Tous les articles par Katia Bayer

Benoît Felici : « Un être humain, c’est extrêmement compliqué, mais si on le prend avec sincérité, avec simplicité, ça le rend encore plus beau »

Parti d’Angers il y a quelques jours et arrivé à Clermont-Ferrand il y a peu, « Unfinished Italy » transporte un étonnant contenu : ruines, restes, jeunes vestiges, manque, vide, passé récent, peur(s). Le temps d’un film de fin d’études, son auteur, Benoît Felici, traverse la Sicile sauvage, s’arrête dans les cafés comme sur les ponts, dialogue avec le regard, enregistre les lieux sans histoires et les histoires sans lieux. Sa carte postale de l’Italie ne s’envoie pas, elle se voit, et puisque c’est d’authenticité dont il s’agit, notre entretien ne peut prendre ses aises que dans un lieu typique, au nom imprononçable et tendancieux.

benoit-felici

Qu’est-ce qui t’intéresse dans l’idée de filmer des gens, la vie ?

J’adore observer les gens, j’ai toujours fait ça. Depuis que je suis tout petit, j’aime bien regarder et imiter les gens. Ce qui m’a amené vers le documentaire, c’est le côté surréel de la réalité, le côté fascinant de certains personnages qui sont encore plus beaux et forts par le fait qu’ils sont naturels. Je trouve qu’il y a une véritable richesse chez certaines personnes que j’aime puiser, chercher, modeler, ça ne veut pas dire pour autant que je joue avec eux, que je les dirige. C’est une espèce de jeu qui a d’ailleurs beaucoup à voir avec la séduction, l’approche. En réalité, ce qui me plaît beaucoup dans le documentaire, c’est que le réalisateur se met beaucoup en scène. Moi-même, je joue un personnage quand je mets en scène un moment à filmer.

Tu n’es pas obligé de le faire.

Non, mais tu dois créer une tension, savoir approcher les gens pour obtenir une intensité dans le regard, un rythme, une cadence selon ce que tu recherches pour ton film. Le film, je l’ai écrit mais en fait,  il y a eu beaucoup de discussions, d’improvisation. Tu dois pouvoir te poser, voir une situation, improviser, parler deux secondes avec le cameraman pour savoir où on va placer la personne, faire en sorte de la mettre à l’aise et de la rendre la plus vraie possible pour que ce soit réel, sincère, émouvant, et dans certains cas, surréel.

Tu as sillonné la Sicile pendant plusieurs mois avec ton chef op, Bastian Esser. Comment lui as-tu expliqué ce que tu recherchais ?

Au début, c’était assez compliqué. Il ne comprenait pas forcément ce que je voulais, ce qui était absolument normal, moi-même, j’étais en recherche. On a des inspirations, des influences, des origines différentes. Il a dû s’adapter à moi parce qu’il aurait fait un film complètement social, il ne serait resté qu’à un seul endroit si je n’avais pas insisté. Au final, il a compris l’idée que je voulais donner au film. On a passé beaucoup de temps ensemble, il me connait. Un monteur danois, Niels Pagh Andersen, a dit qu’un bon monteur, c’était quelqu’un qui connaissait parfaitement son réalisateur, qui comprenait aisément ce qui se passait dans sa tête. Je pense que pour la caméra, c’est pareil.

Tu es français, d’origine italienne. Est-ce que tu as redoublé de vigilance pour éviter tout cliché sur l’Italie ?

Au bout de trois ans d’études en Italie, j’ai eu à plusieurs reprises l’occasion de travailler avec des italiens. Ce qui m’a toujours marqué, c’est leur ouverture d’esprit, leur gentillesse, leur sympathie. Personnellement, à part mes origines, je pense que c’était un défi de ne pas me planter. Il ne fallait pas que je fasse une interprétation de l’Italie qui n’était pas juste et tolérante : je ne voulais pas d’une Italie critique ou caricaturale. On peut faire une carte postale de l’Italie d’aujourd’hui, mais on ne peut pas en faire une sur les gens.

La plus grande partie de mon travail a été d’observer la Sicile, d’essayer de comprendre les Siciliens, le fonctionnement de la mentalité, d’absorber leur rythme, leur vision des choses. Moi, je ne suis pas vraiment italien, je suis français, mais ma famille me pousse à aimer ce pays. Quand mon père m’achète une voiture, c’est une Fiat, pas une Renaud !

Pourquoi as-tu filmé les choses figées, les lieux un peu morts là-bas et pas ailleurs ?

Je pense que le phénomène est italien parce qu’il y a un système économique qui est tourné autour du ciment, du béton. En revanche, que ce soit l’Italie, ce n’est pas super important. Pourquoi construit-on une piscine olympique dans un village de 10.000 habitants ? Pourquoi bâtit-on un stade de polo – un jeu anglais – dans un village italien ? C’est la question de la surmodernité, d’un pays extrêmement pauvre qui découvre le progrès, qui connait un boom économique dans les années 60, qui se met à construire plus qu’il ne faut, comme une espèce de boulimie. Cette question et ces ruines-là ne sont pas spécifiques à l’Italie, mais à notre époque.

« L’amour existe » de Maurice Pialat m’a beaucoup inspiré pendant le tournage. Le film traite de la construction des tours de banlieue dans les années 60, la voix-off parle à un moment de « ces lieux dont le futur a déjà un passé et dont le présent a un éternel goût d’attente ». Quand j’ai entendu ça, je me suis dit que c’était exactement ce qu’étaient ces lieux.

Tu parles de lieux, mais tu parles beaucoup de toi, de tes manques en off. Pourquoi était-ce important pour toi de t’impliquer par la voix ?

La voix-off a plusieurs raisons d’être. A Zelig (école de documentaire à Bolzano), on nous force à nous impliquer personnellement, à sortir du reportage, de l’investigation. Au moment d’approcher les protagonistes, on est dans le dialogue, on donne du sien, on s’ouvre, on s’implique au maximum, on fait sentir à l’autre qu’on est comme lui. C’est une approche beaucoup plus psychologique, sincère, humaine. Et beaucoup plus simple. A l’école, j’ai entendu que les choses les plus difficiles à faire étaient les plus simples. Un être humain, c’est extrêmement compliqué, mais si on le prend avec sincérité, avec simplicité, ça le rend encore plus beau.

« Unfinished Italy » est ton film de fin d’études. Qu’est-ce que tu as le sentiment d’avoir appris à l’école ?

