Ce matin, se tenait la conférence de presse de la Quinzaine des Réalisateurs au Forum des Images. Edouard Waintrop, le nouveau Délégué général de cette section distincte par « sa liberté d’esprit, son caractère non compétitif et son souci d’ouverture à tous les publics » y a présenté la sélection des longs et courts métrages. Le cinéma court se voit attribuer deux programmes distincts de cinq films chacun. Quentin Dupieux, découvert en 2010 avec son premier long métrage étonnant, « Rubber », à la Semaine de la Critique ainsi que Franco Lolli, que nous avions interviewé il y a trois ans pour son film de fin d’études « Como todo el mundo », font partie de cette sélection.
Programme 1
Avec Jeff, à moto de Marie-Eve Juste (Canada). Prod : Voyous Films
Rodri de Franco Lolli (France). Prod : Les films du worso
Königsberg de Philipp Mayrhofer (France). Prod : Ferris et Brockman
Porcos Raivosos (Porcs enragés) de Leonardo Sette et Isabel Penoni (Brésil). Prod : Lucinda
Os vivos tamben choram (Les Vivants pleurent aussi) de Basil da Cunha (Suisse, Portugal). Prod : O Som e a Fùria/Portugal
Programme 2
Portret Z Pamieci (Drawn from Memory) de Marcin Bortkiewicz (Pologne). Prod : Polish Filmmakers Association Munk Studio
The Curse de Fyzal Boulifa (Royaume Uni, Maroc). Prod : Quark Films
Tram de Michaela Pavlátová (France, République tchèque). Prod : Sacrebleu Productions
Os mortos-vivos (Les Morts-vivants) de Anita Rocha da Silveira (Brésil). Prod : Anita Rocha da Silveira
Wrong Cops de Quentin Dupieux (France). Prod : Realitism Films
Point de conférence de presse pour la Semaine de la Critique. Hier soir, la section parallèle du Festival de Cannes mettait en lumière sa sélection de courts et de longs métrages sur son site internet et son compte Twitter. Après de nombreux clics impatients, les internautes ont enfin pu découvrir les films retenus pour cette édition.
Liste des films sélectionnés
La Biflede Jean-Baptiste Saurel (France)
Ce n’est pas un film de cow-boys de Benjamin Parent (France)
Circle Line de Shin Suwon (Corée du Sud )
O Duplo de Juliana Rojas (Brésil)
Family Dinner de Stefan Constantinescu (Suède)
Fleuve rouge, Song Hong de Stéphanie Lansaque & François Leroy (France)
Hazara de Shay Levi (Israël)
Horizon de Paul Negoescu (Roumanie)
Un dimanche matin de Damien Manivel (France)
Yeguas y cotorras de Natalia Garagiola (Argentine)
Lors de la 34e édition du Festival de Films de Femmes de Créteil, La fémis était amplement représentée : l’école de cinéma renommée a pu non seulement compter deux de ses étudiantes en compétition dans la catégorie courts-métrages, mais elle s’est également vue offrir la mise en place d’une Master Class animée par la non moins connue Claire Simon.
Et si on allie le travail de la réalisatrice intervenante à La fémis avec un des courts-métrages en compétition cette année, on obtient le film « Demain, ça sera bien » de Pauline Gay, présenté il y a un an à la Quinzaine des Réalisateurs. En effet, Claire Simon, une des responsables du département réalisation à La fémis, a accompagné Pauline Gay dans la fabrication de ce docu-fiction.
Lorsqu’on se penche un temps soit peu sur le travail de Claire Simon, on remarque que Pauline Gay a su tirer profit des leçons de son mentor en proposant un film aux aspects documentaires pourtant fictionnel, dont le pitch se résume à : « Portrait de deux jeunes filles en galère ». En effet, si l’on se penche sur Les Carnets de Filmer à Tout Prix (2004), Claire Simon évoque ceci : « Dans mon travail documentaire, j’ai essayé de trouver des situations de fiction, non pas au sens où il y aurait des acteurs, mais où la référence serait la fiction », on comprend ce qu’il y a de fictionnel dans les portraits de Céline et Mélodie, filmés par Pauline Gay.
Céline et Mélodie jouent apparemment leur propre rôle, celui de deux jeunes filles d’une vingtaine d’années provenant de milieux sociaux inférieurs, livrées à elles-mêmes. Le film raconte une anecdote dans leur vie de tous les jours – celle d’aller voler un radiateur pour remplacer le leur qui est cassé – en intercalant des images de chacune d’elles témoignant de leur histoire personnelle.
