Retour sur Mauvais Genre

Mauvais Genre est un festival à part dans le paysage festivalier actuel. Il y est question d’œuvres déjantées et ovniesques, de films de genre jusqu’au-boutistes, de pelloches hors normes. Né à Tours de la passion d’une équipe supervisée par Gary Constant, il trouve sa place quelque part entre le Festival de Gérardmer et l’Etrange Festival à Paris, et nous propose, d’édition en édition, une programmation pointue de films venus des quatre coins du globe et pour la plupart inédits.

Cette année, sous l’œil attentif du Jury – composé entre autres de l’acteur Thierry Frémont, du maquilleur SFX Steve Johnson (The Abyss, SOS Fantômes, etc.), du journaliste Jean-Baptiste Thoret, ou encore de l’écrivain Thomas Day – une dizaine de longs métrages se retrouvent en compétition, parmi lesquels figurent Balada Triste de Trompeta de Alex de la Iglesia, le surprenant film coréen à sketches The Neighbor Zombie de Oh Young-doo, le nouvel ovni super-héroïque de Takeshi Miike, Zebraman 2, la suite d’un faux docu sur la vie tumultueuse de deux hard-rockers, Fubar 2 de Michael Dowse, ou encore le film américain coup de poing Red, White and Blue de Simon Rumley.

En complément de la compétition, une nuit spéciale SF est organisée, au cours de laquelle est montré, pour la première fois, Kaydara, homemade fanfilm français sur l’univers de Matrix, bourré d’effets spéciaux et réalisé à deux mains pendant six ans par Savitri Joly Gonfard et Raphaël Hernandez. D’autres films hors compétition sont projetés, dont l’attendu Mirages, premier film franco-marocain d’un jeune réalisateur, Talal Selhami, qui voit cinq personnes perdues dans le désert, assaillies par des visions cauchemardesques, luttant pour leur propre survie. Une œuvre originale et remplie d’idées et de passion.

D’autres séances titillent les sens, avec des titres comme le dérangeant Midori-Ko, film d’animation japonais au graphisme très « plymptonien » signé Keita Kurosaka, un ciné concert autour du film L’Homme Qui Rit de Paul Leni avec l’immense acteur allemand Conrad Veidt, ou encore la diffusion en « séance rose » de l’œuvre culte pornographique des frères Mitchell, Derrière la Porte Verte.

Côté courts métrages, trois grandes sélections se profilent : une sélection de films en compétition, un sélection hors compétition et une séance spéciale Mad In France. En compétition, Mutantland est une sorte de « bande démo » 3D impressionnante, en provenance des studios de Phil Tippet (Starship Troopers). Comme un Chien de Benoît Delépine est un mini film noir pour lequel il a fait appel à des têtes connues : Barbet Schroeder, Valérie Maes pour le casting et Stéphane Elmadjian au montage. The Old Ways de Michael Vass est un court canadien en noir et blanc sur l’absurdité de l’exécution d’un adolescent qui ne se passe pas comme prévu.

Un autre film canadien, Junko’s Shamisen de Solomon Friedman, dans un style proche de Sin City, est une histoire de vengeance à l’époque des samouraïs. Enfin, Danny Boy de Marek Skrobecki nous plonge dans un univers d’animation en volume où la norme est de ne pas avoir de tête, le personnage principal étant très malheureux car affublé d’une tête. Il lui faudra rentrer dans la masse, et donc se couper la tête, pour espérer trouver l’amour. Un court ambitieux et pessimiste, mais rempli d’humour et de burlesque. D’autres films, dont deux français, complètent cette sélection très éclectique, qui fait la part belle à l’animation.

Une sélection de courts hors compétition et une séance spéciale Mad In France complètent la programmation de courts métrages de cette année. Après une première carte blanche Mad In France en 2010, Erwan Chaffiot remet le couvert avec ses coups de cœur de l’année en cours qu’il a chroniqués dans Mad Movies. Il nous propose une belle brochette de films, dont 56 Pesos de Denis Larzillière, un western graphique et romantique utilisant des techniques visuelles proches de Sin City. Eric de Nicolas Simonin est un film de terreur pure très réussi, dans lequel un homme, attendant une nuit un train qui ne vient pas, va s’aventurer trop loin, attiré par une mystérieuse voix féminine.

VNR de Vincent Gatinaud marie un humour trash et potache à un film d’action rythmé et superbement chorégraphié, ce dont témoigne un plan séquence d’action dans une maison avec de multiples cascades au milieu du film. Mon Père de Patrice Gablin raconte une histoire d’ogre, avec beaucoup de classicisme, mais aussi pas mal de classe, bien servi par une très belle photographie et un découpage minutieux.

Enfin, Ratrix Hero nous rappelle à notre bon souvenir les noms de Savitri Joly-Gonfard et Raphaël Hernandez (Kaydara). Déjà plongés dans l’univers de Matrix (Ratrix Hero fait partie intégrante de Kaydara), les deux jeunes réalisateurs mélangent animation en pâte à modeler et SFX et racontent les aventures d’un rat endossant le costume de Néo. Vivement l’année prochaine pour une nouvelle dose de films hors des sentiers battus…

Julien Savès

Le palmarès de cette 5ème édition :

Prix du public (court métrage) : Danny Boy
Prix du public (long métrage) : The Neighbor Zombie

Mention spéciale Jury jeunes : Red, White and Blue
Prix du jury jeune (court métrage) : Les Conviviaux
Prix du jury jeune (long métrage) : The Neighbor Zombie

Mention pour l’interprétation, Jury Pro : Amanda Fuller pour Red, White and Blue
Prix du jury (court métrage) : Danny Boy
Prix du jury (long métrage) : Fubar 2

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