Tous les articles par Katia Bayer

Night Mayor de Guy Maddin

The truth of the false star

Repéré entre autres au festival de Clermont Ferrand en 2011, où il a emporté le Grand Prix Labo haut la main,  « Night Mayor » de Guy Maddin est un exercice dans le genre biographique, au sens le plus large du terme. Le dernier court métrage du réalisateur canadien est à la fois caractéristique et atypique de son style et vient couronner sa filmographie déjà bien singulière.

Nihad Ademi, photographe et Winnipegois comme Maddin lui-même, se met en scène pour jouer son propre rôle d’immigré bosniaque, sauf qu’il troque son appareil pour un tuba et transpose son histoire des années 90 post-guerre yougoslave vers les années 40 au Canada. Faiseur d’images en fiction comme en réalité, Ademi incarne un scientifique fou qui tire parti de l’énergie de l’Aurore boréale pour créer un appareil audiovisuel organique appelé « télémélodium ». Celui-ci capte et retransmet les images les plus intimes du pays, sorte de téléréalité avant la lettre, et Ademi se proclame Night Mayor (maire de nuit) de Winnipeg.

night-mayor1

Ceux qui s’aventurent à chercher dans l’œuvre de Maddin un message social manifeste pourront se féliciter de trouver dans ce film une thématique complexe derrière un sujet anecdotique, ce qui est inhabituel pour le cinéaste principalement formaliste. D’une part, se pose la question de l’identité, en l’occurrence canadienne : le film se présente comme une émission télévisuelle intitulée « Faces of Canada » et prend la forme d’un témoignage collectif de Ademi et de ses enfants sur l’immigration de leur famille et leur intégration dans la culture d’accueil. D’autre part, semble s’opérer en filigrane une dénonciation de l’invasion des images et du manque de respect de la vie privée, le côté Big Brother de la culture populaire d’aujourd’hui. Postmoderne jusqu’à la moelle, Maddin fait preuve d’un cynisme mordant sur ces deux coups. La volonté d’appartenir à tout prix à la société canadienne et la soif du pouvoir que celle-ci engendre chez le protagoniste deviennent le cauchemar (le mot nightmare retentit tout au long du récit comme homophone du titre) du peuple, du gouvernement et d’Ademi lui-même.

night-mayor3

Aucunement limité à une lecture unidimensionnelle, le court de Maddin s’interroge également sur le rapport entre la vérité et la fiction. Le film joue d’ailleurs sur l’ambiguïté fiction/documentaire en se présentant comme un reportage télévisuel. Par ailleurs, les images qui saturent les écrans des Canadiens et offusquent les autorités sont ironiquement elles-mêmes nées de l’illusion qu’est l’aurore polaire : « the peculiar truth that comes from the false dawn ».

Finalement, comme de nombreux courts métrages du génie du déjanté (notamment « Send Me to the ‘lectric Chair », coréalisé avec Isabelle Rossellini), « Night Mayor » est le portrait psychologique d’une manie, d’une obsession, dessiné avec une plume fantastique, surréaliste et grotesque. Sous cette couverture du bizarre, Maddin réussit à explorer des tabous avec aplomb, lorsque, par exemple, Ademi exprime son désir érotique par rapport à sa fille nue. Sur le plan formel, les habitués du cinéma de Maddin peuvent s’étonner une fois de plus devant une prépondérance de dialogue (cf. « Sombra dolorosa ») et un tel éloignement par rapport au muet, code primordial du cinéma des premiers temps cher au réalisateur. D’autres éléments plus familiers, tels les intertitres, l’image griffée, l’esthétique de science-fiction primitive et les bruitages perturbant, reviennent alors nous rassurer.

Adi Chesson

Consultez la fiche technique du film

Vincent Macaigne : « Ce que j’écris, ce ne sont pas des rôles, mais plutôt ce que j’ai envie de dire. J’ai une sorte de parole qui m’est personnelle »

Récemment, le MK2 Beaubourg semblait très attaché au format du moyen-métrage. Exercice de style extrêmement intéressant et surtout loin des exigences commerciales, le moyen-métrage est souvent trop peu visible sur les écrans, petits ou grands ou dans les festivals malheureusement. Ce cinéma permet par conséquent de (re)découvrir le double travail de Vincent Macaigne dans deux moyens-métrages. On le connaissait certes déjà comme comédien, on aura toujours le même plaisir à le voir ou à le revoir dans « Un monde sans femmes » de Guillaume Brac, récemment nominé aux César. Et depuis le mercredi 29 février, on a également l’occasion de noter ses talents de jeune réalisateur avec son premier film eletrochoc , « Ce qu’il restera de nous », fort remarqué au dernier Festival de Clermont-Ferrand : il y a remporté rien de moins que le Grand Prix, le Prix de la presse Télérama et une Mention Spéciale du Jury Jeunes National.

Nous en avons donc profité pour rencontrer celui qui fait couler beaucoup d’encre, aussi bien pour ses performances théâtrales que pour son premier film réalisé. Un moyen de prouver que, derrière le bonhomme aux airs timides mais barrés, Vincent Macaigne possède une réelle acuité qui fait de lui un artiste absolument unique, en constante recherche artistique et en totale recherche de liberté.

Format Court : « Ce qu’il restera de nous » est sorti le mercredi 29 février au MK2 Beaubourg, de manière un peu imprévue. Quelle a été ta réaction ?

Vincent Macaigne : Ce n’était pas prévu effectivement. On a été pris par surprise ! Et c’est plutôt une bonne nouvelle en fait. La seule chose un peu dommage est qu’on n’a pas eu vraiment le temps de préparer cette sortie en salle.

On note une certaine envie, apparemment, du MK2 Beaubourg de proposer une programmation de moyens-métrages, puisque sont également (ou ont été récemment) à l’affiche dans ce cinéma, le film de Guillaume Brac dans lequel tu joues, « Un monde sans femmes » et  « Le Marin masqué » de Sophie Letourneur.

V.M. : Oui, à vrai dire, je n’y ai pas vraiment fait attention, mais je sais que pour le film de Guillaume, c’est un peu particulier car c’est un programme avec deux de ses films autour du même personnage qu’est celui de Sylvain que j’interprète. Certes, il y a Un monde sans femmes, mais aussi Le naufragé. Par conséquent, c’est un peu comme un long-métrage qui doit durer à peu près 1h15.

Pour en revenir à ton film, d’où vient ce projet ?

V.M. : En réalité, je faisais un labo de théâtre à Orléans et lorsque j’ai eu fini mon travail pour le théâtre, j’avais encore environ deux semaines de résidence dans la maison où l’on était. D’ailleurs, c’est la maison qu’on voit dans le film. Du coup, j’avais une maison, les comédiens et j’ai emprunté une caméra pour filmer.