L’une d’elle, Céline, a quitté le foyer familial suite à une grossesse précoce. Quant à Mélodie, probablement la plus responsable des deux, elle s’est enfuie de chez oncle qui la battait. Céline cohabite alors avec son petit Kylian de 3 ans, de manière illégale chez son amie Mélodie. Les dialogues entre elles deux ne manquent pas de vulgarité et d’agressivité, elles semblent pourtant s’adorer et surtout, se soutenir dans cette existence de reclus.
Il y a certes beaucoup de Claire Simon dans ce film, mais on retrouve également un peu de la cruauté du film « Froid comme l’été » de Jacques Maillot dans lequel une jeune fille semblable aux protagonistes de Pauline Gay, délaisse inconsciemment son bébé lorsqu’elle part au bord de la mer, ce qui causera la mort de l’enfant. On pense particulièrement au moment où, dans « Demain, ça sera bien », Céline laisse son fils dormir seul dans la voiture, le temps qu’elles aillent voler le fameux radiateur.
Au même titre que ses prédécesseurs, Pauline Gay réussit à nous faire avoir de l’affection pour ces deux filles un peu paumées et complètement irresponsables. Certains plans rapprochés permettent d’ailleurs de rentrer dans leur intimité, de sorte à nous montrer leur sensibilité, voire leurs faiblesses. Le film ne tombe pas pour autant dans le mélo puis. Même si parfois, le ton de « Demain, ça sera bien » est peut-être un peu trop lisse, on est par conséquent en plein dans le cinéma du réel et dans le documentaire social.
Le film « When the bough breaks » de Ji Dan, une des réalisatrices chinoises les plus en vue, remporte l’Objectif d’Or 2012 du Festival Millenium. Ji Dan nous trace un portrait saisissant d’une famille de travailleurs chinois migrants, où le père est fou, la mère dépassée et dont seuls les enfants semblent à même de pouvoir changer un destin qui ne leur promet que misère et dégradation. Cinq autres prix ont été décernés durant la soirée de remise des prix. 15 films étaient sélectionnés pour la compétition. Un jury international et un jury du public étaient en charge d’attribuer les 6 prix de cette édition 2012. Voici le palmarès complet:
Objectif d’or : Prix du meilleur film documentaire
Pour plus d’informations : Rendez-vous à la page événement
La soirée de remise des prix est la fin d’une première étape mais le Festival Millenium continue jusqu’au 5 mai. Il y a encore des projections, des master classes, des rencontres et des débats.
Jolie découverte que « Le Gosse », sélectionné à la 34ème édition du Festival International de films de femmes de Créteil. Ce moyen-métrage documentaire n’est autre que le travail de fin d’études de Louise Jaillette, étudiante de la Fémis issue de la section montage.
Thibaut est un gamin de l’Ardèche, un fils de fermier. À Chambonnet-Haut, il arpente les collines, suit le courant de la rivière et nourrit les chèvres. Il déteste l’école autant que possible car elle l’empêche de sortir et de respirer cette nature qu’il semble avoir totalement apprivoisée.
La caméra, toujours maintenue à une certaine distance, filme les sentiments avec pudeur et la nature avec humanisme, sans jamais porter de jugement attendri ou même condescendant. Loin des adultes – il faut dire qu’aucune place ne leur est accordée dans le film -, Thibaut et son amie Ophélie parlent de l’avenir avec une maturité qui dénote, mais quand plus tard, du haut d’un rocher, Thibaut tente une approche maladroite, c’est l’enfance qui refait surface avec ses audaces candides et ses hésitations délicates. On se prête alors à penser à Marie et Jacques de « Au hasard Balthazar » de Robert Bresson.
« Le Gosse » ne serait qu’anecdotique s’il ne dégageait pas une intensité cinématographique qui dépasse la réalité qu’il entend filmer. Serait-ce en raison du parfait équilibre que la réalisatrice a su trouver entre l’importance à accorder au sujet et à l’environnement qui l’entoure ? Serait-ce dû à l’indéniable charisme de son personnage principal ? Ou serait-ce grâce à la beauté de l’Ardèche et de ses secrets d’un ailleurs imaginaire qui transparaît dans chaque plan ?
Dans la lignée des films sur l’enfance, le documentaire de Jaillette aborde avec une justesse harmonieuse le passage crucial qui conduit à l’adolescence puis à l’âge adulte. Elle installe le film dans une durée qui mêle objectivité et subjectivité pour nous offrir une des plus belles fables bucoliques vues depuis bien longtemps.
Synopsis : Thibaut est un enfant extraordinaire. Ce petit bout d’homme calcule, spécule et se plante. Il arpente la colline, élève des moutons et se pose des questions. La peur de l’avenir, la conscience du présent et le rêve de bâtir.
