Roberto le canari de Nathalie Saugeon

Parmi les courts-métrages présélectionnés à l’édition 2020 des Césars, il faut compter sur Roberto le Canari, déjà sélectionné à Clermont en 2019. Il tisse un parallèle subtil entre les peines des enfants et celles des adultes. Réalisatrice et scénariste, Nathalie Saugeon a notamment écrit le scénario de Ma Révolution, réalisé par Ramzi Ben Slimane (Festival Premiers Plans d’Angers en 2016), et de Le Fils de l’autre, de Lorraine Lévy (Grand Prix au Festival international du Film de Tokyo en 2009).

Roberto, le canari de Max et Cléo, vient de mourir : c’est le petit Max qui l’annonce à ses parents, un matin de vacances. On l’enterra dimanche chez Grand-Mère, où Cléo, en vacances chez son oncle et sa tante, rejoindra pour la cérémonie son frère et ses parents.

Si Roberto ne perdra plus ses plumes, Elsa, la mère des deux enfants, perd ses cheveux. La prochaine fois qu’elle la verra, dit-elle à sa mère, elle sera blonde. Evoquée avec légèreté, par le seul prisme capillaire, la maladie de la mère fait écho à la mort prématurée, et finalement dérisoire, de l’oiseau.

Magnifique de gravité et de tendresse, Elodie Bouchez donne à Elsa une profondeur mêlée de simplicité. Ni Mère Courage ni malade pathétique, la comédienne joue ce personnage avec naturel et sobriété. Le grain de sa peau, dont on perçoit les ridules et les aspérités, est filmé de près, ce qui accroit encore le sentiment de sérénité diffusé par le personnage.

Un sentiment de sensualité aussi : c’est alors qu’elle s’apprête à faire l’amour qu’Elsa se retrouve, pour la première fois, avec une mèche de cheveux dans la main. Surtout, les plans rapprochés sur son visage filment des regards et sourires à destination de son mari, joué par David Kammenos, dont on ne saurait se méprendre sur le sens. Les regards que l’un et l’autre s’échangent semblent planer au-dessus des autres et du quotidien, comme si, malgré la mort et la maladie, leur désir était seul au monde. La musique des Pêcheurs de perles de Bizet, choisie pour accompagner l’enterrement du canari, résonne on ne sait plus pour qui. N’est-elle pas, d’ailleurs, quelque peu grandiloquente pour un simple oiseau domestique ? C’est ce que nous laisse supposer le fou-rire final des deux parents.

Car, en dépit des thèmes abordés, Roberto le canari fait la part belle à l’humour : ainsi en est-il du second baptême que Julien, le père, donne à l’oiseau quand il le place au congélateur pour le conserver jusqu’à l’enterrement : « Courjault », en référence à une congélation bien connue. C’est là l’une des importantes qualités de ce film que de parvenir à réunir humour et gravité, quotidien et sensualité. Un film également dont la subtilité permet différents degrés de lecture que l’on ne saurait épuiser.

Julia Wahl

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