H comme Harvie Krumpet

Fiche technique

Synopsis : Biographie d’un homme ordinaire apparemment affligé d’une poisse perpétuelle. 

Genre : Animation

Durée : 23’

Pays : Australie

Année : 2003

Réalisation : Adam Eliott

Scénario : Adam Eliott

Images : Adam Eliott

Animation : Adam Eliott

Technique : Pâte à modeler

Son : Peter Walker

Montage : Bill Murphy

Voix : Geoffrey Rush, Julie Forsyth, John Flaus

Production : Melodrama Pictures

Article associé : la critique du DVD Harvie Krumpet

DVD Animatic 6 : l’animation internationale à Annecy

Créée en 1998 à Paris, la revue Repérages est passée par tous les genres cinématographiques avant de se focaliser sur le court métrage. Le magazine suit régulièrement quelques festivals majeurs en France, (Clermont-Ferrand, Némo, l’Étrange Festival, Annecy), et est systématiquement accompagné d’un DVD depuis 2003. Le dernier numéro de Repérages, consacré au Festival d’Annecy, s’intéresse à la 3D et propose un DVD bien étoffé, avec dix courts métrages, plusieurs clips et bonus, ainsi qu’un focus sur la maison de production, The World of Arthur Cox.

Le premier titre de la sélection, « Naïade », de Nadia Micault et de Lorenzo Nanni (France, 2008), établit d’emblée le niveau des films repris sur ce disque. Ava, une nymphe aquatique évocatrice de la petite sirène de Disney, règne dans les eaux limpides d’une forêt entourée de la Nature dans toute sa magnificence. À la surface, l’Homme, cruel et pervers, attrape les animaux et les dissèque sans scrupules, pour sauver son confrère. « Naïade », métaphore élogieuse de la Nature, non pas passive et martyrisée, mais tout puissante et furibonde, nous rappelle les conséquences des abus écologiques. Accompagnée d’une musique éthérée, la plastique marquante de ce film est due à son chromatisme riche et sensuel, inspiré de la palette chagallienne, ainsi qu’à son animation stylisée, miroitante et cristalline.

Le discours sur la nature-victime se retrouve également dans « Aubade » de Pierre Bourrigault (France, 2007), un conte simple et poignant sur des animaux disloqués. S’il s’attache à « Naïade » par son contenu, il s’en démarque par la sobriété de son image terne et la translucidité de ses teintes matinales.

Ailleurs sur la carte, Georges Shwizgebel propose « Retouches » (Suisse, Canada, 2008), une animation en train de prendre forme. La mise en abyme d’une main qui crée rappelle à la fois Escher et « Le Mystère Picasso » de Clouzot. À l’instar de « #1 » du duo français Noamir, ce film opère une revisitation de l’art, en s’appuyant sur la liberté qu’offre le médium de l’animation.

Le Hollandais d’Adriaan Lokman, offre, lui aussi, dans « Forecast » (2007), un regard transversal lié à l’art plastique. Entre film et art vidéo, cette animation  »stratosphérique » s’étale sur l’écran comme une surcharge visuelle qui joue sur les éléments (air, eau, feu, nuage, pixel y compris). Entre l’éthéré et le bionique, le calme et le tempétueux, « Forecast » glisse aisément d’un registre à l’autre, par le biais de la pulsation musicale chromatique, voire atonale. Cet exercice stylistique se défend par sa légende finale :  »Look up, marvel at the ephemeral beauty and live with your head in the clouds. » (Regarde vers le haut, émerveille-toi de la beauté éphémère et vis avec la tête dans les nuages.)

Sur un ton plus sérieux, « Raging Blues » (France, 2004) tend vers le social. Avant « Persepolis », l’animateur Vincent Paronnaud a dépeint la Grande Dépression des années trente à la manière des films de gangster. Son film offre un souffle à un genre désuet, ainsi qu’un regard particulièrement pertinent sur la crise actuelle. « Raging Blues » est à la fois glauque et léger, cynique et humoristique, osé et pudique. S’il réussit son défi ambitieux, c’est grâce au contrepoint : les événements lugubres (abus sexuel, misère, désespoir, suicide, …) sont représentés de façon allégée, dépourvue de toute sentimentalité. Doté de la marque esthétique de « Persepolis », ce film muet et monochromatique fonctionne par une surexplicité d’expressions, de gestes, de liens de cause à effet, renforcée par un usage appuyé d’effets d’iris et de vignettes, typiques du genre noir. Il livre le portrait d’un monde sans visage et sans espoir, où l’humanité est repoussée à ses limites.

Dans un registre plus léger, quatre films, tous français, se démarquent de la compilation Animatic. « Blind Spot » est un très court ludique co-réalisé par pas moins de six élèves des Gobelins. Le film enregistre, par le biais d’une caméra de surveillance, un hold-up raté et des catastrophes provoquées par un effet domino. Son originalité repose sur le concept du blind spot (le point aveugle) de la caméra, et ses personnages en 3D grotesques et disproportionnés.

