Onder ons de Guido Hendrikx

« Je veux me fuir moi-même mais je n’y arrive pas ! Je ne peux pas m’échapper ! » (« M, Le Maudit », Fritz Lang, 1931)

Présenté ces jours-ci à IndieLisboa en compétition internationale, lauréat du Prix Format Court et du Prix VEVAM (prix du Meilleur film néerlandais) au Festival Go Short qui s’est déroulé à Nijmigen du 8 au 12 avril dernier, « Onder ons » a séduit le jury de Format Court pour son sujet tabou traité avec autant de sobriété et de pudeur que de sensibilité. Le film sera projeté le jeudi 14 mai 2015, à 20h30 au Studio des Ursulines (Paris, 5ème), en présence du réalisateur dans le cadre de la séance spéciale Prix Format Court.

Également programmé en début d’année à Clermont-Ferrand dans la section Labo, le film de Guido Hendrikx, ancien étudiant de la Nederlandse Filmacademie, nous confronte à des témoignages de pédophiles qui dévoilent leurs désirs les plus intimes. En partant du conflit qui existe entre la morale et l’instinct naturel, le réalisateur s’est intéressé à ce sujet tabou en donnant la parole à trois personnes qui, dans l’anonymat le plus complet, expliquent leurs difficultés à gérer leur attirance sexuelle.

Le mérite du film d’Hendrikx est bien d’avoir tenté de faire comprendre le phénomène de la pédophilie en lui offrant une voix au travers de récits tantôt fragiles, tantôt choquants mais toujours criants de sincérité. Petit à petit, au fur et à mesure du film, le spectateur se glisse dans la peau des pédophiles pour être amené à ressentir leur souffrance et leur mal-être.

Le cinéaste opte pour une mise en scène métaphorique où l’image illustre les témoignages recueillis. La forme est dès lors au service du contenu et, plus qu’entendues, les paroles deviennent alors tangibles et permettent de donner naissance à une réelle empathie et à une meilleure compréhension du sujet. Le film tourné dans un noir et blanc significatif se compose de ralentis stylistiques et de nombreux travellings qui figent la réalité dans une horizontalité terrienne mettant en évidence la difficulté du pédophile de s’élever et de se libérer de ses pulsions sexuelles qui l’empêchent de vivre normalement.

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Dans ses choix de plans et de montage, le réalisateur utilise le motif de la frontière de façon récurrente ; souvent, le regard est gêné par une ligne (fenêtre, barrière) qui traverse le plan, coupant l’image en différentes parties, explorant habilement cette zone grise, cette sorte de no man’s land qui sépare la raison de l’instinct, la normalité de la déviance, le bien du mal…

Film d’école d’une grande maturité, « Onder ons » pose un regard intelligent et sans jugement sur l’une des déviances sexuelles les plus brûlantes de la société moderne.

Marie Bergeret

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