Zelig est une école hyper familiale. On est tous très proches, les professeurs nous connaissent, nous soutiennent. J’ai appris des choses sur moi, mon oeil s’est formé à certains films, mon point de vue sur le documentaire a changé, et les grandes questions que je me posais sont moins floues qu’avant. Ces questions touchent aux thèmes que j’ai pu travailler au sein de l’école, ceux que j’ai choisis pour faire mes films, et qui étaient en rapport avec le temps, le manque, l’abandon, le vide, les ruines et les restes.

Il y a un moment un peu étrange dans ce film, celui où le berger, seul à ses heures et à ses moutons perdus, vous demande si vous êtes des astronautes qui vont sur la lune. A partir du moment où on est pris à partie, où le sujet a suffisamment fait  abstraction de la caméra au point de poser des questions directes, est-ce qu’on se sent désemparé ou on se dit que c’est super pour le film ?

Dans ce genre de moment, je ne réponds pas, mais je suis un peu en transe. Cette phrase n’était pas prévue, il l’a sortie. Tout se passe dans le regard que moi, je lui tiens. C’est ça qui est génial : tu composes avec le protagoniste, tu te concentres sur ce qu’il te dit, tu soutiens son regard. Ce n’est que dans les yeux que ça se passe.

italy1

Il n’y a pas un risque de manipulation en jouant ainsi sur le regard ?

Non, c’est là la différence entre le reportage et le documentaire. Il y a un montage, des heures de rushes. Je ne suis pas en train de chercher une info, je suis en train de faire un film. Ce que me raconte le berger, c’est une légende sauf que je le place dans un certain cadre et que je dialogue avec lui. Je ne pense pas que ce soit malhonnête. J’essaye de capter un peu l’aspect poétique d’un lieu, d’une situation, d’une personne. Dans mon école, la plupart des étudiants s’intéressaient au social, aux thèmes sociaux, actuels. « Unfinished Italy » est différent de leurs films.

C’est important d’avoir son style, de se singulariser dans le domaine du documentaire, au-delà du thème, du sujet ?

Plus il y a un auteur derrière un documentaire qui impose son style et son écriture avec son équipe, plus c’est du cinéma.

Dans ce cas, à quel moment sur ce film, as-tu commencé à te dire que tu faisais du cinéma ? Est-ce que ça a eu lieu au fil du voyage, des rencontres, des images ou après, en salle de montage ?

Là où tu te dis que tu fais vraiment du cinéma, c’est quand tu t’es imaginé des plans, des scènes et qu’elles se réalisent ou, mieux encore, qu’elles se réalisent toutes seules. L’un de mes professeurs a coutume de dire que les choses sont déjà là, et c’est vrai. Je ne sais pas pourquoi le berger a dit ça à ce moment-là, mais c’est formidable qu’il l’ait fait car finalement, c’est devenu extrêmement positif pour le film. Ce qui est fascinant dans le documentaire, c’est qu’un énorme problème peut devenir une chance incroyable. C’est pour ça d’ailleurs que je pense que le documentaire est vraiment du cinéma :  il y a une vraie création dans l’équipe, dans l’écriture et dans les événements.

Propos recueillis par Katia Bayer

Article associé : la critique du film

Consulter la fiche technique du film

« Unfinished Italy » est programmé au Festival de Clermont-Ferrand dans le cadre du programme I13

C comme Chair disparue

Fiche technique


Synopsis : Alors qu’elle s’apprête à profiter de sa retraite en compagnie de Paul, son mari, dans leur petit pavillon de banlieue, Louise assiste plusieurs fois à un phénomène surnaturel : la disparition fugace du corps de Paul. Terrifiée, Louise perd progressivement pied.

Genre : Fiction

Durée : 18′14”

Année : 2010

Pays : France

Réalisation: Pascal Mieszala

Scénario : Pascal Mieszala

Image : Éric Weber

Montage : Emmanuel Jambu

Son : Mathieu Villien

Musique originale : Richard Escola

Interprétation : Denise Aron-Schröpfer, Jean-Yves Gaultier, Jean-Stéphan Richardeau

Production : Les Enragés

Article associé : la critique du film

Chair disparue de Pascal Mieszala

Louise, Paul, Louise et Paul, Louise sans Paul… Dans « Chair disparue », Pascal Mieszala poursuit son exploration chez les voyants. Déjà avec L’enfant borne, il abordait le thème d’un personnage qui voit ce que les autres ignorent ou dissimulent. Dans « Chair disparue », le réalisateur s’intéresse à un moment de bascule dans la vie d’un couple de personnes âgées.

Dans ce quasi huis clos, c’est Louise qui va perdre pied, c’est elle qui va, à l’approche d’un événement tragique, être extra-lucide. Elle sent que la disparition de Paul est proche et cette sensation se transforme en quelque chose d’inexplicable, d’intangible.

Le film n’entre pas dès le départ dans le surnaturel. Le réalisateur nous conduit délicatement vers un décalage où Louise passe du monde réel à un monde de solitude. Dans sa précédente réalisation, Pascal Mieszala avait pris le parti de filmer des personnages pétris d’étrangeté sans pour autant avoir recours aux effets de post production chers au genre fantastique. En opposition, dans « Chair disparue », il exprime l’extra-lucidité de Louise par un rendu en transparence de Paul. Certains trouveront le procédé un peu simpliste ou presque inutile. S’il est vrai que l’on peut regretter la narration plus en suspension de L’enfant borne (où le surnaturel était seulement suggéré) « Chair disparue » révèle un talent habile du réalisateur pour filmer les corps.

Par une mise en scène extrêmement proche des personnages, on assiste à la fuite du charnel entre Paul et Louise. Le couple s’efface au propre comme au figuré. Une seule séquence, sans doute la plus émouvante, redonne à ce couple une existence charnelle. Ils sont proches et se touchent, les peaux se retrouvant une dernière fois.

Dans ce film, le travail de Mieszala est minutieux. Il aborde avec délicatesse le thème de la disparition et réussit à exprimer la peine de ceux qui restent. L’emploi d’artifices cinématographiques utilisés (comme la transparence du corps de Paul) pour rendre visible au spectateur la perte du rapport au réel de Louise cloisonnent cette œuvre dans le genre fantastique, mais il s’agit avant et surtout d’un regard poétique sur le deuil.

Fanny Barrot

Consultez la fiche technique du film

 

Coloscopia de Benoît Forgeard

« Coloscopia » est le récit d’une success story toute particulière. Celle de Jackie La Rose, reine des playmates, devenue Coloscopia suite à une colostomie. Idole d’une nouvelle génération, elle devient la figure d’un nouvel eldorado de l’érotisme, le trash. Benoît Forgeard, son auteur, surprend, amuse et touche avec son dernier opus présenté en compétition à Clermont-Ferrand.