Tu connaissais déjà Laure Calamy pour avoir tourné avec elle dans « Un monde sans femmes » et pour l’avoir dirigée au dernier Festival d’Avignon dans ton adaptation d’Hamlet ? C’est la raison pour laquelle tu as eu envie de retravailler avec elle ?

V.M. : Laure, je la connais depuis le Conservatoire qu’on a fait ensemble. Et elle était disponible à l’époque du film. Je dis « à l’époque » car j’ai passé beaucoup de temps sur le montage. Le film a été tourné il y a environ deux ans si je me souviens bien. Disons que j’avais beaucoup de matière, beaucoup de rushs et j’aurais presque pu faire un film d’1h30. Et oui, j’ai choisi Laure parce que je la connais bien. Mais Thibault (ndlr : Lacroix, autre comédien du film) a aussi fait le Conservatoire avec nous.

Pour tes deux comédiens, Thibault Lacroix et Anthony Paliotti, c’était leur première fois au cinéma ?

V.M. : Pour Thibault, oui. Mais pas pour Anthony. Il avait dû travailler avec Étienne Chatiliez auparavant et d’autres pour des petits rôles.

Dès le début du projet, tu avais un texte, un scénario ?

V.M. : C’est compliqué en réalité car il y a des éléments qui étaient un peu improvisés et d’autres non. Au bout d’un moment, de deux, trois heures qu’on tournait sans raison, d’un coup dans la nuit, j’ai commencé à écrire l’histoire. J’avais quand même dans l’idée de raconter l’histoire d’un mec qui brûlait sa voiture. Et par hasard, j’avais vu une voiture brûlée dans les alentours de la maison qui nous servait de résidence. À partir de cette scène-là, on a alors reconstruit le film. Puis, on a commencé à tourner avec cette voiture. Malheureusement les flics sont arrivés et l’ont enlevée.

Si bien que la séquence de la fourrière a été tournée en temps réel ?

V.M. : Oui, on a profité que la dépanneuse retirait la voiture pour filmer.

C’était une volonté de départ de faire un film si violent où les personnages crient autant ?

V.M. : Oui, oui. De manière où je travaille au théâtre, bien évidemment, on est parti de ce qu’on faisait au théâtre. Par conséquent, je me suis dit que j’allais partir de ce que je connaissais. Disons que je n’avais jamais fait de cinéma et je n’avais donc pas la prétention de faire du cinéma dans le sens, « faire semblant » de savoir faire du cinéma. C’est la raison pour laquelle, par exemple, je n’ai pas beaucoup de gros plans dans mon film. Disons que c’était à la fois trop simple et trop instable.

À partir de quel moment as-tu contacté la société de production Kazak ?

V.M. : En réalité, lorsque j’avais dirigé l’Idiot au théâtre, Jean-Christophe Raymond m’a contacte en me disant que ça les intéressait de faire quelque chose ensemble et je n’étais pas contre cette idée. Il est vrai que j’avais très envie de faire du cinéma. Comme j’avais déjà ces rushs, je les ai rappelés et je leur ai demandé de l’aide car je ne savais pas trop comment faire. Par conséquent, ils sont arrivés un peu après sur le projet. Ils ont trouvé un monteur, mais comme ça ne convenait finalement pas très bien, j’ai décidé de monter seul.

Par conséquent, tu as réellement tout fait : le scénario, la réalisation, l’image et le montage.

V.M. : Oui, mais Kazak a tout de même su m’accompagner. Et très sincèrement, sans eux, je n’aurais pas abouti. J’aurais laissé les rushs tels quels.

Et tu avais déjà vu ce que Kazak produisait ?

V.M. : Non, pas vraiment, mais ça ne m’intéressait pas de voir. Disons que je valorise plus volontiers le côté humain des choses. Il est vrai qu’ils avaient pas mal d’énergie pour reprendre le film à un moment où j’en avais un peu marre. Leur rôle a donc été de m’accompagner pour terminer ce film.

Ça te donne tout de même l’envie de refaire un film ou pas ?

V.M. : Oui, oui, j’ai très envie. Avec Kazak, je dois justement faire un autre court-métrage en partant de leurs affections à eux, mais ce n’est pas encore vraiment décidé. Pourquoi pas en faire un autre. Après, j’écrirai un long. Mais pour le moment, il y a des tas de choses que je n’ai pas assez étudiées pour faire un truc bien.

Tu sembles en tout cas, assez autodidacte.

V.M. : Oui, j’aime bien apprendre par moi-même. J’ignore si j’apprends bien, mais oui, je pense que j’apprends vite.

Aujourd’hui, on entend beaucoup de comédiens qui, faute de se voir proposer les rôles dont ils ont envie, écrivent eux-mêmes leurs rôles et se mettent en scène. Tu n’as pas eu envie de jouer dans ton propre film ?

V.M. : J’aime beaucoup jouer, mais de toutes manières, c’était impossible que je joue dans mon film puisque c’était moi qui tenais la caméra. Et puis, ce que j’écris, ce ne sont pas des rôles. C’est plutôt ce que j’ai envie de dire. J’ai une sorte de parole qui m’est personnelle.

Au niveau de la direction d’acteurs, comme tu as été toi-même comédien auparavant avec d’autres réalisateurs, as-tu reproduit des schémas ou pas ?

V.M. : En réalité, je n’ai pas trop d’avis là-dessus puisque selon moi, chacun dirige à sa propre manière pour nous amener là où il veut afin d’obtenir le film qu’il souhaite.

Donc tu n’as pas emprunté de techniques ou pris exemple sur Guillaume Brac ou Louis Garrel avec qui, tu as tourné ?

V.M. : Non, pas vraiment. En réalité, j’ai joué dans leurs films car ce sont des amis. Après, ils m’ont emmené là où ils voulaient selon ce qu’ils attendaient et moi, j’ai aussi fait un peu comme j’imaginais les personnages.

Et as-tu ton mot à dire auprès des réalisateurs avec qui tu travailles puisque tu écris et mets en scène toi aussi ?

V.M. : Disons que je leur fais part de ce que je pense, mais après, ils en font ce qu’ils veulent. Ça dépend des moments aussi. Parfois, je peux être chiant. Par exemple, sur « Un monde sans femmes », j’avais l’impression que le personnage de Sylvain était beaucoup plus lent que moi, voire même trop lent. Par conséquent, les journées étaient assez dures, d’autant qu’elles me semblaient longues à cause de la lenteur du personnage. D’ailleurs, j’avais du mal à être hyper joyeux.

Tu te considères comme quelqu’un d’heureux ?

V.M. : Oui… enfin, je crois. Ça dépend des fois…

En tout cas, que ce soit chez Brac ou Garrel, ils t’ont proposé des personnages un peu « paumés », des rôles qu’on pourrait éventuellement cataloguer de « looser ». Ça ne te dérange pas d’accepter de jouer ce type de rôle justement ?