Du 30 mars au 8 avril, la maison de la Culture de Créteil accueillait la 34ème édition du Festival International de films de femmes. Avec des compétitions de longs-métrages, de courts métrages de fictions, des documentaires, une section parallèle, un Jury Jeune Public (Graines de Cinéphage) et un autoportrait, le Festival demeure un lieu privilégié d’exploration de cinéma de femmes. Cette année, le Festival pouvait compter parmi ses invitées les personnalités aussi prestigieuses que celles d’Anna Alvaro, Brigitte Fontaine ou encore Gisèle Halimi. Une édition axée sur les lucioles du 7è art, ces petites lumières (réalisatrices, auteures, professionnelles du cinéma) qui, par le regard qu’elles posent sur le monde et la société, mettent en lumière les liens existant entre l’Histoire du féminisme et la création féminine.
Prix du public : La vie parisienne de Vincent Dietschy / France / 2011 / Fiction / 37 minutes
Prix Cine+ : Vilaine fille, mauvais garçon de Justine Triet / France / 2012 / Fiction / 30 minutes ex-aequo Ce qu’il restera de nous de Vincent Macaigne / France / 2011 / Fiction / 40 minutes
Prix de scénario de moyen métrage : Bleu, blanc, rouge de Xavier Bonnin
Dernière info cannoise. La Cinéfondation a fait connaître sa sélection hier matin, en même temps que celle des courts métrages en compétition. La Cinéfondation a reçu cette année 1 700 films d’étudiants en provenance de 320 écoles de cinéma, à l’arrivée, quinze films ont été retenus. Pour la première fois, une école libanaise est présente dans cette sélection. Le jury de la Cinéfondation et des courts métrages sera, comme nous vous l’annoncions il y a quelques jours, présidé par Jean-Pierre Dardenne.
Liste des films sélectionnés
Derrière moi les oliviers, de Pascale Abou Jamra (Alba, Liban, 20′)
Riyoushi, de Shoichi Akino (Tokyo University of the Arts, Japon, 39′)
Les ravissements, d’Arthur Cahn (La Fémis, France, 50′)
Slug Invasion, de Morten Helgeland (The Animation Workshop, Danemark, 6′)
Tambylles, de Michal Hogenauer (FAMU, Rép. Tchèque, 58′)
Matteus, de Leni Huygue (Sint-Lukas, Belgique, 18′)
Tabara Din Razaore, de Cristi Iftime (UNATC, Roumanie, 22′)
Doroga Na, de Taisia Igumentseva (VGIK, Russie, 32′)
Terra, de Piero Messina (CSC, Italie, 23′)
Los Anfitriones, de Miguel Angel Moulet (EICTV, Cuba, 16′)
The Ballad of Finn + Yeti, de Meryl O’Connor (UCLA, USA, 18′)
Head Over Heels, de Timothy Reckart (NFTS, Royaume Uni, 10′)
Abigail, de Matthew James Reilly (NYU, USA, 17′)
Resen, d’Eti Tsicko (TAU, Israël, 26′)
Pude Ver un Puma, d’Eduardo Williams (UCINE, Argentine, 17′)
Alors que la sélection officielle des longs métrages du Festival de Cannes sera présentée jeudi 19 avril, celle des courts métrages a été dévoilée hier matin, en avant-première. Dix courts-métrages, choisis parmi les 4 500 présentés au comité de sélection, sont en lice pour la Palme d’or du court métrage et quinze films ont été retenus dans le cadre de la Cinéfondation. Le jury de la Cinéfondation et des courts métrages sera, comme nous vous l’annoncions il y a quelques jours, présidé par Jean-Pierre Dardenne. Pour la première fois, un réalisateur syrien et un portoricain participent à la compétition qui accueille également un artiste français connu du monde de la musique, le rappeur Hamé du groupe la Rumeur.
Liste des films en compétition
Mi Santa Mirada, d’Alvaro Aponto-Centeno (Porto Rico, 15′)
Gasp (Souffle), d’Eicke Bettinga (Allemagne, 15′)
Ce chemin devant moi, de Mohamed Bourkba dit Hamé (France, 15′)
Falastein, Sandouk Al Intezar Lil Butuqal, de Bassam Chekhes (Syrie, 15′)
The Chair, de Grainger David (Etats-Unis, 12′)
Night Shift, de Zia Mandivwalla (Nouvelle-Zélande, 14′)
Chef de meute, de Chloé Robichaud (Canada, 13′)
Yarbird, de Michael Spiccia (Australie, 13′)
Cockaigne, d’Emilie Verhamme (Belgique, 13′)
Sessiz-Be Deng (Silencieux), de L. Rezan Yesilbas (Turquie, 14′)
Synopsis : Chez les Nigériens, être jumeaux peut signifier une bénédiction ou une malédiction. Le père de O est le chef du village, un sorcier qui croit à la malédiction des jumeaux. Un jour, ce sorcier a tenté, lors d’une fête rituelle, de tuer ses deux fils : O a réussi à s’échapper, mais a assisté au meurtre de son frère. Après s’être enfui et avoir traversé son pays, il a réussi, par chance, à sortir du Nigeria et à s’exiler en France. Il a demandé l’asile dans ce contexte, mais sa demande a été refusée car il ne pouvait fournir aucune preuve.