Ce matin, l’hiver est tombé sur le monde du charme et de l’indécence. C’est par ces mots endeuillés que commence Coloscopia petit bijou décalé et jouissif du toujours surprenant Benoît Forgeard.

Jackie La Rose, playmate star du magazine de charme Beauty, vient de subir une colostomie suite à un cancer fulgurant du gros colon et son docteur témoigne de l’opération sur le plateau télé d’une version illuminée de Thé ou café. Évoquer la pose d’un anus artificiel lors d’une émission matinale semble tout à fait naturel tout comme la retentissement du gong qui annonce , à la manière d’un film de Powell et Pressburger, le début de notre histoire épique.

Jackie (jouée par la sculpturale Caroline Deruas) décide d’assumer pleinement sa « poche » et de continuer à faire des photos de charme, affublée de son accessoire. Désormais rebaptisée « Coloscopia », elle devient rapidement le fantasme d’une nouvelle génération de lecteurs à la recherche d’un tout autre genre d’érotisme. Colo, pour les intimes, est bientôt courtisée pour apparaître dans des films hardcore au grand désarroi de sa mère (incarnée par la trop rare Christine Boisson), elle-même à la tête du magazine Beauty et garante de la tradition maison.

La force du film de Benoît Forgeard est d’insuffler de la mélancolie et de la douceur à un sujet pour le moins atypique. Le destin de Jackie, devenue Coloscopia, récit d’une success story à l’envers, est étrangement touchant. Au fond, Jackie tente non seulement de vaincre le handicap et les préjugés mais aussi tout simplement de rester désirable. Forgeard décrit aussi la fin d’un monde, celui d’un certain érotisme traditionnel et vieillissant face au besoin de plus en plus pressant du frontal et du cru vers le trash ultime.

L’humour n’est pourtant pas absent de ce court. On rit beaucoup notamment grâce à la présence toujours aussi jubilatoire de Darius (qui joue le docteur), comédien fétiche de Forgeard qui, par sa diction unique et son rythme, apporte beaucoup au film. La mise en scène semble autant se nourrir de films érotiques des seventies que de soap opera actuels dans une décomplexion bienvenue. En treize minutes seulement, Forgeard donne corps à des personnages hors normes sans tomber dans la caricature et étonne par la maitrise de son récit fantasmagorique.

Amaury Augé

Consulter la fiche technique du film

Article associé : l’interview de Benoît Forgeard

Y comme Yuri Lennon’s Landing on Alpha 46

Fiche technique

Synopsis : Juste après son atterrissage sur Alpha 46, une lune de Jupiter, le cosmonaute Yuri Lennon se retrouvera confronté à un paradoxe extraordinaire.

Genre : Fiction

Pays : Suisse, Allemagne

Durée : 14’30

Année : 2010

Réalisation : Anthony Vouardoux

Scénario : Daniel Young , Anthony Vouardoux

Image : Pascal Walder

Musique originale : Beat Soler

Interprétation : Marc Hosemann, Milton Welsh

Son : Ramon Orza

Production : Port au Prince Film

Article associé : la critique du film

Yuri Lennon’s Landing on Alpha 46 d’Anthony Vouardoux

Le dernier court métrage du Suisse Anthony Vouardoux, sorti de l’Ecole cantonale d’art de Lausanne (ECAL) et vivant à Berlin, se base sur le genre de la science-fiction mais est plutôt un essai ironique sur l’incommunicabilité et la soi-disant suprématie de l’Homme par rapport à son environnement.

Un astronaute symboliquement nommé Yuri Lennon part en mission vers Alpha 46, satellite fictif de Jupiter. Lorsqu’une intervention de Dan, son interlocuteur d’Houston et télé-pilote échoue, Yuri prend les choses « en main » et provoque l’atterrissage de la fusée lui-même. En arrivant à destination, il remplit sa mission en récupérant une perle rare qui se met à fusionner avec la Terre et se détache du firmament nébuleux. Il ne reste plus qu’à Yuri de choisir entre deux solutions : abandonner la Terre-perle sur Alpha 46 ou la ramener à elle-même.

Hormis le travail esthétique fort réussi et digne du genre duquel il s’inspire, Yuri Lennon aborde, en coulisse de son récit de science-fiction, l’échec de la communication, tant littéral que figuratif. La voix de Dan se transmet en bribes et en craquements à travers des années lumières, et ne montre aucune sympathie envers le protagoniste, lui refusant un dernier contrôle technique et dénigrant sa solitude et ses frustrations sexuelles. Yuri, de son côté, se moque d’Houston en lui faisant un doigt d’honneur et en chantonnant « I’m a poor lonesome Cowboy and I’m far away from home » en guise de provocation. Le travail de la caméra confirme ce décalage entre le personnage et le monde extérieur : dans le vaisseau, l’unique plan est celui du visage rapproché de Yuri qui laisse percevoir l’hors champs dans le reflet de son casque d’astronaute, montrant progressivement le décollage, le voyage dans l’espace et le gigantesque Jupiter.

La deuxième thématique abordée par Vouardoux est plus audacieuse, c’est celle de l’interférence néfaste de l’Homme par rapport au monde et en l’occurrence à l’Univers. Cette fiction intelligente revisite avec ironie mordante un genre usé qui trouve ici une expression inédite. « Yuri Lennon’s Landing on Alpha 46 » ou l’Apocalypse selon St-Anthony.

Adi Chesson

Consultez la fiche technique du film

Terrains Glissants de François Vogel

Le 33ème Festival de Clermont-Ferrand ouvre cette année une belle fenêtre sur le travail d’un artiste intuitif, François Vogel, avec deux films en projection : « Rébus » dans la programmation rétrospective des 10 ans du Labo, et « Terrains Glissants » en compétition nationale.

Avec « Terrains Glissants », le regard s’ouvre sur une plage qui semble avoir fondu au soleil, point d’entrée d’un voyage initiatique à travers le monde. Des rues de New York à celles de Buenos Aires en passant par les campagnes de l’Anjou, des décors naturels en distorsion permanente glissent et se déforment autour de François Vogel et de son appareil photo jusqu’à en donner le vertige. Les jours et les nuits filent au rythme effréné des heures, la planète tourne, et l’auteur, lui, avance dans l’image, point fixe de l’univers en mouvement, inversant les principes de la gravité. Les précisions métronomiques d’une voix-off qui marque l’espace et le temps contrastent avec des mouvements d’images à 360° où la perception visuelle est bouleversée.