V.M. : Je ne pense pas que ce soit lié à moi. C’est plus volontiers dû à ce groupe de gens qui sont mes amis. On est assez proche et ils me connaissent. Et selon moi, les personnages qu’ils me proposent sont plutôt mélancoliques que « paumés », au même titre que les personnages de « Ce qu’il restera de nous ». La seule différence c’est que par exemple, chez Guillaume, cette mélancolie est traitée avec de la douceur, tandis que chez moi, elle est peut-être plus violente. Mais globalement et de toutes manières, j’accepte plus facilement des rôles des gens qui m’entourent.

Cela signifie que tu n’as pas vraiment de plan de carrière ou plus exactement, d’expectatives de rôles ou de travail avec tel ou tel metteur en scène ?

V.M. : Non, pas vraiment. Il y a peut-être des gens dont j’apprécie le travail, mais encore une fois, je travaille avec les gens qui m’entourent, donc je n’ai pas réellement de rêve, non. Je ne sais peut-être pas toujours exactement où je vais tout simplement parce que j’essaie d’agir librement, en faisant confiance à mon instinct et de faire ce que j’aime.

V.M. : As-tu des références cinématographiques ou autres ?

C’est compliqué. Je n’ai pas vraiment de références réelles quand je tourne. Il doit sûrement y en avoir, ou certains en verront, mais mon but c’est surtout d’arriver à dire, à faire passer ce que j’ai envie de dire.

Et si je te dis Michaël Haneke ?

V.M. : Ah oui, j’aime bien Haneke… mais je n’ai pas cherché à y faire référence.

Pour finir sur ton film, on a tout de même l’impression que tu es très attaché au travail d’improvisation et d’expérimentation ?

V.M. : Pourtant, je te promets qu’il y a très peu d’improvisation dans le film. À part la scène de Laure où là oui, elle improvise son monologue et c’est aussi pour ça qu’on ne l’a tourné qu’une seule fois car c’était assez intense. Il y a peut-être quelques petites autres scènes, mais sinon, pas vraiment en fait. Ce que j’ai monté n’était pas du tout improvisé. Quant au moment du tournage, la veille de filmer, je travaillais une scène et le lendemain, on les retravaillait pas mal tous ensemble. Parfois, on faisait même 25 prises !

Malgré le travail de longue haleine que tu décris, tu ne crains pas que les gens puissent y voir un exercice de style, cinématographiquement parlant ?

V.M. : Pour moi, il ne s’agit pas d’un travail expérimental, car même si pour beaucoup de gens, ça peut paraître étrange, c’est, selon moi, tout à fait normal et accessible. Je considère que ce film est grand public et j’espère que les gens le verront comme tel. Je conviens que le film peut paraître bizarre, mais dans l’absolu, je ne pense pas qu’il le soit autant. À partir du moment où on dit quelque chose aux gens ou que les gens sont curieux d’écouter ce qu’on a à leur dire, peu importe la forme. Après, de toutes manières, je suis peut-être un peu paradoxal puisque j’ai aussi fait des choses très commerciales. Mais finalement, ça ne me pose pas trop de problème et je veux me sentir libre de faire les choses quand je veux, sans avoir de règle. Je n’ai pas de problème à me mettre en danger car j’aime rencontrer des gens et des univers.

Propos recueillis par Camille Monin

Article associé : la critique de « Ce qu’il restera de nous »

Les Quatre saisons de Cinergie. Rencontre avec Jan Hammenecker le 16 mars 2012

Qu’est-ce un film sans comédiens ? Qu’est-ce un comédien sans personnages ? Au-delà des incarnations proposées, comment se traduit son charisme ? Où va-t-il puiser son essence pour habiller le costume qu’on lui prête ? Jan Hammenecker, comédien flamand, découvert au public francophone avec « Max et Bobo », un film de Frédéric Fonteyne, et qui ne cesse de percer tant dans le cinéma belge que français, se prêtera au jeu des confidences après la projection de courts métrages auxquels il a donné sa présence. Bientôt à nouveau présent sur grand écran avec la dernière réalisation de Frédéric Fonteyne, « Quartier libre », Jan Hammenecker sera entouré des réalisateurs et réalisatrice des films programmés. Ceux-ci s’exprimeront sur la tâche délicate qu’est le choix du casting ainsi que la direction d’acteurs.

joseph_4

Au programme de la soirée, on pourra retracer l’évolution de Jan Hammenecker sur quasiment deux décennies avec « Ti amo » (1990) de Frank Van Passel (le réalisateur du « Madonna’s Pig »), « Une fameuse journée » (2005) de Jean-Marie Buchet (un non-sense à l’anglaise), « Les Habitants » (2006) de Raphaël Balboni, « Une issue » (2007) de Mireille Verboomen et la « Monique de Joseph » (2007) de Damien Chemin. Au vu de cette programmation, Jan serai-il un comédien de l’absurde ou tout simplement un comédien belge ? Nous lui poserons la question.

Les Quatre saisons de Cinergie – Printemps 2012
Vendredi 16/03 à 20h à Flagey, Studio 5
www.flagey.be, cinergie.be
Place Sainte Croix
1050 Bruxelles

Le Festival Millenium dévoile sa 4ème édition!

millenium

Pour la 4ème année consécutive, le Festival International du Film Documentaire Millenium se déroulera à Bruxelles à partir du 17 avril 2012. Ce ne sont pas moins de 50 films qui y seront présentés avec des avant-premières belges ou internationales, dont 15 dans le cadre de la compétition. Un Jury international présidé par le réalisateur Stefano Savona ainsi qu’un Jury du Public auront la responsabilité de décerner les 6 prix en jeu. Au cours du Festival se tiendront également des conférences, des ateliers et un événement spécifique de 2 jours consacré au web-documentaire.

Le Festival Millenium est un événement international unique à Bruxelles, le rendez-vous incontournable des passionnés du film documentaire. C’est un lieu de rencontre multiculturel où se côtoient des réalisateurs du monde entier, des professionnels du cinéma et un public engagé, réunis autour d’une programmation qui interpelle sur les enjeux de l’humanité.

Cette 4ème édition accorde une place toute particulière à la jeunesse et aux défis de plus en plus globaux qu’elle doit relever. Sur les 5 continents, nous découvrons des jeunes qui s’interrogent et prennent position face aux changements majeurs de la société. En toile de fond, un sentiment d’urgence universelle à repenser les Objectifs du Millénaire pour soutenir un développement durable.

Le Jury 2012 sera présidé par le réalisateur italien Stefano Savona, dont les films documentaires ont été primés dans plusieurs grands Festivals internationaux. Un appel est lancé pour des candidatures à devenir membre du Jury du Public, qui sera composé de 30 volontaires.