Rare occurrence de l’animation au sein du festival Courtisane, « Manque de preuves » interpelle à plus d’un titre. Fascinée par la reconstruction de la mémoire, sa réalisatrice Kwon Hayoun, élève de l’école Le Fresnoy, livre un documentaire prenant sur les péripéties d’un exilé nigérien en France.
Victime d’une persécution et de tentatives parricides à cause du fait qu’il est né jumeau (phénomène soit vénéré soit condamné dans le pays qui ironiquement affiche le taux le plus élevé de la gémellité), Oscar a fui le Nigeria pour le sol français, où sa demande d’asile est restée sans réponse pour manque de preuves tangibles. En s’intéressant à cette histoire personnelle, la réalisatrice, elle même immigrée coréenne, pose la question fondamentale liée au genre documentaire, celle de la distinction entre la vérité historique et la vérité narrative, entre le fait réel et la discours rapporté.
Sincère à sa volonté de traduire fidèlement mais non pas littéralement ce récit apocryphe, la réalisatrice opte pour une narration brumeuse. Partant des deux seules épreuves judiciaires, le témoignage oral déposé par Oscar et l’esquisse retraçant sa fuite, Hayoun récrée les événements périlleux vécus par le rescapé. Elle opte pour une technique d’animation transparente qui consiste à mettre à nu le squelette de son dessin en 3D. L’image rappelle à tout moment le procédé de reconstitution par un refus catégorique d’une représentation matérielle associée à la live action. Celle-ci fait toutefois son apparition à deux reprises. Premièrement, lorsque Hayoun opère un éloquent trompe l’œil en dessinant, à l’aide de papier collant dans une salle blanche, un bureau vide sur lequel est posé de croquis d’Oscar, symbolisant l’inertie à laquelle la demande d’asile d’Oscar est confrontée. Deuxièmement, le plan final montre dans un flou la silhouette d’un homme qu’on associe inéluctablement au protagoniste. Ce faisant, elle introduit avec justesse l’élément humain qui manque rudement et sciemment à un récit presque entièrement conduit par le virtuel. Loin d’être un simple exercice stylistique, « Manque de preuves » interroge les systèmes de justice déshumanisés qui nous entourent, ici et ailleurs, guidés par la superstition ou par la raison empirique.
SHORT SCREENS, le court métrage sur grand écran, a le plaisir de vous annoncer sa première séance de la saison 2012.
Dans une ambiance chaleureuse et décontractée, venez vous régaler devant une programmation éclectique, avec des films d’hier et d’aujourd’hui, fruits de la créativité d’auteurs belges et étrangers.
Rendez-vous le 26 avril à 19h30 à l’Actor’s Studio, au 16 petite rue des bouchers, à 1000 Bruxelles !
WITHOUT SNOW
Magnus von Horn
Pologne / 2010 / Fiction / 35’ – VO SE ST EN Linus a 16 ans et vient de tomber amoureux de la copine de son meilleur ami. Il ne pouvait pas imaginer que cela aurait de telles conséquences.
LA VERSION DU LOUP Ann Sirot et Raphaël Balboni Belgique / 2010 / Fiction / 10’ – VO FR
Comme dans le conte traditionnel, le loup convoite le petit chaperon rouge et se déguise pour arriver à ses fins. Mais dans cette version, le loup, lassé de sa cruelle réputation, rétablit la vérité et dévoile un petit chaperon plus espiègle que la candide fillette de la légende.
LES BESSONES DEL CARRER PONENT
Marc Riba et Ana Solanas
Espagne / 2010 / Animation / 13’
Pommades, élixirs et potions. Enriqueta et Ramoneta vous serviront avec discrétion, réserve et éducation, rue de Ponent, numéro 17A , Barcelone.
PUCHA VIDA
Nazly López Díaz
Cuba / 2007 / Documentaire / 12’ – VO ES ST EN Pucha est une révolutionnaire exemplaire ; elle mène une vie heureuse, dans un décor qu’elle a elle-même aménagé, et chaque chose qu’elle possède a sa place dans l’univers qui est le sien. Néanmoins, il y a conflit entre ses idéaux et la réalité. Sa petite-fille adorée est partie vivre dans le pays de l’ennemi et a changé de nationalité.