Dans l’univers de François Vogel, tout évolue, se fluidifie et se transforme sans cesse à travers des miroirs déformants pour donner sens à une quête métaphysique d’une très grande esthétique.

Véritable performance visuelle et poétique d’un avant-gardisme insolent, ce court métrage expérimental réalisé en stop motion apporte un regard nouveau dans la technique de composition d’image, peut-être même une révolution du genre.

Xavier Gourdet

Consulter la fiche technique du film

Article associé : l’interview de François Vogel

T comme Terrains Glissants

Fiche technique

Synopsis : Images déformées, temps élastique : TERRAINS GLISSANTS nous offre une vision poétique et singulière de l’Homme sur la planète. Entre carnet de voyage et performance, le film retrace les errements d’un individu guidé par d’étranges voix intérieures.

Genre : Animation expérimentale

Pays : France

Durée : 11’

Année : 2010

Pays : France

Réalisation : François Vogel

Scénario, musique originale, interprétation, animation, effets spéciaux : François Vogel

Son : Mister Yellow, Alain Cure, Bruno Porret

Musique : John Cage

Montage : François Colou

Voix : François Vogel, Hélène Vogel, Stéphanie Daniel

Production : Drosofilms

Article associé : la critique du film

Aki Kaurismäki : « Mes personnages ne sont pas perdus, c’est le reste du monde qui est perdu »

À l’instar de Luc Moullet et Marcel Hanoun, Aki Kaurismäki était l’un des invités du Festival “Est-ce ainsi que les gens vivent…”, consacré à la « Comédie du travail ». Ce festival donnait l’occasion de revenir sur sa “trilogie ouvrière”, initiée par « Shadows in Paradise » (1986), poursuivie avec « La Fille aux allumettes » (1989) et conclue avec « Au loin s’en vont les nuages » (1996). Accompagné de Peter von Bagh, il a également rencontré le public dyonisien lors d’une master-class.

D’origine finlandaise, le cinéaste est un cinéphile passionné et un ardent observateur de la vie sociale en Europe. En 1983, il réalise une remarquable adaptation de « Crime et châtiment » de Dostoïevski, mais ce n’est qu’en 1989 qu’il accède à une reconnaissance internationale avec « Leningrad cowboys go America », en compagnie des membres d’un groupe de rock totalement farfelu. C’est alors qu’il réalise cinq courts-métrages musicaux. Puis, il écrit et réalise « Au loin s’en vont les nuages » (1996), « Juha » (1999) et « L’Homme sans passé » (2002), quelques-uns de ces plus grands films. Notre entretien, à l’image d’Aki Kaurismäki, fonctionne au rythme de l’humeur, des impulsions passagères et des formules bien trouvées. Son verre à la main, il revient sur l’Europe des années 1970, période où se jouent les bases de son travail de cinéaste, à la frontière entre mythologie et modernité.

akkaurismaki

Souvent, les lieux où vos personnages prennent des décisions importantes ne sont pas habituels. Il s’agit de voitures, de ports, de cafés… Pourquoi vos personnages passent-ils par exemple tant de temps dans les cafés ?

J’adore rester seul dans un bar. Si mes personnages passent du temps dans les cafés, c’est sans doute parce qu’ils ont soif. Plus sérieusement, ils sont là parce qu’il y a d’autres personnes autour d’eux, parce qu’ils se socialisent. S’ils restaient chez eux, c’est sûr, ça coûterait moins cher au producteur ! Et je pourrais rester chez moi pour tourner dans ce cas. Mais je ne veux pas être ivre chez moi, donc j’emmène boire mes amis dans un bar. Je fais la même chose avec les acteurs. De toute façon, ils sont si pauvres économiquement qu’ils n’ont pas de foyer. À Helsinki, nous vivions plus ou moins dans la rue. Donc le seul endroit où tourner était le bar, endroit où nous passions la majorité de notre temps. Depuis que la loi sur les « bars non-fumeurs » est passée, nous n’y allons plus, alors les histoires sont retournées dans la rue. Je pense que le bar demeure le lieu de vie du peuple, à Paris aussi. Concernant les emplacement que j’utilise dans mes films, j’ai tourné dernièrement dans le port du Havre, en France. Je crois que j’apprécie filmer des lieux où le vent souffle !

Vos premiers films s’inscrivent entre les deux cultures dominantes de l’époque, la culture américaine, avec la série des « Leningrad Cowboys » par exemple, et la culture soviétique comme lorsqu’à la fin de « Shadows in Paradise », le couple fuit vers l’Estonie, dans un bateau marqué du symbole communiste.

En effet, il y a ce symbole sur la cheminée du bateau. Mais, lorsque le film est sorti, tout le monde se moquait des symboles ! Pour moi, c’est une plaisanterie qui consistait à montrer que l’Estonie était un « paradis » pour mes personnages. Et il faut avoir vécu en Finlande dans les années 1970/1980 pour comprendre que partir en Estonie signifiait « faire un choix ». Pour des raisons logistiques, je ne pouvais permettre à mes personnages de les envoyer en Floride ! D’un autre côté, pensez-vous qu’ils puissent être heureux en Floride ? Par ailleurs, en Finlande, on a eu les juke-box, les flippers, l’arrivé du rock-and-roll et les gadgets du « monde merveilleux ». La culture finlandaise a été la plus influencée par celle des États-Unis depuis 1950. Baudelaire, j’ai dû le trouver moi-même. Personne n’en parlait.

Vous éprouvez une sorte de fascination pour les États-Unis et Hollywood, mais ce sentiment est lié à de la haine. Qu’en est-il ?

J’admire un certain cinéma hollywoodien, seulement jusqu’à 1962. Après quoi, il n’y pas de fascination à avoir. Je pense que c’est de la merde.

leningrad

Vous avez tourné vos premiers courts-métrages avec le groupe de rock, les « Leningrad Cowboys ». Ces courts-métrages dessinent un univers noir, inscrit dans la mafia finlandaise, mais posent également un regard ironique sur la hiérarchie entre les « têtes dures » et les « loosers ».

Vous savez, les « courts-métrages » dont vous parlez, ce sont des clips de rock pour le groupe. Ils ont été tournés en 35mm mais ils étaient faits pour la publicité. On les appelle des « courts-métrages » mais ils n’en sont pas. C’est l’époque où MTV est arrivé. Je pense qu’il s’agissait des premiers clips finlandais. A l’époque, ces gars étaient révolutionnaires. Ils étaient sauvages, ils étaient grands. Les groupes de rock avaient juste trois minutes pour montrer toute leur créativité. Il m’arrivait d’être jaloux et de me dire : « Bon sang, qu’est-ce qu’ils sont libres ! ».