Dates : du 17 avril au 05 mai 2012.
Lieux : Salles Vendôme, Flagey, CIVA et Senghor

Découvrez le programme du Festival ici !

Projection Format Court, ce jeudi au Studio des Ursulines

Envie de fuir la civilisation, de chercher l’inspiration dans un paquet de bonbons, d’occuper votre ancien lieu de travail, de vous mettre au nudisme ou de vous munir de votre plus belle cape de magicien ? Retrouvez-nous demain à l’occasion de la soirée Format Court, en présence des équipes de films. Merci de confirmer votre présence à : info@formatcourt.com

mars2

Festival International du Documentaire de Création de La Rochelle, ouverture des inscriptions

Le Festival International du Documentaire de Création de La Rochelle vient d’ouvrir ses inscriptions pour sa 12ème édition qui se déroulera du 6 au 11 novembre 2012.

affiche

Conditions pour postuler :

Support de projection DVCam ou Beta SP
Terminés après le 1er janvier 2011
Genre : Documentaire
Pays de production : Tous

Vous pouvez inscrire vos films via la plateforme d’inscription aux festivals internationaux : http://www.filmfestplatform.com

Le site du festival : www.carre-amelot.net/escalesdocumentaires

S comme Sombra dolorosa

Fiche technique

Synopsis : Au court d’un fantaisiste combat de catch, une veuve éplorée combat l’ange de la mort afin de sauver celui qu’elle aime.

Genre : Expérimental

Durée : 4’30 »

Pays : Canada

Année : 2004

Réalisation : Guy Maddin

Scénario : Guy Maddin

Cadre : Guy Maddin / Matthew Hannam

Montage : Guy Maddin

Interprétation : Talia Pura, Cindy Marie Small,  Johnny A. Wright

Production : IFC Productions, Manitoba Film & Sound, Bravo !FACT

Article associé : la critique du film

Sombra Dolorosa de Guy Maddin

Petit conte macabre fait de bric et de broc, mis en scène avec beaucoup d’humour noir, dans le sillage du long métrage « The Saddest Music In The World », « Sombra Dolorosa » est un savant mélange de genres que l’on doit au cinéaste canadien le plus fou de sa génération, Guy Maddin.

« Sombra Dolorosa » raconte l’histoire d’une mère de famille mexicaine, la veuve Paramo, qui doit affronter El Muerto (le mangeur d’âmes) au cours d’un combat de catch, pour sauver sa fille Dolores du suicide, car cette dernière est inconsolable après la mort de son père, Don Paramo. La mère va redoubler d’ingéniosité pour terrasser son adversaire avant que le soleil ne disparaisse au cours d’une éclipse totale, et ainsi profiter des vertus régénératrices d’El Muerto qui va littéralement avaler le corps du père pour lui permettre de se réincarner. Le fantôme du père élira alors domicile dans la mule de son futur « gendre », qui venait tout juste de porter secours à la belle Dolores.

Utilisant, tout en les détournant, les grandes figures de style du cinéma muet et primitif (intertitres, jeu hystérique, décors peints et effets spéciaux artisanaux, etc), et les confrontant au visuel tout en couleur des combats de catch et des fêtes mortuaires mexicaines (multiples symboles de mort dans les arrières-plans, chants funestes du public, cérémonie traditionnelle liée à la notion de résurrection), Guy Maddin arrive à créer un mélange rocambolesque qui fonctionne à plusieurs niveaux narratifs et esthétiques.

Tout en rupture de tons et avec un rythme très soutenu, le film alterne à la fois des séquences de pur délire, où l’absurdité et le surréalisme sont de mise, comme le combat entre une veuve toute de noir vêtue et « La Mort » personnifiée en catcheur de Lucha libre ; et des moments tragiques avec un suspense haletant, comme la scène où, pendant l’éclipse de soleil, El Muerto « avale » le corps du père, dans une ambiance pesante et lugubre.
sombra-dolorosa-guy-maddin
L’humour particulier du cinéaste lui permet de lier tous ces éléments a priori disparates et de trouver une cohérence générale au film. L’exemple type de cet équilibre étant la scène de préparation mortuaire du corps du père, pendant laquelle plusieurs mains de vieilles femmes viennent attendrir la chair, qui sera ingurgitée plus tard, à coups de rouleaux à patisserie.

La grande force de Guy Maddin est d’arriver à utiliser un dispositif formel et visuel très marqué et d’y imprimer ses propres obsessions sur la cellule familiale éclatée. En effet, la mort du père, ainsi que son absence qui pèse sur ceux qui restent et les empêche de continuer à vivre, est une thématique centrale de l’oeuvre du cinéaste canadien dont le premier court se nomme « The Dead Father ». Dans « Sombra Dolorosa », c’est la fille, Dolores, qui éprouve ce sentiment, au point de vouloir rejoindre son père dans la mort. Elle retrouve dans la mule de son sauveur le fantôme de son géniteur défunt et finit par quitter sa mère pour lui. Avec cette fin énigmatique, est-ce que le cinéaste cherche à montrer l’éclosion d’une jeune fille sortant du nid familial et continuant sa vie avec un homme qui remplace feu son père ? Ou alors, est-ce juste un pied de nez, un ultime recours au second degré, à une certaine malice d’un auteur plutôt insaisissable ?

Fruit inimitable du savoir-faire d’alchimiste de Guy Maddin, « Sombra Dolorosa » est une oeuvre unique, en dehors des époques, la partition déjantée et improvisée d’un cinéma mexicain pop et primitif, empreint de tragédie et de drôlerie poétique.

Julien Savès

Consultez la fiche technique du film.

Isabel Herguera : « Un bon court métrage d’animation devrait combiner désir de liberté et maîtrise de la technique »

Isabel Herguera, à l’origine du film « Ámár », était présente du côté de Flagey la semaine dernière. Membre du Jury des courts métrages internationaux du Festival Anima, la réalisatrice espagnole nous a fait l’honneur d’une petite discussion sur l’animation.

isabel-herguera1

Tu as décidé de te lancer dans le cinéma d’animation au milieu des années 80, à un moment où c’était plutôt rare. Pourquoi ?

Après avoir terminé les Beaux-Arts en Espagne, je suis allée poursuivre mon éducation artistique à l’Académie de Düsseldorf où j’ai eu Nam June Paik comme professeur. A l’époque, je faisais des installations et un ami m’a fait découvrir le monde de l’animation. J’ai réalisé que cet art nécessitait moins d’infrastructure et qu’une petite caméra et une feuille A4 suffisaient pour développer tout un univers. Je me suis retrouvée comme un enfant en face d’un nouveau jouet et j’ai surtout eu un sentiment de liberté que je n’avais jamais éprouvé auparavant.

