Cornée de Colin Laubry, Stéphane Blanquet, Arnaud Crillon, Valentin Gasarian, Ca Theuillon

Quelque soit la porte par laquelle on entre dans l’univers créé par Stéphane Blanquet, l’un des réalisateurs de « Cornée », on n’en ressort pas tout à fait pareil. Les chemins par lesquels il nous promène se trouvent généralement dans des contrées aux frontières de la morale, de la conscience et de la folie. Fidèle à lui-même, son nouveau court métrage « Cornée » poursuit cette exploration visuelle et sensorielle, de quoi hanter nos nuits pour notre plus grand plaisir !

Projeté en ouverture de L’Etrange Festival en septembre dernier, «Cornée » est un film initié par Le Laboratoire d’Images et réalisé avec la collaboration de plusieurs étudiants de l’école supérieure en animation 3D Supinfocom Arles. Rompu aux techniques d’animations en papier découpé ou en 2D depuis la fin des années 90, Stéphane Blanquet poursuit ainsi ses expérimentations en adaptant en animation 3D les mondes foisonnants qu’il a imaginés.

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Avant de rentrer dans le vif du sujet, rappelons que ce fils spirituel (et illégitime) de Charles Burns et de Jérôme Bosch, œuvre avec brio dans l’illustration, l’édition, la bande dessinée et le film d’animation depuis plus de 20 ans. Dans « Cornée », son dernier film en date, il convoque les figures obsessionnelles de son univers fait d’insectes rampants, de plaies entrouvertes et de bien d’autres joyeusetés. Il prend un malin plaisir à venir gratter là où ça fait mal, ses personnages se retrouvant dans des situations étranges, inquiétantes voir extrêmes, avec toujours une petite pointe d’humour noir.

À travers une galerie de tableaux aussi envoutants que terrifiants, le film propose une jolie promenade sous acide dans les chimères fantasmagoriques d’une personne sur le point de se faire opérer l’oeil par un ophtalmologue aux méthodes peu orthodoxes. Zone du corps pour le moins sensible et ô combien importante au cinéma, la cornée – la partie antérieure transparente du globe oculaire – filmée est donc mise à rude épreuve… Stéphane Blanquet ne se contente pourtant pas de maltraiter le corps, il malmène aussi la représentation qui en est faite et notamment les interdits qui y sont liés, l’œil, et donc la cornée, étant communément considérés comme le miroir de l’âme.

Dans un précédent court métrage en forme de profession de foi intitulé « Mode d’Emploi », Stéphane Blanquet expose son approche de la création et notamment son rapport complexe au corps humain. Voici quelques unes de ses réflexions à ce propos, qui ne sont pas sans rappeler « Cornée » : « penser à l’étrange, à la tendresse, à la cruauté ou bien la vengeance primesautière. Penser à son propre dégout et à ses répulsions, penser à la peur, au léger frisson, ne pas oublier l’importance du corps, le corps est une matière noble, de la pâte à modeler pour toute forme de création (…) ».

Année après année, Stéphane Blanquet reste bel et bien cohérent avec les règles qu’il a lui-même énumérées. En utilisant cette fois-ci la technique de l’animation 3D, il est parvenu à approfondir et à intensifier la puissance suggestive des images et des situations qu’il a imaginés. Au résultat, « Cornée » est un véritable travail d’orfèvre, où chaque son, chaque détail de l’image est au service des visions torturées de son créateur. Un film sans concessions autant pour le public que pour son auteur.

Julien Beaunay

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Pour celles et ceux qui voudraient en savoir plus sur le travail de Stéphane Blanquet, cliquez ici.

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