Aujourd’hui, les images montrent des gens qui s’entassent en remuant et en bougeant leur corps. Rien n’est transmis au public. Comment se fait-il qu’un travail artistique comme celui-ci soit aussi florissant pendant un an et puis meure d’un coup ? Comment a-t-on pu dépenser tant d’argent pour cela ? La mort soudaine de cette dynamique a été à la hauteur des investissements.

Récemment, vous avez été amené à refaire un film court intitulé « Bico » (2004). Pourquoi êtes-vous revenu à une forme courte ? Et, parallèlement, au documentaire ?

Je l’ai fait pour des raisons privées. Quelqu’un m’a demandé de faire un film sur le village où j’habite, au Portugal. C’était une manière de documenter ce lieu, alors, oui, c’est un documentaire. Il n’est pas très bon. Je dirais qu’il s’agit d’un fragment, quoi que cela signifie. Mais, en général, je me sens à l’aise avec tout ce qui est inférieur à 90 minutes. Au-delà, je me sens dans l’insécurité. La longueur d’un film est liée à la présence des dialogues. S’il y en a beaucoup, les films sont plus longs. Tout ce qui excède 100 minutes est trop long, sauf « Ben-Hur (1959) ». Si les films sont silencieux, ils sont plus courts.

Les personnages de vos films semblent perdus, ils ont l’air de se demander en permanence : « dois-je rester ou dois-je partir ? ». Serait-ce un symptôme du présent ?

Mes personnages ne sont pas perdus, c’est le reste du monde qui est perdu. Fondamentalement, ils ne savent pas où aller. C’est ça, le problème. Ils veulent aller quelque part et ils veulent rester, ils ne savent pas quoi faire. Ils ne sont pas à l’aise où qu’ils soient. Ce sont des personnages plutôt autobiographiques.

La question est compliquée parce que mes personnages ont un certain inconfort qui est de facto dans mon sang, mais je ne fait pas des autoportraits pour autant. J’essaie de décrire les gens mais mon propre inconfort se retrouve dans les personnages. Parce que j’ai toujours aimé partir mais, je ne sais pas où, sauf dans ma tombe. Il n’y a qu’au Japon où je me sens à peu près bien.

Tout comme Alain Resnais, les acteurs que vous choisissez ne changent que très rarement. Kati Outinen a, par exemple, participé en tant qu’actrice à huit de vos films. Pourquoi cette permanence ?

Si les acteurs sont bons, pourquoi en changer ? John Ford aimait travailler avec John Wayne pour cette raison. Il en est de même avec Marcel Carné et Jean Gabin. Lorsque ce sont des acteurs géniaux, un cinéaste ne peut pas s’empêcher d’écrire les rôles pour eux. C’est comme une famille. Mais ça n’est pas une marque de paresse !

vie

« La Vie de bohème »

Dans vos films, vous n’hésitez pas à faire des citations, à récupérer des formules ou à utiliser des archétypes. Pourquoi aimez-vous tant les citations ?

J’aime les citations parce que je n’ai pas d’idées par moi-même. J’aime Godard lorsqu’il dit : « Lorsque tu voles, vole honnêtement. » Dans « La Vie de bohème » (1992), lorsque le peintre vend toutes ses toiles pour payer les frais d’hôpital à Mimi, Jean-Pierre Léaud — qui joue le bourgeois — dit : « Qui a peint cela ? Becker ? », et le peintre acquiesce. Jusqu’à maintenant, je n’ai trouvé personne qui savait qu’il s’agissait de la dernière image de Montparnasse 19 de Jacques Becker. Donc quand on cite, il faut le faire avec respect. J’ai volé l’image, mais j’ai mentionné à l’intérieur de l’image qu’elle provient de Becker. À ma grande déception, personne ne l’a remarqué. Plus globalement, le cinéma est intéressant parce qu’il est fondé sur une certaine illusion, sur des archétypes, qui sont sans cesse repris, volés. Comme en littérature, tout est fondé sur quelques histoires. Les gens vont au cinéma pour voir ces histoires et ils veulent en connaître les variations.

Vous êtes actuellement l’invité du Festival « La Comédie du travail ». De vos premiers courts-métrages aux « Lumières du Faubourg » (2008), vos films sont centrés autour du travail et des conséquences liées à celui-ci. Pensez-vous que vos films soient « politiques » ?

Vous pouvez faire des films politiques mais c’est ennuyeux. L’idée même de faire un film politique est vouée à l’échec. Les gens vont voir des films pour sortir de la réalité. Il ne veulent pas la rencontrer au cinéma. Dans mes films, il n’y a pas de messages politiques, tout du moins, j’espère qu’il n’y en a pas. Sauf peut-être celui-ci : « Tuez le Capital ! ». C’est sans espoir.

Propos recueillis par Mathieu Lericq

Benoît Forgeard : « J’ai toujours une curiosité pour des choses qui viendraient de mon inconscient, que je vais mettre en avant, quelques fois avec inquiétude »

Chaque nouveau court métrage de Benoit Forgeard donne lieu à de légers voire violents spasmes abdominaux selon les spectateurs. Impossible semble-t-il de rester de marbre face aux propositions de l’animal et à son humour catégorie indéfinissable. Après les brillants « La course nue » (2005) et « Belle île en mer » (2007), le revoilà en forme olympique avec « Respect » et « Coloscopia », le dernier étant en compétition à Clermont. Le film relate l’histoire de Jackie, playmate à succès contrainte de subir une colostomie, opération qui fera d’elle Coloscopia, la playmate à la poche, fantasme ultime de nouveaux lecteurs. L’occasion de rencontrer l’auteur chez lui entre masque d’escrime, peinture de berger allemand et navette spatiale.

benoit-forgeard

© AA

Même venant de votre part, on ne s’attendait pas à un tel sujet. D’où vient l’idée de départ ?

Je n’en sais rien moi même. J’essaye d’avoir une démarche qui me vient de la période où j’étais étudiant aux Beaux Arts. Plutôt que de traiter un thème, j’ai toujours une curiosité pour des choses qui viendraient de mon inconscient et que je vais mettre en avant, quelques fois avec inquiétude, comme c’est le cas avec cette histoire de colostomie. Il m’arrive quasi quotidiennement de faire un exercice de pitching où j’écris des pitchs de trois phrases en essayant de ne pas me censurer, en écrivant n’importe quoi, des choses qui m’amusent quand même. L’histoire de Coloscopia était l’un de ces pitchs. Ca me paraissait complètement abominable. Quand je suis retombé sur ce pitch de playmate à poche ça m’a fait rire mais ça m’a surtout touché. Esthétiquement aussi, le sujet était assez riche dans sa simplicité, un trou dans un corps. Le film parle aussi de désir et de morale.

