Tout s’est bien passé de François Ozon

Adaptation du livre au titre éponyme d’Emmanuèle Bernheim, Tout s’est bien passé, l’avant-dernier film de François Ozon (Cannes 2021) est sorti récemment en DVD chez Diaphana avec en bonus des interviews exclusives du réalisateur, des acteurs et un court-métrage documentaire sur l’artiste plasticienne Claude de Soria, l’épouse du personnage central, André Bernheim.

De quoi parle Tout s’est bien passé ?

Grand débat de société, le droit à mourir dans la dignité est un sujet aussi tabou que « banal » et quotidien. Ce film biographique débute lors de l’accident vasculaire cérébral d’André Bernheim (André Dussollier). Présenté comme un homme charismatique et épicurien, ce dernier se retrouve alors diminué et demande à sa fille Emmanuèle (Sophie Marceau) de l’aider « à en finir ».

Le film retrace le récit des neuf mois qui ont suivi cette demande, dans lesquels les souvenirs et les histoires de famille reviennent à la surface. Pourtant, les deux sœurs Emmanuèle et Pascale (Géraldine Pailhas) restent unies, impliquées dans la seule mission qui a alors de l’importance : assister leur père dans sa décision.

Qu’en a-t-on pensé ?

Ce dernier film de François Ozon ne tombe que très rarement dans le pathos, le discours ne se veut pas plus militant. Le réalisateur ne prend pas de position franche. Il fait intervenir de nombreuses perceptions qui laissent la liberté à tout un chacun de se forger sa propre idée, et surtout sa propre volonté sur ce droit. L’élément central du film reste et demeure le personnage principal et son goût de la vie, mais ne cherche aucunement à influencer une idéologie commune.

Dans les interviews qu’Emmanuèle Bernheim a donné à la sortie de son livre, elle évoque le « dernier projet commun » qu’elle a accompli avec son père. Une forme de résilience, surtout d’amour inconditionnel, d’accepter et d’orchestrer cette étape fatale. François Ozon arrive à retranscrire ce lien indéfectible grâce à une chronologie rythmée du récit et à la performance des trois acteurs principaux.

François Ozon célèbre ainsi la vie avec des personnages aux émotions et caractères pluriels. De vielles histoires, de vieilles rancœurs et de vieux amours remontent à la surface, ponctuent le film et le rend digeste ; l’art et la musique en toile de fond. Ces multiples péripéties sonnent comme des sursauts d’espoir, des accroches qui retiennent le personnage à sa vie et en même temps la commémore. Elles permettent également de questionner nos propres motivations, et de réévaluer notre rapport à la vie.

Qu’est-ce qui a retenu notre attention dans l’édition DVD ?

Dans les bonus, on peut apprécier les interviews (filmées à Cannes en 2021) des trois acteurs et de François Ozon sur leur relation avec l’histoire d’Emmanuèle Bernheim et la difficulté d’être justes lorsqu’on aborde ce sujet délicat.

Un grand coup de cœur également pour le court-métrage documentaire sur la sculptrice Claude de Soria, l’épouse de André Bernheim, interprétée discrètement à l’écran par Charlotte Rampling. La relation entre l’artiste et le collectionneur est volontairement anémiée de Tout s’est bien passé. Absente dans les derniers moments de la vie de son mari, cette femme lui a pourtant permis d’une certaine manière d’avoir accès à celle qu’il a vécu : elle l’a initié à l’art contemporain, l’a incité à acquérir des oeuvres et lui a permis de se familiariser et d’intégrer ce milieu confidentiel. On découvre alors son parcours, l’évolution de sa pratique artistique et les diverses expositions qu’elle a présentées. Ce film documentaire permet de compléter le portrait de cette famille atypique, dont l’influence sur le domaine des arts reste encore aujourd’hui conséquente.

Anne-Sophie Bertrand

Tout s’est bien passé de François Ozon, édition Diaphana. Film et entretiens, scènes coupées, essais lumières et costumes, projets d’affiches, documentaire : « Claude De Soria, sculpteur » de Michelle Porte

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