Dans la même logique de l’absurde, « For Sock’s Sake » de Carlo Vogele, prix du meilleur film de fin d’études à Annecy 2009, narre la sortie en ville d’un tas de vêtements anthropomorphisés, organisée par une chaussette rebelle. « Une histoire vertébrale » de Jérémy Clapin évoque son deuxième film über primé « Skhizein », par le choix d’un sujet atypique. « Une histoire » relate la rencontre entre un homme au cou replié vers le bas, et une femme avec la tête penchée en arrière. Après une suite de chutes et de rechutes et à l’aide d’un petit oiseau, le couple retrouve son bonheur et, pour ainsi dire, « se complète » physiquement. « Un Jour » de Marie Paccou narre le récit d’une femme qui se retrouve un beau matin avec un homme dans son ventre. Derrière cette façade farfelue, se cache une belle allégorie des relations amoureuses perçues du point de vue de la femme à la recherche de l’homme parfait et de la dimension maternelle de ces relations.

Le film qui se démarque le plus de la sélection est indiscutablement « Chainsaw », une intrigue bien tissée de 24 minutes, avec deux, voire trois récits en parallèle. Le fil rouge du film tient dans le mot  »chainsaw » lui-même, signifiant tronçonneuse en français, et servant aussi de nom à un célèbre taureau, vedette de rodéo. Ce mot clef relie aussi les trois chapitres du film : le pseudo-documentaire (le film éducatif sur la sylviculture), le documentaire (la relation entre le toréador Luis Miguel Dominguin et Ava Gardner, mariée à l’époque avec Frank Sinatra), et le docu-fiction (inspiré du triangle hollywoodien). Le style de l’animation est aussi riche et sophistiqué que sa thématique, et diffère pour chacune des parties du récit : dessins colorés proches des comics des années 50, collages et images d’archives de la belle Gardner et du Crooner, et séquences en live action retravaillées en rotoscopie.

3waystogo

Co-fondée en 2002 par Sally Arthur et Sarah Cox, The World of Arthur Cox est une boîte de production d’animation britannique qui se veut spécialiste dans « tout ce qui bouge ». Elle inclut dans son éventail des techniques d’animation diverses : de la 2D, de l’animation en volume, de travail sur la live-action, … . Six court métrages et sept pubs et films de commande alimentent ce focus, et démontrent une diversité technique et thématique presque aussi grande que celle des films vus ci-dessus. Parmi ces œuvres, se trouve « Heavy Pockets », de Sarah Cox (2004), un mélange de live action et d’animation, gravitant autour de l’histoire fantaisiste d’une jeune fille dans une école publique, qui doit remplir ses poches de pierres lourdes afin de ne pas s’envoler. « Operator » (2007) de Matthew Walker (auteur de « John and Karen »), met en scène la conversation téléphonique frivole entre un homme oisif avec le barbu là-haut, le grand D lui-même. Last but not least, « 3 Ways To Go » de Sarah Cox (1993) analyse trois façons de « manger les pissenlits par les racines » : le suicide, le naufrage et l’accident de voiture. Chacun de ces trois phénomènes sont représentés par un graphisme différent (la typographie, les ratures, les dessins traditionnels, la live action retravaillée,…). Ils prennent chacun, par conséquent, une immédiateté unique, provoquant un sentiment de brutalité liée à l’acte fatal, malgré le ton indifférent de la narration.

Adi Chesson

Consulter les fiches techniques de « Naïade », « Blind Spot », « Raging Blues », « 3 Ways To Go », « Chainsaw »

Animatic volume 6 : le meilleur de l’animation – Co-édition Repérages et Chalet Pointu

C comme Chainsaw

Fiche technique

Synopsis : Le romantisme est comme une tronçonneuse : une bête bien dangereuse.

Genre : Animation

Durée : 24′

Année : 2007

Pays : Australie

Réalisation : Dennis Tupicoff

Scénario : Dennis Tupicoff

Musique : David Herzog

Techniques : Dessin sur papier, ordinateur 2D/3D, rotoscopie

Production : Jungle Pictures

Article associé : la critique du DVD Animatic 6

R comme Raging Blues

Fiche technique

Synopsis : Dans les années trente, à l’approche de Noël, dans les bureaux de l’hôtel de ville d’une grande métropole, un promoteur présente au maire un nouveau grand projet immobilier. Au milieu de la foule qui s’active dans les rues de la ville, une jeune femme en haillons, la main tendue, le dos courbé, demande la charité aux passants.

Genre : Animation

Durée : 6′

Pays : France

Année : 2004

Réalisation : Vincent Paronnaud, Lyonnel Mathieu

Scénario : Vincent Paronnaud, Lyonnel Mathieu

Musique : Olivier Bernet

Production : Je Suis Bien Content

Article associé : la critique du DVD Animatic 6

B comme Blind Spot

Fiche technique

Cliquer sur l’image pour voir le film sur le site des Gobelins

Synopsis : Un voleur entre dans une épicerie pour faire un hold-up. Dans le magasin, une vieille grand-mère qui voit mal fait ses courses comme elle peut. Soudain, tout s’enchaîne dans une confusion totale sous l’oeil de la caméra de surveillance…

Genre : Animation

Durée : 3’

Pays : France

Année : 2007

Réalisation : Johanna Bessiere, Cécile Dubois Herry,  Nicolas Chauvelot, Simon Rouby, Olivier Clert, Yvon Jardel

Scénario : Johanna Bessiere, Cécile Dubois Herry,  Nicolas Chauvelot, Simon Rouby, Olivier Clert, Yvon Jardel

Musique : Gregory Vettraino

Mixage : Julien Aves, Elude/Digimage

Production : Les Gobelins, l’école de l’image

Distribution : Premium Films

Le site du film : www.blindspotthemovie.com

Article associé : la critique du DVD Animatic 6

N comme Naïade

Fiche technique

Synopsis : Ava règne sur un marais peuplé de créatures féeriques. Un étrange personnage observe en secret ce royaume luxuriant, espérant y trouver la solution pour sauver son frère jumeau malade.