ENTACHÉ
Lucie Thocaven et Iris Alexandre
Belgique / 2010 / Animation / 6’ Dans une laverie, un vieux garçon laisse échapper un porte-jarretelle en vidant sa machine.
Depuis 2004, le festival Côté court (15-26 juin) propose une compétition consacrée au cinéma expérimental, à l’essai ou encore à l’art vidéo, un cinéma qui a pour habitude de bousculer le langage cinématographique. Entre arts plastiques et cinéma traditionnel, il croise par nature différentes esthétiques. Voici les films issus de cette section que vous aurez l’opportunité de voir cette année.
Invisible, Catherine Alves et Nathalie Battus
Or Anything at all Except the Dark Pavement, Théodora Barat
Ma mère, David et moi, Taysir Batniji
Cap Tingis, Safia Benhaïm
Les Derniers Hommes, Quentin Brière Bordier
Sweet Viking, Salma Cheddadi
Cela ne s’est jamais passé, Alessia Chiesa
La Reine des neiges, Julien Chollat-Namy
O Sal Da Lua, A outra experiência, Cédric Dupire et Cristiana Miranda
Motif 1, Patricia Godal
Il se peut que la beauté ait renforcé notre résolution, Masao Adachi, Philippe Grandrieux
Glucose, Mihai Grecu et Thibaul Gleize
Laissez ici toute espérance, Charles H. Drouot
Danser avec Griselidis, Véronique Hubert
Gruffalo sur ma peau, Marie-Pierre Lagarrigue
La Terre, Vincent Le Port
Les Aimants, Cerise Lopez
abcdefghijklmnop(q)rstuvwxyz, Valérie Mréjen et Bertrand Schefer
Synopsis : Tu peux oublier. Tu dois oublier. Mais impossible d’oublier. A quoi pensent les femmes et que ressentent-elles cinq minutes avant d’avorter ?
Réalisation : Alina Rudnitskaya
Scénario : Alina Rudnitskaya
Genre : documentaire
Durée : 25’
Année : 2011
Pays : Russie
Image : Alexander Filippov
Montage : Alina Rudnitskaya
Son : Alexey Telno
Production : Studio des Films documentaires de Saint-Pétersbourg
Pour Alina Rudnitskaya, le cinéma est témoignage. Dans son captivant « I Will Forget This Day », elle ambitionne de saisir les pensées des femmes cinq minutes avant leur avortement. Mention Spéciale à Courtisane.
Un entretien en caméra subjective dans un sobre noir et blanc rend compte du désespoir d’une jeune fille qui ne peut mettre des mots sur ce qu’elle vit. S’ensuit alors une série de portraits de femmes jeunes et moins jeunes, toutes filmées dans la même position, dans la même largeur de plans fixes. Elles attendent, le visage inquiet, anxieux et parfois défait. Ce qu’elles attendent, on l’ignore puis, on le devine peu à peu. Un pont sur la Neva, entièrement plongé dans une brume hivernale, fait alors étrangement écho au désarroi et à la solitude de ces femmes.
Pour traiter d’un sujet délicat, la réalisatrice a opté pour une mise en scène neutre et distanciée mettant en valeur un montage ingénieux. Le temps du film devient alors une donnée psychologique et l’attente est perçue avec une précision clinique. La réalisatrice joue d’ailleurs avec la notion de durée ; elle l’allonge, la rétrécit à sa guise, n’hésitant pas à répéter la même scène à l’infini tout en changeant de protagoniste. Ces duplications, au lieu de singulariser l’acte d’avorter, le pluralise et le place au sein d’une masse d’individu(e)s anonymes, uni(e)s dans la même souffrance.
Le tour de force de la documentariste est de faire ressortir l’intériorité de ces femmes par sa simple caméra. Leurs doutes et inquiétudes, leur angoisse et intimité se déploient dans chaque plan. Et pourtant il y a une vraie pudeur tout au long du film, car au-delà du dispositif, on sait le regard, de la réalisatrice doux et compatissant. Pour les scènes finales, elle décide de briser le contrat tacite qu’elle avait minutieusement établi avec son spectateur, elle boucle la boucle en montrant la suite des entretiens entre les patientes et la praticienne. Cette fois-ci, les jeunes femmes parlent et font éclater leur tristesse tandis que le personnel hospitalier ne cesse de leur faire prendre conscience de la gravité du moment. Mais ça, elles le savent, elles ne pourront d’ailleurs jamais oublier ce jour.
« I Will Forget This Day » capture superbement une certaine partie de l’essence féminine où vie et mort sont finalement si intimement liées.