Dans le film, les lecteurs du magazine développent un fétiche pour la colostomie. Aviez-vous envisagé d’autres fétichismes ?

A priori, je ne sais pas s’il existe. Je ne sais pas si les gens sont fans de … ce genre de choses. On ne peut pas dire que j’ai trouvé beaucoup de choses sur internet. C’est un fétichisme un peu extraordinaire et extravagant et qui contient une part grotesque – dans ce que ça a de tragique d’avoir une colostomie. Cette poche est la dimension grotesque et la farce de la colostomie, et ça m’intéressait.

Quand vous avez présenté l’idée à votre producteur (Emmanuel Chaumet, Ecce films), s’est-il montré réticent ?

A ma grande surprise non. Je me disais que je faisais un truc où je n’en faisais qu’à ma tête et que je serais surpris d’être suivi. D’ailleurs tout au long de la production ça a été simple. C’est aussi pour cette raison que je pense que cette histoire de colostomie doit raconter quelque chose aux gens, les toucher inconsciemment. Je n’ai d’ailleurs toujours pas mis le doigt dessus, c’est le cas de le dire.

L’esthétique du film fait autant appel aux films érotiques des années 70 qu’aux plus récentes télénovelas. Comment sont nés les choix visuels ?

Mon idée de départ était de raconter – à travers l’itinéraire de Jackie qui vient d’une revue érotique classe – l’évolution de l’érotisme aujourd’hui. Quand on regarde les revues ou les films pornographiques, l’érotisme a changé de nature. C’est un peu l’équivalent en sport de ce que pouvait être la gymnastique dans les années 70. Aujourd’hui c’est quelque chose qui est plus dans la force, dans la crudité. Je voulais deux univers dans le film, un univers assez passéiste très doux qui rappelle le magazine Playboy et l’univers de Coco Lapin (nom du magazine dans le film) avec une lumière plus forte, plus blanche et une ambiance plus vidéo, plus rude.

coloscopia

En cela le personnage de la mère, joué par Christine Boisson, est intéressant. Il est empreint d’une certaine nostalgie liée à son passé. Sa fille lui échappe et ce qu’elle a connu, cette dynastie de playmates, n’est plus.

La mère de Jackie est en effet dépassée par l’érotisme de sa fille et ce nouveau concept qui consiste à prendre des libertés assez folles avec la morale et avec son propre corps. Elle devient tout à coup la voix de la raison alors qu’elle-même était censée incarner la débauche. L’anecdote veut que Christine Boisson a elle-même un passé de playmate.

Votre rythme de travail est assez élevé, est ce un avantage ou un handicap notamment par rapport à la vie des films ?

« Respect » et « Coloscopia » inaugurent un nouveau cycle. « La course nue », « Belle île en mer » et « L’antivirus » étaient des œuvres rassemblées (récemment présentées ensemble dans un même film à sketches), « Respect » et « Coloscopia », je les ai faites dans une volonté d’aller vite par rapport à des choses inconscientes. Comme je suis dans l’optique du long métrage, je ne souhaite pas passer trop de temps sur les courts. Par expérience, les choses peuvent gagner à être cuisinées très rapidement, jusqu’à un certain point bien sûr.

Pouvez-vous nous parler de l’incroyable Darius, votre acteur fétiche, qu’on ne voit d’ailleurs que chez vous ?

Darius, j’ai toujours un rôle pour lui. Il sera dans le long aussi. Au moment de l’écriture, c’est un des seuls pour qui j’écris spécifiquement. J’entends sa voix et ça apporte quelque chose. C’est quelqu’un qui a une forme de grâce et un rythme qui convient à mon univers.

Propos recueillis par Amaury Augé

Consulter la fiche technique du film

Lire prochainement la critique du film

« Coloscopia » est projeté au festival de Clermont-Ferrand dans le cadre du programme F6

C comme Coloscopia

Fiche technique

Synopsis : La sublime Jackie Larose, reine du charme et de l’érotisme, subit une opération de l’intestin qui la laisse avec un anus artificiel. Un trou muni d’une poche. A son retour, plutôt que de faire une croix sur son métier, elle affirme son intention de poser nue pour le magazine Coco Lapin. Oh Jackie !… Où nous entraînes-tu ? Dans quel précipice ? Et quelle est cette fièvre dont tu es le premier frisson ?

Genre : Fiction

Durée : 13’

Pays : France

Année : 2010

Réalisation : Benoit Forgeard

Scénario : Benoit Forgeard

Image : Hervé Lodé

Son : Jean-Baptiste Haehl

Musique : Emiliano Turi , Bettina Kee

Montage : Nicolas Boucher

Interprétation : Caroline Deruas , Darius , Nora Hamzawi , Guillaume Saurrel , Christine Boisson , Francis Van Litsenborgh , Emmanuel Lautréamont

Production : Ecce Films

Article associé : l’interview de Benoit Forgeard

« Cheveu », Prix du meilleur court métrage français 2011

Le Syndicat Français de la Critique de Cinéma et des Films de Télévision a décerné ses prix annuels. Parmi eux, le Prix du meilleur court métrage français a été attribué à « Cheveu »  de Julien Hallard. Pour information, ce prix est décerné depuis 1973 et c’est la Commission du court métrage de la Semaine de la Critique qui propose une sélection de films à l’ensemble des membres du Syndicat.

cheveu

Lire la critique du film

Voir l’interview du réalisateur

D comme Le Dernier Chaperon Rouge

Fiche technique

beart3

Synopsis : Dans la forêt de Perlimpinpin, au milieu de la faune et des animaux, vit le dernier chaperon rouge. Mais il est l’objet de bien des convoitises.

