Rosita de Dominique Abel et Fiona Gordon

Réalisé en 1997, trois ans après leur premier film « Merci Cupidon », « Rosita » est le deuxième court métrage d’Abel et Gordon. Consolidant l’évolution du duo comique vers l’expression cinématographique, ce film de 13 minutes, quasiment introuvable pour le grand public, se démarque de leur filmographie pour être le seul à avoir été écrit et filmé sans la collaboration du réalisateur Bruno Romy. Il s’inspire d’ailleurs directement d’une de leur création théâtrale, « Poison » (1994).

Au cœur d’une fête foraine, la vieille caravane de Rosita peine à attirer les clients, et malgré les rabais offerts sur les prestations, rares sont les passants qui sortent convaincus par ses numéros de voyance. Harcelés par un percepteur de foire qu’on croirait directement sorti des films muets de Buster Keaton, Rosita et son compagnon Raoul s’enfoncent dans une déchéance qui pourrait mettre en péril leur amour et leur mode de vie.

rosita

Fidèles au registre burlesque qui les a révélés au théâtre, Abel et Gordon développent dans « Rosita » toute leur énergie comique avec un jeu clownesque très physique du corps et des visages qui nous rappelle que ce sont avant tout des comédiens de grand talent. Le personnage de la voyante déchue comme celui de son assistant maladroit et un peu simple d’esprit sont parfaitement convaincants dans un registre d’émotions à la fois drôle et tendre qui pourrait complètement se passer des quelques scènes dialoguées. Les décors, costumes et maquillages, réussis, renforcent même avec brio l’atmosphère générale du film.

Côté réalisation, les mouvements de caméra sont presque inexistants, et la succession de plans fixes donne au film un côté un peu statique qui agit peut-être au détriment de l’action. Toutefois, l’enchainement de scènes de gags parvient à mettre à contribution le spectateur en tissant un lien de complicité avec lui. Lorsque dans sa caravane, la voyante en transe tente d’embobiner des badauds ébahis, on assiste avec plaisir aux efforts vains d’un Raoul essayant péniblement d’activer dans l’ombre des effets spéciaux désastreux. Boules de cristal en ballon de baudruche, numéro de spiritisme bidons, pathétiques visions extralucides, rien ne fonctionne vraiment dans la caravane de Rosita, sauf peut-être l’amour et l’humour qui les fait triompher. Conte social humoristique ou comédie légère et optimiste, « Rosita » est un essai cinématographique plutôt réussi qui met en réalité surtout en valeur l’immense talent de comédiens de Abel et Gordon.

Xavier Gourdet

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Article associé : l’interview de Fiona Gordon, Dominique Abel et Bruno Romy

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