aux César, les mardi 12 novembre (fiction 1/2) et lundi 9 décembre (fiction 2/2). De nombreux·ses professionnel·les (réalisateur·ices, producteur·ices) sont attendu.es à l’occasion de ces 2 événements.

Vous voulez en apprendre davantage sur les parcours d’auteurs et producteur.trice.s qui bâtissent le cinéma d’aujourd’hui et de demain, découvrir leurs films, échanger avec elles et eux sur leurs œuvres, leurs choix artistiques, leurs expériences et le déroulement de leur travail, comprendre le fonctionnement de l’Académie des César et poursuivre ces discussions autour d’un verre ?

Un After Short, comment ça se passe ? 

En amont : les photos et bios des intervenants ainsi que les liens de visionnage des courts sont mis à la disposition des personnes ayant réservé leur place. Le jour J, le public a ainsi la possibilité de participer activement à la discussion qui s’engage avec les équipes de films.

Lors de l’évènement : les équipes (réalisateurs.trices et/ou producteurs.trices, anciens lauréats des César, membres de comités de sélection de l’Académie) se succèdent sur scène pour une intervention et un échange avec le public d’une dizaine de minutes chacune. Deux animateurs sont là pour introduire leur travail et vous donner la parole.

Info, rappel : il n’y a pas de projection de films au cours de la soirée. 

Après la rencontre : un cocktail est organisé à l’ESRA. C’est entre autres l’occasion de poursuivre les discussions de façon plus informelle avec les équipes présentes.

Intéressé(e)s par l’After Short ? Téléchargez la présentation (PDF) de nos invités ainsi que leurs bios et les synopsis de leurs films, représentés lors de notre première soirée de l’année, le mardi 12 novembre 2024 à 19h à l’ESRA. 8 films sur 24 seront présentés lors de ce premier échange accueillant 13 pros. Si vous souhaitez assister à l’événement et visionner les films qui seront évoqués, reportez-vous aux infos pratiques mentionnées ci-dessous.

Nos invités

– Kenza Manach, responsable du Département courts métrages et du pôle éducation à l’Académie des César.

Caroline Maleville, membre du comité d’experts et responsable de programmation à la Cinémathèque française.

– Salomé Da Souza, réalisatrice de Boucan.

– David Padilla, réalisateur, et Jonathan Hazan, producteur (Les Films du Cygne) de Cultes.

– Théo Vincent, réalisateur de Mémoires du bois

– Noëlle Levenez, productrice (Les Films Norfolk) de The Man who could not remain silent, réalisé par Nebojša Slijepčević.

– Guil Sela, réalisateur et producteur de Montsouris.

Marie-Lola Terver et Paul Jousselin, co-réalisateurs de Les Mystérieuses Aventures de Claude Conseil

Hakim Atoui, réalisateur de Les Liens du sang

Charlotte Vincent et Katia Khazak, productrices (Aurora Films) de Et si le soleil plongeait dans l’océan des nues de Wissam Charaf

En pratique

* After Short 1 : mardi 12 novembre 2024 – 19h : catégorie fiction 1/2. Accueil : 18h30. En présence de 8 équipes ! PAF : 5€. Billetterie en ligne, dans la limite des 50 places disponibles. Pour les (ex-)étudiants de l’ESRA, pensez à réserver votre place gratuite à communication@esra.edu

* Notez d’ores et déjà la date de notre 2ème After Short consacré aux courts de fiction, prévu le lundi 9 décembre prochain, à 19h, toujours à l’ESRA. En présence de 13 nouvelles équipes ! PAF : 5€. Billetterie en ligne, dans la limite des 50 places disponibles). Pour les (ex-)étudiants de l’ESRA, les réservations gratuites se font à l’adresse communication@esra.edu