Genre : Fiction

Durée : 26’

Pays : France

Année : 1996

Réalisation : Jan Kounen

Scénario : Jan Kounen, Carlo de Boutiny inspiré de Charles Perrault

Chorégraphie : Philippe Découflé

Image : Tetsuo Nagata

Son : Richard Shou

Musique : Brune Roman, François Roy, Jean-Jancques Hertz

Montage : Philippe Kotlarski

Interprétation : Emmanuelle Béart, Gérald Weingand, Diana Payne-Meyers, Marc Caro, Stéphane Chivot, Alexandra Gonin, Philippe Découflé

Production : La Petite Reine / Tawak Pictures

Article associé : la critique du film

Le Dernier Chaperon Rouge de Jan Kounen

Le 33° Festival du court métrage de Clermont ouvre cette année une programmation spéciale dédiée au thème du conte avec trois séances rétrospectives où figurent entre autres la  « Cendrillon » de Georges Méliès et l’indémodable « Petit Chaperon Rouge » de Tex Avery. Le conte de Charles Perrault est d’ailleurs particulièrement mis à l’honneur puisqu’il inspire pas moins de dix films sur les vingt-quatre projetés. Parmi eux, «Le Dernier Chaperon Rouge » de Jan Kounen, une super production de 26 minutes avec un générique digne d’un long.

beart3

Le Petit Chaperon Rouge version Jan Kounen mêle avec subtilité la naïveté naturelle des contes pour enfants et l’univers fantastique des films d’épouvante. Si l’on retrouve les personnages principaux imaginés par Perrault, l’adaptation du scénario nous transporte dans un monde où des chaperons sortent d’une fusée nucléaire venue du centre de la terre pour tomber nez-à-nez avec un monstre mi-homme mi-machine interprété par l’inquiétant Marc Caro. Le personnage de Mère-Grand devient celui de la vieille femme aux jambes tordues, ancien petit chaperon mutilé qui court après ses rêves de jeunesse pour récupérer les jambes qui la faisait danser. Car le film de Jan Kounen est aussi une comédie musicale où dans une forêt magique, les animaux, les champignons et les minéraux chantent et dansent autour des chaperons dans des mouvements chorégraphiques particulièrement efficaces et parfaitement filmés.

Le dernier chaperon rouge, interprété par Emmanuelle Béart chante avec charme l’innocente vision de l’amour et de l’enfance, alimentant la convoitise de la vieille dame, mais aussi celle du loup. Interprété par un Gérald Weingand plus que convaincant, le loup dévoré de désir amoureux pour ce petit chaperon, est en proie à une lutte intérieure pour tenter en vain d’échapper à sa propre nature. Avec des costumes et des décors bluffants, des mouvements de caméra percutants, des effets spéciaux admirablement orchestrés, «Le Dernier Chaperon Rouge » nous fait pénétrer dans une atmosphère hallucinatoire, à la fois drôle et effrayante, revisitant dans une version pour adultes le conte de notre enfance.

Xavier Gourdet

Consulter la fiche technique du film

Jacques Kermabon. Point de vue critique & forme brève

En novembre, Jacques Kermabon, le souriant rédacteur en chef de Bref (plus de 20 ans au compteur. Respect) faisait partie du Jury officiel de Média 10-10 à Namur. En décembre, on décidait de le rencontrer pour revenir sur l’éditorial de Bref et sur les liens historiques de la revue avec l’Agence du court métrage. En janvier, on se remettait des fastes du Nouvel An, et en février, on profitait d’un focus rouge et dessiné pour sortir l’interview de cet habitué de Clermont-Ferrand.

Interview : Katia Bayer

Image, montage : Cyrille Vaillant

I comme Il Etait Une Fois l’Huile

Fiche technique

Synopsis : Dans le garage d’une maison tranquille, deux enfants fouillent les étagères et renversent par mégarde un bidon d’huile. Une goutte tombe à terre et se métamorphose en Goutix, la mascotte officielle des huiles Méroll, friture et moteur, emmenant les marmots faire un voyage merveilleux dans l’usine en question.

Genre : Animation

Durée : 14’40 »

Année : 2010

Pays : France

Réalisation: Vincent Paronnaud

Scénario : Vincent Paronnaud, Cizo, Frédéric Felder

Son : Denis Vautrin

Musique originale : Olivier Bernet

Voix : Raphaël Lamarque, Fily Keita

Production : Je Suis Bien Content

Article associé : la critique du film

Il Etait Une Fois l’Huile de Vincent Paronnaud

Après « Persepolis » et la parenthèse du zombie pastoral («Villemolle 81») et en attendant de futurs projets de longs, Winshluss alias Vincent Paronnaud revient au court métrage d’animation pour le meilleur, avec le film « Il Etait Une Fois l’Huile », produit par la société de production Je Suis Bien Content. Un court métrage qui avait déjà fait les beaux jours de la dernière édition de l’Etrange Festival et qui apporte une touche d’humour noir bienvenue à la sélection Labo de Clermont cette année.

Utilisant les dispositifs d’apprentissage ludique de programmes comme C’est Pas Sorcier ou Il Etait Une Fois La Vie, le récit suit deux enfants qui délivrent sans le vouloir le « génie » d’une bouteille d’huile, au fond d’une vieille remise. Mais ce n’est pas n’importe quel génie, puisqu’il s’agit de Goutix, la mascotte officielle des huiles Méroll. Goutte d’huile personnifiée affublée d’un costume improbable, Goutix va emmener ces enfants dans le monde « mervhuileux » des huiles Méroll pour expliquer leurs bienfaits sur, tour à tour, l’écologie, la santé et la société. Commence alors un périple déjanté dans l’univers de Winshluss (bien connu des lecteurs assidus des éditions de BD Les Requins Marteaux), où l’on nous raconte comment Edouard Michel Méroll a eu l’idée de recycler toutes les huiles usagées qui ne servaient plus, y ajouter un agent régénérateur (l’agent X903), et créer des huiles propres, promptes à servir toute la famille : les huiles Méroll.

il-etait-une-fois-lhuile-vincent-paronnaud

Fable satirique incisive et très drôle, le film nous parle de consumérisme décomplexé, de propagande publicitaire et de la politique du global corporating, tout en évitant les écueils propres à ce type d’engagements. Winshluss, aidé de près par Cizo et Frédéric Felder, sait rester pertinent à tout moment, grâce à un subtil équilibre entre un ton noir proche de Roland Topor et René Laloux (la fausse pub en images réelles, le monde fantasmé où l’huile a été interdite, le fameux « cycle de la vie » des huiles), et des fulgurances kitsch du meilleur effet (le petit-déjeuner Méroll, la chanson de fin « La Mérolla »). Bien animé, très inventif dans l’utilisation de plusieurs styles d’animation, « Il Etait Une Fois l’Huile » est peut-être l’une des oeuvres les plus abouties de son auteur.