La sélection du court métrage « Les poissons préfèrent l’eau du bain » au Festival d’Aubagne est, pour son réalisateur Pierre Mazingarbe, une première dans un festival international de cette renommée alors que le film a déjà un an. On osera s’en étonner tant le film est unique en son genre : il parle d’un thème grave et tabou, l’avortement, sur un ton léger voire désinvolte, le tout dans un décor directement sorti des films de Tim Burton. Avec ce film, Pierre Mazingarbe nous plonge dans un univers étouffant, dérangeant et merveilleux à la fois, où la recherche esthétique tient la même place importante que celle de la narration dénonciatrice. À Aubagne, où le festival porte sur la musique et le travail sur le son, nous avons rencontré le réalisateur Pierre Mazingarbe et ses deux compositrices, Camille Hardouin et Aude Wyart, du groupe Lilt pour un entretien croisé.
On note dans ton film, que tu accordes une grande importance à l’aspect esthétique et artistique, visuellement parlant. Comment expliques-tu cela ?
Pierre Mazingarbe : Je crois que ça vient d’une démarche de l’animation que je pratiquais avant aux Arts Déco. Le projet a été très préparé en amont, on avait par exemple fait un story-board de tout le film. On avait aussi pensé et prévu le montage avant, comme on le fait en animation. Le côté théâtral du jeu des comédiens, ressemblant sensiblement aux marionnettes, peut également venir de l’animation. Par ailleurs, je suis actuellement en première année au Fresnoy. L’école propose une formation qui va du documentaire en passant par la fiction, jusqu’aux films expérimentaux et avec bien sûr une grande place à tout l’art contemporain. Ça explique aussi certainement ma recherche de l’esthétisme.
Est-ce que pour la musique, tu as également effectué un travail en amont ?
P. M. : En réalité, je ne me souviens plus trop à quel moment on a commencé à travailler la musique, mais oui, c’était un peu en amont.
Aude Wyart : Je crois effectivement que ça s’est fait en parallèle. On a assisté aux réunions de préparation du film et avant même de voir les images, on a commencé nos recherches. Par la suite, on a suivi tout le processus d’élaboration du court métrage.
Camille Hardouin : Oui, Pierre avait déjà l’idée du film, c’est pour ça qu’il nous a contactées. Il avait déjà imaginé l’idée de base, trois filles dans une baignoire avec un univers à plusieurs voix et plusieurs personnalités.
P. M. : L’idée était vraiment d’avoir un univers à trois voix avec celles de Camille et d’Aude musicalement parlant, des voix graves et aigües pour obtenir un système de miroir avec le film, lequel possède plusieurs niveaux de narration. Néanmoins, tout n’était pas prêt avant. En effet, lorsque le film s’est tourné, qu’on a abordé le thème délicat de l’avortement, il y a eu des discussions, des réflexions qui ont continué à faire évoluer les choses.
Pierre, lorsqu’on traite d’un sujet aussi féminin que le tien, est-il important, selon toi, de travailler avec des femmes ?
P. M. : Déjà, pour aborder un sujet de la sorte, il m’a fallu beaucoup discuter avec des amies. Puis, beaucoup de collaboratrices m’ont aidé, ce qui a contribué à la justesse de l’intrigue. Par ailleurs, oui, ça m’intéresse de voir de quelle manière, on peut envisager une responsabilisation des hommes au niveau de leur sexualité en abordant ce thème de front, avec les problèmes éthiques que cela soulève.
Aude et Camille, au niveau de la musique, comment avez-vous travaillé ?
A. W. : On a composé toutes les deux le thème principal pour le film et on a complété avec un morceau de banjo déjà enregistré par un ami. Comme Pierre l’a aimé, on l’a gardé.
Pierre, le thème de l’avortement et de la femme te tient particulièrement à cœur. Ton film antérieur, « Blanche », était déjà dédié à ça.
P. M. : En effet, tous les films que j’ai réalisé – et je suis en train de terminer le quatrième – sont autour de personnages féminins. J’aime les mettre au premier plan et raconter quelque chose sur leur intimité qui ne soit pas juste rattaché à des stéréotypes. Ça vient aussi et certainement de mes lectures féministes. Peut-être parce que ma culture vient de là, d’Élisabeth Badinter, de Françoise Héritier ou de Caroline Fourest. Dans « Les poissons préfèrent l’eau du bain », je voulais confronter une certaine légèreté aux préjugés des spectateurs grâce aux trois personnages féminins qui font comme si l’avortement était un jeu.
Au moment d’envisager ton casting, tu avais déjà tes comédiennes en tête ?
P. M. : Certaines viennent du théâtre, j’avais déjà travaillé avec elles. Ce sont des personnes qui sont attachées à la langue, capables d’avoir une crudité de langage, de dire : « J’ai la chatte trempée comme une éponge » sans que cela paraisse vulgaire. J’assume un côté théâtral qui colle avec mon univers. En cela, Géraldine Martineau avec qui j’avais déjà travaillé, possède ce jeu à part, qui vient effectivement du théâtre.
