Drôles de César

Vendredi soir, de 19h à 1h du matin, les membres de l’Académie des Arts et Techniques du Cinéma ont vécu et supporté tant bien que mal la très longue des Nuit des César. Ceux qui avaient prévu le coup avaient emmené un coussin avec eux et récupéré leurs manteaux avant la fin. Les autres, coincés au milieu des rangées, fermaient de temps en temps un oeil en espérant que les caméras de Canal ne leur fassent pas de mauvaises blagues.

Comme d’habitude, Edouard Baer, le maître de cérémonie, invitait les primés à faire court. C’était sans compter les remerciements généralisés (« Merci à mes parents, mes enfants et mon poisson rouge sans qui je ne serais pas là »), les imprévus (Abderrahmane Sissako remontant plusieurs fois sur scène) et les moments d’émotion qui ne pouvaient que s’installer dans la durée (le discours généreux et touchant de Pierre Niney ou encore M et Ibrahim Maalouf jouant ensemble).

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Au bout de plusieurs heures aux César, on commençait toutefois à trouver le temps long et à gigoter sur son siège numéroté en velours. C’est à ce moment-là que le César du Meilleur court métrage d’animation a été décerné à Chloé Mazlo et à ses « Petits cailloux », un film coloré, un tantinet trop long, parfois un peu trop appuyé, s’intéressant aux angoisses d’une jeune femme incarnée par la réalisatrice elle-même. Malgré ses petites imperfections, le film doté de bonnes intentions et de jolies trouvailles animées, produit par Jean-Christophe Soulageon (Les Films Sauvages), s’est distingué face aux trois poids lourds bien moins intéressants : le mignon mais trop enfantin « La petite casserole d’Anatole » de Eric Montchaud, le visuel mais peu stimulant « Bang Bang ! » de Julien Bisaro et le beaucoup trop long « La bûche de Noël » de Patar et Aubier.

Par la suite, les choses se sont compliquées. Quand l’enveloppe s’est ouverte et que « La Femme de Rio » de Emma Luchini et Nicolas Rey a été désigné comme le Meilleur court métrage de l’année, certaines têtes fatiguées ont sursauté, l’hébétement s’est installé et les discours prévus par les autres courts-métragistes en lice sont allés valser à la poubelle.

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Sans qu’on sache vraiment pourquoi, « La Femme de Rio », l’un des pires films français jamais vus, faisait partie de la shortlist des 6 films en lice. Sans qu’on sache vraiment pourquoi, le film le plus faible en termes de scénario, d’intrigue et de jeu d’acteurs, a obtenu le César.

On sait à quel point le jeu est cruel pour les laissés-pour-compte et que le court, format mal aimé, a besoin de valorisation et d’une vitrine telle que celle des César pour gagner en visibilité. On sait aussi que chaque année, les César offrent leur lot de contentement et de mécontentement. Si la profession a su distinguer à juste titre certains films ( « Les Combattants », « Timbuktu »), elle est complètement passée à côté des cinq autres courts en lice pour le César (et en premier lieu « Les Jours d’avant » de Karim Moussaoui).

Katia Bayer

5 thoughts on “Drôles de César”

  1. On sent que Katia est remontée, et elle a raison. L’académie des Cesars se fait remarquer pour son manque total de gout concernant tout ce qui sort de la fiction « classique ». Quand il s’agit de Documentaires, d’Animation, de Courts métrages, on peut s’attendre a des choix aberrants liés a la méconnaissance de ces genres par les membres de l’académie. Il y avait, selon les gouts, des films nominés plus intéressants que La Femme de Rio, pour sur !!!

  2. http://www.academie-cinema.org/academie/comites.html

    Sans que vous ne sachiez pourquoi? C’est une blague ? Vous faites partie du comité, alors peut être que vous n’avez pas voté pour, mais vous savez qui l’ont fait … Ensuite à l’exception d’un film, c’est les Pires courts métrages des films présélectionnés… Re ensuite. J’aimerais bien savoir si vous visionnez les films en dehors des festivals de catégorie 1, car bon…. Y’a malaise qd même pour juger d’un production de l’année quand on ne voit les films qui passe certaines passerelles avec le même bon étrier qu’aux césars….

  3. Et oui, Katia est remontée, et oui, certains films (de fiction) étaient bien plus intéressants que le lauréat, mais ça ne veut pas dire pour autant qu’il faut baisser les bras (tu as raison, Albane). C’est quoi après tout, un César ? La seule récompense, le seul prix du court peut-être ? Bon, le plus people, c’est vrai..

    Petite précision quand même : la production annuelle (quelques centaines de films) est bien loin de se résumer à 12 films, puis 6, puis 1. Et ce n’est pas parce qu’on fait partie de ces comités (merci Lucie de le rappeler !) qu’on ne peut pas estimer que les films différents, fragiles et peu diffusés ne sont pas assez représentés. Par ailleurs, quelques voix ne font pas toujours la différence. Elles ont pour autant le mérite d’exister et essayent de se faire entendre. Maintenant, il y a quand même quelques bons films qui arrivent aux César (si, si…) et c’est pour eux (mais aussi pour les autres) qu’on continue à aimer le court et à le soutenir !

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