Genre : Animation

Durée : 12′

Pays : France

Année : 2008

Réalisation : Nadia Micault, Lorenzo Nanni

Techniques : Animation d’objets, Ordinateur 2D – 3D

Production : Autour de Minuit Productions

Article associé : la critique du DVD Animatic 6

T comme 3 Ways To Go

Fiche technique

3waystogo

Synopsis : Film d’animation sur les derniers moments de trois vies. Plusieurs techniques sont utilisées pour illustrer chaque situation : un homme qui se noie, une fille qui tombe d’un bâtiment et une voiture sur le point d’avoir un accident.

Genre : Animation, expérimental

Durée : 4’16’’

Pays : Royaume-Uni

Année : 1997

Réalisation : Sarah Cox

Scénario : Sarah Cox

Techniques : Dessin sur papier (peinture), dessin sur papier (encre), photocopies, vues réelles

Production : Picasso Pictures

Distribution : Picasso Pictures

Article associé : la critique du DVD Animatic 6

Festival Silhouette 2009 : le Palmarès

Dimanche 6 septembre 2009, s’est achevée la 8ème édition du Festival Silhouette. Aux Buttes Chaumont, trois Jurys ont distingué plusieurs films issus de la compétition.

Grand Prix Silhouette 2009 : Nacht Wake (Le Veilleur de nuit) de Menno Otten (Pays Bas, 2008, 10’, Documentaire)

Synopsis : Un endroit sombre où les bruits de la nuit deviennent musique, où l’on perd les limites de la réalité et de la conscience.

Prix Spécial du Jury : Forbach de Claire Burger (France, 2008, 35′, Fiction)

Synopsis : Samuel revient à Forbach, sa ville natale, pour recevoir une médaille. Dans cette ancienne cité minière de Lorraine, on est fier de sa réussite parisienne : l’enfant du pays est en passe de devenir un comédien célèbre. Pour Samuel, c’est l’occasion de renouer avec sa famille.

Prix de la Meilleure Photo : Lila du Broadcast Club (France, 2009, 12’, Documentaire expérimental)

Synopsis : Ce doit être, se dit-elle, pensive, la forêt où les choses n’ont pas de nom.

Prix de la meilleure interprétation (ex aequo) :

Jean-Benoît Ugueux dans « Michel » d’Emmanuel Marre et Antoine Russbach (Belgique, 2008, 27’, Fiction)

Synopsis : Michel est le jeune stagiaire de Dagosto, le responsable technique désabusé d’un ensemble d’habitations. Il casse par accident la chaudière du bâtiment et n’ose pas avouer sa faute.

Yéliz Alniak dans « C’est gratuit pour les filles » de Claire Burger et Marie Amachoukeli (France, 2009, 23′, Fiction)

Synopsis : Dans quelques jours, Laetitia obtiendra son brevet professionnel de coiffure. Elle et sa meilleure amie Yeliz pourront concrétiser leur rêve : ouvrir un salon ensemble. Mais avant de passer son examen, Laetitia veut aller à une fête.

Prix du jury junior : Os sapatos de Aristeu (Les chaussures d’Aristeu) de René Guerra Luiz (Brésil, 2008, 17’, Fiction)

Synopsis : Le corps d’un travesti décédé est préparé pour l’enterrement par d’autres travestis. Son corps de femme est amené à sa famille, qui décide de l’enterrer comme un homme.

Prix du public : Ripple de Paul Gowers (Royaume-Uni, 2008, 18’, Fiction)

Synopsis : Un homme ordinaire s’écarte du droit chemin à la suite d’un petit acte de méchanceté qui le plonge dans un sombre voyage qu’il n’oubliera jamais. Une comédie noire sur le hasard du destin.

32èmes Rencontres Henri Langlois : Participez au Jury étudiant

Du 4 au 12 décembre, se dérouleront les 32èmes Rencontres Henri Langlois (Festival International des Ecoles de Cinéma). Le Prix du Jury étudiant, attribué à l’un des films en compétition, sera déterminé par sept étudiants issus de différentes UFR de l’Université de Poitiers, ayant assisté à l’ensemble des séances et participé aux réunions de délibération.

Vous êtes étudiant et souhaitez proposer votre candidature ?

Merci d’envoyer une lettre de motivation avant le 15 octobre 2009, au Service culturel de l’Université/Maison des étudiants. Une connaissance pointue en matière de cinéma n’est pas exigée mais une curiosité pour le 7e Art et votre bonne humeur seront les bienvenues !

Contact & Information : www.etu.univ-poitiers.fr – mde@univ-poitiers.fr – 05 49 45 47 00
Le site du Festival : www.rihl.org

Izù Troin. La débrouille et le son du pinceau

Pays de mots, arbres à lettres, livres interdits, idées reçues, émotions-frissons, … Nourri par des mélodies, des typographies, et des idéogrammes variés, « Le Bûcheron des mots » est un film poétique à la croisée de plusieurs imaginaires, rencontres, et cultures. Interview à Annecy, avec Izù Troin, son réalisateur.

