Horn OK Please de Joël Simon

Programmé lors de la dernière séance Short Screens intitulée « Beyond Bollywood : un autre cinéma indien », l’animation « Horn OK Please » de Joël Simon est le fruit d’un véritable cocktail : produit en Irlande du Nord et réalisé par un Belge, le film a fait appel à une grande équipe d’Indiens pour montrer la vie à Bombay vue à travers les yeux d’un taximan! Un doux moment d’allégresse qui venait couronner une séance éclectique posant un regard inhabituel sur l’Inde, le film a d’emblée été un succès et a reçu l’accolade du Coup de cœur du public.

Inspiré par son propre voyage dans le pays qui ne laisse personne indifférent, Simon a reconstruit à merveille en stop-motion le monde trépident et agité de Bombay. Un vrai melting-pot de nationalités, de cultures, de classes sociales et de modes de vie, c’est que cette gigapole de plus de 20 millions d’habitants est la ville la plus peuplée de l’Inde.

Pour traiter son sujet vaste, le réalisateur a choisi comme protagoniste un profil qui est incontestablement le plus à même de vivre cette diversité au quotidien : l’omniprésent taximan. Le titre fait d’ailleurs référence à cette fameuse devise, non grammaticale et insensée, marquée sur les taxis et camions, invitant les doubleurs à s’annoncer en klaxonnant. On accompagne donc ce conducteur qui ne rêve que de s’acheter un taxi climatisé (le Cool cab), bien plus chic que sa carriole croulante. A partir de cette prémisse basique se défile une gamme quasi infinie de types qui constituent le tissu cosmopolite de Bombay : des amoureux pudibonds qui passent leur vie en taxi pour avoir un peu d’intimité et pour échapper aux sanctions contre la public display of affection ou la «démonstration publique d’affection » (se tenir par la main, s’embrasser, etc.), des touristes paumés terrorisés face à l’inconnu, des eunuques-mendiants collants qui terrorisent à leur tour le chauffeur, des mamies persuadées de se faire avoir avant même que la voiture ne démarre, des gangsters louches, des politiciens encore plus louches, des vedettes liste B frustrées et arrogantes… Bref, un monde que les spectateurs familiers reconnaissent tout de suite et que les nouveaux venus trouvent incroyable, mais même ceux-ci finissent par comprendre que it happens only in India !

En même temps, le travail remarquable de l’animation aide à plonger le spectateur directement dans l’univers recréé. Le chromatisme riche voire kitsch qu’on associe avec l’esthétique indienne est rendu parfaitement par l’image soignée. En l’absence de dialogue (les bribes de drôleries prononcées par les personnages en différentes langues indiennes sont délibérément laissées non traduites), la musique – une partition simpliste évoquant les jeux vidéo et les cartoons d’antan – ajoute une dimension comique, et incite à ne pas prendre les choses trop au sérieux : une leçon précieuse en ce qui concerne l’Inde.

Une excursion filmique vivement recommandée autant pour les indophiles acharnés que pour les curieux de ce pays impénétrable et sans pareil, terre de mille et une visages !

Adi Chesson

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