Inseki to impotence de Omoi Sasaki

« Inseki to impotence » de Omoi Sasaki est présenté en compétition du Festival de Cannes. Ce court métrage japonais explore un thème assez rarement abordé, l’impuissance, et enrobe la narration autour d’un phénomène surnaturel, l’apparition d’une météorite dans le ciel nippon… De l’audace donc, dans cette création qui paraît atypique dans une pareille sélection !

S’ouvrant sur un corps organique pourri sur un fond blanc, le film déconcerte dès les premières secondes. Pour autant, le réalisateur bascule rapidement dans le coeur du sujet en nous faisant entrer dans l’univers quotidien d’un couple. Le décor est posé sobrement : la femme jeune, belle, nue sur le lit s’approche de son conjoint assis de dos, nu, sur une chaise dans la pièce attenante. Lorsqu’elle s’approche tendrement de lui, il l’éloigne. Elle part. Cut. L’image s’ouvre alors sur un plan large d’une ville dont le ciel est pour ainsi dire «mangé» par une immense météorite. Rien ne sera jamais explicité sur la présence de cette chose. Pour autant, au fur et à mesure des séquences, on peut supposer que le corps étranger est doté d’une force étrange incarnée sur terre par un mystérieux pizzaiolo au pouvoir sexuel exacerbé qui affole les femmes et qui comblera le manque sexuel de la jeune femme qui ne peut faire l’amour avec son conjoint impuissant.

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Dans le film, le réalisateur s’intéresse aux rapports charnels et sexuels inexistants de ce couple en crise et aux solutions qui s’offrent à eux pour y remédier. Chacun de leur côté souffre et si l’homme tente de trouver une réponse à son problème physique de façon toute à fait rationnelle (chez un médecin aux méthodes quelque peu farfelues, certes), la femme va quant à elle être confrontée à une force extérieure, extra-terrestre, inexplicable, incompréhensible qui lui permettra de satisfaire ses envies (avec le pizzaiolo).

D’un point de vue formel, le film joue la carte du surnaturel, ici donné à voir comme un principe de base. En effet, le spectateur doit adhérer tout de suite à cette météorite pour pouvoir avoir accès au film, il s’agit là d’une condition sine qua non. La météorite n’est pas crédible mais pour autant, tout repose sur son existence. L’image de cette présence est très bien relayée par un travail sur le son qui émane de la pierre et qui enveloppe littéralement les actions des personnages. Ce bruit sourd fait passer le spectateur de l’oppression à la fascination au même titre que les protagonistes du film ont peur mais sont également attirés par la météorite.

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Et puis, il y a ces séquences purement symboliques du corps organique pourri qui se retrouvent à trois occurrences dans le film : en ouverture où la pourriture est naissante, après la séquence où l’homme rentre de son rendez-vous chez le médecin où les champignons poussent et enfin, lors du dernier plan du film où les champignons sont matures. Si la référence phallique est assez claire, voire peut-être trop appuyée, on saluera l’audace du réalisateur qui, par ces incursions inattendues dans la narration, fait de ce film une sorte d’essai expérimental.

« Inseki to impotence » est un court métrage surprenant et assez inédit quand au sujet qu’il aborde. Le réalisateur ne nous livre quasiment pas de clef de lecture face à cet objet qui se termine par un happy end aussi déroutant que le reste du film. En signant ce court métrage, Omoi Sasaki fait la promesse d’un cinéma à la marge et inspiré, même s’il peut paraître de prime abord difficile à lire, et qui ne saurait laisser personne indifférent.

Fanny Barrot

Consultez la fiche technique du film

Article associé : l’interview d’Omoi Sasaki

Pour information, « Inseki to impotence » sera projeté samedi 25 mai à 11h, salle Debussy, et à 17h, salle Buñuel, dans le cadre de la projection des courts métrages en compétition. Une projection est également prévue le jeudi 30/05, à 20h30, à Paris, au Cinéma du Panthéon lors de la reprise des courts métrages en compétition au Festival de Cannes 2013

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