Depuis tes débuts, le cinéma d’animation a beaucoup changé, on retrouve plus de festivals qui mettent ce genre en valeur, plus de producteurs, de réalisateurs qui en font leur marque de fabrique ainsi qu’un intérêt grandissant du public. Que penses-tu de cette évolution?

Je me suis vraiment rendu compte de l’importance du cinéma d’animation quand je suis partie vivre aux Etats-Unis, à Los Angeles, J’y ai constaté qu’en dehors de Disney, il existait une grande production composée d’auteurs indépendants. Mais c’est seulement depuis ces 15 dernières années que le changement s’est accentué grâce aux nouvelles technologies et à l’Internet. Aujourd’hui, on n’est pas obligé d’attendre un festival pour voir ce qui s’est fait et ce qui se fait en animation. Les facilités d’accès font que plus de gens s’y intéressent. C’est génial.

Dans ton travail, on constate un attachement pour le court métrage. Est-ce par choix ou par contrainte économique ou temporelle ?

C’est un choix. J’aime beaucoup cette forme, elle me permet de rester libre du début jusqu’à la fin et de garder le contrôle sur toutes les étapes. Je peux aussi trouver plus facilement des financements même si je ne sais pas comment les choses vont évoluer étant donné qu’on parle de couper les budgets de moitié. Sans doute qu’il y aura quelques concessions à faire…

A travers tes 8 films, on sent l’envie de changer de style, de varier les techniques et les supports. Te chercherais-tu encore ?

J’aime varier les techniques, c’est vrai. Je peux ressentir le besoin d’utiliser le sable, ou le collage ou le cristal selon les histoires. Chez moi, l’expérience visuelle prédomine, celle-ci est très vite mêlée à une technique et à une histoire que j’ai envie de raconter. Technique et histoire sont intimement liées et je ne peux pas vraiment dire ce qui vient en premier. La variété et le changement me permettent d’expérimenter et d’évoluer.

Ton film « La Gallina ciega » a été nominé aux Goyas en 2006. Cette nomination t’a-t-elle ouvert certaines portes ?

Ce serait mentir que d’affirmer le contraire. Je suis devenue plus crédible, on me faisait plus confiance. Mais on peut dire que ça m’a aussi aidée en termes d’expérience. Petit à petit, j’ai appris des choses sur la façon de mener à bien un projet de cette ampleur.

Tu as été directrice d’Animac (Muestra Internacional de cinéma de animación de Catalonia), un festival d’animation situé à Lleida, en Catalogne. Comment s’est déroulée cette expérience ?

Ça a été très enrichissant. J’ai pu constater l’explosion de l’animation en Espagne. Quand je vivais aux Etats-Unis, je suivais difficilement l’activité qu’il y avait dans mon propre pays. Animac m’a permis de me rendre compte de la richesse du panorama espagnol, surtout depuis ces dernières années. Quand avant, on peinait à obtenir une séance d’une heure avec des bons films, aujourd’hui, c’est plus facile tant le choix est grand. Surtout que l’Espagne n’est pas un pays possédant une longue tradition de cinéma d’animation, nous n’avons pas d’écoles réputées comme c’est le cas en Belgique, ou en France. D’autre part, j’ai davantage compris le rôle indispensable qu’ont les festivals : celui de promouvoir un genre qui est encore malgré tout en marge du paysage cinématographique, en général. C’est la raison pour laquelle j’apprécie beaucoup un festival comme Anima.

Cette année, tu es invitée au Festival Anima en tant que membre du Jury des courts métrages internationaux. A ce propos, que faut-il selon toi, pour qu’un court métrage soit bon ?

Je ne sais pas, ça dépend. Il faudrait d’une part que le créateur arrive à atteindre une certaine liberté grâce au moyen d’expression. Mais, l’animation a ses contraintes techniques qu’il faut arriver à dépasser. Donc dans l’idéal, un bon court métrage d’animation devrait combiner désir de liberté et maîtrise de la technique.

Le Festival a mis l’Espagne à l’honneur en présentant de nombreuses activités, dont les deux programmes « Cortos de España », une série de courts métrages montrant un panel varié de l’animation contemporaine. Comment s’est passée la sélection?

J’ai surtout proposé une série d’animations parmi lesquels Philippe Moins et Doris Cleven ont sélectionné un certain nombre de films. J’ai essayé de choisir des œuvres originaires de petites structures, mettant en avant le talent d’auteurs indépendants comme Maria Lorenzo, la réalisatrice de « La Flor Carnivora », qui a tout fait toute seule (ou presque) tout en n’ignorant pas les grosses productions derrière lesquelles se cachent les succès comme « La Dama y la muerte », par exemple.

« Ámár », ton dernier film, sélectionné au Festival l’an dernier, faisait partie de la sélection. Comment as-tu eu l’idée de réaliser cette histoire assez particulière ?

L’idée du film germait en moi depuis bien longtemps. Juste après « La Gallina ciega », je suis allée en Inde. C’est un pays qui m’a toujours fascinée et que j’avais envie de découvrir. Dès que je suis arrivée, j’ai senti les odeurs, contemplé les couleurs et beaucoup de choses ont traversé mon esprit. J’avais besoin de mettre cela sur papier. Comme j’ai l’habitude de réaliser des carnets de voyages, j’en ai fait un. Mais j’avais besoin d’aller plus loin. Ainsi est né le film.

On sent la prédominance du pays sur les personnages.

C’est vrai. L’Inde est un pays où l’on peut perdre la raison, les repères ne sont pas les mêmes. Il n’y a pas de réelles références auxquelles on peut se rattacher. Pour un Occidental, c’est une expérience étourdissante. J’ai voulu parler de cette douce folie, cette perte de contrôle qui nous touche quand on est là-bas.

Quels sont tes projets ?

J’ai un nouveau projet d’animation qui se passe encore en Inde. Ce serait un documentaire avec des enfants atteints du Sida. Cela fait trois ans que je vais là-bas et que je côtoie ces enfants. A chaque fois, ils dessinent ou peignent et c’est cela que j’ai eu envie d’assembler et de mettre en scène.

