Serenity Now de Simon Cartwight

Mis à l’honneur par le focus que Format Court lui réserve, Simon Cartwright n’en est pas à sa première réussite avec « Manoman » qui a remporté le Prix Format Court au Festival Court Métrange en octobre dernier. Il y a 4 ans, maniant déjà avec dextérité un art de la métaphore débridée et accrocheuse, Simon Cartwright livrait un pamphlet aussi concis qu’appuyé avec le très très court-métrage « Serenity Now ».

Dans la cabine d’un train, un homme est heurté par les manières de son voisin de cabine qui lui laisse imaginer les pires débordements aux conséquences tragiques. Le voir poser nonchalamment ses chaussures sur les sièges déclenche chez notre personnage des sueurs froides, des flashs violents d’images de guerre et d’horreur…

Pour convoyer ses idées à un rythme soutenu, et notamment au rythme de la pensée du personnage, « Serenity Now » use du stratagème de la citation, chacune de ses images se rattachant à une référence connue du public, qui lui permet d’être comprise plus facilement car déjà fortement connotée.

Le titre en est le premier signe, « Serenity Now » se situe dans la réflexion d’un grand monument du cinéma « Apocalypse Now ». Et si les personnages de Simon Cartwright sont muets, le fait que le film nous montre le train de pensée du protagoniste raccroche immédiatement notre lecture du court-métrage à celle de la vision du Capitaine Willard, le personnage incarnée par Martin Sheen dans le classique de Coppola.

Par ailleurs, cette référence guerrière se répercute sans transition sur la bande son, puisque le moindre mouvement des personnages est traduit par un bruitage d’armurerie, fait de sons métalliques et menaçants.

La menace représentée par le nouveau passager de la cabine culmine alors qu’il étire ses jambes sur la banquette du protagoniste, une montée de stress l’inonde alors sous un flot d’images brutales, d’humiliation, qui lui font sauter au cou de son supposé agresseur jusqu’à le défigurer dans un accès de violence cathartique.

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Au grand dam du personnage peut-être, cette libération sanglante n’est, comme les flashs d’images violentes la précédant, que le produit de son imagination. Le voisin de cabine se porte bien mais apeurée par l’expression tendue et humide de son vis-à-vis, ôte fissa ses pieds pour reprendre la position indiquée. C’est une victoire pour notre personnage, mais une victoire par la terreur.

Par le biais d’une animation stop motion qui permet de désamorcer un ton très cynique de la condition humaine moderne, brassant des références allant d’Alfred Hitchock et « L’inconnu du Nord-Express » aux derniers grands scandales médiatiques, Simon Cartwright exulte les tensions et paradoxes qui écartèlent les contemporains en proie à leurs sentiments les plus forts, les plus violents.

Gary Delépine

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