Viejo Pascuero de Jean-Baptiste Huber

« Quelle merde vous avez dans le cœur et dans la tête, vieux Père-Noêl, pour laisser sous mon lit une toupie, une trompette et une balle en plastique !!! ». Hélas, c’est bien connu, plus l’espérance est grande, plus la déception est violente… Et pour Jaimito, petite canaille des bidonvilles de Santiago (Chili), qui tout au long de l’année s’était donné un mal fou à troquer son attitude de diablotin contre une réputation de garçonnet aussi mignon qu’exemplaire, rien n’excusera jamais, ô grand jamais, l’affront qui lui a été fait. La bicyclette, le train électrique, la paire de patins à roulettes et le jeu d’Atari : où sont donc les récompenses de cette année rude en complaisance ? Aider les vieilles à traverser et se tuer le cerveau à étudier n’aurait donc servi à rien ? Bien décidé à descendre le personnage légendaire de son piédestal, le jeune chilien lui a concocté une lettre qui sent clairement le sapin, dans une prose latine injurieuse n’ayant rien à envier à l’irrévérencieuse chanson de Renaud, « Le Père Noël Noir », qui à l’époque déjà, lui promettait un aller-retour express vers le Pôle Nord.

À la voix-off éraillée d’un gamin empreint d’une franchise de tête brûlée aussi attachant que l’était Antoine Doinel dans « Les 400 coups » de François Truffaut, se superpose des images de docu-fiction amateur, dévoilant un enfant en proie à l’errance dissimulé derrière des pitreries gaguesques, le rapprochant alors d’une autre célèbre figure du cinéma, le personnage burlesque de Charlot. En utilisant les armes du rire et du cynisme, Jean-Baptiste Huber en profite pour attirer l’attention du spectateur sur les répercussions de l’extrême précarité qui règne au sein des bidonvilles et dont les plus petits, pas toujours désirés, sont les premières victimes. Enfin, en confrontant tradition et condition sociale sur un ton explosif, le court-métrage « Viejo Pascuero » met en lumière des phénomènes sociaux tels que l’influence, les normes, le conformisme ou encore la comparaison sociale, desphénomènes universels auxquels aucun individu ne se soustrait, ce quelque soit sa situation socio-culturelle, économique, politique ou son groupe d’appartenance.

Lola L’Hermite

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