Propos recueillis et traduits par Marie Bergeret

Article associé : la critique de « Ámár »

D comme The Dead Father

Fiche technique

my-dead-father1

Synopsis : Malgré sa mort, un père de famille continue à venir faire de brèves visites à son fils aîné. Cette situation finit par affecter le jeune homme…

Genre : expérimental

Durée : 24min

Pays : Canada

Année : 1986

Réalisation : Guy Maddin

Scénario : Guy Maddin

Image : Kathy Driscoll, Bob Russick, Stephen Snyder (as W. Steve Snyder)

Montage : Guy Maddin

Son : Wayne Finucan

Direction artistique : Jeff Solylo

Interprétation : D.P. Snidal, Margaret Anne MacLeod, John Harvie, Angela Heck, Rachel Toles, Jilian Maddin, Stephen Snyder

Production : Vincent Landay

Article associé : la critique du film

The Dead Father de Guy Maddin

Réalisé en 1986, « The Dead Father » est le premier film de Guy Maddin. Après un énigmatique prologue, le réalisateur de « The Saddest Music in the World » nous plonge dans l’intimité d’une famille qui cohabite avec le corps sans vie de leur père. Chacun paraît s’accommoder de cette présence familière ; sauf le fils aîné, témoin privilégié des retours périodiques à la vie du patriarche mort-vivant.

Généalogie d’un style

Guy Maddin aime jouer à l’apprenti sorcier, reprendre les vieilles formules qui avaient court au début de l’histoire du cinéma pour créer un univers personnel à la fois sombre et caustique. Il parsème son film de points de repères familiers hérités de la grande époque du cinéma muet (noir & blanc, intertitres, image granuleuse et parasitée…) pour mieux les détourner et surprendre son spectateur.

Le film s’ouvre avec un générique présentant les personnages sur une musique enjouée, qui rappelle celle de comédies légères, mais elle devient vite plus inquiétante et l’image s’assombrit. Nous entrons alors dans ce que le narrateur appelle “le Territoire de l’oubli”, une contrée faite d’images persistantes qui mêlent des figures du quotidien à travers le regard perturbé du jeune narrateur.

Ce travail sur la mémoire et la perception est remarquable à double titre. Premièrement, il permet de repartir aux fondements du septième Art, d’un point de vue esthétique mais aussi financier – les premiers films du “David Lynch canadien”, comme certains le surnomment, ont souvent été réalisés avec une économie de moyens qui permet de conserver une certaine liberté. Deuxièmement, Guy Maddin questionne ce médium qu’est le cinéma en amenant le spectateur à aller au-delà de l’archétype du “vieux film” en se rappropriant les clés du récit, une véritable invitation à passer de l’autre côté du miroir.

Cerise sur le gâteau, Guy Maddin prend un soin tout particulier à créer des images qui impriment durablement la rétine. Il y a tout d’abord la silhouette du père que le fils croit apercevoir une nuit à sa fenêtre. Et puis, il y a la scène où ce même fils sort d’un pas décidé de chez lui, passant devant des corps inertes étendus à terre, jusqu’à s’arrêter devant celui de son père. Le jeune homme sort alors une cuillère de sa poche, la plonge dans le ventre paternel et dévore ses entrailles.

D’un mythe à l’autre

my-dead-father2

Guy Maddin fait partie des cinéastes hantés par des thèmes récurrents. La figure paternelle est une pièce maîtresse de son univers au point d’avoir appelé son premier court métrage “The Dead Father”. Venu à Paris présenter son dernier film en date « Ulysse, souviens-toi ! » (Keyhole), il a confié aux spectateurs que peu avant le tournage de son tout premier, son père est mort. Pendant les semaines qui ont suivi, il a rêvé presque toutes les nuits que son père revenait, juste l’espace d’un instant, pour reprendre un objet qu’il avait oublié dans leur maison. Ce fût le point de départ du film.

Dans « The Dead Father », le fils aîné vit mal le décès de son père. Pour faire passer cette émotion sur la pellicule, Guy Maddin mêle la tristesse de la perte d’un être cher au trouble suscité par cette émotion. En jouant sur la perception du temps, l’enchevêtrement des situations et les répétitions, il parvient à créer une ambiance empreinte d’étrangeté, de mélancolie et de sous-entendus que ne renieraient pas Buñuel (« Le Chien Andalou », « L’Âge d’Or ») et Cocteau (« Le Sang d’un Poète », « Orphée »). Le père autoritaire rappelle également celui que décrit Franz Kafka dans “La lettre au père” : «Il m’arrive d’imaginer la carte de la Terre déployée et de te voir étendu transversalement sur toute sa surface. Et j’ai alors l’impression que seules peuvent me convenir pour vivre les contrées que tu ne recouvres pas ou celles qui ne sont pas à ta portée.»

Julien Beaunay

Consultez la fiche technique du film

Anima 2012 : le palmarès

Compétition internationale

PRIX DÉCERNÉS PAR LE JURY : The Wonder Hospital – Beomsik Shimbe Shim
PRIX DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE PROFESSIONNEL : Romance – Georges Schwizgebel
PRIX DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE ETUDIANT : Kuhina – Joni Männistö
PRIX DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE JEUNE PUBLIC : Dodu – O Rapaz de Cartao (Dodu – The Cardboard Boy) – José Miguel Ribeiro
PRIX DU MEILLEUR CLIP VIDÉO : Björk “Crystalline” – Michel Gondry
PRIX DU MEILLEUR FILM PUBLICITAIRE :Canon “Parade” – Dante Ariola

PRIX DÉCERNÉS PAR LE PUBLIC

PRIX FLUXYS DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE PROFESSIONEL : Luminaris – Juan Pablo Zaramella
PRIX DU PUBLIC DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE ETUDIANT : Flamingo Pride – Tomer Eshed
PRIX DU PUBLIC DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE JEUNE PUBLIC : L’Envol du chat – Clément Doranlo
PRIX DU PUBLIC DU MEILLEUR COURT DE LA NUIT ANIMÉE : A Morning Stroll – Grant Ochart

Compétition nationale

PRIX DÉCERNÉS PAR LE JURY

GRAND PRIX DE LA FÉDÉRATION WALLONIE-BRUXELLES : La Boîte de sardines – Louise-Marie Colon
PRIX DE LA SACD : Natasha – Roman Klochkov
PRIX DE LA SABAM : Duo de volailles, sauce chasseur – Pascale Hecquet
PRIX TVPAINT DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE ÉTUDIANT BELGE : Shattered Past – Boris Sverlow

PRIX DÉCERNÉS PAR LES PARTENAIRES

PRIX BETV : Adonaissance Trip – Madeline Feuillat
PRIX RTBF/LA TROIS : La Boite de sardines – Louise-Marie Colon
PRIX CINERGIE : Dans le Cochon tout est bon d’Iris Alexandre

W comme Wild Life

Fiche technique

Synopsis : En 1909, un fils à papa anglais est envoyé à Alberta pour travailler au ranch. Mais son penchant pour le badminton, les oiseaux et la bouteille ne lui laisse que peu de temps pour jouer au cowboy.