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Les rames, les ailes, le désir

Enfant, j’ai d’abord découvert le cinéma en prises de vues réelles. Curieusement, les films d’animation m’effrayaient. Mes parents m’avaient offert un livre, La traversée de l’Atlantique à la rame, de Jean-François Laguionie. Je le lisais tout le temps, et le connaissais par coeur. Plus tard, j’ai vu l’adaptation de La traversée au cinéma (J-F Laguionie), et « Les ailes du désir » de Wim Wenders. Tous deux m’ont marqué et donné envie de faire du cinéma. Comme la vue réelle me paraissait trop compliquée, j’ai choisi l’animation.

Tremblements et bouts de ficelle

À 14 ans, j’ai fait un petit film, « Conte d’une nuit d’hiver », en Super 8. Deux ans plus tard, j’ai contacté la Fabrique, le studio d’animation créé par Jean-François Laguionie à Montpellier. J’ai montré mon film à Bernard Palacios, un réalisateur qui m’a dit : “c’est bien, mais il faut tout refaire, parce que ça tremble dans tous les sens”. Il m’a prêté une caméra 16mm et j’ai retourné le film. J’ai appris à me servir de la caméra, et après, je me suis débrouillé, dans ma chambre, avec des bouts de ficelle et des livres. J’ai constitué un banc-titre pour filmer des cellos qui n’étaient même pas des cellos. Je ne savais pas ce que c’était, alors à la place, j’ai utilisé des rodoïdes qu’on trouve en papeterie. Et pour payer la pellicule, j’ai utilisé l’argent que mon grand-père m’avait donné pour passer le permis. J’ai payé la pellicule avec, et au bout du compte, je n’ai toujours pas le permis !

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Les Beaux-Arts

Naïvement, après le bac, j’ai tenté l’examen d’entrée des Gobelins, sans rien préparer. Je me suis retrouvé, dans une salle, entouré de gens qui ne voulaient faire que de l’anim’, et je me suis aperçu que cela ne m’intéressait pas du tout. Sur un film, je préfère travailler le cadre, la lumière, ou le storyboard, que de d’animer les personnages. Je n’ai pas été pris, mais cela ne m’a pas déçu. Comme à l’époque, il n’y avait pas d’écoles comme la Poudrière ou l’EMCA [École des Métiers du Cinéma d’Animation], j’ai fait les Beaux-Arts en attendant de trouver ma voie. Pendant mes études, je faisais de l’art contemporain très conceptuel, et des films expérimentaux. J’apprenais aussi à me servir d’outils et de logiciels, mais ce qui me manquait vraiment, c’était de pouvoir raconter une histoire. Pendant mon cursus, la Poudrière a vu le jour. J’ai réussi le concours, et j’ai laissé tomber les Beaux-Arts, parce que la formation me correspondait beaucoup mieux. C’était le tout début de l’école; je fais partie de la deuxième promotion de la Poudrière.

La Poudrière

La Poudrière était, à l’époque, une école vraiment à part. Il n’y avait pas d’autres formations pour devenir réalisateur en animation. C’était de l’expérimentation pour tout le monde, pour les professeurs comme pour les élèves. Au début, on n’a pas été beaucoup d’étudiants à se présenter à l’examen d’entrée. Encore aujourd’hui, beaucoup de jeunes gens préfèrent une école comme les Gobelins, probablement, parce que il y a plus de débouchés quand on en sort et qu’on peut trouver du travail en tant qu’animateur, en tant que technicien de l’image. À la Poudrière, c’est un peu plus risqué : quand on en sort, on est censé être réalisateur, sauf que souvent, on ne l’est pas. On travaille sur d’autres productions ou on devient assistants.

Folimage

En sortant de La Poudrière, je suis entré à Folimage. Pendant plusieurs années, j’y ai fait de la conception de génériques et un peu de compositing sur des courts et un long, « Mia et le Migou ». Depuis la fin de mes études, j’avais un projet de film, « Ceux d’en Haut ». Il s’agit de l’adaptation de L’auberge, une nouvelle de Guy de Maupassant. J’ai soumis le projet à Folimage, mais comme on n’a pas eu l’aide du CNC, le projet a été mis en standby. Sans budget, le film ne peut malheureusement pas se faire.

Les mots dans les arbres

« Le Bûcheron des mots » est né par hasard. Un jour, une amie réalisatrice, Olga Marchenko, m’a dit : “j’ai une idée qui t’irait bien. Pourquoi ne ferais-tu pas un film dans lequel les mots pousseraient dans les arbres ? “ Elle a dessiné un arbre orné de lettres. Mon style est plutôt réaliste, ce n’est pas celui du « Bûcheron ». Je lui ai dit que cette histoire la correspondait mieux qu’à moi. Elle a insisté : “non, ce n’est pas pour moi, cette histoire. Elle te ressemble plus. Prends-la et fais-en ce que tu veux.” À partir de son idée, j’ai développé une trame d’histoire. Comme je n’avais aucune dramaturgie, j’ai demandé à une scénariste, Isabelle Blanchard, de travailler sur le projet, et je l’ai présenté à Folimage. Cette fois, on a eu le CNC.