On connaît Géraldine Martineau pour ses rôles de filles très jeunes, voire d’enfants, du fait de son physique plutôt juvénile. En as-tu joué en la mettant en scène, avec comme toile de fond le thème de l’avortement ?
P. M : Lorsqu’on a affaire à quelqu’un avec un physique de type adolescent qui tout à coup, développe une vraie réflexion sur la place de la femme, cela permet de créer la bonne distance, de passer d’un simple jugement sur le physique à un regain de sérieux sur un thème très tabou.
Où le film a-t-il été tourné ?
P. M. : Dans ma grange, la même depuis trois films. Ici, elle aide peut-être à ce que le film paraisse plus féministe. Mais je crois surtout que l’idée m’amusait de mettre une caméra au milieu d’un décor qui ressemble à un hammam. Pour moi, le cinéma est un art de la désinhibition. Quant aux extérieurs, ils ont été tournés dans la région d’où je viens, l’Oise.
Le film est le fruit de trois co-productions ?
P. M. : Oui. À la base, il y a le Collectif Babouchka, puis, Les Trois Lignes qui ont remporté la Palme d’Or du court-métrages avec le film « Cross », et enfin, Ferris & Brockman qui viennent de terminer un long-métrage « Robert Mitchum est mort ». On s’est rencontrés à Clermont-Ferrand où j’avais vu certains de leurs courts-métrages. Le Collectif Babouchka, c’est un peu particulier. C’est un groupe d’amis des Arts-Déco de Paris, dont je fais partie, parmi lesquels, se retrouvent des spécialistes de l’animation, des scénographes, des illustrateurs, etc. On fait des films ensemble, cette année, on avait cinq films en compétition à Clermont. Ce qui nous relie, c’est une approche pluridisciplinaire de la création qui vient sans doute de l’esprit des Arts-Déco. Par conséquent, on n’a pas forcément la volonté de faire absolument des films mais plutôt de confronter tous les arts.
Aude et Camille, avant le film de Pierre, vous aviez déjà composé pour le cinéma ou bien étiez-vous plus volontiers un groupe de scène ?
C. H : Je ne sais pas si on peut se qualifier de groupe de scène car, avec notre groupe Lilt, on fait une musique assez calme. Mais là, en effet, c’était notre premier essai au cinéma et on en a été très contente, certainement aussi parce qu’on avait vécu le film précédent de Pierre et qu’on appréciait vraiment son univers. Il y avait une vraie résonnance avec ce qu’on faisait. Néanmoins, on ignorait si on allait être capable de répondre à une commande, car en général, on compose en se laissant une grande part de liberté.
P. M : Il fallait à la fois faire passer une certaine inquiétude, puisqu’on aborde un sujet assez grave, et trouver également des sonorités allant vers l’onirisme, la légèreté.
A. W : Oui, on a essayé de voir comment ça se passe dans notre inconscient pour mêler l’aspect grave et onirique. Et c’est ce qui nous a d’ailleurs plu car dans ce film, qu’il n’y ait pas un traitement habituel du thème de l’avortement. Généralement, on voit des films à engagement social ou moral.
Qu’entends-tu par « un traitement inhabituel du thème de l’avortement » ?
P. M : Il est vrai que dans les années 2000, il y a peut-être eu trois ou quatre longs-métrages qui traitaient de l’avortement. Et effectivement, c’étaient des films sociaux, pathos, etc…Un phénomène qui arrive à une femme sur deux dans notre société et qui est si peu traité au cinéma, c’est tout même incroyable, ça prouve bien que c’est un tabou. J’y vois un réel intérêt à me pencher sur la question.
C. H : Les gens sont très souvent surpris que ce soit un réalisateur qui soit à l’origine de ce film et non pas une réalisatrice. C’est-à-dire qu’il y a un vrai problème sur ce préjugé comme quoi il s’agirait d’une préoccupation des femmes car c’est quelque chose qui arrive dans leur ventre, alors que finalement, la femme n’est pas la seule responsable et elle ne l’est pas non plus directement pour l’avortement. Je ne voudrais pas me lancer sur un terrain glissant, mais si la question de l’avortement concerne une femme sur deux, beaucoup d’hommes sont aussi concernés. Dans « Les poissons préfères l’eau du bain », le fait que ce soit traité comme un film merveilleux adoucit l’austérité du thème.
P. M : En même temps, c’est peut-être un des risques du film, que les gens y voient quelque chose de gratuit, sans engagement sur un sujet aussi grave justement.
Ton prochain film abordera également des sujets féminins et/ ou engagés ?