Pays : Canada

Année : 2011

Genre : Animation

Durée : 13’30

Réalisation : Amanda Forbis, Wendy Tilby

Scénario : Amanda Forbis , Wendy Tilby

Son : Patrick Butler

Musique : Judith Gruber-Stitzev

Montage : Patrick Butler

Animation : Wendy Tilby , Amanda Forbis

Voix : Frank Fontaine , Marcel Jeannin

Production : Office national du film du Canada

Article associé : la critique du film

César & court

Vendredi soir, devant les César, vous étiez peut-être hésitants entre « The Artist », « Polisse » et « Intouchables ». Et pour le court, pronostics à la main, vous penchiez peut-être pour l’un ou l’autre nommé (« L’Accordeur », « La France qui se lève tôt », « J’aurais pu être une pute », « Je pourrais être votre grand-mère », « Un monde sans femmes »).

On ne vous apprendra donc pas que les bides et que les décolletés se sont succédés, que Jean Dujardin s’est fait doubler par Omar Sy, que Maïween a pleuré comme une baleine, qu’Alice Taglioni a fait sa maligne en citant Nietzsche, que Michel Blanc s’est montré très classe face à Mathilde Seigner, et que « L’Accordeur » a glané le César, suite à de nouveaux jeux de mots bien limités sur le mot « court ».

Wild Life de Amanda Forbis et Wendy Tilby

Après le très remarqué « When the days breaks », court métrage multiprimé, nous retrouvons avec plaisir le dernier film d’Amanda Forbis et de Wendy Tilby, « Wild Life », nominé aux Oscars et sélectionné en compétition internationale à Anima cette année. Les deux réalisatrices qui nous amènent à suivre la trajectoire d’un jeune immigré anglais, parti découvrir les vastes prairies d’Alberta, au Canada en 1909. Mais son amour du badminton, du thé et son flegme naturel perdront ce gentleman.

Parti pour devenir rancher et se lancer dans l’élevage de bétail, il découvre que rien dans son éducation raffinée ne l’avait préparé aux difficiles conditions de vie du Nouveau Monde. Le court métrage met cette trajectoire en perspective, avec des jeux et entrelacs narratifs. Plusieurs procédés nous permettent de saisir le décalage entre la « vie sauvage », rêve romantique d’un jeune anglais, et la réalité d’une vie au Canada. Mais, et il faut le souligner, jamais cela n’entame la fraicheur du court métrage, ni la fluidité d’une narration à l’esprit délicieusement ironique.

L’animation devient une enquête sur le terrain mêlant des témoignages moitié amusés, moitié inquiets des autochtones ayant fréquenté le gentleman, et la relecture des lettres laissées par le rancher. Les « locaux » commentent brièvement son désintérêt pour la religion, pour le travail et nous dressent le portrait d’un doux rêveur, avec une vision romantique de ce que peut être la vie d’un cow-boy. Ainsi, le film emprunte allègrement aux codes du western, définition universelle du grand ouest américain, avec ses vastes étendues désertes et ses chemins de fer.

Si au premier abord, on s’amuse du décalage entre les lettres romanesques qu’il envoie à ses parents et la réalité de sa situation, on ressent vite un certain malaise, une empathie avec ce personnage qui dit avoir acquis un «ranch» là où il n’y a, en fait, qu’une petite cabane au milieu d’un champ. On le voit flâner, plus occuper à regarder les oiseaux et méditer sur le sens de la vie que de se mettre effectivement au travail. Peu à peu, cet entêtement dans le mensonge d’une vie qui ne lui correspond pas lui fait perdre pied; on le voit errant, démuni face à la réalité de sa situation, face à son isolement. Les lettres deviennent alors le seul lien avec une société et, en même temps, le reflet de ce qu’aurait dû être sa «vie sauvage». Car c’est une des caractéristiques appréciables de l’imagination romantique de toujours entraîner le rêveur au-delà de la réalité.

Une autre des mises en perspective utilisées dans la narration est l’utilisation de textes, apparaissant à plusieurs reprises, pour commenter la trajectoire d’une comète, « amas de glace et de poussière, qui n’est pas parvenu à s’intégrer à une planète ». Le parallèle est ainsi créé dès la première image, et c’est bien de cela qu’il s’agit; de la collision entre un esprit cultivé mais détaché de la réalité matérielle, et la « vie sauvage » canadienne. Cela on le comprend vite en voyant le décalage entre les autochtones et le jeune rêveur. En voyant sa « cabane » noyée sous la pluie, la neige, on comprend aussi que la nature n’est ni romantique, ni clémente mais bien au contraire rude et sans pitié.

En intégrant des répliques de photos d’époques, de chansons traditionnelles, « Wild Life » dépasse le récit d’une trajectoire individuelle devient le reflet d’un phénomène de l’époque. Sur les photos jaunies, on voit les visages de ces conquérants d’un «Nouveau Monde» imaginaire, qui connaitront, eux aussi sûrement, les affres du mal du pays. Le contraste entre civilisation et espace sauvage est ainsi constamment présent; les plans du film se répondent : immensité des champs / tasse de thé, ou lorsque le héros joue du golf sur un pâturage criblé de terriers. Autant de détails loin d’être anodins… Finalement, comme la comète, le «rancher» ne peut s’intégrer à son environnement et restera définitivement dans la marge, jusqu’à sa mort, issue certaine de ce changement de vie, radical et dangereux.

Pauline Gardavaud

Consultez la fiche technique du film

M comme My Mother’s Coat

Fiche technique

My Mother’s Coat (full version) from Moth on Vimeo.

Synopsis : Réalisatrice Marie-Margaux Tsakiri-Scanatovits livre un Documentaire sur sa mère italienne, ses expériences d’immigrée en Grèce dans les années 70 post-dicature et sa nostalgie sur sa petite ville natale.

Pays : Royaume Uni, Grèce

Genre : Documentaire, Animation

Durée : 06’06 »

Année : 2010

Réalisation, Animation : Marie-Margaux Tsakiri-Scanatovits

Voix : Paola Dionisotti

Son : Tom Lowe

Production : Royal College of Art

Article associé : le reportage « Envol estudiantin à Anima »

Envol estudiantin à Anima

Comme de coutume à Anima, une bonne part de la programmation de courts métrages en compétition se consacre aux films d’écoles. Position entièrement défendable, vu que le format court est après tout le principal medium d’expression employé dans le cadre scolaire, et que l’animation est le genre qui requiert le plus de connaissances techniques précises.

Premier constat : une grande partie des films ressemble plutôt à des expériences singulières en techniques d’animation, et, vu la prolifération exponentielle de celles-ci, leur exploitation au cinéma mérite assurément d’être encouragée. Ces films impressionnent donc sur le plan formel mais, en raison de leur parti pris de faire abstraction du contenu, ils laissent le spectateur sur sa faim. « Connan O’Brian » de Jacob Gilbreath (USA), par exemple, est un exercice de style en typographie cinétique fort louable, mais dont l’intérêt cinématographique, au-delà de l’illustration du discours d’adieu du présentateur américain, nous échappe. De même, « Graffitiger » (du Tchèque Libor Pixa), le tigre-graffiti déambulant sur les façades de la jungle urbaine pendant une dizaine de minutes, évoque et dépasse même le travail « mutant » de l’animateur italien Blu. Cependant, ici, on pourrait se poser la même question que dans « Muto » quant au manque de contenu cohérent en dehors de la technique prodigieuse.