La typo

Cela fait plusieurs années que je conçois des génériques, et j’aime beaucoup y inclure de la typographie. « Le Bûcheron des mots » a été une occasion intéressante de développer une histoire avec de la typographie, de ne pas faire un générique de 11 minutes, mais presque ! Je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire autour des mots et des arbres. J’ai commencé à faire des recherches, du côté des enluminures japonaises et de l’histoire médiévale, pour constituer le décor, le graphisme, et l’ambiance du film.

Le son du pinceau

J’ai eu envie d’utiliser, à un moment, des idéogrammes dans les décors. Le film commence avec un idéogramme de “mélancolie” en japonais, et se termine avec le mot “ressentir une émotion” en chinois. J’ai demandé à Hefang Wei, une amie chinoise, étudiante de la Poudrière, de peindre de la calligraphie pour l’utiliser dans le film. En la voyant travailler, je me suis dit que ce serait intéressant d’utiliser le son de son pinceau. J’en ai parlé à Loïc Burkhardt, responsable de la conception sonore du « Bûcheron » qui trouvait l’idée intéressante, et qui s’interrogeait, tout comme moi, sur le résultat.

Hefang Wei est venue à Folimage. Elle s’est installée, avec sa table et son pinceau, dans la cabine d’enregistrement où on enregistre habituellement les voix au studio. On a placé le micro très, très près du pinceau, et on a fait différents essais (avec plusieurs types de pinceaux et de papiers, avec de l’eau, …). Cette calligraphie sonore a servi à plusieurs moments dans le film, dans les bruitages et les ambiances notamment.

Les livres, la liberté

Dans le film, on retrouve des références à certaines périodes de l’histoire à travers l’interdiction et la destruction des livres. « Le Bûcheron » touche à l’idée de la liberté, à la censure, à la différence, à la peur, et aux livres interdits. La peur des livres revient assez souvent, à de nombreuses époques. J’ai travaillé sur ce projet avec des personnes qui ont vécu, directement comme indirectement, le manque de libertés et certaines répressions. Olga Marchenko, à l’origine du film, vient de Biélorussie, Serge Avedikian, le narrateur, est arménien, et Aldona Nowowiejska, la compositrice, est polonaise. Elle a connu une époque où certains livres circulaient avec de fausses couvertures. Les sensibilités propres à leurs cultures ont nourri en partie le film et m’ont donné un point de vue différent sur le récit.

Musique Babel

« Le Bûcheron des mots » est habité par des “arbres à mots” issus de différents pays et alphabets. De même, la musique, très présente dans le film, mêle plusieurs langues. Par hasard, en cherchant des musiques slaves, je suis tombé sur le site Internet d’une chanteuse polonaise, Aldona Nowowiejska. Je lui ai envoyé un mail, elle a lu le scénario, et a accepté de participer au film. Comme elle est polyglotte, elle était en mesure de faire ce mélange de langues. Les chansons sont en grande partie en polonais sauf une, celle des souvenirs, dans laquelle chaque mot est lié à une langue différente. La phrase commence en hindi, se poursuit en japonais, puis en chinois, etc. Pour comprendre la phrase dans son entièreté, il faudrait connaître toutes les langues utilisées. Je suis un des seuls à en connaître la traduction !

En cours et à venir

Depuis près de sept ans, je travaille sur « Ceux d’en Haut ». C’est un film très sombre de 25 minutes en animation traditionnelle qui est très difficile à financer. À l’heure actuelle, je n’ai plus de producteur, mais 8 minutes du film sont terminées. J’espère l’achever bientôt. J’ai d’autres projets en tête : un court métrage en vue réelle : « Larmes » et une version longue du « Bûcheron des mots ». Isabelle Blanchard, la scénariste du film, a commencé à en écrire le scénario. L’histoire sera assez différente, mais inclura le même univers et le même graphisme que le court métrage.

Propos recueillis par Katia Bayer

Consulter les fiches techniques de « La Traversée de l’Atlantique à la rame », du « Bûcheron des mots », ainsi que le blog d’Izù Troin

B comme Le bûcheron des mots

Fiche technique

Synopsis : Dans un pays où les habitants se nourrissent de lettres et de mots cueillis dans les arbres, Nadal, un bûcheron des mots, fait une rencontre qui change sa vie…

Genre : Animation

Durée : 11’20’’

Pays : France

Année : 2009

Réalisation : Izù Troin

Scénario : Isabelle Blanchard

Technique utilisée : Ordinateur 2D

Graphisme : Izù Troin

Storyboard : Izù Troin

Layout : Izù Troin

Décor : Izù Troin

Animation : Izù Troin

Camera : Izù Troin

Compositing : Izù Troin

Musique : Aldona Nowowiejska

Son : Loïc Burkhardt

Montage : Hervé Guichard

Production : Folimage

Article associé : l’interview d’Izù Troin

T comme La Traversée de l’Atlantique à la rame

Fiche technique

atlantique

Synopsis : Au début, il ne s’agissait que de traverser l’Atlantique à la rame, un exploit comme un autre… Mais certains voyages durent toute une existence et la vie à deux (dans un espace réduit) n’est pas facile… Aussi faut-il sauver les apparences !