P.M : Oui et non mais ça sera tout de même un peu plus léger que celui-ci. Dans « Les poissons préfèrent l’eau du bain », il s’agissait d’une recherche sur une narration décousue; le prochain est un peu plus simple au niveau de l’histoire mais il conserve une recherche esthétique.
Aude et Camille, vous faites partie du projet ?
C. H : Non, mais on a suivi toutes les histoires truculentes de Pierre à propos de ce film, mais on n’en fait pas partie.
P. M : Mais on a travaillé de nouveau ensemble après « Les poissons préfèrent l’eau du bain » puisque j’ai réalisé le clip du thème principal du film. L’idée est venue du film « La vie aquatique » de Wes Anderson. Pour coller avec la musique, j’ai fabriqué un poisson de six mètres de long dans ma grange, avec un ami, créateur de décor. Après pas mal de discussions, on a fini par se poser une semaine pour tourner le clip.
Encore un poisson ? Comment expliques-tu cette fascination pour les animaux aquatiques ?
P. M : Je crois avoir eu un choc en découvrant une installation de Sophie Calle (« Les poissons me fascinent », 1986). Elle avait demandé à des aveugles de naissances quelle était pour eux l’image de la beauté. L’un d’eux à répondu : « Les poissons me fascinent. Je suis incapable de dire pourquoi. ça n’a aucun intérêt pour moi. C’est leur évolution dans l’eau qui me plaît, l’idée qu’ils ne sont rattachés à rien.» « L’idée qu’ils ne sont rattachés à rien », m’a profondément bouleversé. J’ai dessiné des poissons pendant six mois alors que j’étais d’habitude plutôt hanté par la représentation des fœtus. Dans le contexte de ce court-métrage, les poissons sont à la fois une métaphore de ces « possibles futurs enfants », et le symbole de l’ambivalence, du flottement de ces trois femmes face à la question de l’avortement. Cette ambiguïté dans le film est une sorte d’invective faite à la mauvaise foi sociale qui impose un confinement à l’avortement. Plus généralement, pour revenir aux poissons, mon idiosyncrasie se situe vraisemblablement dans la façon dont je ne peux distinguer, dans une représentation, ce qui à trait à la sexualité, au corps, et à la nourriture. Mes personnages ont tous une pensée tautologique : ils mangent pour pouvoir faire l’amour, ils font l’amour pour avoir faim.
Aude et Camille, d’être là sur un festival rempli de compositeurs de musiques de films, est-ce que ça vous motive pour justement continuer dans cette voie-là ?
C. H : Le fait que ça ait été un exercice concluant donne envie de recommencer. Par ailleurs, ça a été un travail agréable, intéressant, donc oui, je crois qu’on rempilerait volontiers.
A. W : A Aubagne, on n’a pas du tout la même approche que la plupart des compositeurs présents. On a découvert des gens qui sont formés à la musique de films, des spécialisations. Nous, on s’est plus « auto-formées ».
C. H : Si bien qu’on défend plus volontiers le fait d’être passée de la musique de scène à la musique de films. Nous sommes dans une période transitive en fait. Même si on a travaillé exactement de la même façon pour le film de Pierre que pour un album, fort heureusement, les gens ne sont pas rebutés par le fait que nous n’ayons pas suivi dix ans d’études de composition pour les films.
Vous avez rencontré des gens ici qui souhaitent désormais travailler avec vous ?
C. H : Non pas vraiment. On nous a proposé des concerts, mais pas de nouveaux projets de cinéma !
Pierre, avec un court métrage aussi atypique formellement parlant que le tien, comment envisages-tu l’éventuel passage du court au long ?
P. M : D’une part, je pense que la frontière court et long est un peu obsolète, de surcroît aujourd’hui. Ceci étant dit, pour ma part, j’utilise le court métrage et les moyens que j’ai pour faire une expérimentation, aussi bien esthétique qu’au niveau de la narration. Évidemment, les contraintes commerciales du long font qu’on est plus amené à avoir une dramaturgie classique. Dans mon prochain film justement, je suis plus traditionnel car je pense qu’il y a un réel intérêt à se confronter aux formes classiques et voir comment on peut également s’éclater en respectant tel ou tel schéma. Néanmoins, je reste persuadé que le rôle du cinéma, qu’il soit court ou long, est d’offrir au réalisateur la possibilité d’adopter une démarche moraliste, comme chez Michael Haneke ou Lars Von Trier dont j’apprécie particulièrement le travail, qu’on soit atypique dans la forme ou pas.
Synopsis : La Tunisie, peu après la révolution. Un moment d’arrêt, improbable, passé en plans séquences dans un hôtel de luxe. Ici les professionnels du tourisme tentent de continuer, comme si de rien n’était, mais les secousses de la révolution sont encore sensibles. Comment continuer?