D’autres films de la sélection montrent une tendance à associer le genre animé à un candide romantisme quasi enfantin. Ce resurgissement de l’héritage Disney paraîtrait pourtant anachronique. Dans cette veine passéiste se trouvent notamment « Reflet » et « Swing of Change », tous deux des projets collectifs de taille. Le premier, signé Josselin Bailly, Nastasia Bois, Jeremy Celeste, Thomas Dufresne, Brian Gossart, raconte le voyage d’une restauratrice des tableaux à travers le temps et l’espace (et les mediums) pour rencontrer le peintre de l’œuvre à laquelle elle est en train de redonner un nouveau souffle. Le deuxième, réalisé par Andy Le Cocq, Harmony Bouchard, Joakim Riedinger, Raphael Cenzi, dépeint le changement de cœur d’un très méchant monsieur raciste, lorsqu’il confisque la trompette d’un mendiant noir dans les rues de New York des années 30. Ces dessins et ce travail d’animation sont irréprochables, mais face à un tel manichéisme, on a l’impression que Scrooge vit toujours et que tout le discours sur la psychologie nuancée n’est que de l’hérésie postmoderniste.

Swing of Change from Swing of Change on Vimeo.

« Galeria » de Robert Proch (Pologne) est un court métrage délectable sur la société de la surconsommation, avec un dessin riche et une mise en scène soignée, et rythmé par une partition cocasse et sensuelle. Le travail formel, et notamment musical, est très réussi mais ne parvient malheureusement pas à combler les lacunes narratives ou à pousser la critique suffisamment loin. Le film reste au stade de l’esthétisation et son récit est dès lors d’autant plus fragilisé par le traitement frustrant d’un thème très pertinent et très courant.

galeria1

« Galeria » de Robert Proch

Trois titres se démarquent toutefois du lot, en ce qu’ils réussissent de manière plus approfondie et plus aboutie à respecter un équilibre entre forme et contenu et à amener à l’animation toute la distinction dont elle est digne en tant que genre cinématographique à part entier.

« I’m Fine Thanks » de Eamonn O’Neill (Irlande) suit la vie d’un jeune homme pas comme les autres, dans un environnement hostile à sa différence. L’étudiant du Royal College of Arts de Londres dresse dans son film un portrait interpellant de la délinquance et des limites parfois très fines qui poussent un être au bord du gouffre. Comme dans « Ben X », « Elephant » ou plus récemment « We Need to Talk About Kevin », le résultat est aussi dramatique que crédible. Cependant, le ton reste particulièrement léger grâce notamment au dessin naïf, à un regard distancié et à un certain humour noir, qui parviennent à éliciter toute l’empathie du spectateur. Les questions de l’incommunicabilité et l’ostracisme et la socio-pathologie, ainsi que la juxtaposition de plusieurs scénarios tragiques, rendent la narration bien plus intelligente que ne laisse soupçonner l’image simpliste.

My Mother’s Coat (full version) from Moth on Vimeo.

« My Mother’s Coat » de Marie-Margaux Tsakiri-Scanatovits (GB/Irlande) se fait d’emblée remarquer par son image époustouflante, à laquelle s’ajoute un récit touchant et sobrement rendu. Largement (auto)biographique, ce documentaire se base sur le témoignage intime de la mère de la réalisatrice, qui à quitté Italie pour suivre son mari en Grèce. Là, elle a souffert du dépaysement et d’une certaine exclusion en raison de son statut d’étrangère. Le spectateur est surtout frappé par la ressemblance à la situation en Europe aujourd’hui, où ces formes de discriminations demeurent mais se sont déplacées vers d’autres sortes d’étrangers, la notion même d’expatrié ayant pris une connotation nettement plus positive que celle d’immigré. L’usage d’une voix-off dans un anglais articulé trahit une sensibilité au multiculturel chez la réalisatrice aux noms multiples. Le discours traduit admirablement le ressenti d’une femme qui raconte à sa fille adulte les difficultés rencontrées lors de son enfance, sans rancune ni doléance. Les dessins fins et élusifs en noir et blanc s’entachent subtilement de couleurs pour évoquer la tristesse, le passage du temps, le flou du souvenir. Telles les esquisses de Picasso, les plans laissent apercevoir les personnages seulement partiellement au lieu de les exposer. Ce n’est qu’à la fin, la narration en off terminée, qu’apparaît la live-action, pour donner enfin un visage à cette femme courageuse, qui pareille à un marsupial, protégea son enfant du monde inhospitalier derrière son manteau en fourrure.

« Conte de faits » de Jumi Yoon
Si les contes de fées sont nés dans la conscience collective humaine à partir d’un besoin d’échapper à la dure et laide réalité, le court métrage de Jumi Yoon est un exemple parfait du genre folklorique. Situé dans une maison close d’une Corée déchirée par la guerre 50-53, le récit suit les tentatives d’une mère de préserver l’innocence de son enfant face à la rapacité des GI envahisseurs. La petite, au prénom révélateur Nana, apprend très vite à se réfugier dans le monde imaginaire raconté par sa mère. Pour se sauver de l’emprise des clients saouls, elle plonge tête d’abord dans le décolleté ou les jupons de sa mère et des prostituées autour d’elle. Ces échappatoires, symboles matriciels à l’instar du manteau du film précédent, sont comme des portails permettant de passer d’un univers à l’autre. Au-delà du sordide, c’est la nature, l’idylle, et Nana est une biche qui savoure la beauté de ce monde. Yoon livre avec « Contes de faits » un magnifique tableau en peinture animée, mêlant esthétique, psychologie et social.

Adi Chesson

Consultez les fiches techniques de « I’m Fine Thanks », « My Mother’s Coat » et « Conte de faits »

A comme Ámár

Fiche technique

Synopsis : Inés part pour l’Inde afin de revoir son ami Ámár, qui a vécu pendant quatre ans dans un asile. Inés se remémore les derniers jours qu’ils ont passés ensemble et sa promesse de revenir.

Genre : Animation

Durée : 8′

Pays : Espagne

Année : 2010

Réalisation : Isabel Herguera

Scénario : Isabel Herguera

Animation : Rajiv Eipe, Rajesh Thakare, Isabel Herguera

Montage : Eduardo Elosegi

Son : Xabier Erkizia

Musique : Xabier Erkizia

Voix : Isabel Herguera

Production : Isabel Herguera

Article associé : la critique du film