Genre : Animation

Durée : 21’

Pays : France

Année : 1978

Réalisation : Jean-François Laguionie

Scénario : Jean-François Laguionie, M. Gaspari

Musique : Pierre Alrand

Animation : Jean-François Laguionie

Technique utilisée : papiers découpés

Voix : Charlotte Maury, Jean-Pierre Sentier

Production : INA – Institut National de l’Audiovisuel, Médiane Films

Distribution : Les Films Saint André des Arts

Article associé : l’interview d’Izù Troin

Festival Expotoons 2009 : Envoyez vos films d’animations avant le 30 septembre

La 3ème édition du Festival International d’Animation Expotoons se tiendra du 25 au 28 novembre à Buenos Aires (Argentine). À la demande de plusieurs boîtes de productions et de studios indépendants, Expotoons a repoussé au 30 septembre sa date limite d’inscription de films pour la compétition officielle.

expotoons-2009

Les catégories concernées sont :

– Les longs métrages : films d’une durée supérieure à 60 minutes
– Les courts métrages : films d’une durée inférieure à 60 minutes ne faisant pas partie d’une série.
– Les films de publicité
– Les séries télévisés : trailer, plus un chapitre requis
– Les courts métrages d’école : films de fin d’année

Deadline : 30 septembre. Pas de frais d’inscription

Plus d’infos sur www.expotoons.com

Hanna Heilborn : « Ce n’est pas évident de placer un micro et un enregistreur devant un enfant qui a une histoire difficile à raconter »

En 2003, Hanna Heilborn et David Aronowitsh ont recueilli le témoignage de Abouk et Machiek, deux anciens enfants esclaves, victimes de la guerre au Soudan. Le résultat, « Slavar » (Slaves) est un film suédois, dur, et nécessaire, lauréat du Prix Unicef et du Cristal d’Annecy, qui démunit son spectateur, par son sujet, ses voix, et ses regards. Entretien avec Hanna Heilborn, co-réalisatrice du film.

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Quel a été ton parcours avant de te lancer dans la réalisation ?

Je me suis formée à l’écriture dès le début. À 20 ans, j’écrivais des textes à but commercial en tant que conceptrice-rédactrice. Je collaborais aussi à Save the Children, une ONG qui défend les enfants maltraités à travers le monde. On montait des campagnes pour trouver des fonds, et sensibiliser les gens aux problématiques des enfants. L’association traitait de tout, de l’inceste en Suède à la guerre en Yougoslavie.

Par la suite, j’ai suivi un programme à la New York Film School, où j’ai pratiquement tout appris sur le cinéma. Après, je me suis inscrite à un cours de scénario au Dramatic Institute de Stockholm. Lors d’un de mes cours d’écriture, j’ai rencontré David [Aronowitsch], qui est le co-réalisateur de « Slaves » et de « Hidden ». À l’époque, nous voulions écrire un long métrage sur une histoire vraie, mais nous nous étions rendus compte que le sujet était plus approprié pour passer à la radio. Nous avons donc décidé de faire un documentaire radio. Au même moment, pendant nos recherches, nous avons rencontré Giancarlo, un enfant péruvien, réfugié et clandestin en Suède. Nous venions de trouver le son de « Hidden », en l’interviewant. David a alors eu une idée : le contenu de la bande son était très puissant, mais nous ne pouvions pas l’utiliser dans son entièreté à la radio. L’idée du documentaire animé est née de cette façon.

Pourquoi cette interview devait absolument se prolonger de manière animée ?

Nous avions une matière audio tellement riche que nous trouvions dommage de devoir la jeter. L’intervention de Giancarlo était très importante. Il était en quelque sorte le représentant de tout enfant qui vivait de manière clandestine, en Suède, puisqu’il parlait parfaitement le suédois, mais aussi dans le reste de l’Europe. Il était comme un symbole pour tous les autres enfants. Et puisqu’il vivait caché, David a eu l’idée d’utiliser le son, et non l’image, pour faire un documentaire animé.

Comment avez-vous gagné sa confiance pour qu’il vous parle librement ?

En fait, il parlait assez facilement de sa situation. En un sens, c’était dur, mais il était très explicite et très clair dans sa manière d’exprimer sa vie clandestine. D’autres enfants qui vivaient en cachette étaient souvent traumatisés. C’était aussi le cas de Giancarlo, mais il faisait preuve d’une lucidité étonnante. Il arrivait à faire passer son message et celui de tous les enfants dans la même situation que lui.

J’ai été honnête avec lui. Je lui ai dit ce que je faisais et qui j’étais. Je n’ai pas de formation en tant que psychologue pour enfants, mais nous avons toujours veillé à ce que les interviews se déroulent dans un milieu où l’enfant n’est pas seul, et dans lequel il se sent en sécurité. Dans le cas de Giancarlo, nous avons demandé à ses parents si nous pouvions lui parler. Ils ont dit qu’ils n’aimaient pas trop l’idée, mais que si leur fils le voulait, il pouvait le faire. Quand on lui a posé la question, il a répondu que ça ne le gênait pas de nous parler, du moment que ce n’était pas un lundi, car il avait son entraînement de foot ce jour-là ! J’ai trouvé ça très beau, cette confiance que ses parents ont montrée vis-à-vis de leur fils. Ils le protégeaient, mais ils lui laissent la liberté de choisir pour lui-même. Cela a été une rencontre très fructueuse. Depuis l’époque de l’interview, nous sommes restés en contact avec lui. Nous désirons même lui proposer d’être interprète sur un autre projet puisqu’il est grand maintenant, et que ce serait, pour lui, une bonne façon de tourner la page.