En témoigne la conclusion post-générique, où nous assistons au départ de Goutix qui croit avoir convaincu les enfants des bienfaits des huiles Méroll ; ceux-ci, après son départ, lâchent cette phrase malheureuse : « il est gentil, mais il est un peu lourd. Et puis, t’as vu son pantalon, bonjour le ringard… ». Les enfants n’ingurgitent que de manière passagère le message « huilé » de Goutix, ils ont juste passé un bon moment et sont déjà à la recherche d’un nouveau  » génie » dans un autre bidon. Les auteurs renvoient à la face des « pro-Méroll » en tous genres leur propre vacuité et le côté éphémère de leurs produits dans le modèle sociétal qu’ils ont créé. Un modèle qui a transformé « nos propres chérubins » en consommateurs accros aux « dérivés du pétrole ».

Julien Savès

Consulter la fiche technique du film

Festival de Clermont-Ferrand 2011

3…2…1, c’est parti. Le Focus Clermont-Ferrand s’ouvre ce mardi 8 février, à 10h33. Retrouvez plusieurs fois par jour nos sujets en phase avec la programmation du festival, via les sections officielles (nationale, internationale, labo) et les programmes parallèles. Bonne lecture & bon festival à ceux qui le suivent.

affiche-clermont-ferrand-2011

Compétition internationale

La critique de « Kawalek Lata » (Un bout d’été) de Marta Minorowicz (Pologne), Grand Prix international

La critique de « Yuri Lennon’s Landing on Alpha 46 » d’Anthony Vouardoux (Suisse), Prix des Médiathèques

L’interview de Banu Akseki, réalisatrice de « Thermes » (Belgique)

L’interview de Benoît Felici, réalisateur de « Unfinished Italy » (Italie, France)

Compétition Labo

La critique de « Big Bang Big Boom » de Blu (Italie), Prix du Public

La critique de « Love & Theft » d’Andreas Hykade (Allemagne)

La critique de « Storyteller » de Nicolas Provost (Belgique)

La critique de « Il Etait Une Fois l’Huile » de Vincent Paronnaud (France)

L’interview de Nicolas Provost, réalisateur de « Storyteller » (Belgique)

L’interview de Jonathan Caouette, réalisateur de « All Flowers in Time » (Etats-Unis), Mention spéciale du Jury Presse

L’interview d’Andrea Martignoni, compositeur de « Big Bang Big Boom » (Italie), Prix du Public

L’interview de Félix Dufour-Laperrière, réalisateur de « Strips » (Québec)

Compétition Nationale

La critique de « Splitting the Atom » d’Edouard Salier

La critique de « Hurlement du Poisson » de Sébastien Carfora, Prix ADAMI d’interprétation masculine

– La critique de « Terrains Glissants » de François Vogel

La critique de « Chair disparue » de Pascal Mieszala

La critique de « Coloscopia » de Benoît Forgeard

L’interview de Blandine Lenoir, réalisatrice de « Monsieur l’Abbé »

L’interview de François Vogel, réalisateur de « Terrains glissants »

L’interview de Benoît Forgeard, réalisateur de « Coloscopia »

Autres

Deux illustrations de Gwendoline Clossais sur les films en compétition

La critique du DVD « 10 ans de Labo »

L’interview de Marc Faye, réalisateur et arrière-petit-fils d’“O’Galop

La critique du DVD Blandine Lenoir : Etre femme

La critique de « Le Dernier Chaperon Rouge » de Jan Kounen

L’interview de Jacques Kermabon, rédacteur en chef de Bref

Festival de Clermont, le 33ème Palmarès

Clermont-Ferrand, le choix international

Clermont, les titres labo

Festival de Clermont-Ferrand, la compét’ nationale

Plus nos anciens sujets en lien avec le festival :

Compétition Internationale

La critique de « Los minutos, las horas » de Janaína Marques Ribeiro (Cuba), Prix Spécial du Jury International

La critique de « Les Journaux de Lipsett de Theodore Ushev » (Canada), Prix du Meilleur Film d’Animation

La critique d’ “Unfinished Italy” de Benoît Felici (Italie)

La critique de « Thermes de Banu Akseki (Belgique)

La critique de « Höstmannen » de Jonas Selberg Augustsén (Suède)

La critique de « Khouya » de Yanis Koussim (Algérie, France)

La critique de « Kwa Heri Mandima » de Robert-Jan Lacombe (Suisse)

La critique de « Nawéwé » d’Ivan Goldschmidt (Belgique)

Compétition Labo

La critique de « All Flowers in Time » de Jonathan Caouette (Canada, Québec, Etats-Unis), Mention spéciale du Jury Presse

La critique de « Stardust » de Nicolas Provost (Belgique)

Compétition Nationale

La critique de “La dame au chien” de Damien Manivel, Prix Spécial du Jury

La critique d’”Aglaée” de Rudi Rosenberg, Mention spéciale du Jury National et Prix ADAMI d’interprétation féminine

La critique de “Monsieur l’Abbé” de Blandine Lenoir

La critique de « Coucou-les-Nuages » de Vincent Cardona

La critique de « Petit Tailleur » de Louis Garrel

La critique de « Vasco » de Sébastien Laudenbach

L’interview de Damien Manivel

L’interview de Rudi Rosenberg

L’interview d’Amal Kateb, réalisatrice de « On ne mourra pas », lauréat du Prix France Télévisions

L’interview de Vincent Cardona

L’interview de Sébastien Laudenbach

P comme Le 1er mai à Saint-Nazaire

Fiche technique

premier

Synopsis : Pendant deux mois, les chantiers de l’Atlantique ont poursuivi une grève grâce au soutien sans faille des commerçants et paysans. Ce 1er mai, tous les syndicats appellent au rassemblement pour la victoire. Une production ORTF censurée, toujours inédite à la télévision.

Réalisation : Marcel Trillat, Hubert Knapp

Genre : Documentaire

Durée : 20’

Année : 1967

Pays : France

Image : Marcel Trillat, Hubert Knapp

Son : Marcel Trillat, Hubert Knapp

Montage : Marcel Trillat, Hubert Knapp

Production : ORTF

Article associé : la critique du film

S comme Le Sabotier du Val de Loire

Fiche technique

sabotier

Synopsis : Jacques Demy évoque ses souvenirs d’enfance à travers le quotidien du couple de sabotier qui l’a accueilli pendant la guerre.

Réalisation : Jacques Demy

Scénario : Jacques Demy

Genre : Documentaire

Durée : 29’

Année : 1955

Pays : France

Image : H. Georges Lendi

Son : Francis Rémoué, Jean-Claude Marchetti

Musique :  Elsa Barraine

Montage : Anne-Marie Cotret

Supervision : Georges Rouquier

Production : La Société Nelle Pathé-Cinéma

Article associé : la critique du film