Jeunesses françaises de Stéphan Castang

Nominé aux César, programmé à Short Screens #21 « Spécial Jeunesse » et lauréat du Prix du public exæquo avec « The Ground Beneath » de René Hernandez, « Jeunesses françaises » présente une série de portraits d’adolescents cadrés au visage. Dans un noir et blanc intemporel, Stéphan Castang y révèle subtilement les caractères propres au bel âge.

À l’initiative de la Compagnie « Le Théâtre de la Tentative », des artistes issus d’horizons différents (plasticiens, photographes…) ont voulu poser une réflexion sur la jeunesse d’aujourd’hui. « Jeunesses françaises » en est le résultat cinématographique.

Des jeunes de seconde du lycée de Courbet de Belfort se prêtent au jeu de Stéphan Castang : mettre en scène un entretien chez le conseiller d’orientation. Un conseiller qui prend tantôt les allures d’un directeur des Ressources (in)humaines, tantôt celles d’un bon père de famille.

Même si les adolescents ont participé à l’écriture du film, ils n’en sont pas moins troublants de vérité. Et la fiction se fait documentaire le temps de capturer les gestes maladroits, les regards fuyants, les tressaillements à peine perceptibles quand les jeunes parlent de leur avenir avec plus ou moins de conviction, de doutes, de colère ou de certitude. Au-delà du personnage imaginé et construit, en définitive, les élèves se racontent et se dévoilent plus qu’ils ne le pensent.

L’intention de Castang était, semble-t-il, d’arriver à universaliser une approche intimiste car le plus intéressant pour lui n’est pas nécessairement ce que les jeunes disent mais bien ce qu’ils ne peuvent s’empêcher d’être. D’où la volonté d’utiliser un dispositif minimaliste du même plan serré, en noir et blanc. Un champ sans jamais de contrechamp. Un choix assumé qui montre quelque part l’incapacité de l’autorité à répondre judicieusement aux questionnements des jeunes, ce qui permet de déceler les limites et les failles existantes entre le système éducatif et la société. Celui-ci ne peut plus former, « produire » ce que la société attend de lui.

Dans son huis-clos académique, Castang dépeint le portrait d’une jeunesse perdue, paumée tout comme il aime sublimer celui d’une jeunesse aussi assurée que volontaire, aussi hargneuse que provocatrice. Celle-la même qui jetait les pavés parisiens à la figure des uniformes et que l’on surprend quelques années plus tard à tagger « No Future » sur les murs de briques londoniens.

Marie Bergeret

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