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« Hidden » date de 2002, « Slaves », de 2009. À l’époque, il n’y en avait pas tellement de documentaires animés, alors qu’aujourd’hui, on voit de plus en plus d’histoires intimes racontées en animation.

Effectivement. Mais honnêtement, je ne pense pas que toute histoire doive être racontée par le biais d’un documentaire animé. Je crois qu’il faut vraiment se poser la question de la vision, et de la justification du choix d’un genre. Le documentaire animé est devenu une mode, et il n’est pas toujours justifié.

Si tu privilégies ce genre, est-ce pour une raison d’anonymat ?

Il y a beaucoup plus de raisons qu’un seul souci d’anonymat. Avant d’entamer de nouveaux projets, que ce soit une fiction ou un documentaire, je dois répondre aux questions que je me pose, et éprouver plusieurs responsabilités. À l’égard de l’histoire, des gens qui la racontent, et aussi du public.

Parfois on entend dire : “ce sont des histoires qu’on a déjà entendues’’. Et alors ? N’est-il pas important d’en parler ? Nous devons bien traiter ces histoires pour que les gens les écoutent et en tirent quelque chose. Dans le cas de « Hidden », l’histoire de Giancarlo avait déjà été traitée. À l’époque, en Suède, si tu prononçais le mot “réfugié’’, les gens fermaient les yeux et les oreilles, tellement ils en avaient marre, donc nous avons pensé qu’il fallait absolument redéfinir ce mot, et renouveler sa signification. Avec « Slaves », ça a été le contraire. La guerre au Soudan a duré plus de 25 ans, et personne au-delà du pays ne s’y intéressait, et n’en parlait. Quand il y a eu des problèmes au Darfour, tout le monde a commencé à en parler, ce  qui rendait la situation encore plus cynique, puisque la guerre au Soudan était au moins aussi horrible que l’autre. Il se passait les mêmes, voire de pires abus au Sud-Soudan. Comment était-ce possible que personne n’en parle ? Voilà pourquoi nous tenions à raconter cette histoire que personne ne voulait raconter, par le biais de deux enfants, Abouk et Machiek, des enfants, des victimes.

Dans « Hidden » comme dans « Slaves », il y a des éléments qui n’ont pas grand-chose à voir avec la personne interviewée, mais avec les conditions de l’interview elle-même (toussotements, hésitations, problèmes d’enregistreur, …). Pourquoi les avez-vous gardés ?

Pour plusieurs raisons. Dans nos films, tout est bien réfléchi. Nous décidons après coup ce que nous voulons garder ou non, et pourquoi. Au moment de l’interview, nous n’y pensons pas trop parce que nous nous focalisons sur ce qui nous intéresse. « Slaves » et « Hidden » sont tous les deux liés à des situations tellement fragiles. Ce n’est pas évident de placer un micro et un enregistreur devant un enfant qui a une histoire difficile à raconter. Moralement, il faut absolument trouver un équilibre. Ce sont eux les héros, ce sont eux qui sont importants. Si en faisant ces documentaires, nous voulons être fidèles à ces enfants et à leurs histoires, nous avons aussi intérêt à être honnêtes avec nous-mêmes, avec nos erreurs, et nos maladresses. Nous devons nous mettre à leur place, dans la situation du documentaire. Il faut se sacrifier d’une certaine façon, parce qu’on peut couper des morceaux qui sont intimidants ou qui nous ne nous montrent pas dans une lumière très flatteuse, mais on peut aussi faire ce qu’on veut avec l’histoire des enfants. On a une responsabilité à assumer à leur égard.

Avez-vous envisagé de prendre une caméra avec vous, au moment des interviews ?

Non, absolument pas. Je suis persuadée que pour les enfants, c’était plus facile et moins intimidant de s’exprimer devant un enregistreur.

Pour « Slaves », il n’y a eu qu’une seule séance d’interview ?

Oui, juste une. Après, les enfants sont repartis au Soudan.

J’imagine que vous êtes restés plus longtemps avec eux. Est-ce qu’il y avait des choses que vous ne pouviez pas garder parce qu’elles étaient trop dures ?

Oui. Le film fait 15 minutes, et notre interview a duré entre une et deux heures. L’interview de Giancarlo était encore plus longue et le film est même plus court. Nous avons coupé, monté, et testé plein de possibilités, pour disposer de plusieurs versions, dont certaines étaient très dures. L’idée, c’était de ne rien changer, mais de décider ce qu’il fallait garder. Nous croyions que pour faire un bon documentaire animé, il fallait séduire, leurrer le spectateur, et abattre ses défenses. En revanche, si nous livrions tout ce qui était dur en même temps, le spectateur reconstruisait naturellement ses défenses. Il y avait donc un équilibre à chercher entre les deux. Par exemple, lorsqu’on traduisait les sous-titres, parfois, on n’était pas aussi explicites en anglais qu’en soudanais, la langue originale des enfants. Au lieu de décrire à quel point la mère de Machiek souffrait avant sa mort, on disait “simplement’’ qu’elle était morte.

