Best of 7, le Best of d’Anima en 2010

Doté d’une jaquette signée du dessinateur belge François Schuitten, le DVD Best of Anima n°7 regroupe l’ensemble des courts métrages primés au Festival d’animation Anima en 2010. La galette contient pas moins de neuf courts métrages d’animation aux styles variés, accompagnés de quelques bonus (bande-annonce, autoportraits). Le DVD est édité par Folioscope, en collaboration avec Cinéart.

Il y a dans ce DVD quelques oeuvres illustres, multi-récompensées et diffusées, comme « Logorama » des H5 (produit par Autour de Minuit), lauréat d’un Oscar en 2010 et d’un César en 2011, et « Madagascar, Carnet de Voyage » de Bastien Dubois (produit par Sacrebleu), nominé aux Oscars en 2011.

On y trouve également l’oeuvre expérimentale de Gil Alkabetz sur le tableau de la Cène de Da Vinci, le fascinant et déconstruit « Der Da Vinci Timecode », lauréat d’un coup de coeur en 2010, ainsi que le fan film impressionnant de Bruno Collet sur Bruce Lee, « Le Petit Dragon » (produit par Vivement Lundi !), véritable ode au maître d’arts martiaux qui raconte comment une figurine à son effigie prend vie dans la chambre d’un fan et se frotte à divers dangers environnants ; un court très maîtrisé techniquement, notamment dans son mélange d’animation en volume et de prises de vues réelles, et qui porte un regard d’enfant, généreux et plein d’authenticité, sur son sujet.

D’autres oeuvres viennent enrichir la sélection, comme « Orsolya » de Bella Szederkenyi, film étudiant narrant l’histoire d’une jeune fille, mal dans sa peau, qui se déplace de manière particulière, la tête à l’envers. Ayant du mal à s’intégrer à la société, elle essaye de trouver une utilité à ce « moyen de locomotion », en offrant ses services pour attraper des objets ayant roulé sous les meubles, hors de portée des gens. C’est alors qu’elle fait la rencontre d’un homme se réfugiant sous un lit, qu’elle l’aide à en sortir, et qu’un amour naît entre eux deux. Voilà une jolie historiette soutenue par un trait simple mais assuré.

« Au Bal des Pendus » de Johan Pollefoort (produit par Les Films du Nord, La Boîte,… et le CCRAV), propose, lui, un univers poétique radical, sombre et surréaliste, au graphisme hachuré, avec une mixité de styles et de techniques, à base de retouches et d’assemblages divers. Il y est question d’une fanfare d’animaux exécutant une danse macabre dans un style jazz hip hop, de fantômes squelettes dans un hôpital, d’un homme en armure jouant aux échecs avec la Mort. Rempli de symboles, de références et d’images fortes, ce petit ovni s’inscrit durablement dans notre mémoire et n’a pas démérité son prix SACD.

« Divers in the Rain » d’Olga et Priit Pärn est un film estonien qui a obtenu le Grand Prix d’Anima 2010 du meilleur court métrage international, suivi d’une belle carrière en festivals. Réalisé à deux mains, dans deux styles différents mais complémentaires (un style associé à chaque personnage principal), ce court raconte un amour à distance entre un plongeur et une dentiste qui exercent leurs talents à deux moments différents de la journée (le jour pour le plongeur, la nuit pour la dentiste). Ils ne peuvent se voir que par intermittence, ce qui met en péril leur couple. Oeuvre protéiforme, cultivant le burlesque à la Jacques Tati, « Divers in the Rain » distille une grande mélancolie et adopte un ton doux-amer tout au long de son récit. Le film est traversé d’images saisissantes comme ce paquebot sorti de nulle part qui coule lentement (symbole du couple qui se noie), mais aussi ces cauchemars terrifiants faits par la femme, trahissant un sentiment de peur quant à l’avenir. Une oeuvre complexe et pas facile d’accès, mais qui vaut le détour de par sa richesse thématique.


Deux oeuvres finissent de nous enivrer, il s’agit en premier lieu de « Grise Mine » de Rémi Vandenitte (réalisé au sein de l’atelier de La Cambre), fable ironique sur les problèmes engendrés par le progrès industriel. Nous suivons un mineur, victime d’un coup de grisou, errer sans but, coincé sous les profondeurs de la terre. Il doit trouver de quoi se nourrir pour survivre et ne pas céder à la folie. Un jour, il déniche une sortie et réapparaît à l’air libre, seulement, le monde tel qu’il le connaissait a changé, les mineurs sont maintenant des automates et la mine est devenue une attraction touristique. Dans un noir et blanc somptueux, jouant sur la lumière et les ombres, « Grise Mine » porte un regard critique et désabusé sur la société du travail prônée par notre monde moderne, qui pratique le profit au détriment de l’humain. Un propos servi par une narration simple et efficiente (l’utilisation de l’ellipse est brillante), et une grande légèreté dans le traitement.

La deuxième oeuvre en question, « Aral » de Delphine Renard et Delphine Cousin (produit par l’atelier collectif Zorobabel), parle aussi de la fin d’un monde, à savoir, comme l’indique le titre, celui de la mer desséchée d’Aral, en Asie centrale. Catastrophe environnementale due au détournement de plusieurs fleuves pour des considérations purement économiques, l’assèchement de la mer d’Aral a appauvri la région et les gens qui la peuplaient. Dans ce contexte réel, le récit se concentre sur un jeune garçon, confié à un oncle violent, qui tente désespérément de convaincre son meilleur ami de rester avec lui, au lieu de vouloir fuir ce lieu désertique avec sa famille. Parallèlement, l’oncle essaye de s’enfuir de son côté avec l’aide d’un passeur. Finalement, le passeur arnaquera l’oncle et le garçon parviendra à monter de manière clandestine à bord de la voiture familiale de son ami, qui l’accueillera à bras ouverts. Fable optimiste et mélancolique, Aral étonne par la justesse psychologique de ses protagonistes et la délicatesse dont les réalisatrices font preuve pour évoquer ce désastre écologique et social.

Julien Savès

Best-Of Anima n°7.  Edition : Folioscope et Cinéart. Distribution : Twin Pics

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