Est-ce que les enfants vous ont parlé facilement ?

Abouk, la fille, ne parlait pas facilement, mais Machiek, le garçon, était tellement traumatisé qu’il a parlé très aisément. Je crois que ça lui a fait du bien d’être entendu.

Sur ces deux projets, vous avez été les seuls à rencontrer les enfants. Comment leurs visages ont-ils pris forme ? Sur base de vos souvenirs ou était-ce purement imaginaire ?

Nous travaillons très étroitement avec Mats Johansson, le directeur artistique, illustrateur et dessinateur des personnages. Il occupe une place aussi importante dans notre équipe que David ou moi-même. Nous adorons son style, et pourtant nous sommes très difficiles ! Il est très 2D, étant illustrateur pour des magazines. Il fait des dessins, en nous écoutant, en écoutant la bande-son. Il n’est pas là quand on voit les enfants, mais nous lui décrivons tout. Il est sensible à nos personnalités et on se connaît très bien. Il reconstruit complètement les personnages à partir de tout ce matériau. Nous travaillons beaucoup avec lui sur papier, sur le style et le dessin

Ensuite, nous travaillons avec Magnus Östergren, la personne en charge de la direction artistique et créative à tous les niveaux. Il sait parfaitement quelle technique il faut employer pour arriver à quel effet. Il nous accompagne au début du film, au moment de de la conception artistique, et il revient à la fin pour faire le compositing.

Y a-t-il des choses que tu as apprises sur le premier film qui ont pu t’aider pour le deuxième ?

« Hidden » date de 2002. Ce n’était pas facile de traduire la 2D en 3D ou en animation, nous travaillions avec une seule personne pour l’animation, et tout a pris beaucoup de temps. Avec « Slaves », nous avons travaillé avec plusieurs personnes, et nous comprenons maintenant ce que nous aurions dû faire pour « Hidden ». C’était notre premier projet, nous ne savions pas très bien comment s’y prendre. Cette fois, nous avons beaucoup mieux compris le processus, notamment la manière de travailler les mouvements des personnages. Je n’aimais pas du tout cet aspect dans « Hidden ». Magnus a affiné cet aspect dans « Slaves », et ça contribue pour beaucoup à la valeur du film. Maintenant, j’ai du mal à revoir « Hidden », tellement je l’ai déjà revu. Mais avec « Slaves » que j’ai aussi revu très souvent, je n’ai pas ce sentiment, car le film est beaucoup plus proche de David et de moi, de notre nature et de notre vision des choses.

Comment travailles-tu avec David ?

Nous avons ouvert notre propre boîte de production [Story]. Quand David fait des projets tout seul, ça ne ressemble pas du tout à notre travail ensemble. Même chose pour moi. Il est plus concerné par les grands enjeux politiques, tandis que moi, je m’intéresse aux enjeux plus personnels. On a des approches tout à fait différentes sur les choses, mais nous avons la même vision du monde. C’est pourquoi nous travaillons tellement bien ensemble, de même qu’avec Mats et Magnus. Nous sommes tous très différents, mais nous avons les mêmes “lunettes’’ pour voir le monde.

Est-ce que Abouk et Machiek ont vu « Slaves » ?

Abouk l’a vu. Elle habite en Ouganda. Elle va très bien, elle va à l’école, et je sais qu’on lui a montré le film. Machiek vit, lui, à Khartoum. Il va un peu moins bien, il a été très traumatisé. Il n’arrive pas à se concentrer sur ses études, il ne cesse pas de doubler. Je ne suis pas sûre qu’il ait vu le film. Mais une bonne nouvelle s’est produite : on a montré le film au Président du Sud-Soudan, Salva Kiir, qui est bien impliqué dans la question. On lui a envoyé 25 copies de « Slavar ». Il a promis de subsidier le travail de James Aguer qui a libéré des milliers d’enfants esclaves. Le film a eu un résultat concret sur place, ce qui est formidable. Un film si court, animé, peut quand même avoir des effets importants sur la réalité.

Propos recueillis par Katia Bayer. Retranscription, traduction :Adi Chesson

Consulter les fiches techniques de « Slavar » (Slaves) et de « Gömd » (Hidden)

Article associé : la critique de « Slavar »

G comme Gömd (Hidden)

Fiche technique

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Synopsis : D’après un entretien avec un garçon de douze ans, Giancarlo, réfugié clandestin en Suède. En combinant l’entretien réel à des images animées, nous voulons créer un espace où vous pouvez entendre et absorber, d’une façon nouvelle, l’histoire d’un enfant réfugié.

Genre : Documentaire animé

Durée : 7’30’’

Pays : Suède, Danemark, Finlande

Année : 2002

Réalisation : Hanna Heilborn, David Aronowitsch, Mats Johansson

Scénario : Hanna Heilborn, David Aronowitsch

Technique utilisée : Ordinateur 3D

Graphisme : Acne, Mats Johansson

Animation : Flemming Borgen, Jonas Moberg

Effets : Oskar Wahlberg, Mantra Animation

Musique : Jonas Bohlin

Production : Asteriskfilm, Story AB

Distribution : Story AB

Le site du film : www.story.se/films/hiddengomd

Article associé : l’interview d’Hanna Heiborn